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Date : 20090127

Dossier : IMM-5039-08

Référence : 2009 CF 84

Ottawa (Ontario), le 27 janvier 2009

En présence de monsieur le juge Shore

 

 

ENTRE :

AISSATOU DIALLO

RAMATOULAYE KABA

DJIBRIL KABA

demandeurs

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET

DE L’IMMIGRATION ET LE MINISTRE DE LA

SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

défendeurs

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

I.  Introduction

[1]               Dans la présente affaire, la preuve soumise à l’appui de la demande d’examen des risques avant renvoi (l’ERAR) avait déjà été examinée par la Section de la protection des réfugiés (la SPR) ou il était raisonnable de s’attendre à ce que, dans les circonstances, elle ait été présentée à la SPR dans le cadre de la demande d’asile.

 

[2]               La Cour a déjà conclu que cette preuve n’est pas « nouvelle » et qu’elle doit être rejetée même si elle aurait contredit une conclusion de la SPR quant à la crédibilité :

[17]      L’agent a rejeté bon nombre des éléments de preuve déposés parce qu’il ne s’agissait pas de nouveaux éléments de preuve. Les demandeurs soutiennent qu’une bonne partie de la preuve rejetée contredit la conclusion de la SPR quant à leur crédibilité – une conclusion de fait.  Selon les demandeurs, c’est l’un des motifs pour lesquels les éléments doivent être considérés comme nouveaux, comme il est écrit dans l’arrêt Raza, précité, au paragraphe 13(3)c).

 

[18]      À mon sens, les demandeurs appliquent mal l’arrêt de la Cour d’appel dans Raza. Selon l’interprétation que je fais de la décision, et en particulier du paragraphe 13, l’élément de preuve n’est pas nouveau dès qu’on peut répondre par l’affirmative à l’une des questions posées. Comme il est écrit au paragraphe 15 de l’arrêt Raza, les preuves doivent être prises en considération « à moins qu’elles ne soient exclues pour l’un des motifs énoncés au paragraphe [13] ci-dessus ». Par conséquent, si les nouveaux éléments de preuve avaient pu être présentés à l’audience devant la SPR, alors l’alinéa 113a) exige que ces éléments soient rejetés, même s’il contredisent une conclusion de fait tirée par la SPR. Ce principe est soutenu par le paragraphe 13(5)a) de l’arrêt Raza.

 

(Mooketsi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 1401)

 

[3]               Dans l’arrêt Raza c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CAF 385, 162 A.C.W.S. (3d) 1013, la Cour d’appel fédérale apporte des précisions sur la notion de « preuve nouvelle » susceptible d’être prise en compte dans une demande d’ERAR, et elle ajoute que l’agent d’ERAR doit prendre acte de la décision de la SPR de rejeter la demande d’asile « à moins que des preuves nouvelles soient survenues depuis le rejet, qui auraient pu conduire la SPR à statuer autrement si elle en avait eu connaissance ».

 

[4]               Compte tenu de ce qui précède, l’agent d’ERAR n’a pas commis d’erreur susceptible de contrôle en rejetant la demande d’ERAR des demandeurs au motif qu’aucune preuve nouvelle n’avait été produite, il n’était pas nécessaire de tenir une audience et les motifs de l’agent d’ERAR sont suffisants dans les circonstances de la présente affaire.

 

II.  Faits

[5]               La demanderesse principale, Mme Aissatou Diallo et sa fille adulte, Mme Ramatoulaye Kaba, sont citoyennes de la Guinée tandis que l’enfant mineur, Djibril Kaba, est citoyen des États-Unis.

 

[6]               Le 4 août 2005, les demandeurs sont entrés au Canada en provenance des États-Unis, où ils vivaient depuis 1991, et ils ont demandé l’asile.

 

[7]               Les demandeurs ont fondé leur demande d’asile en alléguant que la demanderesse principale est lesbienne et que sa fille adulte serait contrainte d’accepter un mariage arrangé avec un homme âgé de 60 ans.

 

[8]               Le 25 octobre 2007, la SPR de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission) a conclu que les demandeurs n’étaient pas des réfugiés au sens de la Convention ni des personnes à protéger compte tenu du manque général de crédibilité de leur demande.

 

[9]               Le 25 mars 2008, la Cour fédérale a refusé la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire des demandeurs à l’encontre de la décision de la SPR de rejeter leur demande d’asile.

