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Cour fédérale

 

Federal Court


 

Date : 20090409

Dossier : IMM‑4387‑08

Référence : 2009 CF 361

 

Ottawa (Ontario), le 9 avril 2009

En présence de monsieur le juge Kelen

 

 

ENTRE :

SELDUZ, MUSTAFA

demandeur

et

 

LE MINISTRE

DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION et

LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE

ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

défendeurs

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire concernant une décision datée du 12 août 2008 par laquelle l’agente d’examen des risques avant renvoi (l’agente d’ERAR) a conclu que le demandeur ne risquerait pas d’être persécuté s’il était renvoyé en Turquie, le pays dont il a la citoyenneté.

 

LES FAITS

[2]               Le demandeur est arrivé au Canada le 27 juillet 2006 et il a demandé l’asile au motif qu’il avait été persécuté par la police et les forces de sécurité en Turquie du fait de son origine kurde et de sa pratique de la religion alevie. Jugeant le demandeur indigne de foi, la Section de la protection des réfugiés (la SPR) de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission) a rejeté sa demande d’asile le 30 octobre 2007. Le 18 avril 2008, la Cour lui a refusé l’autorisation d’obtenir un contrôle judiciaire. Le demandeur a ensuite présenté une demande d’ERAR, qui a été rejetée.

 

La décision faisant l’objet du présent contrôle

[3]               À la page 2 de la décision d’ERAR, l’agente d’ERAR a indiqué qu’une partie des éléments de preuve que le demandeur avait présentés datait d’avant la décision de la Commission concernant la demande d’asile du demandeur et que ces éléments ne seraient donc pas pris en considération, car il n’avait pas été expliqué pourquoi ceux‑ci n’avaient pas été soumis à la Commission. L’agente d’ERAR n’a pas indiqué précisément de quels éléments il s’agissait.

 

[4]               L’agente d’ERAR a conclu que les observations du demandeur ne dénotaient pas que ce dernier courait un risque autre que ceux que la Commission avait déjà pris en considération dans la demande d’asile (décision d’ERAR, page 3) :

 

[traduction]

Les risques cernés par le demandeur dans sa demande d’ERAR sont les mêmes que ceux que la SPR a entendus et évalués. La présente évaluation n’a pas pour but de plaider de nouveau les faits soumis à la SPR. La décision de la SPR doit être considérée comme définitive en ce qui concerne la question de la protection visée aux articles 96 et 97, sous réserve seulement de la possibilité que de nouveaux éléments de preuve établissent que le demandeur serait exposé à un risque nouveau, différent ou supplémentaire, non envisageable à l’époque où la SPR a rendu sa décision.

 

[5]               À la page 3 de sa décision, l’agente d’ERAR a conclu que les nouveaux éléments de preuve présentés par le demandeur n’établissaient pas que ce dernier n’était pas personnellement exposé à un risque :

[traduction]

Les éléments que le demandeur a produits consistent en des articles de journal et des rapports, imprimés à partir de sources accessibles sur Internet; ces documents font état de la situation générale en Turquie, et le demandeur n’a pas fait de lien entre ces éléments de preuve et le risque auquel il s’expose personnellement. Il n’a pas fourni de preuves documentaires objectives montrant que son profil en Turquie est semblable à celui des personnes qui s’exposeraient actuellement à un risque de préjudice ou de persécution dans ce pays.

 

[6]               Après avoir conclu qu’il y avait [traduction] « moins qu’une simple possibilité que le demandeur soit persécuté s’il retournait en Turquie », l’agente d’ERAR a rejeté la demande d’ERAR.

 

[7]               Il était prévu que le demandeur soit expulsé aux États‑Unis d’Amérique le 16 octobre 2008. Le 15 octobre 2008, le juge Phelan a accordé un sursis jusqu’à ce que la présente demande soit réglée, en raison des questions sérieuses qui sont énumérées ci‑après.

 

LES QUESTIONS EN LITIGE

[8]               Dans sa demande, le demandeur soulève les questions suivantes :

1.             l’agente d’ERAR a omis de prendre en considération de nouvelles preuves pertinentes; ou

 

2.             si l’agente d’ERAR était au courant des preuves en question, mais a conclu qu’il ne s’agissait pas de nouvelles preuves, elle a commis une erreur en omettant d’expliquer pourquoi il n’en a pas tenu compte.

