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Date : 20090224

Dossier : IMM-3489-08

Référence : 2009 CF 193

Montréal (Québec), le 24 février 2009

En présence de monsieur le juge Lagacé

 

 

ENTRE :

RENÉ DE LA CRUZ OLGUIN

demandeur

 

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

I.          Introduction

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire présentée par le demandeur conformément à l’article 72 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la LIPR), visant la décision rendue le 17 juillet 2008 par la Section de la protection des réfugiés (la SPR) de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié dans laquelle la SPR a conclu que le demandeur, un citoyen mexicain, n’avait pas fourni d’éléments de preuve dignes de foi et crédibles pour appuyer une crainte raisonnable conformément à l’article 96 et n’avait établi aucun risque en vertu du paragraphe 97(1) de la LIPR. Par conséquent, la SPR a jugé qu’il n’était ni un réfugié au sens de la Convention ni une personne à protéger.

 

II.         Faits

[2]               La crainte de persécution du demandeur, qui l’a amené à quitter son pays d’origine pour demander l’asile au Canada, est fondée sur des menaces de mort qu’il aurait reçues puisqu’il serait au courant d’opérations commerciales illégales entre son ex-patron et la police au sujet de la vente illégale d’essence provenant d’un réservoir souterrain.

 

III.       Question en litige

[3]               La décision défavorable de la SPR était-elle déraisonnable?

 

IV.       Analyse

Norme de contrôle

[4]               La question est de savoir si la commissaire a commis une erreur dans son examen des faits invoqués dans la demande du demandeur. La norme de contrôle applicable est donc la décision raisonnable (Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9). Comme la Cour suprême l’affirme au paragraphe 161 de l’arrêt Dunsmuir, « la décision relative à une question de fait commande toujours la déférence », particulièrement lorsque la crédibilité du demandeur est touchée, et « lorsque le litige ne porte que sur les faits, il n’est nécessaire de tenir compte d’aucun autre facteur pour déterminer si la déférence s’impose à l’endroit du décideur administratif ».

 

[5]               En examinant la décision de la Commission, la Cour s’attache « principalement à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » (Dunsmuir, précité, au paragraphe 47).

 

[6]               À moins que la SPR n’ait tiré ses conclusions quant à la crédibilité de façon arbitraire ou sans s’appuyer sur la preuve, ou qu’elle n’ait pas fourni des motifs suffisants en termes clairs et explicites pour conclure comme elle l’a fait, la Cour fera preuve d’une retenue considérable à l’égard de ces conclusions. Le fardeau incombe le demandeur de démontrer que les inférences défavorables quant à la crédibilité tirées par la SPR ne pouvaient pas raisonnablement l’être (Aguebor c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration)(C.A.F.), [1993] A.C.F. n° 732, au paragraphe 4).

 

Conclusions quant à la crédibilité

[7]               Le demandeur affirme que la SPR a rejeté à tort sa demande en exprimant des doutes quant à sa crédibilité. Il accuse la commissaire d’avoir été partiale et de ne pas avoir une connaissance minimale de la situation au Mexique, en particulier de la criminalité et de la corruption répandues à travers tout le pays. En fait, le demandeur insulte les connaissances et la formation de la commissaire lorsqu’il soutient que la décision défavorable découle de l’inexpérience de la commissaire.

 

[8]               Le demandeur oublie cependant que la commissaire a conclu que sa demande était invraisemblable et qu’elle contenait plusieurs contradictions qui n’étaient pas appuyées par la preuve. Dans son recours contre la décision de la SPR, le demandeur ne s’est pas acquitté du fardeau de démontrer que la SPR a commis une erreur en tirant ses inférences défavorables quant à la crédibilité. Le demandeur oublie aussi qu’il appartient à la SPR, et non pas à la Cour, de décider si sa demande est vraisemblable ou non.

 

[9]               Une lecture attentive de la transcription de l’audience n’amène pas la Cour à croire que la SPR a rendu une décision de façon arbitraire ou sans tenir compte des éléments de preuve dont elle disposait. Au contraire, la SPR a présenté des motifs suffisants pour conclure que le demandeur n’était pas crédible et pour justifier sa décision défavorable. La SPR a trouvé de nombreuses contradictions et a conclu que la communication entre le demandeur et son ex-patron à propos des lettres de recommandation et de l’inspection du réservoir souterrain était invraisemblable, compte tenu de l’allégation du demandeur selon laquelle son ex-patron lui faisait craindre pour sa vie.

 

[10]           En fait, le demandeur demande plus ou moins à la Cour d’analyser et d’apprécier la preuve dans l’espoir qu’elle substitue son opinion à celle de la SPR et qu’elle tire une conclusion différente de celle tirée par la SPR. Cependant, là n’est pas le rôle de la Cour. La SPR bénéficie d’un grand avantage par rapport à la Cour puisqu’elle a l’expertise dans ce domaine et qu’elle a entendu le demandeur. La SPR est donc beaucoup mieux placée que la Cour pour évaluer les forces et les faiblesses de la preuve, et pour déterminer si elle est ou non admissible et si elle contient ou non des éléments dignes de foi et crédibles permettant de conclure que le demandeur craint avec raison d’être persécuté.

 

[11]           À cette étape du processus, le rôle de la Cour se limite à une vérification visant à déterminer si les inférences et les conclusions tirées par la SPR à propos du manque d’éléments de preuve crédibles appuyant la demande du demandeur sont raisonnables ou non. Les motifs donnés par la SPR ne doivent pas être examinés à la loupe par la Cour et la SPR n’est pas obligée de faire référence à chaque élément de preuve dont elle est saisie (Cepeda-Gutierrez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1998] A.C.F. n° 1425).

 

[12]           La présente affaire porte sur l’omission du demandeur d’établir, à partir d’éléments de preuve crédibles et dignes de foi, l’objet de sa demande, c’est-à-dire que sa crainte de persécution se rapporte à ce qu’il savait vraiment des activités commerciales illégales auxquelles se serait livré son ex‑employeur et aux menaces qu’il aurait reçues en conséquence.

 

[13]           Dans l’ensemble, le demandeur n’a pas démontré que la décision attaquée est déraisonnable ou n’appartient pas globalement aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit. Sa demande de contrôle judiciaire sera donc rejetée.

 

[14]           La Cour convient avec les parties qu’il n’y a aucune question de portée générale à certifier.

 


 

JUGEMENT

 

POUR LES MOTIFS SUSMENTIONNÉS, LA COUR rejette la demande.

 

 

 

« Maurice E. Lagacé »

Juge suppléant

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Julie Boulanger, LL.M.

 


 

COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-3489-08

 

INTITULÉ :                                       RENÉ DE LA CRUZ OLGUIN c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 3 février 2009

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              Le juge suppléant Lagacé

 

DATE DES MOTIFS

ET DU JUGEMENT :                       Le 24 février 2009

 

 

COMPARUTIONS :

 

Marie Aziz

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Evan Liosis

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Marie Aziz

Montréal (Québec)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

 

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

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