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Date : 20090210

Dossier : T‑999‑08

Référence : 2009 CF 134

Toronto (Ontario), le 10 février 2009

En présence de monsieur le juge Russell

 

 

ENTRE :

LA CHEF PAHTAYKEN, BRANDY BUFFALO CALF,

ELVIE STONECHILD et CHRISTINE MOSQUITO

demandeurs

et

 

LARRY OAKES, JORDIE FOURHORNS,

RUSSELL BUFFALO CALF, LINDA OAKES

et GLEN OAKES

défendeurs

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

LA DEMANDE

 

[1]               Les demandeurs sollicitent, en vertu de l’article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, ch. F‑7, le contrôle judiciaire d’une mesure administrative et, en vertu du paragraphe 18(1) de Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, ch. F‑7, un bref de quo warranto au sujet du droit des défendeurs d’occuper une charge au conseil de bande de Nekaneet, c’est‑à‑dire le poste de chef pour Larry Oakes, et des postes de conseiller pour Jordie Fourhorns, Russell Buffalo Calf, Linda Oakes et Glen Oakes.

 

[2]               La présente demande concerne deux élections distinctes qui ont eu lieu le 28 mars 2008, créant en théorie deux conseils distincts pour la bande de Nekaneet, élus en application de deux coutumes distinctes. Le but de la demande est d’établir quelle coutume régit les élections du conseil de bande à Nekaneet et lequel des deux conseils de bande exerce légitimement ses fonctions.

 

[3]               Les demandeurs ont été élus à la suite d’une élection basée sur une coutume adoptée par référendum (le référendum) auprès des électeurs admissibles de Nekaneet, référendum qui a eu lieu le 25 février 2008. Lors du référendum, la population a approuvé la Nekaneet Constitution (la Constitution de Nekaneet) ainsi que la Nekaneet Governance Act (la Loi sur la gouvernance de Nekaneet), lesquelles forment ensemble la Coutume de la bande approuvée par le référendum. Cette dernière a pour but de remplacer toute coutume antérieure de Nekaneet et ne peut être modifiée, abrogée ou remplacée que par un autre référendum.

 

[4]               Les défendeurs n’ont pas été élus conformément à la Coutume de la bande approuvée par le référendum, mais plutôt à la suite d’une élection basée sur une coutume de la bande (la Deuxième coutume de la bande) adoptée lors d’une assemblée des membres de Nekaneet, par un vote à main levée, le ou vers le 14 mars 2008.

 

[5]               Le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien (MAINC) a refusé de reconnaître soit les demandeurs soit les défendeurs en tant que conseil de bande officiel de Nekaneet. Le MAINC considère le litige comme une question de gestion interne et a proposé aux parties d’avoir recours à la médiation ou à une demande devant la Cour pour résoudre l’impasse. L’option de la médiation a été rejetée puisque la médiation ne peut modifier le droit créé par la coutume de la bande de Nekaneet. L’impasse a causé d’importants problèmes à Nekaneet et il faut y mettre fin le plus rapidement possible.

 

[6]               En particulier, les demandeurs souhaitent obtenir :

1.                  Une déclaration selon laquelle la coutume concernant les élections du conseil à Nekaneet est constituée de la Constitution de Nekaneet et de la Loi sur la gouvernance de Nekaneet, telles qu’adoptées lors du référendum par les électeurs admissibles de Nekaneet le 25 février 2008;

2.                  Une déclaration selon laquelle les demandeurs élus en tant que chef et conseillers de Nekaneet conformément à la Constitution de Nekaneet et à la Loi sur la gouvernance de Nekaneet lors de l’élection à Nekaneet le 28 mars 2008 sont le chef et les conseillers de Nekaneet;

3.                  Un bref de quo warranto selon lequel les défendeurs n’ont pas le droit d’occuper la charge de chef ou de conseiller, le cas échéant, de Nekaneet;

4.                  Dans le cas où les défendeurs rendraient une décision ou une ordonnance plus de 30 jours avant la date de la présente demande, une ordonnance accordant un délai permettant aux demandeurs de déposer la présente demande, en vertu du paragraphe 18.1(2) de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, ch. F‑7;

5.                  Une ordonnance enjoignant aux défendeurs, solidairement, de payer les dépens;

6.                  Toute autre réparation que la Cour jugera bon d’accorder.

 

LE CONTEXTE

 

[7]               Nekaneet est une bande indienne assujettie à la Loi sur les Indiens et élit son chef et ses conseillers conformément à la méthode prévue par la coutume de la bande.

 

[8]               Les demandeurs ont été élus au conseil de bande de Nekaneet conformément à une coutume de la bande adoptée par référendum auprès des électeurs admissibles de Nekaneet résidant tant dans la réserve que hors de la réserve, le 25 février 2008. Lors du référendum, les électeurs ont approuvé la Constitution de Nekaneet et la Loi sur la gouvernance de Nekaneet, lesquelles forment ensemble la Coutume de la bande approuvée par le référendum, laquelle devait remplacer toute coutume antérieure de la bande de Nekaneet. La Coutume de la bande approuvée par le référendum précise en outre qu’elle ne peut être modifiée ou abrogée que par un autre référendum tenu conformément à la Constitution de Nekaneet.

 

[9]               Les défendeurs ont été élus au conseil de bande de Nekaneet conformément à la Deuxième coutume de la bande, adoptée par un vote à main levée ayant eu lieu lors d’une assemblée des membres de la bande de Nekaneet tenue à cette fin le 14 mars 2008.

 

[10]           La tenue du référendum était sous la responsabilité de M. Walter Wenaas, un fonctionnaire référendaire qui est indépendant de la bande de Nekaneet.

 

[11]           La bande de Nekaneet compte environ 418 membres dont 267 étaient des électeurs admissibles à la date pertinente. Des 267 électeurs admissibles à Nekaneet, 136 ont voté lors du référendum. Des 136 électeurs ayant déposé un bulletin de vote, 113 se sont prononcés en faveur de la Constitution de Nekaneet alors que 21 ont voté contre, et 114 se sont également prononcés en faveur de la Loi sur la gouvernance de Nekaneet, tandis que 21 ont voté contre.

 

[12]           Avant le référendum, toutes les coutumes antérieures de la bande de Nekaneet étaient adoptées par vote à main levée lors d’une assemblée des membres tenue à cette fin.

 

[13]           L’adoption de la Coutume de la bande approuvée par le référendum devait créer une nouvelle approche au gouvernement à Nekaneet, laquelle établissait que les lois de Nekaneet devaient être adoptées par référendum (article 9.05 de la Constitution de Nekaneet). Elle a également mis en évidence dix lois essentielles de Nekaneet visant à protéger le bon gouvernement et la responsabilité (article 9.07 de la Constitution de Nekaneet). En outre, elle a également confirmé la primauté du droit à Nekaneet.

 

[14]           L’article 11.02 de la Constitution de Nekaneet prévoit que les terres et les ressources de Nekaneet sont détenues pour le bénéfice commun de tous les citoyens de Nekaneet.

 

[15]           L’article 5.02 de la Loi sur la gouvernance de Nekaneet exige que les candidats posant leur candidature à une élection ne doivent pas avoir de dette envers Nekaneet si cette dette a été contractée plus de 90 jours avant l’assemblée de nomination pertinente.

 

[16]           La Loi sur la gouvernance de Nekaneet contient également des règles formelles concernant les élections (articles 1 à 11) et des dispositions sur la gestion des affaires publiques établissant des normes pour le bon gouvernement, des règles sur les conflits d’intérêts et des règles sur la responsabilité et la transparence (articles 12 à 18).

 

[17]           La Constitution de Nekaneet crée un tribunal d’appel indépendant pour Nekaneet. La Loi sur la gouvernance de Nekaneet, à l’article 19, établit des règles pour le dépôt de demandes auprès du tribunal d’appel.

 

[18]           Les défendeurs, qui se sont opposés à l’initiative à l’origine de la Coutume de la bande approuvée par le référendum, ont pris une contre‑mesure afin d’adopter une autre coutume pour la bande de Nekaneet. Il s’agit de la Deuxième coutume de la bande.

 

[19]           La Deuxième coutume de la bande a été adoptée non pas par référendum conformément à la Coutume de la bande approuvée par le référendum du 25 février 2008, mais par un vote à main levée ayant eu lieu lors d’une assemblée des membres tenue à cette fin le 14 mars 2008.

 

[20]           On ne connaît pas le nombre de membres de la bande qui étaient présents ou qui ont participé à l’assemblée ayant créé la Deuxième coutume de la bande.

 

[21]           Une élection générale a été déclenchée conformément à l’article 3.04 de la Loi sur la gouvernance de Nekaneet. Le jour de mise en nomination était le 29 février 2008 et le jour du vote était le 28 mars 2008.

 

[22]           M. Gordon Alger, de Meadow Lake, en Saskatchewan, a été nommé directeur général des élections pour l’élection générale à Nekaneet en 2008, en application de la Loi sur la gouvernance de Nekaneet.

 

[23]           L’assemblée de mise en nomination du 29 février 2008 a eu lieu et Mme Alice Pahtayken, un des demandeurs, a été élue par acclamation au poste de chef. Quatre personnes étaient également en lice pour les trois postes de conseiller.

 

[24]           Un des quatre candidats au poste de conseiller était M. Steven Richard Buffalo Calf. Il s’est désisté le 10 mars 2008, ce qui a permis aux trois autres candidats d’être élus par acclamation. Ce sont les trois autres demandeurs.

 

[25]           Aucun appel prévu par Loi sur la gouvernance de Nekaneet n’a été déposé au sujet de l’élection du 28 mars 2008 tenue en vertu de la Coutume de la bande approuvée par le référendum.

