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Date : 20081117

Dossier : IMM-1203-08

Référence : 2008 CF 1269

Ottawa (Ontario), le 17 novembre 2008

En présence de monsieur le juge Pinard

ENTRE :

ASHIQ AL ISLAM, NAHID ISLAM,

MASIHA ISLAM, FARISA ISLAM

 

demandeurs

 

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

 

[1]               Le présent contrôle judiciaire porte sur une décision, rendue le 28 janvier 2008, par laquelle une agente d’examen des risques avant renvoi a rejeté la demande de protection déposée par les demandeurs en vertu du paragraphe 112(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la Loi).

 

[2]               Le demandeur principal, Ashiq al Islam, est Bihari. Les Biharis sont des musulmans de langue urdu qui se sont enfuis au Pakistan oriental lors de la partition et qui sont restés coincés dans cette région après l’indépendance du Bangladesh en 1971. Ils sont en conflit avec la majorité de ce pays de langue bengalaise depuis qu’ils se sont rangés dans le camp du Pakistan durant le conflit de neuf mois.

 

[3]               Le demandeur principal a quitté le Bangladesh et est arrivé aux États-Unis le 24 décembre 2002. La demanderesse, Nahid Islam, est son épouse; elle est arrivée aux États-Unis le 24 juin 2002. Le 22 juin 2003, ils sont arrivés au Canada avec leurs jumelles d’âge mineur nées aux États-Unis, et ils ont fait une demande d’asile le même jour.

 

[4]               Le demandeur principal craint de retourner au Bangladesh en raison de l’hostilité de ses beaux-parents à son égard, lesquels s’opposent vivement au mariage de leur fille avec un Bihari; et, de façon plus générale, en raison du terrible traitement réservé aux Biharis.

 

[5]               La Section de la protection des réfugiés (la SPR) a examiné les demandes faites par les demandeurs le 26 avril 2006 et le 28 septembre 2006. À l’audience, la demanderesse a fondé sa demande sur celle de son époux qui a également été nommé représentant désigné des deux demanderesses d’âge mineur dans les demandes mettant en cause les États-Unis. Leurs demandes ont été rejetées le 23 mars 2007. Une demande d’autorisation de contrôle judiciaire a été refusée le 10 août 2007 par la juge Heneghan. Les demandeurs ont ensuite présenté une demande d’ERAR qui leur a été refusée. C’est cette décision qui fait l’objet du présent contrôle.

 

* * * * * * * *

 

[6]               La demande du demandeur principal comporte deux volets. Elle repose sur (1) la crainte avec raison d’être persécutée par ses beaux-parents influents qui s’opposent à son mariage avec leur fille, et sur (2) le dur traitement que le Bangladesh et son peuple fait subir aux Biharis.

 

[7]               En ce qui concerne le premier volet, la plus grande partie de la décision de la SPR était fondée sur des conclusions défavorables en matière de crédibilité. Le demandeur principal allègue que l’agente d’ERAR ne pouvait pas s’appuyer sur ces conclusions mais qu’elle devait tenir une audience, si elle avait des doutes au sujet de la crédibilité. Je ne suis pas de cet avis.

 

[8]               De façon générale, l’examen des risques avant renvoi est jugé sur dossier (voir article 113 de la Loi; le paragraphe 161(1) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (le Règlement), et Alvarez c. Solliciteur général du Canada, 2005 CF 143). La tenue d’une audience est requise seulement lorsque les facteurs énumérés à l’article 167 du Règlement sont réunis. Dans la présente affaire, une audience n’était pas requise pour décider de la crédibilité des nouveaux éléments de preuve dont la SPR ne disposait pas. Par conséquent, l’agente d’ERAR n’a pas commis d’erreur en n’accordant pas d’audience au demandeur (Jaouadi c. Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, 2006 CF 1549).

 

[9]               En ce qui concerne le deuxième volet, le demandeur principal a fourni des éléments de preuve qui, en partie, auraient pu et auraient dû être soumis à la SPR. À cet égard, l’avocate du défendeur a raison lorsqu’elle souligne dans ses observations écrites, au paragraphe 20, ce qui suit :

[traduction] [. . .] contrairement à ce que les demandeurs ont invoqué dans leur mémoire d’arguments, l’agente d’ERAR n’a pas contesté l’origine ethnique biharie du demandeur principal. Elle était plutôt d’avis que la question concernant les mauvais traitements subis par les Biharis au Bangladesh avait déjà été présentée à la SPR. Par conséquent, la présente demande et la preuve produite à son appui étaient assujetties à l’alinéa 113a) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés [. . .]

 

[10]           De plus, elle fait observer à juste titre au paragraphe 24 de son mémoire que [traduction] « la procédure d’ERAR n’est pas un mécanisme d’appel des décisions de la SPR »; par conséquent, [traduction] « ce n’est pas le rôle de l’agente d’ERAR d’apprécier la preuve qui aurait pu être présentée à la Commission, mais qui ne l’a pas été » (voir Jaouadi, précitée, au paragraphe 26; Alvarez, précitée, au paragraphe 6; Raza et al. c. Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration et al., 370 N.R. 344, 2007 CAF 385; et Yousef c. Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, 296 F.T.R. 182, 2006 CF 864, au paragraphe 21).

 

[11]           Pour ce qui est des autres éléments de preuve qu’elle a acceptés de considérer comme nouveaux, l’agente d’ERAR écrit dans sa décision :

[traduction] Les nouveaux éléments de preuve présentés par le demandeur ne suffisent pas à expliquer ces incohérences, de manière à ce que le demandeur réfute la conclusion de la SPR fondée sur la même situation de risque. À la page 19 des observations manuscrites, on résume les risques courus par les demandeurs, et on donne l’historique des faits. Dans la lettre, on ne réfute pas les conclusions particulières de crédibilité tirées par la Commission, en expliquant pourquoi de telles incohérences ont été relevées.

 

En me fondant sur la preuve documentaire, je conclus que le demandeur n’a pas établi de lien entre cette preuve documentaire, lui-même et sa situation de risque personnel. De plus, la preuve documentaire ne permet pas d’expliquer les incohérences particulières soulevées par la SPR dans sa décision. Bien que les documents fournissent des renseignements sur la situation au Bangladesh, ils ne suffisent pas à réfuter les nombreuses incohérences soulevées par la Commission dans sa décision.

 

 

 

[12]           Après avoir examiné la preuve, je ne suis pas convaincu que l’appréciation des faits faite par l’agente d’ERAR est déraisonnable. Dans ces circonstances, il n’incombe pas à la Cour de substituer sa propre appréciation des faits à celle de l’agente d’ERAR.

 

* * * * * * * *

[13]           Pour tous ces motifs, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.


JUGEMENT

 

            La demande de contrôle judiciaire de la décision, rendue le 28 janvier 2008, par laquelle une agente d’examen des risques avant renvoi a refusé la demande de protection déposée par les demandeurs en vertu du paragraphe 112(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27, est rejetée.

 

 

« Yvon Pinard »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Caroline Tardif, LL.B., B.A. Trad.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

DOSSIER :                                        IMM-1203-08

 

INTITULÉ :                                       ASHIQ AL ISLAM, NAHID ISLAM, MASIHA ISLAM, FARISA ISLAM c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 15 octobre 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              Le juge Pinard

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 17 novembre 2008

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Ali M. Amini                                                    POUR LES DEMANDEURS

 

Ladan Shahrooz                                               POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Amini Carlson LLP                                           POUR LES DEMANDEURS

Toronto (Ontario)

 

John H. Sims, c.r.                                             POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

 

 

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