 

[10]           Le 25 janvier 2008, les demandeurs ont présenté une demande d’ERAR fondée sur les mêmes motifs que ceux invoqués dans leur demande d’asile.

 

[11]           L’agent d’ERAR a rejeté la demande d’asile des demandeurs puisqu’aucune preuve nouvelle n’a été soumise pour l’étayer. Les documents joints à la demande d’ERAR des demandeurs avaient déjà été examinés par la SPR dans le cadre de leur demande d’asile, et les lettres et l’affidavit ensuite fournis, postérieurement à la décision de la SPR, ne satisfaisaient pas à la définition de preuve nouvelle puisqu’ils ne révélaient aucun fait nouveau et qu’il était raisonnable de s’attendre à ce qu’ils aient été soumis à la SPR à l’appui de la demande d’asile.

 

[12]           L’agent d’ERAR a également examiné la preuve documentaire sur la situation en Guinée et constaté que des progrès avaient été faits dans le domaine des droits de la personne, mais il a reconnu que certains problèmes persistaient dans ce même domaine. Il a conclu que les demandeurs n’avaient pas réussi à établir qu’ils craignaient avec raison d’être persécutés ou d’être soumis à la torture, à une menace à leur vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités advenant leur renvoi dans ce pays.

 

[13]           Le 14 novembre 2008, les demandeurs ont déposé une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire à l’encontre de la décision défavorable rendue quant à l’ERAR. Le présente requête visant l’obtention d’un sursis à l’exécution de la mesure de renvoi est déposée accessoirement à cette demande.

 

III. Question en litige

[14]           Les demandeurs ont-ils satisfait au critère à trois volets permettant de justifier l’obtention d’un sursis à l’exécution de la mesure de renvoi, étant donné qu’il n’y a pas de question importante à juger, qu’il y a absence de preuve d’un préjudice irréparable et que la prépondérance des inconvénients favorise le ministre?

 

IV.  Analyse

Le critère de l’obtention d’un sursis d’exécution

[15]           La Cour suprême du Canada a formulé un critère à trois volets en vue d’établir si les injonctions interlocutoires devraient être accordées en attendant la décision sur le bien-fondé d’une affaire, à savoir, (i) s’il existe une question importante à juger; (ii) si la partie qui cherche à obtenir l’injonction interlocutoire subirait, si elle n’était pas accordée, un préjudice irréparable; et (iii) d’après la prépondérance des probabilités, déterminer laquelle des deux parties subira le plus grand préjudice selon que l’on accorde ou refuse une injonction interlocutoire en attendant une décision sur le fond. Les demandeurs doivent satisfaire aux trois volets du critère avant que la Cour puisse accorder une suspension de la procédure (Toth c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1988), 86 N.R. 302 11 A.C.W.S. (3d) 440 (C.A.F.); RJR-MacDonald Inc. c. Canada (Procureur général), [1994] 1 R.C.S. 311, 46 A.C.W.S. (3d) 40).

 

(i) Question importante

[16]           Les demandeurs allèguent que l’agent d’ERAR a commis une erreur en refusant de leur accorder une audience, en tirant des conclusions déraisonnables et en ne motivant pas suffisamment sa décision.

 

[17]           L’agent d’ERAR a examiné la décision de la SPR, la demande d’ERAR des demandeurs et les preuves « nouvelles » fournies par les demandeurs en sus de la preuve documentaire pertinente. L’agent d’ERAR a conclu qu’il n’y avait pas de preuve « nouvelle » comme le prescrit l’alinéa 113a) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la LIPR).

 

[18]           L’alinéa 113a) de la LIPR énonce que, pour l’audition d’une demande d’ERAR, un demandeur d’asile débouté ne peut présenter que des éléments de preuve survenus depuis le rejet ou qui n’étaient alors pas normalement accessibles ou, s’ils l’étaient, qu’il n’était pas raisonnable, dans les circonstances, de s’attendre à ce qu’il les ait présentés au moment du rejet :

113.   Il est disposé de la demande comme il suit :

 

a)   le demandeur d’asile débouté ne peut présenter que des éléments de preuve survenus depuis le rejet ou qui n’étaient alors pas normalement accessibles ou, s’ils l’étaient, qu’il n’était pas raisonnable, dans les circonstances, de s’attendre à ce qu’il les ait présentés au moment du rejet;

113.    Consideration of an application for protection shall be as follows:

(a)   an applicant whose claim to refugee protection has been rejected may present only new evidence that arose after the rejection or was not reasonably available, or that the applicant could not reasonably have been expected in the circumstances to have presented, at the time of the rejection;