 

[26]           Toutefois, une seconde élection du chef et du conseil de Nekaneet a eu lieu le même jour, soit le 28 mars 2008. Cette élection était basée sur la Deuxième coutume de la bande et a donné lieu à l’élection des défendeurs.

 

[27]           Le MAINC a refusé de reconnaître aux demandeurs ou aux défendeurs le titre de chef et de conseillers officiels de la bande de Nekaneet et considère le litige comme étant une question de gestion interne.

 

[28]           Il est nécessaire de résoudre rapidement le litige parce que le refus par le MAINC de reconnaître le conseil de bande des demandeurs élu conformément à la Coutume de la bande approuvée par le référendum ou le conseil de bande des défendeurs élu conformément à la Deuxième coutume de la bande signifie qu’il est impossible de gérer à Nekaneet les programmes ne relevant pas du MAINC.

 

[29]           Tant les demandeurs que les défendeurs conviennent que l’impasse doit être résolue le plus rapidement possible et les deux parties demandent à la Cour de décider qui sont le chef et le conseil de bande légitimes de Nekaneet.

 

LES QUESTIONS EN LITIGE

 

[30]           Les demandeurs ont soumis les questions suivantes à la Cour :

1.                  La présente demande est‑elle appropriée compte tenu des conditions préalables établies dans la Loi sur les Cours fédérales et les Règles sur les Cours fédérales et de l’existence de l’action no T‑481‑08 présentée devant la Cour fédérale et introduite par une déclaration. Cette question soulève plusieurs sous‑questions :

a.    La présente demande présentée en vertu du paragraphe 18(1) des Règles des Cours fédérales est‑elle appropriée?

b.    Que les défendeurs, en tant que tribunal, rendent une décision est-il une condition préalable au dépôt de la présente demande de contrôle judiciaire?

c.    L’action introduite par déclaration devant la Cour fédérale dans le dossier no T‑481‑08 constitute‑t‑elle un obstacle au présent contrôle judiciaire?

 

2.                  Quelle est la coutume valide : la Coutume de la bande approuvée par le référendum du 25 février 2008 ou la Deuxième coutume de la bande adoptée par vote à main levée le 14 mars 2008 lors d’une assemblée des membres de Nekaneet? Cette question semble soulever les sous‑questions suivantes :

a.    Si la Coutume de la bande approuvée par le référendum a été adoptée validement, est‑ce qu’elle invalide la Deuxième coutume de la bande parce que l’adoption de celle‑ci ne s’est pas faite conformément à la procédure prévue dans la Constitution de Nekateet?

b.    Un référendum concernant une coutume de la bande doit‑il être déclenché par résolution du conseil de bande au pouvoir et la bande de Nekaneet doit‑elle se limiter aux coutumes adoptées par vote à main levée lors d’assemblées tenues à cet effet?

c.    La Coutume de la bande approuvée par le référendum satisfait‑elle au critère d’être généralement acceptable pour les membres de la Première nation de Nekaneet et de faire l’objet d’un consensus large?

d.    Est‑ce que l’une ou l’autre des irrégularités reconnues lors du déroulement du référendum invalide le vote?

 

ANALYSE

            Le caractère approprié de la demande

 

[31]           Dans l’arrêt Marie c. Wanderingspirit, 2003 CAF 385, la Cour d’appel fédérale a énoncé ce qui doit se produire dans des cas comme celui en l’espèce où, à proprement parler, aucune décision du conseil de bande n’est contestée, mais où la demande vise à contester le droit du titulaire d’une charge publique d’occuper cette charge :

18     Suivant l’alinéa 18(1)a) de la Loi sur la Cour fédérale, la Cour fédérale a compétence pour décerner un bref de quo warranto ou pour rendre un jugement déclaratoire. Je ne vois pas pourquoi un jugement déclaratoire, lequel s’apparente à un quo warranto, ne peut être rendu. La Cour d’appel fédérale semble approuver ce processus dans l’arrêt Bande indienne de Lake Babine et al. c. Williams et al. (1996), 194 N.R. 44 (C.A.F.), où le juge Robertson s’exprime dans les termes suivants aux paragraphes 3 et 4 :

 

3. Il convient de souligner dès le départ que les appelants ne contestent pas la compétence de la Cour en ce qui a trait à l’examen des questions soulevées en l’espèce. Les intimés demandent un jugement déclaratoire et une injonction, ce qui, dans les circonstances, équivaut essentiellement à une demande de bref de quo warranto. Un recours de cette nature permet de contester le droit d’une personne d’exercer une charge donnée [...]

 

4. La compétence de la Cour est donc indéniable, le conseil de bande étant « un office fédéral » au sens des articles 2 et 18 de la Loi [...]. Par conséquent, la Cour d’appel fédérale a compétence pour statuer sur la question, mais elle ne peut le faire que dans le contexte d’une demande fondée sur l’article 18, et non dans le cadre d’une action introduite au moyen d’une déclaration.

 

19.     Comme la présente affaire a été introduite par le dépôt d’une demande, l’opposition relative à la procédure par voie de déclaration soulevée dans l’arrêt Lake Babine n’est pas pertinente en l’espèce.

 

20.     Bien que le contrôle judiciaire concerne généralement une décision prise par un office fédéral, il arrive qu’une réparation soit accordée en l’absence d’une telle décision. La demande de bref de prohibition en est un exemple évident. Le bref de quo warranto ou le jugement déclaratoire qui s’apparente à un quo warranto dans le cas où la contestation vise le droit du titulaire d’une charge publique d’exercer cette charge directement en est un autre. C’est d’ailleurs ce qui s’est passé en l’espèce. Pour ces raisons, le deuxième motif d’appel doit être rejeté.

 

[32]           À la lumière de ce qu’a affirmé la Cour d’appel fédérale, j’estime que la demande portée à mon attention relève légitimement de la compétence de la Cour selon la Loi sur les Cours fédérales et les Règles des Cours fédérales.

 

[33]           J’estime que l’action no T‑481‑08 devant la Cour fédérale ne constitue pas non plus un obstacle à la présente demande. La principale réparation demandée dans cette action diffère de la réparation demandée en l’espèce et les deux parties conviennent qu’il est impératif de trancher rapidement les questions soulevées en l’espèce.

 

[34]           Les deux parties au présent litige conviennent également que l’impasse entre elles doit être résolue le plus rapidement possible afin d’éviter à la Première nation de Nekaneet dans son ensemble les répercussions négatives et elles ont demandé à la Cour de rendre une décision dans le cadre de la présente demande.

 

La Deuxième coutume de la bande

 

[35]           La demande de quo warranto, ou visant l’obtention d’une déclaration qui s’apparente à un quo warranto, que sollicitent les demandeurs vise la Deuxième coutume de la bande sous le régime de laquelle les défendeurs auraient été élus le 14 mars 2008. Cependant, afin d’établir si les défendeurs ont été ou non élus dans les formes, il faut examiner les coutumes régissant les élections du conseil de bande de Nekaneet et établir si ces coutumes ont été remplacées par la Coutume de la bande approuvée par le référendum qui est constituée de la Constitution de Nekaneet et de la Loi sur la gouvernance de Nekaneet.

 

[36]           L’élection des défendeurs aux postes de chef et de conseiller était fondée sur une coutume adoptée par un vote à main levée ayant eu lieu lors d’une assemblée tenue à cette fin le 14 mars 2008. Cela signifie que les défendeurs pourraient ne pas avoir le droit d’occuper une charge au conseil de bande de Nekaneet pour l’une des raisons suivantes :

a.       Leur élection n’était pas conforme à une coutume de Nekaneet telle qu’elle existait avant l’adoption de la Constitution de Nekaneet et de la Loi sur la gouvernance de Nekaneet;

b.       Leur élection ne s’est pas faite conformément à la Constitution de Nekaneet et à la Loi sur la gouvernance de Nekaneet si ces instruments se sont substitués à toute coutume antérieure concernant l’élection du chef et du conseil de bande.

 

[37]           Cependant, les demandeurs ont convenu que, s’il était conclu que leur élection conformément à la Coutume de la bande approuvée par le référendum sous le régime de la Constitution de Nekaneet et de la Loi sur la gouvernance de Nekaneet n’était pas valide, alors l’élection des défendeurs en application de la Deuxième coutume de la bande devrait être considérée comme étant valide, même si elle pourrait être contestée pour d’autres motifs.

 

[38]           Puisqu’il en est ainsi, je pense que la manière la plus facile d’aborder ces questions est de déterminer si la Constitution de Nekaneet et la Loi sur la gouvernance de Nekaneet régissent maintenant l’élection du chef et du conseil de bande de Nekaneet et, le cas échéant, si les défendeurs occupent leurs charges légitimement et conformément aux dispositions pertinentes. Si ce n’est pas le cas, dans la mesure où la Constitution de Nekaneet et la Loi sur la gouvernance de Nekaneet sont considérées comme étant valides et régissant l’élection du chef et du conseil de bande au sein de la Première nation de Nekaneet, les demandeurs seront alors le chef et les conseillers de bande légitimes parce qu’on ne m’a présenté aucune preuve ou allégation selon laquelle ils n’auraient pas été élus conformément à la Coutume de la bande approuvée par le référendum sous le régime de la Constitution de Nekaneet et de la Loi sur la gouvernance de Nekaneet.

