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Date : 20081014

Dossier : IMM-406-08

Référence : 2008 CF 1156

Ottawa (Ontario), le 14 octobre 2008

En présence de monsieur le juge O'Reilly

 

 

ENTRE :

EDWIN ORLANDO MANCHAME

demandeur

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               M. Edwin Manchame a demandé l’asile au Canada, par crainte à la fois de représailles d’une famille voisine et d’extorsion de gangs criminels au Guatemala. Un tribunal de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission) a rejeté sa demande. La Commission a estimé que les menaces des voisins étaient des actes criminels isolés et non pas de la persécution, et que les activités des gangs étaient un danger grandement répandu et non pas un risque personnalisé couru par M. Manchame.

[2]               M. Manchame allègue que la Commission a commis une erreur relativement à ces deux conclusions et il me demande d’ordonner que sa demande soit renvoyée à un tribunal de la Commission différemment constitué pour nouvel examen. Toutefois, je ne trouve pas de base sur laquelle je peux me fonder pour annuler la décision de la Commission et je devrai, par conséquent, rejeter la présente demande de contrôle judiciaire.

 

[3]               La principale question en litige avancée par M. Manchame est de savoir si la Commission a correctement examiné les motifs prévus à l’alinéa 97(1)b) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la LIPR), qui justifient l’octroi de l’asile; voir l’annexe A.

I.          Résumé des faits

[4]               À la suite d’un désaccord sur la propriété d’une parcelle de terrain à Jocotan, au Guatemala, le père de M. Manchame a tiré sur le fils d’un voisin et l’a tué. Les frères de la victime ont cherché à exercer leur vengeance contre M. Manchame et d’autres membres de sa famille.

[5]               M. Manchame s’est enfui de Jocotan et a trouvé un emploi de conducteur d’autobus à Guatemala. Dans cette ville, des membres de gangs montaient régulièrement à bord de son autobus, ils exigeaient de l’argent de lui et ils volaient les passagers de l’autobus. Ils proféraient aussi des menaces contre lui et sa famille restée à la maison.

II.         Décision de la Commission

 

[6]               La Commission n’a pas mis en doute la version des faits de M. Manchame. Toutefois, comme elle l’a mentionné, elle a estimé que les menaces des voisins n’équivalaient pas à de la persécution. De plus, puisque M. Manchame n’avait pas eu de nouvelles de ses anciens voisins après son déménagement à Guatemala, la Commission a conclu qu’il n’existait plus de fondement objectif à sa crainte.

[7]               La Commission a noté que l’extorsion des conducteurs d’autobus était courante au Guatemala et qu’on en faisait état dans de nombreux documents. De plus, la Commission a fait remarquer que M. Manchame pouvait échapper aux menaces tout simplement s’il changeait d’emploi. La Commission s’est fondée sur une décision de la Cour d’appel fédérale dans laquelle cette cour a conclu que lorsque des personnes courent un risque en raison de leur emploi, elles n’ont pas droit à l’asile à moins qu'elles établissent qu’il n’y a pas d’autre domaine de travail qui leur est raisonnablement accessible. Voir Sanchez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2007 CAF 99.

III.       La Commission a-t-elle omis de tenir valablement compte du paragraphe 97(1) de la LIPR?

[8]               En ce qui a trait aux menaces des voisins, la Commission a conclu qu’il ne s’agissait plus d’une base objective de la crainte de M. Manchame, étant donné qu’il n’avait plus entendu parler d’eux après qu’il s’était enfui à Guatemala.  Je ne trouve aucune base pour contester cette conclusion. Lors de l’audience, M. Manchame a dit qu’il était sûr que les voisins pouvaient toujours le retrouver et l’attaquer, mais je ne décèle aucune erreur commise par la Commission dans sa conclusion selon laquelle il n’y avait aucune preuve objective à l’appui de cette appréhension.

[9]               En ce qui concerne les menaces contre M. Manchame comme conducteur d’autobus, je prends note de son propre témoignage dans lequel il déclare [traduction] « ils m’ont dit que si je ne leur donnais pas d’argent, j’aurais deux choix, soit je démissionnais de mon emploi, soit ils me tuaient ». Étant donné cet élément de preuve, je ne peux pas reprocher à la Commission de s’être fondée sur le principe énoncé dans l’arrêt Sanchez, précité.

IV.       Conclusion

 

[10]           À mon avis, les conclusions de la Commission étaient étayées par la preuve. Par conséquent, je ne peux pas conclure qu’elles étaient déraisonnables et je devrai rejeter la présente demande de contrôle judiciaire. Ni l’une ni l’autre des parties n’a proposé de question pour certification, et aucune ne sera énoncée.


JUGEMENT

LA COUR ORDONNE :

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.
  2. Aucune question de portée générale n’est énoncée.

 

 « James W. O’Reilly »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Laurence Endale, LL.M., M.A.Trad.jur.

 


 

Annexe A

 

Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27

 

Personne à protéger

  97. (1) A qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et serait personnellement, par son renvoi vers tout pays dont elle a la nationalité ou, si elle n’a pas de nationalité, dans lequel elle avait sa résidence habituelle, exposée :

[…]

b) soit à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités dans le cas suivant :

(i) elle ne peut ou, de ce fait, ne veut se réclamer de la protection de ce pays,

(ii) elle y est exposée en tout lieu de ce pays alors que d’autres personnes originaires de ce pays ou qui s’y trouvent ne le sont généralement pas,

(iii) la menace ou le risque ne résulte pas de sanctions légitimes — sauf celles infligées au mépris des normes internationales — et inhérents à celles-ci ou occasionnés par elles,

(iv) la menace ou le risque ne résulte pas de l’incapacité du pays de fournir des soins médicaux ou de santé adéquats.

 

Immigration and Refugee Protection Act, S.C. 2001, c. 27

 

Person in need of protection

  97. (1) A person in need of protection is a person in Canada whose removal to their country or countries of nationality or, if they do not have a country of nationality, their country of former habitual residence, would subject them personally

(b) to a risk to their life or to a risk of cruel and unusual treatment or punishment if

(i) the person is unable or, because of that risk, unwilling to avail themself of the protection of that country,

(ii) the risk would be faced by the person in every part of that country and is not faced generally by other individuals in or from that country,

(iii) the risk is not inherent or incidental to lawful sanctions, unless imposed in disregard of accepted international standards, and

(iv) the risk is not caused by the inability of that country to provide adequate health or medical care.

 

 

 


 

 

 

 

 

COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

Dossier :                                               IMM-406-08

 

INTITULÉ :                                              MANCHAME c. MCI

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                        Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                      Le 1er octobre 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                     Le juge O’Reilly

 

DATE DES MOTIFS :                             Le 14 octobre 2008

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Peter Wuebbolt

POUR LE DEMANDEUR

 

Neal Samson

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Peter J. Wuebbolt

Toronto (Ontario)

POUR LE DEMANDEUR

 

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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