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Date : 20081114

 

Dossier : IMM-1179-08

Référence : 2008 CF 1278

Ottawa (Ontario), le 14 novembre 2008

En présence de monsieur le juge Harrington

 

ENTRE :

MARGARET SEONA STEPHENS

 

demanderesse 

 

et

 

 

 

MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

 

défendeur

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

 

[1]               Madame Stephens, une citoyenne de Saint Vincent, a été admise au Canada à titre de visiteur en 2001. Elle n’a pas prorogé son statut à l’expiration de celui-ci et est sans statut depuis l’année 2002.

 

[2]               Sa demande pour une dispense de l’exigence de présenter sa demande de résidence permanente à l’extérieur du Canada pour des motifs d’ordre humanitaire (demande CH), contrairement à la règle générale, a été refusée par une agente d’immigration. C’est cette décision qui fait l’objet du contrôle judiciaire devant cette Cour.

 

[3]               Trois points en litige ont été soulevés lors de l’audience :

·        Le degré d’établissement de Mme Stephens au Canada;

 

·        Disponibilité d’endroit pour vivre à Saint Vincent; et

 

·        La crainte de Mme Stephens par rapport à son bien-être si elle est obligée de retourner à Saint Vincent.

 

[4]               Une décision dans le volet des demandes CH doit soupeser l’appréciation du degré d’établissement de Mme Stephens au Canada contre une projection de la situation à laquelle elle ferait face si elle est retournée à Saint Vincent. Il n’est pas question d’une crainte assez prononcée pour appuyer l’application de l’article 96 ou de l’article 97. Le Guide IP 5 de Citoyenneté et Immigration Canada, intitulé « Demande présentée par des immigrants au Canada pour des motifs d’ordre humanitaire », discute plutôt des difficultés inhabituelles et injustifiées ou excessives.

 

[5]               Il est clair que, même avant l’arrêt de la Cour suprême Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick 2008 CSC 9, [2008] S.C.J. No. 9, la norme de contrôle judiciaire dans les demandes CH est celle de la décision raisonnable (Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817).

 

[6]               L’Agente a trouvé que Mme Stephens démontre une bonne implication au Canada. Elle a une famille ici dans laquelle comptent sa mère et son frère, elle s’est améliorée et se dévoue au sein de sa communauté.

Je note que l’établissement de la requérante est tel qu’attendu d’une personne voulant vivre au Canada de façon autonome. Il est normal de créer des liens sociaux dans son entourage. Son implication au sein de l’église et de sa communauté peut également se poursuivre dans son pays. Je conclu donc que l’établissement de la requérante bien qu’il soit bon, n’est exceptionnel et ne justifie pas à lui seul une dispense de présenter sa demande de résidence à l’étranger.

 

[7]               Dans le contexte, il est évident que l’Agente ne remet point en question que Mme Stephens est bien établie au Canada. Certainement, il n’est pas ici question d’une dispense de l’obligation de l’Agente de considérer la situation à laquelle Mme Stephens ferait face si elle serait retournée à Saint Vincent.

 

[8]               Tel que discuté par le juge Teitelbaum dans l’arrêt Mooker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 779, 62 Imm. L.R. (3d) 311, au paragraphe 15 :

[…] L'agente a raisonnablement conclu que le degré d'établissement des demandeurs ne  dépassait pas ce qu'il est raisonnable de s'attendre de personnes qui ont habité dans un pays pendant quatre ans et demi. De plus, le degré d'établissement est seulement l'un des facteurs dont il faut tenir compte dans une demande CH et il n'est pas en soi déterminant (Klais c. Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, 2004 CF 785; Irimie c. Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration (2000), 10 Imm. L.R. (3d) 206).

 

[9]               Mme Stephens a aussi allégué qu’elle n’aurait plus d’endroit pour vivre si elle retourne à Saint Vincent. Bien que le dossier porte à confusion quant à savoir si elle pourrait retourner vivre où elle a vécu auparavant, puisqu’il se peut que la propriété familiale a été vendue, aucune preuve n’a été présentée qui laisserait savoir qu’elle n’aurait plus d’endroit pour vivre à Saint Vincent, que ce soit avec sa fratrie ou non.

 

[10]           Finalement, il se peut que la situation générale à Saint Vincent suggère un degré de pauvreté et de violence criminelle, mais Mme Stephens n’a pas lié ces conditions à sa situation personnelle. Fondamentalement, l’argument est vraiment que l’Agente aurait dû accorder plus de poids à certains facteurs et moins à d’autres. Cependant, tel que noté par le juge Blais dans l’arrêt Lee c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) 2005 CF 413, 45 Imm. L.R. (3rd) 129, au paragraphe 13 :

Je tiens à répéter encore une fois que la Cour ne peut intervenir à la légère dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire des agents d'immigration. La décision concernant une demande fondée sur des motifs d'ordre humanitaire doit reposer sur une analyse des faits et sur la pondération de nombreux facteurs. J'estime que l'agent a pris en considération tous les facteurs pertinents au regard des motifs d'ordre humanitaire et qu'il n'a commis aucune erreur justifiant l'intervention de la Cour.

 

[11]           La question à trancher par l’Agente était la suivante : est-ce que le cas particulier à Mme Stephens est tel que la difficulté qu’elle subirait si elle devait faire sa demande de résidence permanente à partir de Saint Vincent serait inhabituelle et injustifiée ou excessive ? La décision de l’Agente, qu’elle ne le serait pas, était raisonnable. Son raisonnement est clairement énoncé et sa décision ne mérite pas l’intervention de cette Cour.


ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire soit rejetée. Il n’y a aucune question à certifier.

 

 

 

« Sean Harrington »

Juge

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-1179-08

 

INTITULÉ :                                       Margaret Seona Stephens c. MCI

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               le 12 novembre 2008

 

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                       LE JUGE HARRINGTON

 

DATE DES MOTIFS :                      le 14 novembre 2008

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Richard Sheitoyan

 

POUR LA DEMANDERESSE

Caroline Doyon

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Richard Sheitoyan

Avocat

Montréal (QC)

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Montréal (QC)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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