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Date : 20090406

Dossier : IMM-3861-08

Référence : 2009 CF 351

OTTAWA (ONTARIO), le 6 AVRIL 2009

En présence de monsieur le juge de Montigny

 

ENTRE :

JUAN CARLOS PAGUADA

demandeur

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               La présente demande de contrôle judiciaire vise une décision rendue le 29 juillet 2008 par la Section de la protection des réfugiés (la « SPR ») de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié.  Après avoir pris connaissance de la preuve documentaire et entendu M. Paguada, la SPR en est arrivée à la conclusion que le demandeur n’avait pas la qualité de réfugié au sens de la Convention ni de personne à protéger, en vertu des articles 96 et 97 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la « LIPR »).

 

 

LES FAITS

[2]               Le demandeur, Monsieur Juan Carlos Paguada, est citoyen du Honduras et allègue être né le 12 novembre 1985.  Il dit craindre des membres du groupe des Maras Salvatrucha, du fait qu’il a refusé de se joindre à eux à plusieurs reprises.

 

[3]               Ses ennuis auraient commencé en 1998, alors que le leader d’une bande de Maras lui aurait demandé de faire partie du groupe.  Puis, en 2001, son demi-frère aurait été assassiné par des personnes non identifiées.  Des policiers sont alors venus en informer le demandeur et lui poser des questions à ce sujet.  Bien que les policiers lui aient dit qu’ils communiqueraient de nouveau avec lui s’il y avait des développements, il semble qu’ils ne se soient jamais manifestés de nouveau.

 

[4]               Entre 2003 et 2006, les demandes des Maras pour que le demandeur se joigne à eux se seraient faites plus insistantes.  Lorsque leur leader l’a de nouveau approché le 10 février 2006 pour en faire son bras droit, il a demandé à réfléchir et en a profité pour aller se cacher chez sa grand-mère.  Lorsqu’il a appris le 15 juillet 2006 que quatre hommes étaient allés chez son arrière-grand-mère, où il avait laissé ses deux enfants, et avaient demandé à le voir, il a décidé de quitter le pays.

 

[5]               Le demandeur a donc quitté le Honduras le 18 juillet 2006, et est arrivé au Canada le 4 novembre, après avoir traversé illégalement les États-Unis pendant 30 jours.  Il a réclamé le statut de réfugié lors de son arrivée au poste-frontière.

 

 

LA DÉCISION CONTESTÉE

[6]               La SPR a indiqué ne pas avoir évalué la crédibilité du demandeur lors de l’audience; en présumant même que son histoire était vraie, elle a conclu que sa demande d’asile ne pouvait être acceptée parce qu’il n’avait pas repoussé la présomption à l’effet que son pays était en mesure de le protéger.

 

[7]               Pour en arriver à cette conclusion, la SPR s’est essentiellement appuyée sur le fait que le Honduras est un pays démocratique, ainsi que sur le témoignage du demandeur. Celui-ci n’a pas demandé la protection de la police, lorsqu’il a été menacé par les Maras, parce que « cela ne servait à rien et que la police pouvait même arrêter » les plaignants.  Aux yeux du tribunal, cette explication n’était pas suffisante et le demandeur se devait de permettre à l’État de lui fournir sa protection avant de chercher refuge dans un autre pays.

 

[8]               La SPR a convenu que la situation n’était pas parfaite au Honduras, mais a néanmoins jugé que les autorités civiles et militaires faisaient de sérieux efforts pour protéger ses citoyens victimes de menaces et d’agressions et qu’il n’y avait pas de preuve convaincante et claire que l’État hondurien ne tenterait pas d’assurer la protection du demandeur s’il retournait dans son pays. 

 

[9]               D’autre part, la SPR a rejeté les explications fournies par le demandeur pour justifier son défaut de demander l’asile aux États-Unis.  Aux yeux de la SPR, ce comportement était peu compatible avec une crainte subjective du demandeur d’être retourné dans son pays.

 

QUESTIONS EN LITIGE

[10]           La présente demande de contrôle judiciaire soulève trois questions : 1) l’absence de transcription de l’audience devant la SPR, justifie-t-elle l’intervention de cette Cour et le renvoi du dossier à la SPR pour qu’il soit réévalué?  2) La SPR a-t-elle erré en ne se prononçant pas sur la crédibilité du demandeur?  3) La SPR a-t-elle commis une erreur révisable en concluant que le demandeur n’avait pas repoussé la présomption à l’effet que le Honduras était en mesure de le protéger?