 

[39]           Je conviens avec les demandeurs que rien dans la Loi sur les Indiens ou toute autre loi portée à l’attention de la Cour n’exige qu’un processus de référendum concernant l’adoption d’une coutume soit entamé ou se déroule d’une façon particulière. La question est de savoir si l’adoption de la Constitution de Nekaneet et la Loi sur la gouvernance de Nekaneet fait l’objet d’un large consensus au sein de la Première nation de Nekaneet, tel que la jurisprudence applicable définit « large consensus », et si ces lois sont généralement considérées comme acceptables. Si elles ont ainsi été adoptées et acceptées, alors la population de Nekaneet a décidé qu’elles gouverneront à l’avenir les élections du chef et du conseil de bande et les élections qui ne se conforment pas aux dispositions pertinentes ne seront pas valides.

 

[40]           En outre, le nombre absolu d’électeurs qui ont participé au référendum était considérable, soit 136 personnes sur 267 électeurs admissibles, et 83 pour 100 des électeurs admissibles ayant participé au référendum ont voté en faveur de la Constitution de Nekaneet et de la Loi sur la gouvernance de Nekaneet, bien que les défendeurs ainsi que leur famille et leurs amis aient boycotté l’ensemble du processus.

 

[41]           Les défendeurs n’ont présenté aucune preuve donnant à penser que le taux de participation, soit 136 électeurs, était faible. En fait, ce chiffre représente plus de la moitié de tous les électeurs admissibles de Nekaneet, alors que les défendeurs, ainsi que leurs partisans, ont refusé d’y participer.

 

[42]           Dans l’affaire Première nation du Lac des Mille Lacs c. Chapman, [1998] 4 C.N.L.R. 57 (C.F. 1re inst.), un « code d’élection des chefs et conseil selon la coutume » avait été adopté par référendum, en vertu duquel les défendeurs dans cette affaire avaient été élus par acclamation conseillers de la bande. Les demandeurs dans cette affaire soutenaient que les pratiques prévues au code d’élection n’étaient pas généralement acceptables pour les membres de la bande et qu’elles ne faisaient pas l’objet d’un large consensus. Le juge Cullen n’était pas d’accord. Après avoir examiné les caractéristiques de la non‑participation générale chez les membres de la bande, il a conclu que la participation de 86 personnes, sur une population de 300 membres (et l’adresse de seulement 130 d’entre eux était connue), dont une vaste majorité des 86 avait voté en faveur du code d’élection, suffisait à établir qu’il y avait un large consensus pour faire du code d’élection la coutume de la bande.

 

La preuve

 

[43]           Il y a certaines contradictions dans la preuve portée à mon attention dans la présente demande. Cette situation est inévitable étant donné les approches divergentes à la gouvernance que représente chaque partie. Les demandeurs se voient comme les défenseurs d’une nouvelle approche plus transparente et plus responsable à la gouvernance de la Première nation de Nekaneet. Les défendeurs, de l’autre côté, se considèrent comme étant l’incarnation des coutumes et pratiques traditionnelles qui n’ont pas besoin de la nouvelle approche exposée dans la Constitution de Nekaneet et la Loi sur la gouvernance de Nekaneet. En fait, les défendeurs considèrent ces instruments comme étant totalement contraires aux coutumes et pratiques traditionnelles et préjudiciables à l’identité de la Première nation de Nekaneet.

 

[44]           Indépendamment des différents points de vue sur le bon mode de gouvernement qui se trouvent dans la preuve et indépendamment des contradictions dans la preuve, après avoir examiné le dossier dans son ensemble, je crois que l’on peut distinguer les grandes lignes suivantes :

a.                   Bien que les défendeurs cherchent à préserver le statu quo à Nekaneet et prétendent incarner les coutumes et pratiques traditionnelles, ils se sont montrés, en général, réticents à permettre à la population de Nekaneet elle‑même de trancher les questions de gouvernance. Ils ont simplement résisté aux nouvelles initiatives mises de l’avant par les demandeurs et tenté de les contrecarrer. Au bout du compte, les règles de gouvernance de Nekaneet devraient être choisies par la Première nation et c’est la volonté de la population de Nekaneet dans son ensemble qui importe. La preuve me donne à penser que les défendeurs sont plus soucieux de préserver le statu quo – et en particulier la façon dont le chef et les membres du conseil de bande sont élus et fonctionnent – que de vérifier quel est le consensus général au sein de la Première nation de Nekaneet au sujet des règles appropriées de gouvernance. Peu importe les irrégularités qui ont pu se produire lors du processus référendaire et dans l’approche générale des demandeurs, il apparaît au moins que l’objectif de ces derniers était de vérifier quelle était la volonté de la population de Nekaneet. La nouvelle constitution et les nouvelles règles de gouvernance ne semblent apporter aucun avantage personnel aux demandeurs, tandis que les efforts des défendeurs pour contrecarrer la recherche d’un consensus sont fortement teintés d’un intérêt personnel concernant la maîtrise des communes et des ressources de la bande. Je crois qu’une partie ou un groupe qui contrecarre les tentatives visant à établir le consensus général et qui s’appuie simplement sur les coutumes et pratiques traditionnelles pour justifier sa propre position dans une situation où le gouvernement est dysfonctionnel attire la suspicion.

b.                  Les défendeurs sont clairement au courant que le consensus au sein de la collectivité est le véritable facteur légitimant parce que, d’une manière très révélatrice, ils ont tenté de se donner cette légitimité. Lors de la seconde élection organisée par les défendeurs en application de la Deuxième coutume de la bande, 113 personnes ont signé une pétition où était écrit ceci en haut des signatures :

[traduction]

Je crois et j’ai confiance en la procédure d’élection de Nekaneet du 28 mars 2008. Les élections de Nekaneet ont choisi leurs porte‑parole [les membres du conseil de bande] dans le cadre du processus prévu par la coutume de la bande puisque des élections ont eu lieu à Nekaneet.

 

La pétition est jointe à l’affidavit de M. Dale Mosquito et la seule explication qu’il offre concernant la pétition est la suivante :

[traduction]

Au moment de l’élection tenue en application de la coutume à Nekaneet, les membres de la bande se sont également vu donner l’occasion de signer une pétition confirmant leur attachement au processus issu de la coutume de notre bande. Ce document a été signé par 113 membres de la bande. Un des demandeurs, Christine Mosquito, et une personne qui a travaillé au sein du Comité de gouvernance, Doreen Oakes, ont signé cette pétition. Une copie de la pétition est jointe au présent affidavit et est la pièce G du présent affidavit.

 

Rien ne prouve qu’il s’agit d’une coutume de Nekaneet que de faire signer par les membres une telle pétition lors d’une élection et cette pétition ne peut être comprise que dans le contexte du présent litige. Il n’est pas nécessaire de faire signer une telle pétition à moins que les défendeurs veuillent l’utiliser pour contester la légitimité du référendum et de l’élection précédente qui a eu lieu en application de la Coutume de la bande approuvée par le référendum. Avec la pétition, les défendeurs tentent de montrer que la collectivité soutient le statu quo qu’ils affirment incarner. C’est leur réponse au référendum des demandeurs.

 

Ce qui est étrange, c’est que les critiques portées par les défendeurs contre le référendum des demandeurs afin de prouver que celui‑ci n’a pas permis d’établir un consensus au sein de la Première nation de Nekaneet en faveur du nouveau régime s’appliquent en réalité à la pétition. Aucun élément de preuve ne vient assurer la Cour que cette pétition a la moindre valeur ou légitimité en tant qu’expression de la pensée ou de la volonté des gens qui l’ont signée. Quelle était la procédure lors de la signature? Quel est le processus d’information et de sensibilisation qui l’a précédée? Dans quelles circonstances a-t-elle été signée? Qui a autorisé la pétition? Qui l’a organisée? Quels moyens ont été utilisés pour obtenir les signatures ou pour assurer que les signataires ont pu voter librement selon leur conscience? Nous connaissons la plupart des réponses à ces questions pour le référendum. Nous n’en connaissons aucune pour la pétition.

 

Les défendeurs affirment avec vigueur dans la présente demande que la Première nation de Nekaneet ne comprenait pas ce qui était en jeu lors du référendum. Ils affirment que la population de Nekaneet n’a pas été adéquatement informée et que le référendum n’était pas sûr en raison des erreurs dans le processus. Ils semblent n’éprouver aucun besoin de rassurer la Cour et de lui démontrer que la pétition a la légitimité qu’ils nient au référendum. Mais sans ces assurances, la Cour ne peut attacher que peu de valeur à la pétition en tant qu’expression de la volonté de la Première nation de Nekaneet.

 

Qui plus est, l’existence même d’une telle pétition met à rude épreuve certains des principes de base de la position des défendeurs. Ceux‑ci affirment que les questions de gouvernance qui ont mené au référendum étaient peu comprises à Nekaneet. Pourtant, ils présentent à la Cour une pétition contredisant le référendum qui ne peut avoir d’importance et de signification que dans le contexte d’un débat sur la gouvernance. Si ces gens ne comprenaient pas ce qui était en jeu, pourquoi signeraient‑ils une pétition dont l’objet était visiblement de faire échec au référendum et à la première élection? La Cour ne peut accepter que les personnes qui ont signé la pétition comprenaient sa signification et ce qui était en jeu alors que les personnes qui ont participé au référendum n’étaient pas suffisamment informées pour savoir ce qu’elles faisaient. La pétition est un élément de preuve soutenant fortement la position des demandeurs selon laquelle les questions de gouvernance en jeu lors du référendum étaient bien connues et avaient été bien discutées dans la collectivité de Nekaneet.

