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Cour fédérale

 

Federal Court

 

Date : 20081121

Dossier : T-290-08

Référence : 2008 CF 1306

Ottawa (Ontario), le 21 novembre 2008

En présence de monsieur le juge Mandamin

 

 

ENTRE :

STEPHEN ANTHONY EDELL

demandeur

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE (Agence du revenu du Canada),

LE SURINTENDANT DES FAILLITES

et RISMAN & ZYSMAN INC.

défendeurs

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               La présente instance a été intentée par le demandeur, Stephen Edell, contre l’Agence du revenu du Canada (l’ARC), le surintendant des faillites (le surintendant) et Risman & Zysman (le syndic) en vue de, notamment, solliciter une ordonnance enjoignant à l’ARC d’accepter la proposition qu’il a soumise en vertu des dispositions de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité, L.R.C. 1985, ch. B-3 (la Loi), prononçant une suspension de la cession présumée au sens de l’article 57 de la Loi et demandant l’octroi de dommages‑intérêts. 

 

[2]               Le demandeur prétend que l’ARC a agi de façon malicieuse sans se soucier des pratiques commerciales raisonnables, de la recommandation du syndic et de ses fonctions à titre d’organisme public. Il prétend qu’il a subi un préjudice et continuera de subir un préjudice en raison du comportement illégal de l’ARC.

 

[3]               Le demandeur a également désigné le surintendant et le syndic comme défendeurs afin qu’ils soient avisés des procédures et afin qu’ils soient liés par les ordonnances de la Cour.

 

[4]               L’ARC et le surintendant ont déposé les 2 et 3 juin 2008, respectivement, des requêtes en radiation de la déclaration du demandeur parce qu’elle ne révèle aucune cause d’action raisonnable. 

 

[5]               Le demandeur a également déposé le 20 juin 2008 une requête en vue d’obtenir une suspension provisoire de la cession présumée en attendant qu’une décision finale soit rendue sur le fond quant à la présente action et afin de demander à la Cour des directives concernant ses obligations de paiement au cours de l’action.

 

La question en litige

[6]               Les principales questions qui doivent être tranchées dans les trois requêtes sont les suivantes :   

a.      Est-il clair et manifeste que la déclaration du demandeur ne révèle aucune cause d’action raisonnable? 

b.   Une suspension de la cession présumée prévue à l’article 57 de la Loi devrait‑elle être ordonnée par la Cour?

 

L’historique

[7]               Le demandeur doit à l’ARC des montants au titre de l’impôt sur le revenu (y compris des intérêts et des pénalités) et des montants au titre de la taxe sur les biens et les services. Le 24 janvier 2008, le demandeur a fait une proposition officielle (la proposition) en vertu de l’article 50 de la Loi et a mentionné que l’ARC était son unique créancier. 

 

[8]               Le demandeur a proposé de régler sa dette envers l’ARC par le versement d’un montant de 75 000 $ échelonné sur quatre ans; un montant moins élevé que le montant total dû à l’ARC. Le demandeur a formulé sa proposition avec l’aide du syndic qui a recommandé que l’ARC accepte la proposition.

 

[9]               La réunion des créanciers prévue dans la Loi a été fixée au 20 février 2008. L’ARC a produit ses preuves de réclamation et son formulaire de votation dans lequel elle a voté contre la proposition le 18 février 2008. À la suite du vote négatif de l’ARC, la proposition a échoué.

 

[10]           Par l’application de l’alinéa 57a) de la Loi, le demandeur était réputé avoir fait une cession de faillite. Cet alinéa mentionne ce qui suit :

 

57.           Lorsque les créanciers refusent d’accepter une proposition visant une personne insolvable :

 

a) celle-ci est réputée avoir fait dès lors une cession;

 

Les prétentions

[11]           Le demandeur prétend que, selon la loi, l’ARC n’avait pas le droit de refuser sa proposition car cela contrevenait à ses fonctions à titre d’organisme public. Il prétend que l’ARC doit gérer ses affaires et exercer son pouvoir discrétionnaire selon des pratiques commerciales raisonnables, en agissant de bonne foi et dans l’intérêt public. Il prétend que l’ARC est soumise à une obligation de diligence plus importante et plus objective que les autres créanciers parce qu’elle doit agir dans l’intérêt public.

 

[12]           Le surintendant défendeur prétend que la Loi est un code complet en matière de faillite et d’insolvabilité et qu’il est chargé de contrôler l’administration des actifs et des affaires régies par la Loi.