 

ANALYSE

[11]           D’entrée de jeu, il convient de dire un mot à propos de l’absence de transcription des audiences de la SPR qui ont eu lieu les 18 juin 2007 et 26 mars 2008.  Il semble que l’enregistrement de ces audiences soit introuvable.  Dans ses représentations écrites, l’avocat du demandeur a fait valoir que la cause devrait être réentendue puisqu’il serait impossible pour cette Cour de se prononcer sur les arguments qui ont pu être avancés pour renverser la présomption de protection de l’État.

 

[12]           Je ne suis pas de cet avis.  Ainsi que l’a clairement établi la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Syndicat canadien de la fonction publique, section locale 301 c. Montréal (Ville), [1997] 1 R.C.S. 793, l’absence d’enregistrement n’est pas fatal et ne justifie pas à lui seul le contrôle judiciaire d’une décision administrative, à moins qu’un tel enregistrement ne soit requis par la loi.  Il n’y aura violation des principes de justice naturelle que dans les cas où l’absence de transcription empêche un demandeur de faire valoir ses moyens en révision :

77. Même dans le cas où la loi prévoit le droit à un enregistrement de l’audition, les tribunaux ont conclu que le requérant doit démontrer qu’il existe une «possibilité sérieuse» d’une erreur dans le dossier ou d’une erreur telle que l’absence d’enregistrement l’empêche de faire valoir ses moyens d’appel:  Cameron c. National Parole Board, [1993] B.C.J. No. 1630 (C.S.), qui suit Desjardins c. National Parole Board (1989), 29 F.T.R. 38.  Ces décisions sont conformes au critère établi par notre Cour, eu égard aux affaires pénales, dans R. c. Hayes, [1989] 1 R.C.S. 44.  Comme je l’ai affirmé dans cet arrêt au nom des juges majoritaires, à la p. 48:

 

Un nouveau procès ne sera pas ordonné chaque fois qu’une transcription est incomplète.  De façon générale, il doit y avoir une possibilité sérieuse que la partie manquante de la transcription contienne une erreur, ou que cette omission ait privé l’appelant d’un moyen d’appel.

(…)

 

81. En l’absence d’un droit à un enregistrement expressément reconnu par la loi, les cours de justice doivent déterminer si le dossier dont elles disposent leur permet de statuer convenablement sur la demande d’appel ou de révision.  Si c’est le cas, l’absence d’une transcription ne violera pas les règles de justice naturelle.  Cependant, lorsque la loi exige un enregistrement, la justice naturelle peut nécessiter la production d’une transcription.  Étant donné que cet enregistrement n’a pas à être parfait pour garantir l’équité des délibérations, il faut, pour obtenir une nouvelle audience, montrer que certains défauts ou certaines omissions dans la transcription font surgir une «possibilité sérieuse» de négation d’un moyen d’appel ou de révision.  Ces principes garantissent l’équité du processus administratif de prise de décision et s’accommodent d’une application souple dans le contexte administratif.

 

[13]           Cette décision de la Cour suprême a été suivie à de nombreuses reprises par cette Cour en matière d’immigration : voir, par exemple, Duarte c. M.C.I., 2003 CF 988, aux paras. 11-13; Kandiah c. M.E.I., (1992), 141 N.R. 232 (C.A.F.); Singh c. M.C.I., 2004 CF 363, au para. 3; Carrasco c. M.C.I., 2007 CF 382, aux paras. 5-7.

 

[14]           En l’occurrence, la décision de la SPR ne s’appuie pas sur une évaluation de la crédibilité du demandeur.  D’autre part, ce dernier n’a soulevé aucun manquement à un principe d’équité procédurale lors des audiences.  C’est plutôt en s’appuyant sur la disponibilité de la protection étatique que la SPR a rejeté la demande d’asile de M. Paguada.  Sur ce plan, le dossier dont dispose la Cour lui permet de statuer convenablement sur la présente demande de contrôle judiciaire.

