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Date : 20090428

Dossier : IMM-3718-08

Référence : 2009 CF 428

Montréal (Québec), le 28 avril 2009

En présence de l'honorable Maurice E. Lagacé

 

ENTRE :

EUGENIA SANTOS RIVERA

CARLOS JAVIER SANTOS RIVERA

demandeurs

 

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

 

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

I.          Introduction

 

[1]               La demanderesse principale, Eugenia Santos Rivera, (demanderesse) et son fils Carlos Javier Santos Rivera, tous deux citoyens du Mexique, sollicitent en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (Loi), le contrôle judiciaire de la décision rendue le 27 juillet 2008 par la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (Tribunal) de ne pas leur reconnaître la qualité de « réfugiés », ni celle de « personnes à protéger » conformément au sens des articles 96 et 97 de la Loi et, en conséquence, d’avoir rejeté leur demande d’asile au motif principal que le Tribunal n’accorde aucune crédibilité à leur récit.

 

II.        Les faits

 

[2]               La demanderesse dépose une demande d’asile au Canada pour elle et son fils, alléguant craindre son ancien conjoint, Eduardo Rafael Guerrero, le père de son fils.

 

[3]               La demanderesse raconte avoir vécu maritalement au Mexique avec M. Guerrero pour une période de 13 mois à compter de juillet 1993. De cette union nait un fils, Carlos Javier, le 11 mars 1995.

 

[4]               En 1995, pendant sa vie commune avec M. Guerrero, la demanderesse aurait découvert que celui-ci fraudait l’employeur pour qui le couple travaillait. Après que son conjoint lui eut admis son méfait, celui-ci aurait menacé la demanderesse et lui aurait enjoint de n’en parler à personne.

 

[5]               À partir de ce moment, la relation du couple se serait détériorée au point que la demanderesse aurait dû déménager et changer d’emploi pour échapper aux poursuites et menaces de son ex-conjoint qui aurait quant même réussi à lui créer d’autres embêtements.

 

[6]               Selon le narratif de son Formulaire de renseignements personnels (FRP), la demanderesse aurait pris la décision de quitter son pays et de venir au Canada le 6 juin 2004, après avoir été agressé par son ex-conjoint alors désireux d’avoir des droits d’accès à son fils.

 

[7]                La demanderesse laisse son fils derrière au Mexique en juillet 2004, pour venir seule au Canada où elle séjournera quelques mois avant de retourner dans son pays, sans demander l’asile.

 

[8]               Le 6 juillet 2006, elle aurait porté plainte contre son ex-conjoint pour harcèlement, et moins de deux semaines plus tard, elle quitte avec son fils pour le Canada et réclame l’asile pour les deux.

 

III.       Décision contestée

 

[9]               Après avoir analysé l’ensemble de la preuve au dossier, le Tribunal n’accorde aucune crédibilité au récit sur lequel repose la revendication de la demanderesse et conclut que « les demandeurs n’ont pas établi qu’ils étaient des réfugiés au sens de la Convention ou des personnes à protéger ».

 

[10]           La décision du Tribunal est-elle déraisonnable?

 

 

 

IV.       Analyse

 

            Norme de contrôle applicable

[11]           Le présent recours porte sur l’appréciation de la preuve et l’absence de crédibilité de la demanderesse. Il s’agit là de questions purement factuelles contrôlables selon la norme de la décision raisonnable définie par l’arrêt Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9 (Dunsmuir).

 

[12]           Le Tribunal bénéficie du net avantage d’avoir entendu la demanderesse et d’avoir pu apprécier son récit à sa juste valeur ainsi que ses explications données lorsque confrontée à ses contradictions et à l’invraisemblance de son histoire; la décision du Tribunal mérite déférence.

 

[13]           Cette norme n’ouvre pas la porte au type d’intervention souhaitée par la demanderesse qui se contente de réitérer à peu près les mêmes faits déjà appréciés par le Tribunal, et à qui elle reproche d’avoir mal évalué sa situation personnelle. Elle demande ni plus ni moins à cette Cour de réévaluer le tout et de substituer son opinion à celle du Tribunal pour conclure différemment.

 

[14]           Malheureusement tel n’est pas le rôle de cette Cour sur une demande de contrôle judiciaire. La Cour au contraire n’a qu’à se demander si la décision contestée est justifiée au regard des faits mis en preuve et du droit tandis que la demanderesse pour sa part doit démontrer à la Cour en quoi la décision du Tribunal serait déraisonnable.

 

[15]           À l’intérieur de cette norme de contrôle, la Cour peut-elle conclure que le Tribunal erre de façon capricieuse lorsqu’il ne prête pas foi au récit de la demanderesse?

 

Crédibilité de la demanderesse

[16]           La demanderesse reproche au Tribunal d’avoir rejeté son récit parce ce qu’elle n’avait produit aucune preuve documentaire pour corroborer son témoignage, et d’avoir écarté sans motif valable son témoignage donné sous serment.  L’analyse du dossier ne permet pas à la Cour de conclure au bien-fondé d’un tel reproche.

 

[17]           La demanderesse oublie que l’absence de documents corroboratifs compte pour très peu parmi les autres éléments qui minent sa crédibilité de façon irrémédiable aux yeux du Tribunal : des éléments importants manquent au FRP de la demanderesse, des contradictions existent entre ce narratif et son témoignage, son récit contient des invraisemblances, son comportement tout au long des évènements rapportés et son retard à porter plainte et à réclamer l’asile. Enfin, tous ces éléments considérés comme un tout justifiait amplement le Tribunal de douter de l’histoire de la demanderesse et de rendre la décision visée par le présent recours.

 

V.        Conclusion

 

[18]           Pour ces motifs, la Cour conclut que les demandeurs n’ont fait valoir aucun motif sérieux pour la convaincre que la décision attaquée se fonde sur des conclusions de fait tirées de manière abusive ou arbitraire, ou que le Tribunal a conclu sans tenir compte des éléments de preuve dont il disposait, y compris le témoignage assermenté de la demanderesse qu’il lui incombait toutefois d’apprécier à sa juste valeur (Lin c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2008 CF 698).

 

[19]           Bien au contraire, l’analyse du dossier convainc la Cour qu’il s’agit d’une décision justifiée tant par les faits et le droit que le gros « bon sens »; il s’agit donc d’une décision raisonnable.

 

[20]           Et puisqu’aucune question importante de portée générale n’a été proposée ou mérite de l’être, aucune question ne sera certifiée.


 

JUGEMENT

 

POUR CES MOTIFS, LA COUR :

 

REJETTE la demande de contrôle judiciaire.

 

 

« Maurice E. Lagacé »

Juge suppléant

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-3718-08

 

INTITULÉ :                                      EUGENIA SANTOS RIVERA ET AL. c. MCI

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               le 27 mars 2009

 

MOTIFS DU JUGEMENT :            LAGACÉ J.S.

 

DATE DES MOTIFS :                      le 28 avril 2009

 

 

COMPARUTIONS :

 

Anthony Karkar

 

POUR LES DEMANDEURS

Suzanne Trudel

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Anthony Karkar

Montréal (Québec)

 

POUR LES DEMANDEURS

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

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