 

c.                   Le débat sur la gouvernance à Nekaneet se fait entre ceux qui souhaitent préserver le statu quo qui a mené à des problèmes importants pour la collectivité dans l’ensemble. Les défendeurs insistent sur le fait que toutes les initiatives du conseil de bande nécessitent un consensus au sein des membres du conseil. Le problème est que cela ne peut fonctionner que si aucun intérêt personnel n’entre en ligne de compte. Toute question discutée au conseil de bande qui menace l’intérêt d’un conseiller, de sa famille ou de ses amis peut être contrecarrée par une absence ou un veto. La preuve révèle que le conseil de bande était constamment paralysé au cours des dernières années au point que les vérificateurs de Nekaneet et le MAINC ont émis des avertissements. Le groupe des défendeurs a invoqué les traditions et les coutumes pour justifier l’approche consensuelle traditionnelle, mais il ressort clairement de la preuve que l’intérêt personnel a souillé la coutume et que, si une nouvelle approche au gouvernement n’était pas adoptée, ceux qui contrôlent les biens communs pourraient continuer à prospérer aux dépens de l’ensemble de la Première nation de Nekaneet. Il y a beaucoup d’amertume personnelle dans la preuve et les mesures quelque peu extrêmes utilisées par les défendeurs pour boycotter, contrecarrer et annuler le référendum, plutôt que de rechercher un consensus au sein de la collectivité de Nekaneet dans l’ensemble, donnent à penser que certains individus du moins ont beaucoup à perdre avec l’instauration d’un nouveau régime de gouvernance. La preuve révèle qu’il y a du népotisme du côté des demandeurs également, mais ceux‑ci ne cherchent pas à protéger les occasions de gain pour eux‑mêmes ou leur famille. La nouvelle constitution les touchera autant que les défendeurs et rendra les deux groupes beaucoup plus responsables envers les membres de la nation de Nekaneet.

d.                  J’ai examiné attentivement les affidavits produits par les deux parties. Bien qu’il y ait des contradictions considérables sur certains points essentiels, il est clair que les affidavits de Mme Pahtayken, de Mme Millar et de M. Buffalo Calf pour les demandeurs sont pour la plupart fondés sur des faits et présentent un témoignage portant sur ce qu’ils connaissent personnellement. Leurs affidavits sont également appuyés par une documentation solide qui porte sur les principales questions en litige. Les affidavits de M. Wenaas et de M. Alger pour les demandeurs proviennent d’observateurs et de participants expérimentés et impartiaux, en plus de soutenir fortement la position des demandeurs. Les affidavits des défendeurs parlent de façon éloquente et convaincante des traditions et des coutumes de Nekaneet de même que de l’histoire particulière du peuple de Nekaneet. Cependant, ils sont beaucoup moins convaincants en ce qui a trait aux principales questions en litige en l’espèce. Sauf pour défendre des positions personnelles, ils contiennent très peu d’éléments de preuve acceptables au sujet du processus suivi lors du référendum et sur la connaissance de la collectivité pour ce qui était des questions en jeu. Les défendeurs y ont beaucoup recours au ouï‑dire, aux affirmations vagues et aux opinions personnelles sur les questions essentielles. Par exemple, après examen de l’affidavit de M. Dale Mosquito, pour les défendeurs, il apparaît clairement que M. Mosquito parle bel et bien à partir de son expérience personnelle, mais beaucoup de ses propos représentent la généralisation d’une opinion ou d’un argument, souvent sur des points qui ne sont pas utiles pour répondre à la question principale de la présente demande. En outre, lorsqu’il répond aux questions principales, M. Mosquito manque d’objectivité. Il donne son avis sur des choses dont il n’a pas eu personnellement connaissance afin de discréditer les demandeurs et de soutenir la cause des défendeurs :

[traduction]

40. Les membres du comité de gouvernance se sont rendus à différents endroits tant au Canada qu’aux États‑Unis pour rencontrer individuellement certains membres de la bande. J’ai été informé par Santana et Belinda Stanley, deux de mes belles‑sœurs, que Harry Buffalo Calf et Cheryl Stanley ont sollicité leur vote. L’une des deux a bel et bien voté lorsqu’elle a accepté de voter en faveur de ce que proposait le comité de gouvernance. Lorsque la seconde personne a fait savoir qu’elle était contre, ces personnes n’ont pas voulu accepter son bulletin de vote. Par contre, on m’a dit que les personnes allant chercher les bulletins de vote ne donnaient pas de détails sur les propositions sur lesquelles les membres étaient appelés à voter. Il semble que cela ne soit pas un cas isolé. J’ai été informé par d’autres membres de la bande que des membres du soi‑disant comité de gouvernance ou les personnes travaillant avec eux ont rendu visite à des membres dans plusieurs endroits.

 

41. J’ai parlé à un membre de la Première nation de Nekaneet qui m’a dit avoir voté pour, mais n’avoir pas compris ce pourquoi il votait.

 

 

[45]           Je ne cherche pas à laisser entendre que tout le témoignage de M. Mosquito est ainsi, mais, sur cette question importante et pertinente, ce qu’il a à dire est de peu d’utilité à la Cour. Par exemple, la Cour doit savoir :

a.                   Quand et comment M. Mosquito a‑t‑il été informé par ses belles‑sœurs et quel est le contexte qui donne à ce qu’elles lui ont dit une certaine crédibilité?

b.                   Pourquoi est‑il incapable de se rappeler laquelle de ses belles‑sœurs a accepté de voter pour?

c.                   Pourquoi ces renseignements sont‑ils présentés comme du ouï‑dire et pourquoi les belles‑sœurs n’ont‑elles pas témoigné directement à ce sujet?

d.                   Qui a informé M. Mosquito que les personnes allant chercher les bulletins de vote n’avaient pas parlé en détails des questions sur lesquelles les membres étaient appelés à voter? Pourquoi n’avons‑nous pas d’affidavit de cette personne et comment M. Mosquito peut‑il faire des généralisations sur cette question comme il le fait?

e.                   Comment M. Mosquito sait‑il qu’il ne s’agit pas d’un cas isolé?

f.                     Qui sont les autres membres de la bande qui ont dit à M. Mosquito que les membres du comité de gouvernance, ou les personnes qui travaillaient avec eux, ont rendu visite à des membres dans plusieurs endroits? Pourquoi M. Mosquito ne nomme‑t‑il pas ces autres membres de la bande? Et qu’est‑ce qui s’est précisément produit, selon M. Mosquito, dans ces autres cas et comment l’a‑t‑il appris et de combien de cas parle‑t‑il?

g.                   Pourquoi M. Mosquito ne nomme‑t‑il pas le membre de la bande à qui il a parlé au paragraphe 41 et pourquoi ce membre n’a‑t‑il pas produit d’affidavit?

 

[46]           Il ne s’agit pas d’une preuve convaincante sur la question essentielle de la légitimité du référendum. La majeure partie est constituée de ouï‑dire au sujet de personnes qui ne sont même pas nommées. Le but de ce témoignage est clair. M. Mosquito souhaite donner l’impression que les gens ont été contraints de voter pour au référendum, que les membres du comité de gouvernance sont personnellement intervenus pour assurer que les votes contre étaient exclus et que les personnes qui ont bel et bien voté en faveur du changement ne savaient pas ce qu’elles faisaient. Mais ce n’est que ouï‑dire et insinuations. Qui plus est, les suggestions contenues dans cet élément de preuve ne concordent visiblement pas aux faits qui sont clairement établis. Par exemple, ce n’est pas toutes les personnes qui ont participé au référendum qui ont voté en faveur du nouveau mode d’élection. Les 113 votes pour le « oui » représentaient 83 pour 100 des 136 bulletins de vote. Le nombre d’électeurs admissibles était d’environ 267. Les défendeurs ont organisé une pétition qui a été signée par 113 personnes lesquelles, selon les défendeurs, souhaitent conserver la coutume électorale traditionnelle. Aucune preuve n’indique combien de ces personnes ont voté lors du référendum, mais les défendeurs et leur groupe ont fait bien attention de boycotter tout le processus référendaire afin de lui retirer sa légitimité. Il est donc raisonnable de supposer qu’un bon nombre des signataires de la pétition n’ont pas participé au référendum. En somme, il semble qu’une proportion importante des électeurs admissibles de Nekaneet ont, d’une façon ou d’une autre, si la propre preuve des défendeurs est acceptée, fait connaître leur point de vue dans le débat sur la gouvernance, même s’il n’y a aucune preuve conférant à la pétition valeur de vote libre et légitime.

 

[47]           Je ne cherche pas à laisser entendre que toute la preuve des défendeurs pose un tel problème, mais d’autres affidavits comportent des problèmes semblables sur des questions essentielles.

 

[48]           En ce qui concerne les contradictions dans la preuve, je crois que la Cour doit prendre en considération le fait que les demandeurs ont fait de leur mieux pour présenter les questions de gouvernance au jugement de la Première nation de Nekaneet afin de permettre à toute la collectivité de s’exprimer. Il y a eu des votes contre lors du référendum. Cela donne à penser que la collectivité était informée, qu’elle savait ce qu’elle faisait et qu’elle a fait un choix libre. Il est révélateur que la pétition des défendeurs soit présentée comme s’il n’y avait aucune dissension et cela soulève des doutes sur le caractère libre et éclairé du choix fait par les signataires de signer la pétition. Sinon, cela donne à penser qu’il y a un groupe de personnes qui ont particulièrement intérêt à veiller à ce que le statu quo demeure à Nekaneet.

 

[49]           Il ne faut pas non plus oublier que le processus adopté par les demandeurs et le nouveau régime approuvé par le référendum ne donnent lieu apparemment à aucun conflit d’intérêt chez les demandeurs. La transparence et la responsabilité dans le gouvernement s’appliqueront tant aux demandeurs qu’aux défendeurs. Cependant, les défendeurs veulent maintenir le statu quo ce qui, selon la preuve, inquiète grandement bon nombre de personnes à Nekaneet qui croient qu’il favorise l’injustice, le népotisme et la recherche de l’intérêt personnel au détriment du bien‑être de la collectivité. La preuve donne à penser que les défendeurs ont personnellement intérêt à maintenir le statu quo et cela doit nécessairement influencer la façon dont la Cour examine leur preuve et leur interprétation des événements qui ont mené au référendum.