 

[15]           L’affidavit circonstancié produit par le demandeur au soutien de la présente demande, dans lequel il relate ce qu’il prétend avoir dit lors de l’audience, est essentiellement au même effet que le récit des événements contenu dans son Formulaire de renseignements personnels.  Même en présumant que cet affidavit reproduit fidèlement l’essence de son témoignage devant la SPR, je n’y vois rien qui déroge aux faits sur lesquels s’est basé le commissaire de la SPR et qui serait incompatible avec le raisonnement qu’il a emprunté.  Par conséquent, je suis d’avis que le demandeur n’a pas démontré une « possibilité sérieuse » que l’absence de transcription lui porte préjudice et l’empêche de faire valoir un argument pouvant justifier le contrôle judiciaire.

 

[16]           D’autre part, le demandeur a prétendu que la SPR avait erré en n’évaluant pas la crédibilité du demandeur, dans la mesure où une telle évaluation est essentielle pour évaluer le bien-fondé des motifs qu’il a soulevés pour expliquer son défaut de porter plainte auprès des autorités de son pays.  Le procureur du demandeur a également attiré l’attention de la Cour sur une apparente contradiction dans les motifs de la décision de la SPR; alors que le commissaire dit ne pas avoir évalué la crédibilité du demandeur lors de l’audience (para. 11), il conclut en écrivant qu’il n’existe pas de possibilité sérieuse que le demandeur soit torturé ou exposé à une menace à sa vie ou à des traitements et peines cruels et inusités au Honduras « parce qu’il n’a pas été trouvé crédible sur des points fondamentaux de sa demande d’asile » (para. 25).

 

[17]           Force est de reconnaître qu’il y a ici contradiction à tout le moins apparente eu égard à la crédibilité du demandeur.  Mais, j’estime qu’il ne s’agit pas là d’un vice fatal dans les circonstances.  Encore une fois, la SPR a rejeté la demande d’asile de M. Paguada au seul motif qu’il n’avait pas repoussé la présomption voulant que les autorités de son pays étaient en mesure de le protéger.  Cette conclusion étant déterminante, il ne lui était pas nécessaire de se prononcer sur la crédibilité des allégations du demandeur. 

 

[18]           La jurisprudence de cette Cour établit clairement qu’une demande d’asile ne peut être accueillie dès l’instant où l’on détermine que la protection de l’État dont le demandeur est citoyen est disponible.  Il ne faut jamais perdre de vue que l’asile constitue une protection supplétive à celle que doit normalement fournir un État à ses ressortissants, et que la réclamation du statut de réfugié dans un État signataire de la Convention doit par conséquent toujours être une solution de dernier recours : Canada (Procureur général) c. Ward, [1993] 2 R.C.S. 689.  Par voie de conséquence, la SPR était parfaitement justifiée de ne pas se pencher sur le récit du demandeur pour en évaluer la plausibilité et la crédibilité, à partir du moment où elle estimait qu’il ne s’était pas déchargé de son fardeau d’établir qu’il ne pouvait recevoir protection de la part des forces policières du Honduras.

[19]           Reste donc précisément la question de la protection de l’État.  Il s’agit clairement là d’une question mixte de fait et de droit, qui doit à ce titre être examinée par cette Cour à l’aulne de la norme de la décision raisonnable : voir, entre autres, Mendez c. M.C.I., 2008 CF 584; Da Mota c. M.C.I., 2008 CF 386; Obeid c. M.C.I., 2009 CF 503; Naumets c. M.C.I., 2008 CF 522; Woods c. M.C.I., 2008 CF 446.

 

[20]           Le demandeur a essentiellement soutenu que la SPR avait omis de considérer ses explications quant au fait qu’il n’avait pas demandé la protection des autorités de son pays.  Tant dans son FRP que dans son affidavit circonstancié, il a maintenu qu’il aurait été « suicidaire » pour lui d’aller dénoncer les Maras aux policiers, et que les autorités n’avaient de toute façon assuré aucun suivi dans leur enquête relative au meurtre de son demi-frère.  Dans cette veine, on a également reproché à la SPR de ne pas avoir tenu compte des enseignements de l’arrêt Ward, précité, où le juge LaForest a précisé qu’il n’était pas nécessaire pour un demandeur d’asile de mettre sa vie en danger en sollicitant la protection inefficace d’un État simplement pour démontrer cette inefficacité.