 

[13]           Le surintendant défendeur souligne que, en vertu de l’alinéa 183a) de la Loi, la Cour supérieure de justice de l’Ontario a compétence en droit et en equity pour exercer la juridiction de première instance, auxiliaire et subordonnée en matière de faillite et en d’autres procédures dans cette province. Par conséquent, il prétend que la Cour fédérale n’a pas compétence pour entendre la présente affaire parce que seule la Cour supérieure de justice de l’Ontario a compétence.

 

[14]           De plus, le surintendant défendeur prétend que, en vertu de l’article 71 de la Loi, dès qu’une cession est produite, le failli cesse d’être habile à céder ou autrement aliéner ses biens. En vertu de l’article 181 de la Loi, si le débiteur est d’avis qu’une cession n’aurait pas dû être produite, il peut demander à la cour compétente d’annuler la faillite.

 

[15]           La Loi ne permet pas de suspendre la cession présumée. Le failli peut plutôt demander l’annulation de la faillite ou soumettre son problème au séquestre officiel afin que celui‑ci décide. Le surintendant défendeur prétend que le failli ne peut plus intenter une action en dommages‑intérêts.

 

[16]           Enfin, le surintendant défendeur prétend que, selon l’article 215 de la Loi, le demandeur doit d’abord demander à la Cour supérieure de justice de l’Ontario l’autorisation d’intenter une action contre le surintendant et le syndic.

 

[17]           L’ARC défenderesse prétend que le défendeur ne peut pas demander la suspension de l’application de la loi, qu’il n’existe aucune cause d’action en matière délictuelle ou de négligence et que le demandeur n’a subi aucun préjudice. De plus, l’ARC défenderesse prétend que le contrôle judiciaire est le seul moyen de contester la décision de l’ARC défenderesse, moyen que le demandeur a choisi de ne pas utiliser.

 

[18]           L’ARC défenderesse prétend que la Loi ne comprend aucune disposition qui permet de suspendre l’application de l’article 57 et que, même si la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C., 1985, ch. F-7 permet à la Cour de suspendre des procédures, elle ne comprend aucune disposition l’autorisant à suspendre l’application de dispositions législatives. Même la Cour supérieure de justice de l’Ontario, qui a compétence exclusive en matière de faillite, ne peut pas exercer sa compétence si elle contrevient aux dispositions de la Loi.

 

[19]           L’ARC défenderesse prétend qu’elle n’a rien fait d’illégal en rejetant la proposition. Au contraire, elle s’est acquittée de sa tâche en conformité avec la Loi. L’ARC a déposé ses preuves de réclamation et elle a voté sur la proposition grâce au formulaire de votation comme la Loi lui permet de le faire. La Loi n’exige pas que les créanciers assistent à la réunion, qu’ils participent aux négociations ou qu’ils acceptent la recommandation du syndic. Par conséquent, l’ARC défenderesse prétend qu’elle n’est responsable d’aucun préjudice subi par le demandeur en vertu du délit de faute dans l’exercice d’une charge publique.

 

[20]           L’ARC défenderesse prétend qu’elle n’a fait preuve d’aucune négligence en rejetant la proposition du demandeur. Pour que l’ARC soit tenue d’une obligation de diligence donnant ouverture à un recours en négligence au profit du demandeur, il faudrait qu’il existe des relations suffisamment étroites entre les parties et que l’intérêt public ne justifie pas la diminution ou la suppression de cette obligation. L’ARC défenderesse prétend qu’elle n’est tenue à aucune obligation de diligence envers un proposant qui tente de conclure une entente avec l’ARC relativement à sa dette fiscale.

 

[21]           De plus, si la Cour concluait qu’il existe une relation de proximité et que le créancier est tenu d’une obligation de diligence envers le débiteur, l’ARC défenderesse prétend que cette conclusion irait à l’encontre du régime prévu dans la Loi quant aux propositions et qu’elle ajouterait une obligation de diligence qui n’a pas été imposée par le législateur lorsqu’il a adopté les dispositions relatives aux propositions.

 

[22]           Le demandeur reconnaît que, selon la Loi, dès qu’un créancier rejette une proposition, le débiteur est réputé faire cession. Par conséquent, le demandeur a sollicité une ordonnance portant que cette cession présumée soit suspendue jusqu’à ce que la présente action soit tranchée. Le demandeur prétend qu’une cession nuirait aux intérêts du demandeur et du public.