 

[50]           Il est impossible pour la Cour de relever, d’examiner et d’analyser chacun des problèmes dans la preuve et de rendre une décision en temps opportun. Il suffit de dire que j’ai examiné tout le dossier et que je conclus que la preuve des demandeurs est beaucoup plus factuelle, pertinente et fondée que celle des défendeurs sur les principales questions en litige. En outre, la preuve des défendeurs est entachée d’intérêt personnel et de contradictions qui ne peuvent être mis de côté. Les défendeurs, de toute évidence, sont profondément attachés au statu quo et ont résisté avec vigueur à ce que l’ensemble de la Première nation de Nekaneet tranche les questions de gouvernance. De l’autre côté, les demandeurs souhaitent de toute évidence prendre le pouvoir, mais ils veulent le faire dans le cadre d’un nouveau système de gouvernement qui ne leur apporte à première vue aucun avantage personnel et qui tente d’introduire la responsabilité et la transparence à Nekaneet pour que le dysfonctionnement, l’intérêt personnel et le népotisme deviennent choses du passé. Leur façon de faire et leur processus n’étaient peut‑être pas parfaits, mais ils ont accepté de porter leurs erreurs à l’attention de la Cour. De toute manière, je crois qu’ils ont prouvé qu’il existe maintenant une nouvelle coutume à Nekaneet, laquelle est incarnée par la Constitution de Nekaneet et la Loi sur la gouvernance de Nekaneet.

 

[51]           La question principale que la Cour doit trancher est de savoir si, indépendamment des erreurs, des désaccords sur la forme et des contradictions dans la preuve, il peut être conclu sans risque que la Première nation de Nekaneet a exprimé un consensus suffisamment large en faveur du nouveau régime de gouvernance et des règles pour l’élection du chef et des membres du conseil de bande que comporte ce régime. Compte tenu de la preuve devant moi, j’estime qu’un consensus a été établi.

 

La question principale

 

[52]           En gardant à l’esprit ces considérations générales, la Cour doit trancher la question principale, à savoir si la preuve démontre qu’un consensus suffisant à Nekaneet a donné naissance au nouveau régime qu’incarnent la Constitution de Nekaneet et la Loi sur la gouvernance de Nekaneet et qui fait en sorte que l’élection du chef et des membres du conseil doit avoir lieu conformément à la Coutume de la bande approuvée par le référendum à moins qu’elle soit modifiée.

 

[53]           Nekaneet compte environ 418 membres, dont 267 étaient des électeurs admissibles lors du référendum. Une des difficultés que pose un groupe de personnes de cette taille est que les loyautés s’aligneront inévitablement sur les familles et les groupes d’amis. Cela rend l’émergence d’un consensus clair et net quasiment impossible. Comme on peut le constater en l’espèce, il y a une polarisation nette entre ceux qui souhaitent maintenir le statu quo et ceux qui désirent une nouvelle approche à la gouvernance.

 

[54]           La jurisprudence sur ce que constitue un consensus suffisant est plutôt rare, mais je crois que les principes pertinents qui permettront de résoudre la présente impasse sont clairs. Dans la décision Bigstone c. Big Eagle (1992), [1993] 1 C.N.L.R. 25 (C.F. 1re inst.), à la page 24, le juge Strayer avait ceci à dire d’importance générale :

Sauf si elle est définie par ailleurs dans le cas d’une bande donnée, la « coutume » doit inclure, à mon sens, des pratiques touchant le choix d’un conseil qui sont généralement acceptables pour les membres de la bande, qui font donc l’objet d’un large consensus […] Pour ce qui est de la validité de la constitution, la question véritable semble donc se rattacher à sa légitimité politique, et non juridique : la constitution résulte‑t‑elle de l’accord de la majorité de ceux qui, d’après la preuve produite, paraissent être des membres de la bande?

 

 

[55]           Dans la décision Bigstone, le juge Strayer semble présumer qu’il n’y a aucune exigence légale précisant une manière particulière d’obtenir le consensus de la majorité. La Cour doit chercher une légitimité politique plutôt que légale.

 

[56]           Cet avis est confirmé par la juge Reed dans la décision Bande indienne de McLeod Lake c. Chingee (1998), [1999] 1 C.N.L.R. 106 (C.F. 1re inst.), au paragraphe 17, où elle fait référence à « ce que la jurisprudence a assez bien établi », c’est‑à‑dire que « la coutume de la bande est l’ensemble des pratiques touchant le choix d’un conseil de bande qui sont généralement acceptables pour les membres de la bande, qui font donc l’objet d’un large consensus ».

 

[57]           Plus récemment, dans la décision Francis c. Conseil mohawk de Kanesatake, [2003] 3 C.N.L.R. 86 (C.F. 1re inst.), le juge Martineau a été appelé à résoudre un litige entre des factions opposées. Il a confirmé que la Loi sur les Indiens n’énonce aucune ligne directrice quant à la façon de déterminer la coutume d’une bande et son approche était conforme aux propos du juge Strayer dans Bigstone et de la juge Reed dans McLeod Lake. Il souligne que les pratiques concernant le choix des membres du conseil doivent être généralement acceptables pour les membres de la bande, donc qu’elles fassent l’objet d’un large consensus. De manière significative, le juge Martineau a conclu que ces pratiques pouvaient être établies soit par des actes répétitifs, soit par une mesure isolée comme l’adoption d’un code électoral. Il affirme au paragraphe 37 que « la véritable question qui se pose quant à la mesure dans laquelle une résolution ou décision d’une bande ou un code électoral adopté traduit la coutume de la bande en question peut être formulée comme suit : la résolution, la décision ou le code est‑il fondé sur un consensus majoritaire de toutes les personnes qui, d’après la preuve existante, semblent être membres de la bande, quel que soit leur lieu de résidence? »

 

[58]           Si on applique ces principes en l’espèce, je crois que la Cour doit déterminer si la Coutume de la bande approuvée par le référendum, coutume adoptée par un référendum tenu le 25 février 2008 auprès des électeurs admissibles de Nekaneet résidant dans la réserve ainsi qu’à l’extérieur de la réserve, par lequel référendum étaient approuvées la Constitution de Nekaneet et la Loi sur la gouvernance de Nekaneet (qui ensemble forment la Coutume de la bande approuvée par le référendum), lesquelles ont remplacé toute coutume antérieure de la bande à Nekaneet concernant l’élection du chef et des membres du conseil, a obtenu le soutien de suffisamment de membres de la bande résidant ou non à Nekaneet de manière à établir l’existence d’un large consensus. En termes simples, la Cour doit décider si le nouveau mode d’élection du conseil est généralement acceptable pour la Première nation de Nekaneet compte tenu de la preuve portée à mon attention dans la présente demande.

 

[59]           La preuve dont je dispose établit que la majorité des membres de la bande de Nekaneet ont participé au référendum et qu’une majorité claire et nette a voté en faveur de la Constitution de Nekaneet et de la Loi sur la gouvernance de Nekaneet.

 

[60]           Voici les faits concrets : sur un total d’environ 267 électeurs admissibles, 136 ont participé au référendum et, de ceux‑ci, 113 (83 pour 100) ont voté en faveur des nouvelles règles.

 

[61]           Puisque les défendeurs et leurs partisans ont refusé de participer au processus référendaire et au référendum parce que cela aurait voulu dire qu’ils consentaient à quelque chose qu’ils voulaient contrecarrer, ces chiffres m’apparaissent comme un taux de participation remarquablement élevé et une approbation nette de l’adoption du nouveau régime comme coutume de la Première nation de Nekaneet.

 

[62]           Je note que, dans la décision Première nation du Lac des Mille Lacs, le juge Cullen a conclu que la participation de 86 membres sur une population de 300, une large majorité des 86 électeurs ayant voté en faveur du Code d’élection des chef et conseil, constituait un consensus suffisamment large pour faire du code une coutume de la bande.

 

[63]           Plutôt que d’exposer leur position à toute la collectivité, les défendeurs ont tenu leur propre élection en application de la coutume traditionnelle et, fait plus important, ont organisé la pétition comptant 113 signatures afin de compromettre le consensus que traduisait le référendum.

 

[64]           La difficulté pour la Cour est que les défendeurs n’ont fourni aucune preuve permettant à la Cour de mesurer la signification ou la légitimité de la pétition comme indicateur d’un consensus au sein de la bande sur les questions soumises à la Cour. Ils tentent simplement d’amoindrir la légitimité du référendum et, pour ce faire, ils soumettent cette pétition à la Cour. Compte tenu de l’ensemble du dossier, la Cour doit demeurer très sceptique vis‑à‑vis de cette tactique.

 

[65]           Si les défendeurs avaient véritablement cherché à connaître la volonté générale de la Première nation de Nekaneet sur les questions en litige, ils auraient présenté ces questions franchement à la population de Nekaneet et auraient participé au référendum ou trouvé une autre façon de permettre à la Première nation de Nekaneet de trancher ces questions pour elle‑même. Plutôt que de permettre à la collectivité d’exprimer sa volonté d’une manière juste et transparente, les défendeurs ont tenté de contrecarrer le processus référendaire afin de préserver le statu quo qui, comme le donne à penser la preuve, est plus favorable à leurs intérêts personnels. Vu ces constatations générales, la Cour ne peut accepter la pétition comme un indice de la façon dont tous ses signataires auraient voté dans un processus libre et transparent. De toute évidence, les défendeurs ont une famille et des partisans qui voteront toujours de leur côté. Toutefois, je ne crois pas que les défendeurs peuvent gagner sur tous les tableaux. Ils ne peuvent s’attaquer aux défauts du processus référendaire et s’en plaindre, puis présenter une pétition qui a été organisée et obtenue d’une manière qui n’est pas transparente selon la preuve. Les défendeurs ne peuvent pas boycotter et contrecarrer un processus référendaire visant à connaître la volonté générale à Nekaneet et ensuite invoquer une pétition qui n’est pas le résultat d’un processus juste et équitable pour soutenir leur propre légitimité dans la collectivité.

