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Date : 20090414

 

Dossier : IMM-4237-08

Référence : 2009 CF 369

Ottawa (Ontario), le 14 avril 2009

En présence de monsieur le juge Martineau

 

ENTRE :

OTHONIEL CASTILLO GONZALEZ

LADY ELIZABETH CONTRERAS MUNOZ

et ANGELINNE CASTILLO CONTRERAS

demandeurs

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]                Les demandeurs contestent la légalité de la décision de la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et de la protection des réfugiés (la Commission), rendue le 2 septembre 2008, laquelle a statué que les demandeurs  n’ont pas la qualité de « réfugiés au sens de la Convention » ni celle de « personnes à protéger » selon les articles 96 et 97 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27, telle que modifiée. L’absence de crédibilité des demandeurs quant à des éléments essentiels de leur revendication a été déterminante.

 

[2]               Le demandeur principal, son épouse et leur fille sont citoyens mexicains. Le 30 juin 2007, le demandeur principal aurait été témoin du viol d’une femme mineure par des membres du groupe nommé « Mara Salvatrucha ». Il aurait alors tenté de porter secours à la victime, ce qui aurait conduit les agresseurs à se retourner contre lui; toutefois, le demandeur aurait réussi à  fuir. Le même jour, le demandeur aurait été victime de menaces de mort par les membres de ce même groupe. Suite à cet incident, les demandeurs ont fui leur domicile pour se réfugier dans un ranch situé dans la municipalité d’Alvarado. Le demandeur soumet qu’il aurait contacté Me Eduardo Vasquez Badillo, afin de déposer une plainte auprès du Ministère public, mais qu’il lui aurait été fortement conseillé de quitter les lieux; la plainte n’a donc jamais été déposée. Le demandeur s’est rendu au Canada le 20 juillet 2007. Or, le 25 juillet 2007, des membres du groupe des Mara Salvatrucha se seraient introduits dans le domicile des demandeurs situé dans la ville de Veracruz. Ils auraient alors pillé les lieux et volé certains documents d’identification appartenant aux demandeurs. L’épouse du demandeur affirme avoir été présente lors de ces événements. C’est donc suite à cet incident que l’épouse du demandeur et sa fille ont rejoint le demandeur au Canada le 7 novembre 2007.

 

[3]               La Commission a conclu au rejet de la demande d’asile des demandeurs, faute de crédibilité des demandeurs quant à des éléments essentiels de leur récit. Tout d’abord, la Commission a relevé des contradictions dans le témoignage de la demanderesse ainsi qu’entre son témoignage, son Formulaire de renseignements personnels (FRP) et les documents du point d’entrée.

 

[4]               La demanderesse a notamment allégué s’être réfugiée avec sa fille dans un ranch situé dans la municipalité d’Alvarado dans l’État de Veracruz du 13 juillet 2007 jusqu’à son départ du Mexique pour le Canada. Toutefois, il est indiqué dans son FRP ainsi que dans les documents du point d’entrée qu’elle a vécu à la même adresse, soit dans une ville de Veracruz, pendant 10 ans. Cette contradiction n’a pu être expliquée de manière satisfaisante à l’audition, d’autant plus que la demanderesse a affirmé en début d’audience que son FRP et les documents annexés étaient complets, vrais et exacts.  

 

[5]               Ensuite la demanderesse a témoigné que des membres des Maras se seraient introduits dans la maison située dans la ville de Veracruz le 25 juillet 2007 et qu’elle y était présente. Or, elle a déclaré antérieurement n’être pas retournée dans la ville de Veracruz après s’être réfugiée au ranch. Confrontée par la Commission à ce témoignage contradictoire, elle a fourni des explications insatisfaisantes. La Commission a noté plus loin que la demanderesse a apporté des explications convenables après avoir été invitée par son avocat à justifier cette contradiction. Par contre, la Commission ne leur a accordé que peu de force probante puisque présentées plus tard au cours de l’audience.