 

L’analyse

La requête en radiation présentée par le surintendant défendeur

[23]           Le paragraphe 221(1) des Règles sur les Cours fédérales, DORS/98-106 (les Règles) figure à la partie 4, laquelle régit les actions. Il est ainsi libellé :

221. (1)  À tout moment, la Cour peut, sur requête, ordonner la radiation de tout ou partie d’un acte de procédure, avec ou sans autorisation de le modifier, au motif, selon le cas :

 

aqu’il ne révèle aucune cause d’action ou de défense valable;

[. . .]

fqu’il constitue autrement un abus de procédure.

 

Elle peut aussi ordonner que l’action soit rejetée ou qu’un jugement soit enregistré en conséquence.

 

[24]           En vertu de l’article 2 des Règles, un acte de procédure est un « acte par lequel une instance est introduite, les prétentions des parties sont énoncées ou une réponse est donnée ». Par conséquent, une déclaration peut être radiée au motif qu'elle ne révèle aucune cause d'action valable ou qu’elle constitue un abus de procédure.

 

[25]           Dans l’arrêt Succession Odhavji c. Woodhouse, 2003 CSC 69, le juge Iacobucci a déclaré, au paragraphe 15, que le critère applicable à la radiation d’une déclaration était que les faits allégués doivent être tenus pour avérés et qu’ensuite il faut se demander s’il est « évident et manifeste » que l’action doit être rejetée. Il a déclaré que « [c]e n’est que si la déclaration est vouée à l’échec parce qu’elle contient un “vice fondamental” que le demandeur devrait être privé d’un jugement ».

 

[26]           Une déclaration qui plaide une cause d’action sur laquelle la Cour n’a pas compétence pour statuer constitue clairement un abus de ses procédures (Weider c. Industries Beco Ltée., [1976] 2 C.F. 739, au paragraphe 4).

 

[27]           La Cour fédérale est une cour créée par la loi qui ne possède aucune compétence inhérente. Sa compétence découle soit de la Loi sur les Cours fédérales, soit d’une autre loi. Le paragraphe 17(1) de la Loi sur les Cours fédérales prévoit que la Cour fédérale a compétence concurrente dans les cas de demande de réparation contre la Couronne. Toutefois, le paragraphe 17(6) limite cette compétence. Il est ainsi libellé :

17(6)    Elle n'a pas compétence dans les cas où une loi fédérale donne compétence à un tribunal constitué ou maintenu sous le régime d'une loi provinciale sans prévoir expressément la compétence de la Cour fédérale.

 

Les dispositions générales de la Loi sur les Cours fédérales ne confèrent aucune compétence lorsqu’une loi fédérale confère compétence à une cour provinciale sauf s’il y a autorisation expresse en vertu de cette loi.

 

[28]           La Loi sur la faillite et l’insolvabilité est une loi fédérale adoptée par le législateur à titre de code complet en matière de faillite et d’insolvabilité (Kalau c. Dahl, [1985] A.J. no 572, au paragraphe 9). L’alinéa 183a) de la Loi confère compétence en matière de faillite à la Cour supérieure de justice de l’Ontario. Cette disposition est ainsi libellée :

183(1)  Les tribunaux suivants possèdent la compétence en droit et en equity qui doit leur permettre d’exercer la juridiction de première instance, auxiliaire et subordonnée en matière de faillite et en d’autres procédures autorisées par la présente loi durant leurs termes respectifs, tels que ces termes sont maintenant ou peuvent par la suite être tenus, pendant une vacance judiciaire et en chambre. [Non souligné dans l’original.]

a) dans la province d’Ontario, la Cour supérieure de justice;

 

[29]           La seule exception en matière de compétence prévue quant à la Cour fédérale est celle du contrôle judiciaire d’une décision du surintendant rendue dans le cadre d’une audience disciplinaire portant sur la conduite d’un syndic. Le paragraphe 14.02 (5) est ainsi libellé :

La décision du surintendant, rendue et remise conformément au paragraphe (4), est assimilée à celle d’un office fédéral et comme telle est soumise au pouvoir d’examen et d’annulation prévu à la Loi sur les Cours fédérales. [Non souligné dans l’original.]

 

[30]           Je conclus que la Loi énonce clairement que la Cour fédérale n’a pas compétence pour examiner la demande de délivrance d’ordonnances du demandeur relativement aux dispositions de la Loi parce que c’est la Cour supérieure de justice de l’Ontario qui a cette compétence.

 

[31]           L’action du demandeur pose d’autres problèmes en ce qui concerne son volet faillite.

 

[32]           Le demandeur désigne le surintendant et le syndic afin que ceux‑ci reçoivent avis quant aux  présentes procédures et afin qu’ils soient liés par la décision de la Cour. Toutefois, l’article 215 de la Loi prévoit explicitement que, sauf avec la permission du tribunal, c’est‑à‑dire la Cour supérieure de justice de l’Ontario, aucune action n’est recevable contre le surintendant ou un syndic, relativement à une affaire de faillite.