 

[66]           À mon avis, par conséquent, le référendum satisfait à première vue les critères énoncés dans la jurisprudence pour l’établissement d’un large consensus à Nekaneet en faveur du nouveau régime et de l’abandon des anciennes façons de faire. La question suivante est de savoir si le référendum était le résultat d’une élection juste et libre dans laquelle les électeurs savaient ce qu’ils faisaient lorsqu’ils ont adopté le nouveau régime comme coutume à Nekaneet.

 

Les critiques des défendeurs

 

[67]           Les défendeurs soutiennent que le référendum était entaché de vices et que les personnes qui ont voté ne comprenaient pas l’importance des changements pour lesquels elles votaient.

 

[68]           Encore une fois, cependant, les propres actions et la propre preuve des défendeurs semblent démentir l’affirmation selon laquelle les changements n’étaient pas suffisamment compris pour rendre le référendum significatif. Évidemment, les défendeurs et leurs partisans savaient précisément ce qui était en jeu et ce que les changements signifieraient. Ils le savaient si bien (ils ont obtenu des conseils juridiques) qu’ils étaient au courant qu’ils devaient boycotter et contrecarrer le processus référendaire pour avoir une chance de préserver le statu quo. Ils le savaient si bien qu’ils ont organisé une pétition en faveur, selon eux, de la façon traditionnelle d’élire le chef et les membres du conseil. Il est donc assez difficile pour la Cour d’accepter l’affirmation de base selon laquelle les défendeurs et leurs partisans savaient ce qui était en jeu et, en effet, ont signé une pétition contre les changements, mais que les personnes de Nekaneet qui ont participé au référendum ne savaient pas ce qui était en jeu. Qui plus est, je crois que d’autres éléments de preuve n’étayent pas la position des défendeurs sur cette question. La preuve des demandeurs à ce sujet donne à penser que, bien que les membres de la collectivité puissent ne pas avoir compris tous les détails de la documentation qui leur a été distribuée et de ce qui est ensuite devenu la Constitution de Nekaneet et la Loi sur la gouvernance de Nekaneet, ils étaient très certainement au courant qu’ils devaient choisir entre le statu quo dysfonctionnel qui accordait trop de place à l’intérêt personnel et un nouveau régime de gouvernance qui apporterait beaucoup plus de transparence et de responsabilité à Nekaneet d’une manière qui profiterait à toute la collectivité.

 

[69]           Le juge Rouleau fait allusion à la nécessité qu’une certaine quantité de renseignements soient donnés avant un vote sur la coutume de la bande au paragraphe 47 de la décision Première nation de Salt River no 195 (Conseil) c. Première nation de Salt River no 195, [2003] 3 C.N.L.R. 332 (C.F. 1re inst.), dans laquelle décision il affirme au paragraphe 45 que « contrairement à ce que prétendent les défendeurs, les pratiques électorales habituelles de la PNSR ne peuvent être modifiées selon les besoins du moment à une assemblée au cours de laquelle il n’était pas prévu de discuter d’une telle question puisqu’aucun avis n’avait été donné à cet effet ». Le critère consiste à savoir si la coutume de la bande a été changée par un large consensus au sein de la bande, ce qui, comme l’affirme le juge Rouleau dans Salt River, « requiert plus qu’une majorité simple. Cela exige une expression très claire du désir des membres de la bande d’être régis par de nouvelles règles. »

 

[70]           En plus du résultat du vote, le processus lié à l’élaboration et l’approbation de la Coutume de la bande approuvée par le référendum est pertinent pour établir s’il y a un « large consensus » et, à cet égard, il faut prendre note de ce qui suit, même si les défendeurs contestent certains de ces faits :

a.                   Le processus référendaire a commencé le 23 février 2007 et s’est terminé avec le référendum le 25 février 2008;

b.                  Une soixantaine de membres qui étaient présents lors de l’assemblée du 23 février 2007 ont mis en marche l’initiative du comité de gouvernance;

c.                   Des membres ont donné 34 réponses écrites où étaient nommés des candidats pour le comité de gouvernance;

d.                  Le comité de gouvernance de Nekaneet a tenu cinq réunions;

e.                   Deux questionnaires ayant obtenu 46 réponses des membres sur la Constitution de Nekaneet et 46 réponses sur la Loi sur la gouvernance de Nekaneet (initialement appelée Loi électorale de Nekaneet) révèlent que le contenu de la majorité des réponses était conforme aux éléments essentiels de la Constitution de Nekaneet et de Loi sur la gouvernance de Nekaneet en ce qui concerne la responsabilité et la transparence;

f.                    Deux assemblées de consultation des membres ont eu lieu, l’une à Regina, en Saskatchewan, et l’autre dans la réserve de Nekaneet, lors desquelles les membres ont eu l’occasion de donner verbalement leur avis;

g.                   Les ébauches de la Constitution de Nekaneet et de la Loi sur la gouvernance de Nekaneet ont été diffusées avant le référendum;

h.                   Un document d’information concernant le sujet du référendum a été diffusé avant le référendum;

i.                     Une assemblée d’information a eu lieu le 4 février 2008 pour donner la chance aux membres de la bande de Nekaneet de discuter des questions concernant la Constitution de Nekaneet et la Loi sur la gouvernance de Nekaneet;

j.                    La Constitution de Nekaneet et la Loi sur la gouvernance de Nekaneet de même que le référendum à leur sujet ont été discutés et chaudement débattus au sein de la collectivité de Nekaneet;

k.                  On a eu recours à un fonctionnaire référendaire indépendant et impartial;

l.                     Les membres de bande ne résidant pas dans la réserve ont participé au vote par la poste;

m.                 Des 267 électeurs admissibles, 136 ont participé au référendum et 83 pour 100 d’entre eux ont voté en faveur de la Coutume de la bande approuvée par le référendum.

 

[71]           Un exposé utile de ce que signifie être suffisamment informé se trouve dans la décision Bande indienne de McLeod Lake c. Chingee (1998), [1999] 1 C.N.L.R. 106 (C.F. 1re inst.). Dans cette affaire, les modalités de la coutume de la bande indienne de McLeod Lake auraient été adoptées lors d’une assemblée générale des membres de la bande convoquée avec préavis. Des élections ont par la suite été tenues conformément à ces modalités. Les défendeurs avaient soutenu que les élections étaient invalides parce que les modalités adoptées à l’assemblée ne reflétaient pas en réalité la coutume de la bande. En examinant cet argument, la juge Reed a formulé les observations suivantes aux paragraphes 18 et 19 :

18     La question à laquelle il reste à répondre est de savoir si un « large consensus » est synonyme d’une « décision prise à la majorité des voix des membres de la bande présents à une assemblée générale convoquée avec préavis ». J’estime que cela peut être le cas ou non, selon un certain nombre de facteurs. Si, par exemple, l’assemblée générale était tenue à un endroit ou à un moment faisant en sorte qu’il est difficile pour plusieurs membres d’y assister et qu’il n’y avait aucune possibilité de voter par procuration, elle pourrait ne pas satisfaire au critère du large consensus. Si l’avis de convocation ne fournissait pas suffisamment de détails sur ce qui serait proposé à cette assemblée ou qu’il n’était pas donné suffisamment à l’avance pour permettre aux gens d’avoir réellement la possibilité d’y assister, l’assemblée ne satisferait alors pas à ce critère.

 

19     Il existe également des cas où ceux qui ne votent pas indiquent par là leur volonté de se soumettre au choix de la majorité de ceux qui votent. J’estime que l’approbation de la majorité des membres adultes de la bande constitue probablement un bon indice d’un large consensus (l’âge de la majorité relevant de la bande). La question de savoir si une décision prise à la majorité des voix des membres présents à une assemblée générale démontre l’existence d’un large consensus dépend des circonstances entourant cette assemblée.

 

Les propos de la juge Reed, qui ont été cités dans un certain nombre de jugements subséquents, confirment que ce sont les circonstances qui permettent d’établir si l’information fournie était suffisante. Si les documents d’information envoyés aux membres de la bande de Nekaneet fournissaient « suffisamment de détails sur ce qui serait proposé » et que les assemblées d’information ont été tenues à un endroit et à un moment relativement commodes, avec un préavis raisonnable, on peut raisonnablement conclure que les membres étaient suffisamment informés.

 

[72]           Comme les demandeurs le soulignent, d’autres décisions sont moins explicites quant au niveau d’information requis pour un vote au sujet de la coutume de la bande. Dans la décision Bigstone, par exemple, des copies de la constitution proposée et d’autres renseignements avaient été envoyés aux membres de la bande, une assemblée où il avait été question de la constitution avait été tenue et des entrevues personnelles avec les membres de la bande avaient été menées. Bien que le juge Strayer n’ait pas précisément examiné le caractère suffisant de cette information dans son analyse, il a en fin de compte décidé que la Cour n’avait aucun motif d’intervenir en ce qui a trait à la coutume de la bande qui avait été adoptée.