 

LA NORME DE CONTRÔLE APPLICABLE

[9]               La Cour a conclu que la norme de contrôle qui s’applique aux conclusions de fait d’un agent d’ERAR et aux questions mixtes de fait et de droit est la norme de la décision raisonnable : voir Erdogu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 407, [2008] A.C.F. n546 (QL), et Elezi c. Canada, 2007 CF 240, 310 F.T.R. 59. Dans Ramanathan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 843, 170 A.C.W.S. (3d) 140, au paragraphe 18, j’ai jugé que, lorsqu’un demandeur émet des doutes quant au fait qu’un agent d’ERAR a pris dûment en considération la totalité des éléments de preuve au moment de rendre une décision, la norme de contrôle qui s’applique est celle de la décision raisonnable.

 

[10]           Par conséquent, la Cour contrôlera les conclusions de l’agente d’ERAR en ayant égard à « la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » (Dunsmuir c. Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, 372  N.R. 1, au paragraphe 47). Cependant, si l’agente d’ERAR omet de motiver convenablement la décision de ne pas prendre en considération de nouveaux éléments de preuve pertinents, importants et probants, le tribunal considérera alors qu’une erreur de droit doit être contrôlée selon la norme de la décision correcte.

 

ANALYSE

Question no 1 : l’agente d’ERAR a‑t‑elle omis de prendre en considération de « nouveaux » éléments de preuve pertinents?

[11]           Il y a trois éléments de preuve « nouveaux » qui, d’après le demandeur, étayent sa prétention de risque personnalisé et dont l’agente d’ERAR n’a pas tenu compte : un mandat d’arrêt lancé contre lui le 16 octobre 2007, un mandat d’arrêt lancé contre lui antérieurement, soit le 19 avril 1999, de même qu’un rapport médical daté du 4 juillet 2008. Dans ses motifs, l’agente d’ERAR ne mentionne aucun de ces documents. Le demandeur soutient que ces documents étayent sa prétention selon laquelle il courrait un risque de persécution personnalisé et précis s’il était renvoyé en Turquie.

 

[12]           Parmi les trois documents, seul le rapport médical date d’après la décision défavorable que la SPR a rendue le 30 octobre 2007 à propos de la demande d’asile du demandeur. Dans les observations relatives à l’ERAR, le demandeur a fait valoir que le mandat d’arrestation de 2007 constituait un élément de preuve nouveau car il datait d’après l’audition de sa demande d’asile. Le défendeur soutient qu’étant donné que le mandat d’arrêt est antérieur à la date de la décision, il ne s’agit pas d’un élément de preuve nouveau. Dans ses motifs (page 5 du dossier de la demande), l’agente d’ERAR mentionne ceci :

 

[traduction]

Je ne tiens pas compte des documents qui datent d’avant la décision de la SPR; ceux‑ci auraient pu être fournis au tribunal, et il n’a pas été expliqué pourquoi cela n’avait pas été fait.

 

Le défendeur soutient que cet énoncé explique de manière suffisante pourquoi l’agente d’ERAR n’a pas pris en considération le mandat de 2007.

 

[13]           L’alinéa 113a) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27, est libellé en ces termes :

113. Il est disposé de la demande comme il suit :

a) le demandeur d’asile débouté ne peut présenter que des éléments de preuve survenus depuis le rejet ou qui n’étaient alors pas normalement accessibles ou, s’ils l’étaient, qu’il n’était pas raisonnable, dans les circonstances, de s’attendre à ce qu’il les ait présentés au moment du rejet [Non souligné dans l’original.]

 

113. Consideration of an application for protection shall be as follows:

(a) an applicant whose claim to refugee protection has been rejected may present only new evidence that arose after the rejection or was not reasonably available, or that the applicant could not reasonably have been expected in the circumstances to have presented, at the time of the rejection (underlining added)

 

 

[14]           Il est clair aux yeux de la Cour que le demandeur n’aurait raisonnablement pas pu recevoir le document daté d’octobre 2007 et provenant de la Turquie avant que la Commission rende sa décision du 30 octobre 2007. Il n’était donc pas raisonnablement loisible à l’agente d’ERAR de conclure que le mandat d’arrestation de 2007 aurait pu être présenté à la Commission avant que celle‑ci rende sa décision. Le demandeur soutient dans sa demande qu’il n’a pas reçu le mandat avant décembre 2007, mais cette explication n’a pas été donnée à l’agente d’ERAR.