 

[33]           La Loi, à titre de code complet en matière de faillite et d’insolvabilité, comporte des dispositions qui traitent précisément des questions soulevées par le demandeur dans la présente action. La compétence inhérente d’une cour de justice ne l’autorise pas à rendre une ordonnance qui va à l’encontre de la volonté clairement exprimée du législateur (Baxter Student Housing Ltd. c. College Housing Co-operative Ltd., [1976] 2 R.C.S. 475, à la page 243). Le demandeur doit examiner la Loi afin de régler ses problèmes.

 

[34]           La Loi prévoit deux façons de demander réparation :

a)       si une partie a des doutes concernant la régularité d’un vote exprimé par un créancier qui entraîne une cession présumée, la partie peut faire part de ses doutes au séquestre officiel afin que celui‑ci se prononce sur ceux‑ci comme le prévoit le paragraphe 51(3) de la Loi;

 

b)       si la partie estime que la cession n’aurait pas dû être produite, elle peut demander à la Cour supérieure de justice de l’Ontario d’annuler la faillite en vertu du paragraphe 181(1) de la Loi.

 

[35]           Le demandeur n’a choisi ni l’une ni l’autre de ces voies qui s’offraient à lui. En agissant de la sorte, j’estime que le demandeur ne s’est pas prévalu des recours prévus par la Loi.

 

La requête en radiation présentée par la défenderesse ARC

[36]           Le demandeur prétend que l’omission de la part de l’ARC d’accepter sa proposition ou de négocier de bonne foi pour modifier les modalités de la proposition est illégale et contrevient à ses fonctions à titre d’organisme public et viole la politique publique. La formulation utilisée ressemble à une allégation de délit de faute dans l’exercice d’une charge publique également connu sous l’expression « abus de charge publique ». Le demandeur doit ensuite démontrer que l’ARC a agi de manière illégitime et délibérée, qu’elle était consciente du caractère illégitime de sa conduite et de la probabilité de préjudice à l’égard du demandeur (Odhavji, au paragraphe 23).

 

[37]           Le demandeur n’a fait état d’aucune conduite illégitime ou délibérée de la part de l’ARC autre que le rejet non motivé de la proposition recommandée. La Loi prévoit la procédure par laquelle un créancier peut répondre à une proposition ou peut rejeter une proposition; l’ARC a suivi cette procédure. La Loi n’exige pas que l’ARC justifie sa décision. Sans autre preuve, l’action de l’ARC était légitime lorsqu’on l’examine dans le contexte de la Loi.

 

[38]           Le demandeur a également utilisé le vocabulaire dont on se sert pour le délit de négligence. Pour invoquer la négligence, le demandeur doit démontrer que l’ARC avait une obligation de diligence à son égard, que, par ses actions, elle a violé cette obligation de diligence, qu’elle était consciente du préjudice que ces actions pourraient causer et qu’elle a causé un préjudice ou des dommages au demandeur.

 

[39]           En vertu de la Loi, l’ARC est sur un pied d’égalité avec n’importe quel créancier. L’ARC a le droit d’évaluer la proposition au même titre que tout autre créancier. Elle n’est pas tenue par la loi d’accepter moins que la dette due. À vrai dire, l’ARC est tenue envers le gouvernement du Canada de recouvrer les montants au titre de l’impôt sur le revenu et les montants au titre de la taxe sur les produits et services qui sont dus au gouvernement. L’ARC, à titre de créancier, n’est tenue d’aucune obligation envers le demandeur.

 

[40]           Le demandeur prétend que, en votant contre sa proposition, l’ARC a agi [traduction] « d’une manière oppressante, arbitraire et abusive […] sans se soucier du caractère raisonnable de ses actions et de l’exercice licite de son pouvoir discrétionnaire ». Il déclare ce qui suit dans ses observations :

[traduction]

 

« Il est également bien reconnu en droit qu’un organisme public qui exerce un pouvoir décisionnel judiciaire ou quasi judiciaire est formellement tenu de remettre à l’intéressé des motifs écrits de sa décision ».

 

 

[41]           Il est manifeste que le demandeur insiste sur le fait que, selon lui, la décision de l’ARC est la source du préjudice qu’il prétend avoir subi. La procédure choisie par le demandeur m’amène à examiner la décision rendue par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Grenier c. Canada, 2005 CAF 348.