 

[21]           Il est vrai que la SPR, dans les motifs de sa décision, a résumé les explications du demandeur de façon succincte en disant qu’il n’était pas allé demander la protection « parce que cela ne sert à rien et la police peut même arrêter les gens ».  Il faut néanmoins présumer qu’elle a considéré toute la preuve au dossier même si elle n’a pas explicitement mentionné les propos exacts du demandeur.  Je note d’ailleurs que le tribunal a fait référence ailleurs dans sa décision (para. 4) aux démarches de la police suite à l’assassinat du demi-frère de son demandeur.

 

[22]           D’autre part, la preuve au dossier révèle que la police n’est pas demeurée inactive suite au meurtre du demi-frère du demandeur.  C’est d’abord elle qui a informé la famille du tragique événement.  Même selon le FRP du demandeur, la police a interrogé plusieurs personnes sur les lieux du crime; devant l’incapacité du demandeur de répondre à leurs questions à l’annonce de cette nouvelle, des policiers ont pris la peine de revenir chez le demandeur une semaine plus tard pour tenter de savoir qui aurait pu en vouloir à son demi-frère et pourquoi.  Le fait que l’on n’ait pas réussi à élucider ce crime ne prouve pas l’inefficacité des forces policières; comme cette Cour l’a souligné à plusieurs reprises, l’efficacité ne se mesure pas à la perfection, et il serait irréaliste, même dans notre pays, de s’attendre à ce que tous les criminels soient traduits en justice.  Enfin, il n’est pas sans intérêt de constater à la lecture du FRP du demandeur que leader des Maras l’ayant présumément invité à se joindre à eux aurait été arrêté et emprisonné pendant cinq ans suite à un cambriolage. 

 

[23]           Le demandeur a raison de soutenir qu’il n’est pas tenu de mettre sa vie en danger pour tenter d’obtenir la protection de l’État.  Il doit cependant prouver de façon claire et convaincante qu’il aurait non seulement été inutile de requérir cette protection, mais qu’il aurait ce faisant aggravé sa situation et qu’il se serait exposé à un plus grand péril.  À cet égard, la Cour d’appel fédérale a récemment réitéré qu’un demandeur d’asile assume à la fois un fardeau de présentation et un fardeau de persuasion.  En d’autres termes, un demandeur doit introduire des éléments de preuve quant à l’insuffisance de la protection de l’État, et convaincre le juge des faits que les éléments de preuve ainsi produits établissent l’insuffisance de la protection de l’État.  D’autre part, cette preuve devra aussi avoir une valeur probante suffisante pour satisfaire à la norme de preuve applicable, soit celle de la prépondérance de probabilité.  Enfin, cette preuve devra être pertinente, digne de foi et convaincante.  Voir M.C.I. c. Carrillo, 2008 CAF 94.

 

[24]           Compte tenu de ce qui précède, les craintes subjectives du demandeur ne seront donc pas suffisantes pour se décharger du fardeau qu’il avait de démontrer qu’il ne pouvait bénéficier de la protection de l’État.  La véritable question que devait se poser la SPR était de savoir si les autorités honduriennes étaient objectivement en mesure de lui assurer une protection, et s’il était raisonnable pour le demandeur de ne pas rechercher cette protection avant de quitter son pays.  Comme l’affirmait le juge Michael Phelan dans l’arrêt Kim c. M.C.I., 2005 CF 1126 (au para. 10), « [l]a réticence subjective (…) à solliciter la protection de l'État ne constitue pas un motif suffisant pour conclure que la protection assurée par l'État est inexistante ou inefficace ». Compte tenu de la preuve au dossier, je suis d’avis que la SPR pouvait conclure que les explications fournies par le demandeur pour ne pas se prévaloir de la protection des autorités de son pays n’étaient pas suffisantes pour se décharger de son fardeau de preuve.

 

[25]           Le demandeur n’a déposé aucun élément de preuve permettant de croire que la police n’agit pas ou qu’elle est impuissante lorsque des plaintes sont déposées par des personnes ayant eu des problèmes avec les Maras.  Tel que relevé précédemment, il semble au contraire que les policiers sont intervenus lorsque le demi-frère du demandeur a été tué, et que les Maras ne sont pas à l’abri de la loi.   Qui plus est, la preuve documentaire tend à démontrer que le Honduras a pris de nombreuses mesures pour contrer le problème des gangs.  La SPR a évalué cette preuve et a déterminé que même si la situation n’était pas parfaite, de sérieux efforts étaient faits pour protéger ses citoyens, victimes de menaces et d’agressions.  Cette conclusion ne me paraît pas déraisonnable.