 

[15]           Cependant, les éléments de preuve censément « nouveaux » comprenaient aussi un mandat d’arrestation daté de 1999 et dont le contenu est essentiellement identique à celui du mandat de 2007 non fourni à la SPR. Le demandeur n’a pas expliqué pourquoi le mandat d’arrêt de 1999 n’avait pas été présenté à la Commission. Dans ses observations relatives à l’ERAR (page 30 du dossier de demande), le demandeur indique ce qui suit :

[traduction]

En ce qui a trait au mandat d’arrestation de 1999, le demandeur reconnaît manifestement qu’il ne s’agit pas d’un élément de preuve nouveau, en ce sens que ce document existait avant la date de l’audience de la SPR. Il soutient toutefois qu’il faudrait en tenir compte au moment de trancher l’ERAR, car il est des plus pertinents pour ce qui est du risque qu’il court. Ce document n’a pas été soumis à la SPR et, par conséquent, l’ERAR est la seule occasion qu’ont les autorités canadiennes d’examiner les facteurs de risque qu’il soulève. En outre, ce n’est nullement de sa faute si le document n’a pas été soumis à la SPR. Il l’a obtenu aussitôt qu’il a pu, mais quand il est arrivé au Canada, son avocat précédent et les membres de sa famille lui ont conseillé de ne pas utiliser les documents. Se fiant à leur jugement, il n’a pas soumis le document à la Commission. Dans ces circonstances, il serait inéquitable de ne pas tenir compte de cet élément des plus probants. [Non souligné dans l’original.]

 

[16]           Le mandat d’arrestation daté de 1992 va à l’encontre de la conclusion de l’agente de l’ERAR que [traduction] « le demandeur ne peut pas être reconnu comme membre de ces groupes ciblés » et que le demandeur n’avait produit aucune preuve à l’appui de sa prétention selon laquelle [traduction] « son profil en Turquie est semblable à celui des personnes qui s’exposeraient actuellement à un risque de préjudice ou de persécution dans ce pays » (page 6, dossier de demande).

 

[17]           Si l’agente d’ERAR a jugé insuffisante l’explication du demandeur à propos de la raison pour laquelle le mandat daté de 1999 n’avait pas été fourni à la Commission, il ne l’a pas dit. Sa déclaration selon laquelle le demandeur n’a pas expliqué pourquoi une preuve datant d’avant la décision de la Commission n’a pas été communiquée laisse croire qu’il n’était pas au courant que le demandeur avait fourni une explication au sujet de ce document. Comme je l’exposerai dans le cadre de la seconde question, ci‑après, si l’agente était au courant qu’une explication avait été donnée et si elle a jugé cette dernière insuffisante, ses motifs auraient dû refléter cette conclusion, compte tenu surtout de la nature probante du document en question.

 

Le rapport médical

[18]           Le rapport médical aurait constitué un élément de preuve « nouveau » qui corroborait les dires du demandeur sur les blessures subies sous la torture, et ce document date d’après la décision de la Commission. Ce rapport décrit en détail les blessures du demandeur et conclut que ces dernières concordent avec ses prétentions, à savoir qu’il avait été torturé en Turquie. Aucun rapport médical n’avait été fourni à la SPR, qui a conclu que les allégations du demandeur à propos du traitement qu’il avait subi en Turquie n’étaient pas dignes de foi.

 

[19]           Le demandeur a expliqué pourquoi aucun rapport médical n’avait été mis à la disposition de la Commission. Dans ses observations relatives à l’ERAR, le demandeur indique ceci :

[traduction]

En ce qui concerne le rapport médical, le demandeur soutient qu’il n’a pas de rapports médicaux de la Turquie parce qu’il avait toujours peur qu’on lui demande comment les blessures étaient survenues. Il était terrifié à l’idée de subir d’autres répercussions si un rapport concernant la cause de ses blessures, et ses allégations de torture, tombait entre les mains de la police. Compte tenu de cette explication, il est allégué qu’aucune inférence défavorable ne devrait être tirée du fait que le demandeur est incapable de produire des rapports médicaux contemporains qui corroborent ses blessures. Peu au courant du processus canadien de demande d’asile, Mustafa ignorait qu’il pouvait obtenir au Canada un rapport médical décrivant ses blessures.

