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Date : 20080711

Dossier : T-2064-07

Référence : 2008 CF 864

Ottawa (Ontario), le 11 juillet 2008

En présence du  juge en chef

 

 

ENTRE :

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

demandeur

et

 

ISAAK FRIESEN

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]        Le défendeur dans la présente instance, Isaak Friesen, est né le 2 juillet 1977 au Mexique. Il était Canadien à sa naissance car sa mère avait qualité de citoyenne canadienne lorsqu’il est né.

 

[2]        Toutefois, selon l’article 8 de la  Loi sur la citoyenneté, L.R.C. 1985, ch. C-29 (la Loi), M. Friesen avait l’obligation de demander à conserver sa citoyenneté avant l’âge de vingt-huit ans, soit avant le 2 juillet 2005. Il a omis de le faire. À partir de cette date-là,  M. Friesen a cessé d’être citoyen canadien.

 

[3]        C’est seulement dix jours plus tard qu’il a demandé à conserver sa citoyenneté.

 

[4]        En réponse à la demande de M. Friesen de conserver sa citoyenneté canadienne dix jours après l’avoir perdue, le juge principal de la citoyenneté a décidé que M. Friesen devait néanmoins avoir une entrevue avec un juge de la citoyenneté afin que ce dernier décide si l’exercice du pouvoir discrétionnaire en vertu du paragraphe 5(4) de la Loi devait être recommandé :

 

5(4) Afin de remédier à une situation particulière et inhabituelle de détresse [] le gouverneur en conseil a le pouvoir discrétionnaire, malgré les autres dispositions de la présente loi, d’ordonner au ministre d’attribuer la citoyenneté à toute personne qu’il désigne; le ministre procède alors sans délai à l’attribution.

 

5(4) In order to alleviate cases of special and unusual hardship … and notwithstanding any other provision of this Act, the Governor in Council may, in his discretion, direct the Minister to grant citizenship to any person and, where such a direction is made, the Minister shall forthwith grant citizenship to the person named in the direction.

 

[5]        M. Friesen a vécu la plus grande partie de sa vie au Mexique. En mai 2004, il s’est installé au Canada. L’entrevue visait également à permettre au juge de la citoyenneté de vérifier que M. Friesen avait résidé au Canada depuis au moins un an avant la date de sa demande de conservation de citoyenneté, une deuxième exigence prévue par l’article 8 de la Loi.

 

[6]        Il semble que M. Friesen a produit une forte impression sur le juge de la citoyenneté. En effet, le juge a fait droit à sa demande « de conservation de sa citoyenneté canadienne et d’immatriculation comme citoyen canadien ». En d’autres termes, le juge de la citoyenneté avait l’intention de redonner à M. Friesen son statut de citoyen canadien, statut que ce dernier avait perdu le 2 juillet 2005.

 

[7]        Toutefois, en faisant droit à la demande, le juge de la citoyenneté a outrepassé sa compétence. Comme la demande de  M. Friesen avait été déposée en retard, la seule réparation que le juge de la citoyenneté pouvait accorder c’était de recommander l’exercice du pouvoir discrétionnaire du gouverneur en conseil prévu au paragraphe 5(4) de la Loi.

 

[8]        L’appel du ministre contre la décision du juge de la citoyenneté doit donc être accueilli.

 

[9]        La présente instance est un appel qui est instruit comme une demande conformément à l’alinéa 300a) des Règles des Cours fédérales. Il ne s’agit pas d’une demande de contrôle judiciaire au titre de l’alinéa 300b) des Règles.

 

[10]      L’avocat du ministre soutient que si je fais droit au présent appel, je n’ai pas la compétence de recommander l’exercice du pouvoir discrétionnaire prévu au paragraphe 5(4). Selon lui, c’est une ordonnance que le juge de la citoyenneté aurait dû rendre, même si le dossier révèle clairement ce que le décideur avait l’intention de faire. D’après le ministre, l’affaire doit être renvoyée à un juge de la citoyenneté pour une autre entrevue.

 

[11]      Comme M. Friesen n’était pas représenté par un avocat dans la présente instance, je n’ai pas eu l’occasion d’entendre d’argument contraire sur la question. Je remarque que l’avocat du ministre, sans vouloir porter atteinte au pouvoir discrétionnaire du juge de la citoyenneté ou du gouverneur en conseil, est d’accord que M. Friesen a agi de bonne foi et que sa cause devrait être traitée avec compassion. Toutefois, puisque la présente décision n’est pas susceptible de révision en appel conformément au paragraphe 14(6) de la Loi, j’ai choisi d’agir avec plus de prudence que cela n’est justifié et de ne pas ordonner d’issue formelle.

 

[12]      Ainsi, sans admettre que les arguments du ministre sont exacts, je vais renvoyer l’affaire au même juge de la citoyenneté qui a interviewé M. Friesen en premier lieu, afin qu’il puisse décider de la demande de conservation de citoyenneté d’une façon conforme aux présents motifs. Je renvoie l’affaire au même juge de la citoyenneté dans l’exercice de mon propre pouvoir discrétionnaire et après avoir expliqué les circonstances à M. Friesen, qui ne s’est pas opposé à ce renvoi.

 

 

 

 


 

JUGEMENT

 

 

LA COUR ORDONNE ET ADJUGE que : l’appel de la décision du 18 octobre 2007 du juge de la citoyenneté Raymond Lee est accueilli. L’affaire est renvoyée au juge de la citoyenneté Raymond Lee pour qu’il rende une nouvelle décision de façon conforme aux présents motifs.

 

 

« Allan Lutfy »

Juge en chef

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Laurence Endale, LL.M., M.A.Trad.jur.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                             T-2064-07

 

 

INTITULÉ :                                            MCI c. Isaak Friesen

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                      Calgary (Alberta)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :                    Le 18 juin 2008

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                    Le juge en chef

 

DATE DES MOTIFS :                            Le 11 juillet 2008

 

 

COMPARUTIONS :

 

 

Rick Garvin

 

 

POUR LE DEMANDEUR

Isaak Friesen

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

 

POUR LE DEMANDEUR

Isaak Friesen

Calgary (Alberta)

POUR LE DÉFENDEUR

 

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