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Cour fédérale

 

Federal Court

 

Date : 20081028

Dossier : IMM-1016-08

Référence : 2008 CF 1206

ENTRE :

ANA ROCIO ALVAREZ BECERRA

 

demanderesse

 

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

défendeur

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

LE JUGE SUPPLÉANT GIBSON

 

I.  Introduction

[1]   Les présents motifs découlent de l’audition à Toronto, le 21 octobre 2008, d’une demande de contrôle judiciaire contestant une décision par laquelle la Section de la protection des réfugiés (le tribunal) a jugé que la demanderesse n’était pas une réfugiée au sens de la Convention et qu’elle n’avait pas, par ailleurs, besoin de la protection du Canada. La décision à l’étude a été rendue le 28 janvier 2008.

 

 

II.  Contexte

[2]   La demanderesse est une citoyenne du Mexique à la fin de la vingtaine.

 

[3]   La demanderesse prétend qu’elle a débuté une relation homosexuelle avec la fille de son employeur. Son employeur a eu connaissance de cette relation. La demanderesse a reçu une série de menaces par téléphone. Alors qu’elle se promenait à moto, la demanderesse et la personne qui l’accompagnait ont été heurtées par une voiture dans des circonstances qui ont mené la demanderesse à croire que la collision était intentionnelle. La demanderesse et la personne qui l’accompagnait ont été grièvement blessées dans la collision. La demanderesse a subi une intervention chirurgicale à l’hôpital et a ensuite traversé une période de réadaptation. Elle prétend qu’elle a dû retourner au travail avant d’avoir terminé sa réadaptation. La demanderesse a continué à recevoir des menaces par téléphone, même après avoir été forcée de quitter son emploi et de déménager ailleurs au Mexique.

 

[4]   La demanderesse a tenté de déposer une plainte à la police. Sa tentative a échoué. Par la suite, son père a réussi à déposer une plainte à laquelle on n’a jamais réellement donné suite et qui a ensuite été retirée sous pression.

 

[5]   La demanderesse s’est enfuie au Canada et y a demandé le statut de réfugiée au sens de la Convention.

 

 

 

III.  La décision à l’étude

[6]    Le tribunal a résumé la preuve documentaire dont il disposait, mais pas toute cette documentation, pour déterminer, d’abord, s’il y a en place au Mexique un cadre législatif et une stratégie de mise en œuvre pour offrir une protection adéquate, quoiqu’imparfaite, aux citoyens homosexuels qui vivent à Mexico.  Il a conclu qu’il existe un tel cadre législatif et une telle stratégie de mise en œuvre. Le tribunal a écrit :

Cet examen me démontre que la situation des gais et lesbiennes peut varier d’un État à l’autre ou même d’une grande ville à une plus petite ville ou une région rurale. Toutefois, dans le district fédéral [de Mexico], un système juridique a été mis en place pour offrir un recours au principe de la légalité pour les citoyens qui ont été persécutés ou qui ont subi un grave préjudice en raison de leur orientation sexuelle. De plus, les divers rapports indiquent que la situation s’améliore constamment, comme l’ont souligné les récents changements dans la loi interdisant la discrimination.

 

[7]   Le président de l’audience s’est alors posé la question suivante :

Le fait que l’agent de persécution soit une personne d’influence ayant des contacts tant au sein du gouvernement que parmi les policiers empêcherait‑il la demandeure d’asile de se prévaloir d’une protection et d’un recours juridique adéquats si elle était retrouvée et si elle subissait de la persécution ou avait une raison de croire qu’elle serait persécutée dans l’avenir?

 

 

[8]   Après avoir examiné la preuve documentaire dont il disposait, le tribunal a également conclu ce qui suit :

Après avoir examiné la preuve présentée, je suis convaincu que, même si dans certaines régions du Mexique, aucun effort sérieux n’est fait pour assurer une protection adéquate aux victimes de corruption et de criminalité, ce n’est pas le cas dans le district fédéral, à Mexico.

 

 

[9]   Le tribunal a ensuite résumé les observations de la conseil de la demanderesse et a conclu ce qui suit :

Étant donné que :

 

·        un cadre législatif et une stratégie de mise en œuvre ont été mis en place pour offrir une protection aux homosexuels qui vivent dans le district fédéral à Mexico,

 

·        la demandeure d’asile a omis de démontrer à l’aide d’éléments de preuve clairs que ces mesures ne lui permettraient pas d’obtenir une protection adéquate si elle en avait besoin dans l’avenir,

 

·        je ne suis saisi d’aucun élément de preuve appuyant l’allégation voulant que le district fédéral à Mexico ne soit pas un lieu raisonnable pour la demandeure d’asile,

 

·        je suis convaincu que la demandeure d’asile a omis de faire la preuve qu’elle ne bénéficierait pas de la protection de l’État dans toutes les régions du Mexique, et que le district fédéral à Mexico représente une PRI viable.

 

 

IV.  Brève analyse et conclusion

[10]           C’est une règle de droit bien connue qu’un tribunal n’a pas à se référer, dans ses motifs, à chacun des éléments de preuve documentaire dont il dispose sans exception. Il suffit que le tribunal cite un document crédible dont il dispose et que ce document fournisse un élément de preuve appuyant sa conclusion. Tel est le cas ici. Je suis convaincu que le tribunal n’a pas ignoré les éléments de preuve présentés pour le compte de la demanderesse et ne s’est pas montré trop sélectif en se fondant sur la preuve documentaire dont il disposait. Dans maintes décisions portant sur des demandes de contrôle judiciaire fondées sur des faits essentiellement similaires survenus au Mexique, la Cour est arrivée à la même conclusion que celle à l’étude ici.

 

[11]           Compte tenu de la norme de contrôle de la raisonnabilité, laquelle traduit la retenue dont il convient de faire preuve envers la décision du tribunal qui est à l’étude en l’espèce, je suis convaincu qu’il était raisonnablement loisible au tribunal de rendre cette décision.   

 

[12]           Pour les motifs qui précèdent, la présente demande de contrôle judiciaire sera rejetée.

 

[13]           Les avocats ont été avisés de la conclusion de la Cour à l’issue de l’audience. Ni un ni l’autre de ces derniers n’a recommandé la certification d’une question. La Cour est convaincue qu’il n’y a aucune question grave de portée générale permettant de trancher l’appel de la présente décision. Aucune question ne sera certifiée.     

 

« Frederick E. Gibson »

Juge suppléant

 

 

Ottawa (Ontario)

Le 28 octobre 2008

 

 

Traduction certifiée conforme

David Aubry, LL.B.

 


 

COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-1016-08

 

INTITULÉ :                                       ANA ROCIO ALVAREZ BECERRA c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 21 octobre 2008

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                       Le juge suppléant Gibson

 

DATE DES MOTIFS

ET DE L’ORDONNANCE :             Le 28 octobre 2008

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Alesha A. Green

 

POUR LA DEMANDERESSE

Ned Djordjevic

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

 

Alesha A. Green

Avocate

Toronto (Ontario)

 

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LA DEMANDERESSE

 

 

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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