 

[20]           Il aurait peut‑être été raisonnablement loisible à l’agente d’ERAR de conclure que le demandeur avait eu suffisamment de temps après son arrivée au Canada pour obtenir un rapport médical avant son audience devant la SPR, ou que ce rapport médical n’était pas probant, ou que le fait de le prendre en considération équivaudrait à juger de nouveau sa demande d’asile, sur laquelle la SPR avait déjà rendu une décision défavorable. Cependant, l’agente d’ERAR n’a tiré aucune conclusion de ce genre. Il déclare plutôt, à la page 6 :

[traduction]

[…] les éléments que le demandeur a produits consistent en des articles de journal et des rapports, imprimés à partir de sources accessibles sur Internet; ces documents font état de la situation générale en Turquie, et le demandeur n’a pas fait de lien entre ces éléments de preuve et le risque auquel il s’expose actuellement.

 

Cet énoncé donne à penser que l’agente d’ERAR ignorait que ce rapport médical, qui date d’après l’audience de la SPR, faisait partie des éléments de preuve relatifs à l’ERAR du demandeur. L’agente d’ERAR n’est certes pas tenue de mentionner dans ses motifs chacun des éléments de preuve, mais le fait d’avoir dit que tous les nouveaux éléments de preuve étaient de nature générale et sa déclaration selon laquelle le demandeur n’a fait aucun lien avec un risque personnalisé laissent croire qu’elle n’était pas au courant du rapport médical.

 

Question no 2 : si l’agente d’ERAR a pris en considération les éléments de preuve, mais a conclu qu’il ne s’agissait pas d’éléments de preuve nouveaux, les motifs qu’elle a fournis sont‑ils suffisants?

 

[21]           Comme je l’ai conclu plus tôt, si l’agente d’ERAR a pris en considération le mandat d’arrestation daté de 1992 et le rapport médical et s’il a conclu qu’il ne s’agissait pas de nouveaux éléments de preuve, elle ne l’a pas indiqué dans ses motifs. Le demandeur a expliqué pourquoi le mandat daté de 1992 n’avait pas été mis à la disposition de la Commission. Le rapport médical datait d’après la décision. La Commission n’a été saisie d’aucun rapport et le demandeur a bel et bien expliqué pourquoi il n’avait pas fourni auparavant un rapport médical. Si l’agente d’ERAR a jugé ces explications insuffisantes, elle ne l’a pas dit, ni expliqué pourquoi.

 

[22]           Dans l’arrêt Raza c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CAF 385, 370 N.R. 344, la Cour d’appel fédérale indique ce qui suit, aux paragraphes 13 et 14 :

[13] Selon son interprétation de l’alinéa 113a), cet alinéa repose sur l’idée que l’agent d'ERAR doit prendre acte de la décision de la SPR de rejeter la demande d’asile, à moins que des preuves nouvelles soient survenues depuis le rejet, qui auraient pu conduire la SPR à statuer autrement si elle en avait eu connaissance. L’alinéa 113a) pose plusieurs questions, certaines explicitement et d’autres implicitement, concernant les preuves nouvelles en question. Je les résume ainsi :

1. Crédibilité : Les preuves nouvelles sont‑elles crédibles, compte tenu de leur source et des circonstances dans lesquelles elles sont apparues? Dans la négative, il n’est pas nécessaire de les considérer.

2. Pertinence : Les preuves nouvelles intéressent‑elles la demande d’ERAR, c’est‑à‑dire sont‑elles aptes à prouver ou à réfuter un fait qui intéresse la demande d’asile? Dans la négative, il n’est pas nécessaire de les considérer.

3. Nouveauté : Les preuves sont‑elles nouvelles, c’est‑à‑dire sont‑elles aptes :

a) à prouver la situation ayant cours dans le pays de renvoi, ou un événement ou fait postérieur à l’audition de la demande d’asile?

b) à établir un fait qui n’était pas connu du demandeur d’asile au moment de l’audition de sa demande d’asile?

c) à réfuter une conclusion de fait tirée par la SPR (y compris une conclusion touchant la crédibilité)?

