Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date : 20090429

Dossier : IMM-3771-08

Référence : 2009 CF 431

Toronto (Ontario), le 29 avril 2009

En présence de monsieur le juge Hughes

 

 

Entre :

REBECA MENGESHA

demanderesse

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire de la décision rendue par un commissaire de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié le 8 août 2008, qui rejetait la demande d’asile de la demanderesse. Pour les motifs qui suivent, la présente demande sera accueillie et l’affaire sera renvoyée à un autre commissaire pour que celui-ci statue à nouveau sur l’affaire.

 


[2]               La demanderesse est une adulte citoyenne de l’Éthiopie. En 1989, elle a fui ce pays en compagnie de sa mère, de son père et de son frère pour se rendre aux États-Unis d’Amérique où ils ont demandé asile. Cette demande a été rejetée. Les parents de la demanderesse se sont arrangés pour la faire adopter aux États-Unis par son parrain et sa marraine; mal lui en prit, puisque cela ne lui a pas permis d’obtenir de statut pour autant. Entre-temps, la mère, le père et le frère biologiques de la demanderesse sont venus au Canada et ont obtenu le statut de réfugié. La demanderesse a suivi ses parents et son frère biologiques au Canada mais sa demande d’asile a été rejetée.

 

[3]               La Commission a été très claire en acceptant la revendication du statut de réfugié des parents et du frère biologiques de la demanderesse. Elle a conclu qu’il y avait une possibilité sérieuse qu’ils subissent un préjudice s’ils retournaient en Éthiopie et qu’ils n’obtiendraient pas de protection de l’État, puisque l’État était le persécuteur.

 

[4]               En l’espèce, le commissaire a conclu, de façon inexplicable, que le même père biologique, dont la demande du statut de réfugié était claire, n’avait pas produit d’éléments de preuve crédibles ou dignes de foi qui indiqueraient qu’il serait recherché par les autorités éthiopiennes en raison de ses opinions politiques. Le même commissaire est arrivé à d’autres conclusions quant à la crédibilité du père et aussi de la demanderesse. Ces conclusions ne sont pas étayées par la preuve. Il devrait y avoir un élément qui mette en doute la déposition de ces témoins. En l’espèce, le commissaire n’a relevé aucun élément de nature à contredire la déposition des témoins autre que la référence au laps de temps écoulé de quatre ans. Ainsi, le commissaire a omis de tenir compte de la preuve selon laquelle la demanderesse et ses parents n’étaient pas en Éthiopie durant ces quatre ans, et qu’ils ne pouvaient dès lors pas être exposés au harcèlement. D’autre part, la preuve documentaire, y compris les propres rapports de la Commission, démontre que le gouvernement en Éthiopie n’a pas cessé de harceler ceux qu’il considère comme ses opposants politiques.

 

[5]               La Commission n’a pas tenu dûment compte du fait que le père, la mère et le frère biologiques de la demanderesse avaient tous obtenu le statut de réfugié sur la base des mêmes faits que ceux qu’a invoqués la demanderesse. Bien que la Commission ne soit pas tenue de suivre ses décisions antérieures de cette nature (voir par exemple Bakary c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 1111, au paragraphe 10), elle ne peut pas non plus en faire abstraction, surtout  lorsque les faits sont identiques.

 

[6]               En outre, je trouve fallacieux les commentaires de la Commission sur le fait que la demanderesse pouvait obtenir un autre passeport éthiopien sous son nom adoptif, dissimulant ainsi son nom d’origine. Pour obtenir un tel passeport, elle devrait présenter son ancien passeport et son ordonnance d’adoption qui, tous les deux, révèlent clairement son nom d’origine.

 

[7]               La décision de la Commission était en l’espèce déraisonnable. La demande sera accueillie. L’affaire sera renvoyée à un autre commissaire pour que celui-ci statue à nouveau sur l’affaire. Aucune question ne sera certifiée.

 

 

 


JUGEMENT

PAR CES MOTIFS :

LA COUR :

  1. Accueille la demande est accueillie;
  2. Renvoie l’affaire à la Commission pour qu’un autre commissaire statue à nouveau;
  3. Déclare qu’aucune question n’est certifiée;
  4. N’adjuge aucuns dépens.

 

 

« Roger T. Hughes »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

 

François Brunet, LL.B., B.C.L.

Réviseur


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-3771-08

 

INTITULÉ :                                       REBECA MENGESHA c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 29 avril 2009          

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              Le juge Hughes

 

DATE DES MOTIFS

ET DU JUGEMENT :                       Le 29 avril 2009

 

COMPARUTIONS :

 

Gregory J. Willoughby

POUR LA DEMANDERESSE

 

Manuel Mendelzon

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Gregory J. Willoughby

Only Immigration

101-235, chemin North Centre

London (Ontario)  N5X 4E7

Téléc. : 519-645-1503

POUR LA DEMANDERESSE

 

 

 

 

 

Ministère de la Justice

La Tour Exchange

Bureau 3400, C.P. 36

2, Place First Canadian

Toronto (Ontario)  M5X 1K5

Téléc. : 416-954-8982

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.