 

[73]           Les demandeurs en l’espèce reconnaissent également qu’il y a eu des irrégularités dans la conduite du référendum :

a.                   Les bulletins de vote n’avaient pas été marqués d’initiales avant l’envoi des trousses de vote par la poste. Les bulletins envoyés par la poste étaient tous accompagnés de déclarations d’identité remplies et la déclaration remplie et signée ainsi que le bulletin de vote étaient placés dans une enveloppe scellée fournie dans la trousse de vote par la poste et ces enveloppes scellées étaient postées ou livrées au fonctionnaire référendaire. Lorsqu’il ouvrait chaque enveloppe scellée, le fonctionnaire référendaire confirmait l’identité de l’électeur tel qu’il se présentait dans la déclaration signée, puis apposait ses initiales le bulletin de vote et ensuite le plaçait dans l’urne. Aucune preuve n’a été produite démontrant que de telles irrégularités auraient influencé de façon appréciable le résultat;

b.                  Le fonctionnaire référendaire a permis à des membres de la bande de Nekaneet de se rendre chez les électeurs pour récupérer les enveloppes scellées contenant les déclarations remplies et signées et les bulletins de vote et a estimé qu’il s’agissait d’une méthode tout aussi acceptable que l’envoi par la poste des bulletins de vote au fonctionnaire référendaire. Parmi les membres de la bande qui sont allés récupérer des bulletins de vote, il y avait des membres du comité de gouvernance de Nekaneet. Le fonctionnaire référendaire avait le pouvoir, en vertu des règles électorales, d’établir ses propres règles de procédure pour l’administration du référendum. Aucune preuve n’a été produite révélant que cette procédure constituait une irrégularité qui aurait influencé de façon appréciable les résultats. En outre, aucune preuve n’a été produite montrant qu’un électeur s’est vu refuser le droit de voter soit en personne, soit en postant son bulletin de vote de la manière habituelle.

 

[74]           Un certain nombre d’autres incidents mineurs ont été portés à mon attention, comme l’envoi de deux trousses de vote par la poste au même électeur et l’inscription d’une personne handicapée mentalement sur la liste électorale, laquelle personne n’a pas voté. Cependant, aucune preuve n’a été présentée établissant que ces irrégularités ont influencé de façon appréciable les résultats.

 

[75]           Afin de discréditer le processus référendaire et le référendum, les défendeurs soulèvent un certain nombre d’arguments. Je les ai examinés un par un par rapport à la preuve produite. Bien qu’il soit vrai que des erreurs ont été commises et qu’il y a des divergences d’opinion et des contradictions dans la preuve, aucun de ces éléments, qu’ils soient considérés individuellement ou cumulativement, ne me convainc que les données brutes du référendum ne reflètent pas un large consensus sur ce que la Première nation de Nekaneet désire véritablement et, à mon avis, il s’agit de la question principale. Je crois que le processus ayant mené au référendum, s’il n’était pas parfait, a fourni suffisamment d’information à la Première nation de Nekaneet pour qu’elle sache ce qui était en jeu et ce pour quoi elle votait. Je crois également que le processus de vote en soi, indépendamment des erreurs qui ont été commises, a permis l’émergence d’un consensus, et ce, malgré les tactiques obstructionnistes et parfois hostiles des défendeurs, ce qui montre que la Première nation de Nekaneet préfère la transparence et la responsabilité que représentent la Constitution de Nekaneet et la Loi sur la gouvernance de Nekaneet à la situation dysfonctionnelle et partisane qui a cours à Nekaneet, selon de nombreux membres, et qui favorise certains individus et certains groupes au détriment d’autres. Il me semble que la population de Nekaneet s’est fait entendre et que le large consensus ne favorise pas les défendeurs sur ces questions de gouvernance.

 

[76]           Comme le soulignent les demandeurs, il n’est pas toujours nécessaire d’interpréter strictement les dispositions d’un code électoral et le manquement à ces dispositions n’invalide pas nécessairement le processus électoral (Brian A. Crane, Robert Mainville et Martin W. Mason, First Nations Governance Law, Markham, Ontario, LexisNexis Butterworths, 2006, à la page 200). Par conséquent, si par exemple le comité de gouvernance de Nekaneet n’a pas strictement respecté son mandat, cela n’invalide pas nécessairement le référendum.

 

[77]           En général, un vote sera invalidé à la suite d’irrégularités seulement si ces irrégularités auraient influencé de façon appréciable les résultats. Un résumé de ce principe se trouve au paragraphe 20 de la décision Ta’an Kwäch’än Council (Re), [2006] Y.J. No. 139, 2006 YKSC 62 :

[traduction]

20     Le principe général de common law veut que la volonté du peuple exprimée lors d’une élection ne soit pas annulée à moins que les irrégularités ou le manquement à la loi ou aux pratiques électorales soient tels que le résultat en aurait été touché de façon appréciable. De toute évidence, une irrégularité touche le processus électoral d’une certaine manière. À moins qu’elle ne touche de façon appréciable la validité des résultats de l’élection, les tribunaux n’annuleront pas la décision des électeurs.

 

[78]           Les demandeurs ont invoqué la décision Camsell c. Rabesca, [1987] N.W.T.R. 186 (S.C.), laquelle a par la suite été citée favorablement par la jurisprudence à titre d’exemple où un vote a été confirmé malgré des irrégularités importantes dans le processus parce qu’aucune preuve ne montrait que les irrégularités avaient influencé de façon appréciable le résultat. Dans cette affaire, les pétitionnaires cherchaient à faire annuler un plébiscite sur l’alcool, lors duquel la majorité de la collectivité avait voté en faveur de la prohibition. Le processus avait été entaché d’irrégularités, notamment un retard dans l’ouverture d’un bureau de scrutin, la manière dont les listes électorales avaient été établies (c’est‑à‑dire l’ajout ou le retrait de noms à partir de la liste électorale des élections municipales par le directeur de scrutin, qui était assisté d’un individu connaissant bien les membres de la collectivité), l’omission de fournir des interprètes au bureau de scrutin conformément aux règlements du plébiscite, un manque de clarté quant aux exigences de résidence pour la participation au vote, le manquement à l’obligation d’ouvrir un bureau de vote par anticipation, une différence entre le nombre de bulletins de vote déposés et le nombre inscrit, l’omission du directeur de scrutin de prêter serment et l’omission d’apposer ses initiales les bulletins de vote conformément aux dispositions applicables.

 

[79]           Le règlement sur le plébiscite dans Camsell prévoyait que les dispositions de la Municipal Act s’appliquaient au vote [traduction] « avec les modifications nécessaires en les circonstances » (paragraphe 6). Le juge Marshall a noté que deux des irrégularités résultaient de telles modifications appliquées par le directeur de scrutin en raison du peu de temps disponible pour préparer le vote. Il a ensuite examiné les précédents applicables et a fait remarquer que des élections [traduction] « ne devraient pas être annulées trop facilement » et que des irrégularités se produiront presque toujours d’une façon ou d’une autre lors d’élections (paragraphe 52). Il a ensuite résumé le droit de la manière suivante au paragraphe 55 :

[traduction]

À mon avis, la règle, après examen des précédents et sous réserve de modifications de la Loi, peut être résumée de la façon suivante : le vote n’est considéré comme entaché de vices seulement s’il est montré que les irrégularités étaient telles que, selon la prépondérance de la preuve, le résultat des élections aurait pu être différent, deuxièmement, que le vote ne pouvait pas être considéré comme un vote, c’est‑à‑dire, qu’il n’a pas été mené en général conformément aux pratiques électorales issues des lois actuelles.

 

Le juge Marshall a conclu que les élections dans Camsell ont été menées en général conformément aux principes applicables pour de telles élections. Il a également conclu que les pétitionnaires n’avaient pas établi selon la prépondérance de la preuve que, en raison des irrégularités qui s’étaient produites, il aurait pu y avoir un résultat différent. Son raisonnement concernant l’absence d’initiale sur les bulletins de vote, particulièrement pertinent en l’espèce, était le suivant, au paragraphe 27 :

[traduction]

Les pétitionnaires ont présenté une preuve révélant qu’aucun des bulletins de vote n’avait été marqué d’initiales, comme l’exigeait l’alinéa 51(j) de la Municipal Act, et par conséquent ils soutiennent que, selon une interprétation stricte de la Loi, aucun des bulletins de vote ne devrait compter. Le but du processus est de s’assurer que les bulletins de vote sont légitimes. L’exigence, à mon avis, est indicative, et non obligatoire. Il existe de nombreux précédents pour cette interprétation [Note de bas de page : Voir Blackburn c. Moss (1986), 12 O.A.C. 387 (Div. Ct.), et Morgan c. Simpson, [1974] 3 All E.R. 722 à la page 725 (C.A.)]. Encore une fois, à cet égard, il n’y avait aucune preuve révélant que la pratique a mené à une irrégularité dans le vote ou la compilation du vote qui aurait pu changer le résultat.

 

Le juge Marshall a ajouté au paragraphe 63 que [traduction] « pour ce qui est de l’omission de marquer les bulletins de vote d’initiales, il n’y a pas la moindre preuve que cela a influencé le résultat d’une quelconque façon ». Le juge Marshall a conclu que, puisqu’il n’y avait aucune preuve que les irrégularités avaient influencé le résultat du vote, la pétition devait être rejetée et le résultat de l’élection maintenu.