Dans la négative, il n’est pas nécessaire de les considérer.

4. Caractère substantiel : Les preuves nouvelles sont‑elles substantielles, c’est‑à‑dire la demande d’asile aurait‑elle probablement été accordée si elles avaient été portées à la connaissance de la SPR? Dans la négative, il n’est pas nécessaire de les considérer.

5. Conditions légales explicites :

a) si les preuves nouvelles sont aptes à établir uniquement un fait qui s’est produit ou des circonstances qui ont existé avant l’audition de la demande d’asile, alors le demandeur a‑t‑il établi que les preuves nouvelles ne lui étaient pas normalement accessibles lors de l’audition de la demande d’asile, ou qu’il ne serait pas raisonnable de s’attendre à ce qu’il les ait présentées lors de l’audition de la demande d’asile? Dans la négative, il n’est pas nécessaire de les considérer.

b) si les preuves nouvelles sont aptes à établir un fait qui s’est produit ou les circonstances qui ont existé après l’audition de la demande d’asile, alors elles doivent être considérées (sauf si elles sont rejetées parce qu’elles ne sont pas crédibles, pas pertinentes, pas nouvelles ou pas substantielles).

 

[14] Les quatre premières questions, qui concernent la crédibilité, la pertinence, la nouveauté et le caractère substantiel, résultent implicitement de l’objet de l’alinéa 113a), dans le régime de la LIPR se rapportant aux demandes d’asile et aux examens des risques avant renvoi. Les questions restantes sont posées explicitement par l’alinéa 113a).

 

[23]           Les mandats d’arrestation et le rapport médical n’ont pas été soumis à la Commission. L’agente d’ERAR n’a pas expliqué pourquoi ces documents n’ont pas été considérés comme des éléments de preuve nouveaux ou pourquoi il n’aurait pas été raisonnable de s’attendre à ce que le demandeur les présente à l’audience de la SPR. De plus, rien dans la décision n’indique que l’agente d’ERAR a tenu compte d’autres facteurs énoncés par la CAF dans l’arrêt Raza, précité, au moment d’évaluer si le mandat d’arrestation de 1992 et le rapport médical étaient exclus par l’article 113. Aucun de ces deux documents n’a été soumis à la SPR, et les deux contredisent potentiellement les conclusions de fait de la SPR quant à la crédibilité du demandeur et, par ailleurs, ils corroborent potentiellement les allégations relatives au risque que le demandeur courrait s’il était renvoyé en Turquie.

 

[24]           Vu la nature probante des deux mandats d’arrestation en particulier, si l’agente d’ERAR a conclu que l’explication donnée par le demandeur quand au fait de ne pas les avoir produits devant la Commission était insuffisante, il aurait fallu qu’elle l’indique dans ces motifs. Le fait de ne pas avoir mentionné ces documents est une erreur de droit.

 

[25]           Pour ces motifs, la présente demande est accueillie et l’affaire renvoyée à un autre agent d’ERAR pour qu’il rende une nouvelle décision, conformément aux présents motifs.

 

[26]           Les deux parties ont informé la Cour qu’elles ne considèrent pas que la présente affaire soulève une question sérieuse qu’il faudrait certifier en vue d’un appel. La Cour partage ce point de vue.

 


 

JUGEMENT

 

LA COUR ORDONNE :

 

La présente demande est accueillie, la décision datée du 12 août 2008 de l’agente d’ERAR est infirmée, et l’affaire est renvoyée à un autre agent d’ERAR pour qu’il rendre une nouvelle décision, conformément aux présents motifs.

 

 

 

« Michael A. Kelen »

Juge

 

Traduction certifiée conforme

David Aubry, LL.B.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                          IMM‑4387‑08

 

INTITULÉ :                                                         SELDUZ, MUSTAFA c.

                                                                              LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION et LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                   TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                 LE 1ER AVRIL 2009

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                                LE JUGE KELEN

 

DATE DES MOTIFS
ET DU JUGEMENT :
                                         LE 9 AVRIL 2009

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Angus Grant

 

POUR LE DEMANDEUR

Judy Michaely

 

POUR LES DÉFENDEURS

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Angus Grant

The Law Offices of Catherine Bruce

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

John H. Sims, c.r.

Sous‑procureur général du Canada

 

POUR LES DÉFENDEURS

 

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