[19]           La tenue d’une audience est requise si les preuves nouvelles dont il est question à l’alinéa 113a) de la LIPR soulèvent une question importante quant à la crédibilité du demandeur, si elles sont importantes pour la prise de la décision et si elles justifieraient que soit accordée la protection :

167. Pour l’application de l’alinéa 113b) de la Loi, les facteurs ci-après servent à décider si la tenue d’une audience est requise :

 

a)  l’existence d’éléments de preuve relatifs aux éléments mentionnés aux articles 96 et 97 de la Loi qui soulèvent une question importante en ce qui concerne la crédibilité du demandeur;

 

b)  l’importance de ces éléments de preuve pour la prise de la décision relative à la demande de protection;

 

c)  la question de savoir si ces éléments de preuve, à supposer qu’ils soient admis, justifieraient que soit accordée la protection

167. For the purpose of determining whether a hearing is required under paragraph 113(b) of the Act, the factors are the following:

 

(a)  whether there is evidence that raises a serious issue of the applicant's credibility and is related to the factors set out in sections 96 and 97 of the Act;

 

 

(b)  whether the evidence is central to the decision with respect to the application for protection; and

 

(c)  whether the evidence, if accepted, would justify allowing the application for protection.

 

 

[20]           Étant donné que l’agent d’ERAR a conclu qu’il n’y avait pas de preuve qui satisfaisait à la définition de preuve « nouvelle », les critère prévus par la loi relatifs à la tenue d’une audience dans le cadre d’une demande d’ERAR n’ont pas été remplis et, par conséquent, il n’y avait pas d’obligation de tenir une audience dans les circonstances de la présente affaire.

 

[21]           Dans l’arrêt Raza, précité, la Cour d’appel fédérale apporte des précisions sur la notion de « preuve nouvelle » susceptible d’être prise en compte dans une demande d’ERAR, et elle ajoute que l’agent d’ERAR doit prendre acte de la décision de la SPR de rejeter la demande d’asile « à moins que des preuves nouvelles soient survenues depuis le rejet, qui auraient pu conduire la SPR à statuer autrement si elle en avait eu connaissance ».

 

[22]           Dans la présente affaire, les éléments de preuve présentés à l’appui de la demande d’ERAR des demandeurs avaient déjà été examinés par la SPR ou il était raisonnable de s’attendre à ce que, dans les circonstances, ils aient été présentés à la SPR dans le cadre de la demande d’asile.

 

[23]           La Cour a déjà conclu que cette preuve n’est pas « nouvelle » et qu’elle doit être rejetée même si elle aurait contredit une conclusion de la SPR quant à la crédibilité :

[17]      L’agent a rejeté bon nombre des éléments de preuve déposés parce qu’il ne s’agissait pas de nouveaux éléments de preuve. Les demandeurs soutiennent qu’une bonne partie de la preuve rejetée contredit la conclusion de la SPR quant à leur crédibilité – une conclusion de fait.  Selon les demandeurs, c’est l’un des motifs pour lesquels les éléments doivent être considérés comme nouveaux, comme il est écrit dans l’arrêt Raza, précité, au paragraphe 13(3)c).

 

[18]      À mon sens, les demandeurs appliquent mal l’arrêt de la Cour d’appel dans Raza. Selon l’interprétation que je fais de la décision, et en particulier du paragraphe 13, l’élément de preuve n’est pas nouveau dès qu’on peut répondre par l’affirmative à l’une des questions posées. Comme il est écrit au paragraphe 15 de l’arrêt Raza, les preuves doivent être prises en considération « à moins qu’elles ne soient exclues pour l’un des motifs énoncés au paragraphe [13] ci-dessus ». Par conséquent, si les nouveaux éléments de preuve avaient pu être présentés à l’audience devant la SPR, alors l’alinéa 113a) exige que ces éléments soient rejetés, même s’il contredisent une conclusion de fait tirée par la SPR. Ce principe est soutenu par le paragraphe 13(5)a) de l’arrêt Raza.

 

(Mooketsi, précitée)

 

[24]           Compte tenu de ce qui précède, l’agent d’ERAR n’a pas commis d’erreur susceptible de contrôle en rejetant la demande d’ERAR des demandeurs au motif qu’aucune preuve nouvelle n’avait été produite, il n’était pas nécessaire de tenir une audience et les motifs de l’agent d’ERAR sont suffisants dans les circonstances de la présente affaire.

