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Date : 20081021

Dossier : IMM‑1363‑08

Référence : 2008 CF 1184

Ottawa (Ontario), le 21 octobre 2008

En présence de monsieur le juge Martineau

 

ENTRE :

TESSIE CAINHOG CAGAMPANG

demanderesse

et

 

LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET

DE LA PROTECTION CIVILE

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire présentée en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la Loi) de la mesure d’exclusion prise par Randy Firlotte, un délégué du ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration (le délégué du ministre) le 9 mars 2008.

 

[2]               La demanderesse, Tessie Cainhog Cagampang, est une citoyenne des Philippines. Le 2 mars 2008, elle est arrivée au Canada et a demandé l’entrée à titre de résident temporaire afin de travailler en vertu du Programme des aides familiaux résidants. Pendant l’examen préliminaire, l’agent de l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) qui a évalué la demanderesse a relevé des questions au sujet de la validité de son offre d’emploi. Par conséquent, l’examen de la demanderesse s’est poursuivi jusqu’au 5 mars 2008 afin d’obtenir des clarifications et des renseignements additionnels. En résultat, la future employeuse de la demanderesse, Mme Lorraine Lowe, a finalement avoué à l’agent de l’ASFC qu’elle ne souhaitait pas, à ce moment, embaucher la demanderesse. Par conséquent, l’agent de l’ASFC a préparé un rapport d’interdiction de territoire en vertu de l’article 44 de la Loi, mentionnant que la demanderesse était interdite de territoire au Canada parce qu’elle n’avait pas satisfait aux exigences de la Loi et du Règlement applicables en ce qui a trait à l’entrée d’étrangers au Canada. Le 9 mars 2008, le délégué du ministre a examiné le rapport et a pris une mesure d’exclusion contre la demanderesse, mesure qui fait maintenant l’objet de la présente demande de contrôle judiciaire.

 

[3]               La demanderesse soutient qu’elle a obtenu un permis de travail avant de se rendre au Canada. Son avocat mentionne les manuels d’immigration, soit IP 4, Traitement des aides familiaux résidants au Canada et OP 14, Traitement des demandes aux termes du programme des aides familiaux résidants, selon lesquels les agents des visas sont responsables du premier processus de sélection et de la délivrance de permis de travail aux aides familiaux résidants. Avant d’entrer au Canada, Service Canada avait émis un avis positif relativement au marché du travail que la demanderesse avait présenté au bureau des visas à Hong Kong avec son offre d’emploi signée par sa future employeuse, Mme Lowe. Comme le bureau de Hong Kong a accepté la demande et a délivré un visa temporaire, la demanderesse soutient que l’agente d’immigration au point d’entrée avait alors l’obligation légale de lui délivrer un permis de travail à son arrivée au Canada. Par conséquent, la demanderesse soutient que l’agente d’immigration a dépassé sa compétence lorsqu’elle a téléphoné à la future employeuse de la demanderesse et lui a demandé de se rendre au bureau avec certains documents. En raison de ces mesures illégales, Mme Lowe ne souhaitait plus employer la demanderesse. Par conséquent, d’après les observations de la demanderesse, la mesure d’exclusion prise contre elle n’est pas valide en droit.

 

[4]               J’ai conclu, comme c’est le cas dans d’autres décisions de la Cour, que la norme de contrôle d’une conclusion du délégué du ministre, sauf dans le cas de questions purement de droit, est celle de la décision raisonnable : Dunsmuir c. Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] A.C.F. no 9 (QL). En l’espèce, l’agente devait évaluer l’admissibilité de la demanderesse au Canada en vertu des effets conjoints des dispositions pertinentes de la Loi et du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002‑227 (le Règlement). Il s’agit d’une question mixte de faits et de droit. En particulier, le délégué du ministre a conclu que : [traduction] « l’alinéa 200(3)d) et l’alinéa 112e) expriment clairement qu’un étranger ne peut obtenir un permis de travail que s’il a un contrat d’emploi avec son futur employeur. Il est clair qu’il n’y a aucun employeur en l’espèce ». Pour les motifs qui suivent, je ne vois aucune raison légale de contredire cette conclusion qui respecte les dispositions applicables de la Loi et du Règlement, qui est fondée sur la preuve au dossier et qui est raisonnable compte tenu des circonstances.

 

[5]               Les arguments de la demanderesse sont fondés sur une mauvaise compréhension du processus légal applicable et de la nature des mesures prises par le bureau des visas à Hong Kong. Contrairement aux observations de la demanderesse, le document qui lui a été délivré le 6 septembre 2007 par le Consulat général du Canada à Hong Kong n’était pas un permis de travail, mais un visa de résident temporaire, qui n’est qu’un document de voyage.

 

[6]               Comme il a été énoncé dans la [traduction] « lettre d’introduction » qui a été envoyée à la demanderesse par le bureau des visas, elle ne devait recevoir son permis de travail qu’au point d’entrée si elle satisfaisait aux exigences en matière d’admission au Canada :

 

[traduction]

Votre demande de permis de travail a été approuvée; Vous pouvez maintenant vous rendre au Canada. Vous devez avoir un passeport ou un document de voyage valide. Veuillez montrer cette lettre et votre confirmation d’offre d’emploi à l’agent des douanes du Canada lorsque vous arriverez au Canada. Cet agent vous présentera à un agent de l’immigration du Canada qui vérifiera que vous satisfaites aux exigences en matière d’admission au Canada et qui vous délivrera un permis de travail. [Souligné dans l’original.]