 

[80]           Comme le soulignent les demandeurs, cette dernière considération a servi de fondement à un certain nombre de décisions confirmant la validité d’élections. On peut le constater par exemple dans la décision Bande indienne de Samson c. Cutknife (2003), [2004] 1 C.N.L.R. 330 (C.F. 1re inst.). Dans cette affaire, le superviseur des élections visant à élire les conseillers avait accordé aux candidats une prorogation de 24 heures pour qu’ils remettent les photographies authentifiées exigées et, pour un des candidats, pour remettre les honoraires électoraux requis. Ces décisions ont servi de fondement à la contestation des élections dans un appel auprès de la Commission d’appel en matière électorale, laquelle a conclu que le superviseur des élections avait accordé les prorogations sans en avoir le pouvoir et a ordonné de nouvelles élections. Dans une demande de contrôle judiciaire, le juge Martineau a annulé la décision de la Commission d’appel. Il a fait remarquer que le superviseur des élections disposait d’un vaste pouvoir général concernant l’administration et le processus des élections, ce qui comprenait le pouvoir de prendre des décisions en matière de procédure. Il a conclu que l’octroi de prorogations faisait partie des pouvoirs du superviseur des élections et qu’agir ainsi était conforme, et non contraire, à l’objectif de la Loi électorale.

 

[81]           Des conclusions semblables ont été tirées dans la décision Simon c. Nation crie de Samson (2001), [2002] 1 C.N.L.R. 343 (C.F. 1re inst.), dans laquelle le superviseur des élections avait retiré le nom de la demanderesse de la liste des candidats au conseil. La demanderesse a soutenu que le superviseur des élections avait outrepassé sa compétence en la disqualifiant et en retirant son nom de la liste des candidats; le superviseur des élections a soutenu que son vaste pouvoir sur la procédure lui permettait d’agir ainsi. Le juge Blais a rejeté l’argument de la demanderesse selon lequel toutes les dispositions des lois électorales de la bande devaient être interprétées strictement et a conclu que l’interprétation du superviseur des élections était « celle qui est la plus compatible avec l’objet de la Loi électorale et avec l’intention de ses rédacteurs » (paragraphe 32). Il a également fait mention des ressources qui seraient gaspillées si d’autres élections devaient être tenues.

 

[82]           De manière semblable, en l’espèce, M. Walter Wenaas avait l’autorité en vertu du règlement électoral de prendre des mesures relativement à la procédure. Il avait le droit de prendre les mesures qu’il a prises dans l’administration du référendum. Cet argument est particulièrement convaincant en ce qui concerne les mesures qu’il a prises dans le but de faciliter le processus électoral, comme permettre qu’on aille chercher les bulletins de vote de membres de la bande plutôt que d’obliger ces derniers à les renvoyer par la poste. Cette mesure était « compatible avec l’objet » du règlement du référendum et n’influence pas la validité du vote.

 

[83]           Je conviens avec les demandeurs que, pour qu’un vote soit invalidé, les irrégularités doivent être beaucoup plus importantes que celles qui se sont en fait produites en l’espèce. Dans la décision Keefe c. Pukanich (2007), [2008] 4 W.W.R. 112, 2007 NWTSC 90, par exemple, le juge Vertes n’aurait pas annulé les élections à la suite des nombreuses irrégularités si l’une d’entre elles n’avait pas été équivalente à une abdication par le directeur du scrutin de ses devoirs, ce qui a fait en sorte que l’élection n’était plus conforme aux exigences de la Loi.

 

[84]           La décision Première nation du Lac des Mille Lacs c. Hogan (2000), 198 F.T.R. 48 (1re inst.) est un autre précédent dans lequel une élection a été annulée, mais encore une fois, il s’agissait d’irrégularités plus graves que les questions de procédure en l’espèce. En concluant que le plébiscite des dirigeants et l’élection étaient nuls et sans effet, le juge Gibson a affirmé ce qui suit au paragraphe 21 :

Aucune de ces caractéristiques particulières du Code d’élection n’a été respectée dans le processus préalable à la révision du leadership et à l’élection, y compris lors des prétendues révision et élection tenues le 29 avril 2000. Aucune preuve n’a été présentée établissant qu’un avis des événements prévus pour le 29 avril avait été donné à l’ensemble des membres de la Première nation. De même, je n’ai reçu aucune preuve établissant que les membres de la Première nation qui seraient vraisemblablement dans l’impossibilité d’assister à la réunion à Thunder Bay bénéficieraient de moyens de communication ou de moyens de voter qui leur permettraient d’y participer vraiment.

 

 

En d’autres mots, les élections dans cette affaire ont été annulées non pas simplement en raison d’irrégularités procédurales, mais parce que le non‑respect du Code électoral avait empêché certains membres de voter. À mon avis, les mesures prises par M. Walter Wenaas en l’espèce ne semblent avoir eu l’effet de priver des membres de la bande de Nekaneet de leur droit de vote. Au contraire, il semble qu’il tentait simplement, comme le dit le juge Vertes, de [traduction] « faciliter l’exercice du droit de vote ».

 

Conclusions

 

[85]           En règle générale, la présente demande témoigne d’une lutte personnelle et idéologique à Nekaneet sur les questions de la gouvernance. Derrière les questions juridiques se cachent des tensions communes sur des choses comme la coutume et la responsabilité, les intérêts des personnes résidant dans la réserve et hors de la réserve, la spiritualité traditionnelle et le christianisme, l’intérêt personnel et le bien commun. Une procédure sommaire comme celle en l’espèce ne peut traiter en détail de ces questions névralgiques culturelles et politiques extrêmement complexes. En fin de compte, elles se résument toutes à la question suivante : à quel consensus la Première nation de Nekaneet veut‑elle en venir? Il est impossible de parvenir à un consensus absolu sur des questions aussi délicates dans une si petite collectivité. La polarisation a mené à un gouvernement dysfonctionnel et ce gouvernement dysfonctionnel a causé des problèmes pour les membres de la Première nation et a commencé à priver la collectivité des ressources dont elle a besoin pour la prestation de services auprès de la population de Nekaneet. Il est impossible de plaire à tout le monde. La seule solution est d’établir s’il y a un consensus suffisant en faveur du changement.

 

[86]           Je ne crois pas que mes conclusions empêcheront les défendeurs de défendre ce qu’ils considèrent comme étant les intérêts traditionnels. La Constitution de Nekaneet et la Loi sur la gouvernance de Nekaneet comportent des dispositions de modification claires. Si les défendeurs représentent une faction traditionnelle suffisamment importante dans la collectivité, ils pourront invoquer les dispositions de modification et tenter de rallier le soutien de la collectivité en faveur de leur façon de faire. Cependant, la nouvelle constitution rend bel et bien nécessaire le soutien de la collectivité et fait de la gouvernance une question qui concerne la Première nation de Nekaneet dans son ensemble, de manière à ce que le gouvernement ne puisse pas être contrôlé par un groupe d’intérêt accroché à ses privilèges, qu’il provienne d’un côté ou de l’autre du fossé culturel et politique.

 

[87]           Je me prononce en l’espèce avec une certaine réticence parce que, en réalité, je me prononce sur la volonté collective de la Première nation de Nekaneet, telle qu’elle s’est exprimée dans un vote d’où est émergé un large consensus. Cela me semble pour le moins présomptueux. À mon sens, la volonté de la population de Nekaneet est une question qui concerne la Première nation de Nekaneet. Cependant, les avocats des deux parties m’ont fait savoir que la présente demande est la seule façon pratique de résoudre en temps opportun l’impasse à Nekaneet sur la question de la gouvernance. J’ai simplement examiné les documents portés à mon attention et j’ai tenté d’exprimer ce que, d’après moi, ces documents révélaient sur la volonté de la population de Nekaneet quant à la gouvernance. Je suis bien au fait que les demandes devant la Cour ne révèlent pas tout, particulièrement dans le cas des procédures sommaires comme la présente demande de contrôle judiciaire. Par conséquent, mes conclusions ne plairont pas à tout le monde à Nekaneet. Toutefois, compte tenu de la méthode de résolution choisie en l’espèce, j’ai fait de mon mieux pour la Première nation de Nekaneet et j’espère que ma décision apportera un certain répit à la division qui a handicapé la collectivité.

 


 

JUGEMENT

 

LA COUR STATUE :

 

1.                  La coutume de la bande de Nekaneet est composée de la Constitution de Nekaneet et de la Loi sur la gouvernance de Nekaneet telles que les électeurs admissibles de Nekaneet les ont adoptées lors du référendum tenu le 25 février 2008;

2.                  Les demandeurs élus aux postes de chef et de conseiller de Nekaneet en vertu de la Constitution de Nekaneet et de la Loi sur la gouvernance de Nekaneet lors des élections tenues à Nekaneet le 28 mars 2008 sont le chef et les conseillers de Nekaneet;

3.                  Un bref de quo warranto est accordé selon lequel les défendeurs n’ont pas le droit d’occuper les postes de chef ou de conseiller, selon le cas, de Nekaneet;

4.                  Les demandeurs se voient adjuger les dépens en l’espèce, lesquels seront payés solidairement par les défendeurs.

 

 

 

« James Russell »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Elisabeth Ross, traductrice

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                    T‑999‑08

 

INTITULÉ :                                                   LA CHEF PAHTAYKEN, BRANDY BUFFALO CALF, ELVIE STONECHILD et CHRISTINE MOSQUITO

                                                                        c.

LARRY OAKES, JORDIE FOURHORNS,

RUSSELL BUFFALO CALF, LINDA OAKES

                                                                        et GLEN OAKES

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             Calgary (Alberta)

 

DATE DE L’AUDIENCE:                            Le 14 janvier 2009

 

MOTIFS DU JUGEMENT:                         Le juge Russell

 

DATE DES MOTIFS :                                  Le 10 février 2009

 

 

COMPARUTIONS :

 

John Richard Lojek

 

POUR LES DEMANDEURS

Thomas J. Waller, c.r.

 

POUR LES DÉFENDEURS

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

John Richard Lojek

Avocat

Calgary (Alberta)

 

POUR LES DEMANDEURS

Olive Waller Zinkhan & Waller LLP

Avocats

Regina (Saskatchewan)

POUR LES DÉFENDEURS

 

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