 

(ii) Préjudice irréparable

[25]           Les demandeurs n’ont pas satisfait au deuxième élément du critère à trois volets, à savoir qu’il faut établir l’existence d’un préjudice irréparable.

 

[26]           La Cour a jugé que le critère du préjudice irréparable est un critère sévère qui oblige à démontrer l’existence d’une menace sérieuse à la vie ou à la sécurité du demandeur. Le risque non corroboré que les demandeurs ont invoqué ne répond pas à ce critère (Frankowski c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2000), 98 A.C.W.S. (3d) 641, [2000] A.C.F. no 935 (QL), au paragraphe 7).

 

[27]           L’allégation d’un préjudice irréparable ne doit pas être une simple hypothèse ni être fondée sur une série de possibilités. En fait, la Cour doit être convaincue que le préjudice irréparable surviendra si le sursis n’est pas accordé (Atakora c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1993), 68 F.T.R. 122, 42 A.C.W.S. (3d) 486 (Sect. 1re inst. C.F.), au paragraphe 11).

 

[28]           La seule exigence pour le moment est que les demandeurs retournent aux États-Unis. Les demandeurs n’ont invoqué aucun risque aux États-Unis. Le préjudice irréparable doit être évalué en fonction du pays vers lequel le ministre se propose de renvoyer une personne. Il n’y a pas de préjudice irréparable en l’espèce, car les demandeurs sont renvoyés aux États-Unis (Radji c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 100, 308 F.T.R. 175, aux paragraphes 41 et 42).

 

[29]           La Cour d’appel fédérale a conclu que les institutions américaines jouissent d’un système de freins et de contrepoids, d’un appareil judiciaire indépendant et de protections constitutionnelles assurant un processus équitable. L’engagement des demandeurs dans le système américain d’immigration ne causerait aucun préjudice irréparable. Les demandeurs auront accès au processus de renvoi du pays et à tout autre recours applicable en matière d’immigration (Hinzman c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CAF 17, 157 A.C.W.S. (3d) 153, au paragraphe 46; Mughal c. Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2007 CF 970, 160 A.C.W.S. (3d) 842, au paragraphe 16; Lakha c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 1204, [2008] A.C.F. n1633 (QL); Qureshi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 FC 97, 155 A.C.W.S (3d) 910, aux paragraphes 1 et 22; Hisseine c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 388, 138 A.C.W.S. (3d) 144, au paragraphe 8; Joao c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 880, 140 A.C.W.S. 93d) 533, au paragraphe 10; Mikhailov c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2000) 191 F.T.R. 1, 97 A.C.W.S. (3d) 727, aux paragraphes 11 et 12 (Sect. 1re inst.); Akyol c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CF 931, 124 A.C.W.S. (3d) 1119, au paragraphe 10).

 

[30]           En outre, la jurisprudence de la Cour a confirmé à maintes reprises que le fait pour un demandeur d’être renvoyé vers les États-Unis où il pourrait être éventuellement renvoyé dans son pays d’origine ne constitue pas un préjudice irréparable (Haddad c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CFPI 405 124 A.C.W.S. (3d) 336 (T.D.), au paragraphe 10; Rahim c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2001 CFPI 130, 103 A.C.W.S. (3d) 789 (Sect. 1re inst.), au paragraphe 9; Anand c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2001 CFPI 1283, 110 A.C.W.S. (3d) 340 (Sect. 1re inst.), au paragraphe 8; Nabut c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2001 CFPI 1392, 110 A.C.W.S. (3d) 1101 (Sect. 1re inst.); Aquila c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2000) 94 A.C.W.S. (3d) 960, [2000] A.C.F. no 36 (Sect. 1re inst.) (QL), au paragraphe 15; Akyol, précité au paragraphe 7; Chen c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 464, 205 F.T.R. 285).

 

[31]           De toute façon, même si les demandeurs étaient renvoyés en Guinée par les autorités américaines, le risque que craignent les demandeurs dans ce pays a déjà été évalué par la SPR, (autorisation refusée par la Cour) et par l’agent d’ERAR. Les allégations de risque sont essentiellement les mêmes que celles examinées antérieurement.