 

[7]               Cela est aussi clairement énoncé sur le site Web de CIC :

 

Lorsque l’examen médical et le contrôle sécuritaire seront terminés, et lorsqu’on aura établi que vous respectez toutes les autres exigences, vous recevrez une lettre d’approbation. Le permis de travail vous sera délivré à votre arrivée au Canada. [Non souligné dans l’original.]

 

Le Programme des aides familiaux résidants : Après avoir présenté une demande

http://www.cic.gc.ca/francais/travailler/aides/demande-apres.asp

 

[8]               Comme les responsabilités en matière de point d’entrée ont été transférées à l’ASFC en octobre 2004, c’est l’ASFC qui délivre les permis de travail au point d’entrée. Il n’y a aucune présence de CIC au point d’entrée depuis que l’ASFC a été créée. Par conséquent, l’ASFC, qui est responsable du point d’entrée, a le pouvoir légal, avant de délivrer un permis de travail, de vérifier s’il existe toujours une offre d’emploi valide à l’arrivée du demandeur au Canada et, en cas de doute, de communiquer avec le futur employeur et de lui demander des précisions et des documents pertinents, le cas échéant.

 

[9]               L’argument de la demanderesse en matière de compétence en l’espèce ne tient absolument pas compte de son obligation de demander l’admission au point d’entrée. Le paragraphe 18 (1) de la Loi exige que la demanderesse se soumette au contrôle :

 

18. (1) Quiconque cherche à entrer au Canada est tenu de se soumettre au contrôle visant à déterminer s’il a le droit d’y entrer ou s’il est autorisé, ou peut l’être, à y entrer et à y séjourner.

18. (1) Every person seeking to enter Canada must appear for an examination to determine whether that person has a right to enter Canada or is or may become authorized to enter and remain in Canada.

 

[10]           L’article 8 du Règlement exige que la demanderesse ait un permis de travail pour qu’elle puisse entrer au Canada pour y travailler. Par conséquent, elle devait avoir un contrat d’emploi valide, conformément à l’alinéa 112e) du Règlement. L’alinéa 20(1)b) de la Loi exigeait aussi qu’elle ait un permis de résidence temporaire pour entrer au Canada.

 

[11]           En effet, l’alinéa 180b) du Règlement donnait à la demanderesse le fardeau de démontrer qu’elle satisfaisait aux exigences au moment du contrôle à son arrivée au Canada :

 

180. L’étranger n’est pas autorisé à entrer au Canada et à y séjourner comme résident temporaire à moins que, à l’issue d’un contrôle, les éléments suivants ne soient établis à son égard ainsi qu’à celui des membres de sa famille qui l’accompagnent :

 

180. A foreign national is not authorized to enter and remain in Canada as a temporary resident unless, following an examination, it is established that the foreign national and their accompanying family members:

a) ils satisfaisaient, à la délivrance du visa de résident temporaire, aux exigences préalables à celle‑ci;

(a) met the requirements for issuance of their temporary resident visa at the time it was issued; and

 

b) ils satisfont toujours à ces exigences lors de leur contrôle d’arrivée.

 

[Non souligné dans l’original.]

(b) continue to meet these requirements at the time of the examination on entry into Canada

(emphasis added)

 

[12]           Ainsi, à l’arrivée de la demanderesse au Canada, si elle démontrait qu’elle satisfaisait aux exigences prévues par les dispositions pertinentes de la Loi et du Règlement, on lui aurait délivré un permis de travail au point d’entrée pour qu’elle soit admise au Canada. Cependant, comme Mme Lowe ne souhaitait plus obtenir les services de la demanderesse lorsque celle‑ci s’est soumise au contrôle au point d’entrée, la perte du contrat d’emploi a entraîné l’application de l’alinéa 200(3)d) du Règlement, qui interdit qu’on délivre un permis de travail à un étranger qui cherche à entrer au Canada à titre d’aide familial résidant si celui‑ci n’a pas de contrat d’emploi valide avec son futur employeur. Comme on n’a pas délivré de permis de travail à la demanderesse, sa demande d’entrée au Canada contrevenait à l’article 8 du Règlement et à l’alinéa 20(1)b) de la Loi, ce qui a entraîné la délivrance de l’ordonnance d’exclusion.

 

[13]           Compte tenu de ce qui précède, la présente demande de contrôle judiciaire doit être rejetée. L’avocat de la demanderesse convient que l’affaire ne soulève aucune question d’importance générale pour la certification et aucune n’est énoncée.

 

 

JUGEMENT

 

LA COUR ORDONNE que la présente demande de contrôle judiciaire soit rejetée. Aucune question n’est certifiée.

 

« Luc Martineau »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Evelyne Swenne, traductrice


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM‑1363‑08

 

INTITULÉ :                                       TESSIE CAINHOG CAGAMPANG c. MSPPC

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 9 octobre 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE MARTINEAU

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 21 octobre 2008

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Matthew Jeffery

416‑944‑3267

 

POUR LA DEMANDERESSE

Tamrat Gebeyehu

416‑973‑9665

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Matthew Jeffery

Avocat

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

John H. Sims

Sous‑procureur général du Canada

Bureau régional de l’Ontario

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

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