 

[26]           La SPR a eu raison d’insister sur le fait que le demandeur n’avait fait aucune démarche pour obtenir aide et protection.  S’appuyant sur l’arrêt rendu par la Cour d’appel dans l’affaire Hinzman c. M.C.I., 2007 CAF 171, mon collègue le juge Barnes a rappelé l’importance de chercher à se réclamer de la protection de son État d’origine avant de présenter une demande d’asile dans un autre pays (voir Salazar Santos c. M.C.I., 2007 CF 793.  Il ajoutait à ce propos que l’omission de s’acquitter de cette obligation donnera lieu d’ordinaire au rejet de la demande d’asile, au moins lorsque le bon fonctionnement de la démocratie dans l’État d’origine n’est pas remis en question, que l’État a la volonté de fournir une certaine protection à ses citoyens et qu’il dispose des moyens nécessaires pour y parvenir.  Ce faisant, il faisait écho à mes propos dans une autre affaire, que je me permets de citer étant donné leur pertinence dans le contexte du présent dossier :

Il se peut bien, en effet, que la Commission ait fixé la barre trop haute en écrivant que le demandeur se devait d’épuiser tous ses recours.  Non seulement faut-il évaluer chaque cas au mérite, mais il a été dit et répété qu’un revendicateur n’est pas tenu de mettre sa vie en danger afin de démontrer qu’il a effectivement recherché la protection de son pays avant de s’exiler.  Par contre, il est raisonnable de s’attendre à ce qu’une personne qui allègue l’incapacité des autorités de la protéger ait préalablement posé un geste qui aurait normalement suscité leur protection.  Sauf en des circonstances exceptionnelles, il me semble inconcevable qu’un demandeur puisse reprocher aux autorités de son pays leur inaction alors même qu’il ne les a jamais alertées de sa situation de vulnérabilité et qu’il ne leur a jamais donné la possibilité de le protéger.

Villasenor c. M.C.I., 2006 CF 1080, para. 19.  Voir aussi, dans le même sens : Torres Lopez c. M.C.I., 2007 CF 198; Lazcano c. M.C.I., 2007 CF 1242; Torres Lopez c. M.C.I., 2007 CF 198

 

 

[27]           Les faits qui ont été portés à l’attention de la SPR ne révèlent pas de circonstances exceptionnelles pouvant justifier l’inaction du demandeur et son défaut d’alerter les autorités civiles et policières de son pays avant de chercher refuge au Canada.  La SPR pouvait donc raisonnablement conclure qu’il ne s’était pas déchargé de son fardeau de démontrer l’incapacité de l’État hondurien à le protéger; il s’agissait là de l’une des « issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » (Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, au para. 47).

 

[28]           Enfin, le demandeur a reproché à la SPR d’avoir tiré une inférence négative du fait que le demandeur n’avait pas demandé l’asile lors de son séjour de 30 jours aux États-Unis.  Bien que ce fait, à lui seul, ne puisse être déterminant, il était certes loisible à la SPR d’en tenir compte pour évaluer la crainte subjective du demandeur.  De toute façon, cet élément n’est abordé que dans le dernier paragraphe de la décision, et n’est tout au plus qu’une considération subsidiaire étant donné la conclusion à laquelle en est arrivée la SPR relativement à la protection de l’État.

 

[29]           Pour tous ces motifs, je rejette la demande de contrôle judiciaire.  Les parties n’ont formulé aucune proposition de question certifiée, et le présent dossier n’en soulève aucune.

 

ORDONNANCE

 

LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire soit rejetée.  Aucune question n’est certifiée.

 

« Yves de Montigny »

Juge


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-3861

 

INTITULÉ :                                      JUAN CARLOS PAGUADA c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Montréal

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 17 mars 2009

 

MOTIFS :                                          Monsieur le juge de Montigny

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 6 avril 2009

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Me Michel Le Brun

 

POUR LA PARTIE DEMANDERESSE

Me  Claudia Gagnon

 

POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Me Michel Le Brun

6981, Marie Guyart

Lasalle (Québec)   H8N 3G9

Fax : (514) 392-0140

 

POUR LA PARTIE DEMANDERESSE

John H. Sims

Sous-procureur général du Canada

Complex Guy-Favreau

200 boul. René-Lévesque O.

5è étage

Montréal (Québec)   H2Z 1X4

Fax : (514) 496-7876

POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE

 

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