 

[32]           Ni la SPR ni l’agent d’ERAR qui a rendu la décision d’ERAR ne s’est dit convaincu que les demandeurs seraient personnellement exposés à un risque. L’autorisation de présenter une demande de contrôle judiciaire de la décision de la SPR a été refusée. Par conséquent, l’existence d’un préjudice irréparable n’a pas été démontrée au moyen des allégations de risque personnel invoquées. Les risques allégués par les demandeurs, qui ont déjà été évalués, ne peuvent pas servir de fondement à un argument de préjudice irréparable (Salman c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2001 CFPI 507, 106 A.C.W.S. (3d) 121, au paragraphe 6; Daniel c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 392, 156 A.C.W.S. (3d) 1144, au paragraphe 27).

 

[33]           La Cour a à maintes reprises conclu qu’une allégation de risque rejetée par la SPR et un agent d’ERAR ne peut servir à étayer une allégation de préjudice irréparable dans le cadre d’une demande de sursis (Joao, précitée au paragraphe 11; Akyol, précitée).

 

[34]           En outre, l’interruption des études ne constitue pas en soi un préjudice irréparable. Comme l’a déclaré le juge Marc Nadon :  « Quitter l’école avant la fin de l’année scolaire leur causera sans aucun doute des inconvénients et les obligera presque certainement à reprendre cette année scolaire. Toutefois, cela ne constitue pas un préjudice irréparable ». (Mahadeo c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1999) 166 F.T.R. 315, 86 A.C.W.S. (3d) 773 (Sect. 1re inst.), au paragraphe 6; Strachan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1998), 157 F.T.R. 267, 84 A.C.W.S. (3d) 545 (Sect. 1re inst.), au paragraphe 24).

 

[35]           Par conséquent, les demandeurs n’ont pas réussi à établir l’existence d’un préjudice irréparable advenant leur renvoi aux États-Unis.

 

 

(iii) Prépondérance des inconvénients

[36]           Les demandeurs n’ont pas satisfait au troisième élément du critère à trois volets, dans la mesure où la prépondérance des inconvénients favorise le ministre.

 

[37]           En plus, en ce qui concerne la procédure de détermination du risque, comme l’a écrit la juge Donna McGillis dans Sinnappu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1997] 2 C.F. 791, 126 F.T.R. 29 (Sect. 1re inst.) : « Il faut reconnaître qu’à un certain point du système, il doit y avoir une décision définitive. »

 

[38]           Lorsque le demandeur a eu l’avantage d’obtenir un examen de sa demande d’asile et un examen des risques avant renvoi dans des affaires similaires, la Cour a conclu que la prépondérance des inconvénients favorise le ministre (Ayub c. Canada (Solliciteur général), 2006 CF 147, 145 A.C.W.S. (3d) 1122, au paragraphe 6; Chen c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 1424, 134 A.C.W.S. (3d) 681; Park Lee c. M.C.I. (IMM-1122-05, IMM‑1182-05), 28 février 2005, par la juge Judith Snider).

 

[39]           Les inconvénients que pourraient subir les demandeurs par suite de leur renvoi du Canada ne l’emportent pas sur l’intérêt public que le ministre cherche à préserver aux fins de l’application de la LIPR, en particulier son intérêt à exécuter les mesures d’expulsion dès que les circonstances le permettent.

 

[40]           Il n’y a pas de disposition législative en ce qui concerne le sursis en attendant l’examen d’une décision relative à l’ERAR. Cela montre que le législateur a voulu que les demandeurs dont l’ERAR a été refusé puissent être renvoyés avant qu’il ne soit statué sur leur demande de contrôle judiciaire, ce qui concorde avec l’obligation du ministre d’exécuter les mesures de renvoi dès que les circonstances le permettent (Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227, articles 231 et 232; Golubyev c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 394, 156 A.C.W.S. (3d) 1147).


 

JUGEMENT

LA COUR ORDONNE que la requête des demandeurs en vue d’obtenir un sursis à leur renvoi soit rejetée.

 

 

« Michel M.J. Shore »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Caroline Tardif, LL.B., B.A. Trad.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-5039-08

 

INTITULÉ :                                       AISSATOU DIALLO

                                                            RAMATOULAYE KABA

                                                            DJIBRIL KABA

                                                            c.

                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                            ET DE L’IMMIGRATION ET

                                                            LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 26 janvier 2009 (par téléconférence)

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              Le juge Shore

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 27 janvier 2009

 

 

COMPARUTIONS :

 

Raoul Boulakia

 

POUR LES DEMANDEURS

Ian Hicks

 

                          POUR LES DÉFENDEURS

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Raoul Boulakia

Avocat

Toronto (Ontario)

 

POUR LES DEMANDEURS

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

                           POUR LES DÉFENDEURS

 

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