 

[6]               En ce qui a trait au récit du demandeur, la Commission lui reproche d’avoir omis de mentionner dans son FRP un élément crucial à sa revendication, soit que des membres des Maras lui auraient volé son portefeuille et des documents d’identité lorsqu’ils s’étaient introduits chez lui en juillet 2007, et que par conséquent ceux-ci pourraient le retrouver partout au Mexique. Or, il a affirmé en début d’audience que les informations rapportées dans son FRP étaient complètes, vraies et exactes.

 

[7]               Finalement, la Commission a souligné l’absence de preuves documentaires corroborant des éléments centraux de la revendication des demandeurs, soit :

a.       un document appuyant le fait que les demandeurs ont vécu au ranch de juillet à novembre 2007; et

b.      un document attestant que le demandeur a consulté l’avocat Eduardo Vasquez Badillo de la ville de Veracruz suite à l’événement de juin 2007.

 

[8]               La présente demande de contrôle judiciaire doit échouer. En effet, la raisonnabilité des conclusions de fait que la Commission a énoncées clairement dans la décision contestée, n’est pas sérieusement attaquée par les demandeurs. Ces derniers reprochent essentiellement à la Commission de ne pas les avoir invités à présenter une preuve additionnelle pouvant corroborer le fait précis qu’ils ont vécu dans un ranch suite aux incidents allégués.

 

[9]               Ainsi, le savant procureur des demandeurs, qui a également représenté ces derniers lors de l’audition tenue devant la Commission, n’a présenté aucune demande de production de documents supplémentaires à l’audition ou après celle-ci conformément à la Règle 37 des Règles de la Section de la protection des réfugiés, DORS/2002‑228, telles que modifiées. Les demandeurs ont été en tout temps représentés par un avocat expérimenté. En l’espèce, rien n’obligeait la Commission à inviter elle-même après coup les demandeurs à déposer des éléments de preuve additionnels pouvant corroborer leur récit. D’un autre côté, il s’avère que la véracité des allégations faites par les demandeurs était sérieusement sujette à caution vu les contradictions notées dans la décision attaquée. Or, en l’absence de preuve corroborant le récit des demandeurs, il était raisonnable pour la Commission de conclure que la revendication des demandeurs s’en trouvait d’autant plus affaiblie.

 

[10]           Cette Cour doit faire preuve d’une grande déférence eu égard aux décisions de la Commission touchant à des questions de crédibilité et d’évaluation de la preuve. Notant ici que la plupart des conclusions négatives que l’on retrouve dans la décision attaquée ne sont pas réfutées par les demandeurs, il n’appartient pas à cette Cour, dans le cadre d’une demande de contrôle judiciaire, d’apprécier la preuve à nouveau et de substituer son opinion à celle de la Commission. Or, l’erreur alléguée par les demandeurs, même admise (ce qui n’est pas le cas en l’espèce), n’est pas déterminante. Ayant pris bien soin d’examiner la justification de la décision, sa transparence et l’intelligibilité du processus décisionnel, et considérant que la conclusion de non-crédibilité de la Commission fait partie des solutions possibles acceptables compte tenu des faits et du droit (Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 R.C.S. 190 au par. 47), je suis d’avis qu’il n’y a pas de motif valable pour casser aujourd’hui la décision attaquée et retourner l’affaire à la Commission.

 

[11]           Par conséquent, la présente demande de contrôle judiciaire doit donc être rejetée. Les avocats n’ont proposé aucune question aux fins de certification, et je conviens que la présente affaire n’en soulève aucune.


JUGEMENT

LA COUR ORDONNE ET ADJUGE que  la demande de contrôle judiciaire soit rejetée. Aucune question n’est certifiée.

 

« Luc Martineau »

Juge

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-4237-08

 

INTITULÉ :                                       OTHONIEL CASTILLO GONZALEZ

                                                            LADY ELIZABETH CONTRERAS MUNOZ

et ANGELINNE CASTILLO CONTRERAS  c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 7 avril 2009

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE MARTINEAU

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 14 avril 2009

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Oscar Fernando Rodas

 

POUR LES DEMANDEURS

Yaël Levy

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Oscar Fernando Rodas

Montréal (Québec)

 

POUR LES DEMANDEURS

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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