 

[42]           Dans l’arrêt Grenier, le juge Létourneau, au paragraphe 20, a conclu que le justiciable qui veut s'attaquer à une décision d'un organisme fédéral n'a pas le libre choix d'opter entre une procédure de contrôle judiciaire et une procédure d'action en dommages‑intérêts. Une décision d'un organisme fédéral conserve sa force et son autorité légales, demeure juridiquement opérante et produit des effets légaux tant qu'elle n'a pas été invalidée. La Cour d’appel fédérale a décidé que l’on doit d’abord procéder par contrôle judiciaire pour faire invalider la décision d’un organisme fédéral avant de procéder par action en dommages‑intérêts.

 

[43]           Le demandeur a intenté une action en dommages‑intérêts par laquelle il vise à contester la décision de l’ARC de ne pas accepter la proposition qu’il a faite dans le cadre de la procédure de faillite. Il a choisi une voie interdite. Toutefois, je ne me prononce pas sur la question de savoir si une décision rendue par l’ARC relativement à une proposition faite en vertu de la Loi peut être contestée par voie de contrôle judiciaire plutôt que par les procédures prévues dans la loi.

 

La requête en suspension provisoire présentée par le demandeur

[44]           Le demandeur demande une suspension de l’application de l’alinéa 57a) de la Loi en vertu duquel le demandeur est réputé être en faillite. Le demandeur ne mentionne aucun fondement factuel, aucune disposition législative, aucun pouvoir conféré par la loi qui autoriserait une cour de justice à suspendre l’application de l’alinéa 57a) de la Loi.

 

[45]           Il a été décidé que la Loi n’autorise pas une cour de justice à suspendre l’application d’une ordonnance de séquestre ou d’une cession, que ce soit à titre provisoire ou à titre permanent (Kalau au paragraphe 11). Selon moi, il en va de même pour les cessions de faillite présumées prévues à l’alinéa 57a) de la Loi.

 

Conclusion

[46]           Je conclus qu’il est évident et manifeste que la déclaration ne révèle aucune cause d’action valable, et ce, pour les motifs suivants :

a)      La Cour fédérale n’a pas compétence en vertu du paragraphe 183(1) de la Loi pour statuer sur la présente action;

b)      Le demandeur n’a pas obtenu de la Cour supérieure de justice de l’Ontario l’autorisation d’intenter l’action contre le surintendant et le syndic;

c)      Le demandeur n’a pas suivi la procédure prévue dans la Loi par le législateur en ce qui concerne la façon de traiter son conflit occasionné par le rejet de sa proposition par l’ARC;

d)      Le demandeur a omis d’invoquer des faits matériels qui étaieraient son action en dommages‑intérêts intentée en vertu de la responsabilité délictuelle;

e)      Le demandeur n’a pas procédé de la manière prescrite par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Grenier, à savoir, présenter d’abord une demande en contrôle judiciaire avant d’intenter une action en dommages‑intérêts.

 

[47]           Par conséquent, je conclus que la déclaration doit être radiée. Je conclus également que la demande de suspension provisoire de l’application de l’alinéa 57a) présentée par le demandeur doit être rejetée.

 

Les dépens

[48]           Comme les trois requêtes ont été entendues au cours de la même audience et que les questions en litige se recoupent, les dépens ne seront adjugés qu’à l’égard d’une seule requête.


JUGEMENT

 

LA COUR ORDONNE :

1.                  La déclaration est radiée.

2.                  La demande de suspension de l’application de l’alinéa 57a) de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité présentée par le demandeur est rejetée.

3.                  Des dépens sont adjugés en faveur du surintendant défendeur et de l’ARC défenderesse quant à leurs requêtes respectives.

 

 

 

« Leonard S. Mandamin »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Claude Leclerc, LL.B.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        T-290-08

                                                           

 

INTITULÉ :                                       STEPHEN ANTHONY EDELL c. SA MAJESTÉ LA REINE ET AUTRES  

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 18 novembre 2008

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE MANDAMIN

 

DATE DES MOTIFS

ET DU JUGEMENT :                       Le 21 novembre 2008 

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Stephen Anthony Edell                          POUR LE DEMANDEUR

 

Liz Tinker                                             POUR LE DÉFENDEUR LE SURINTENDANT

                                                            DES FAILLITES

 

Kevin Dias                                           POUR LA DÉFENDERESSE SA MAJESTÉ LA REINE (ARC)

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Stephen Anthony Edell                          POUR SON PROPRE COMPTE

Toronto (Ontario)

 

John H. Sims, Qc                                 POUR LES DÉFENDEURS

Toronto (Ontario)

 

 

 

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