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Date : 20080627

Dossier : IMM-2784-07

Référence : 2008 CF 815

 

 

Ottawa (Ontario), le 27 juin 2008

 

 

En présence de Monsieur le juge Lemieux

 

 

ENTRE :

ALBERTO GIUSEPPE FERRARO

 

demandeur

 

et

 

LE MINISTÈRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET

DE LA PROTECTION CIVILE

 

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

Introduction

[1]               Le 9 juillet 2007, l’agente d’exécution Adele Holmes (l’agente) a refusé de différer le renvoi du demandeur du Canada vers l’Équateur fixé au 17 juillet 2007 en attendant qu'il soit statué sur sa demande fondée sur des considérations humanitaires (la demande CH), laquelle est parrainée par sa conjointe de fait. M. Ferraro a demandé le contrôle judiciaire de cette décision. Le 16 juillet 2007, la juge Snider a ordonné qu’il soit sursis au renvoi du demandeur jusqu’à ce qu’une décision soit rendue relativement à sa demande d’autorisation et de contrôle judiciaire. Cette autorisation a été accordée. Les présents motifs font suite à l’audience relative à sa demande de contrôle judiciaire.

 

[2]               La présente affaire soulève un problème qui est à la fois nouveau et ancien. La nouvelle question est de savoir quelle est l’incidence du récent arrêt de la Cour suprême du Canada Dunsmuir c. Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9 (Dunsmuir) sur la norme de contrôle applicable à la décision de ne pas différer la date qui a été fixée pour le renvoi d’un demandeur.

 

[3]               L’ancien problème ne tient pas tant à l’étendue du pouvoir discrétionnaire limité dont dispose l’agent pour différer l’exécution d’une mesure de renvoi en application de l’article 48 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (LIPR), mais plutôt à la question de savoir si l’agente a commis une erreur dans la prise en compte des facteurs reconnus. Plus particulièrement, en l’espèce, le demandeur soutient que l’agente n’a pas interprété correctement les « circonstances impérieuses de sa situation personnelle (c’est‑à‑dire les raisons d’ordre humanitaire) », facteur auquel a souscrit  mon collègue le juge O’Reilly dans Ramada c. Canada (Solliciteur général), 2005, CF 1112, et qu’ont subséquemment suivi mes collègues dans plusieurs autres décisions.

 

Les faits

[4]               Alberto Giuseppe Ferraro est né en Équateur en 1962. Sa famille est retournée en Italie en 1969 et a immigré au Canada en 1970. Alors âgé de 9 ans, il est devenu résident permanent de notre pays, où il vit depuis.

 

[5]               Toute sa famille est au Canada, y compris son père veuf de 76 ans, ses deux filles, Vanessa, âgée de 24 ans, et Victoria, âgée de 11 ans, sa conjointe de fait et son beau‑fils âgé de 9 ans, son unique sœur et ses tantes, oncles et cousins. Tous sont citoyens canadiens à l’exception du demandeur : croyant apparemment qu’en tant qu’enfant, il devenait automatiquement citoyen canadien, ses parents n’auraient pas présenté de demande en son nom..

 

[6]               Ses problèmes d’immigration ont commencé en 2001; le 17 septembre 2001, après avoir plaidé coupable, il a été condamné pour trafic d’une substance désignée et possession de biens volés, infractions pour lesquelles il s’est vu infliger des peines concurrentes de trois ans d’incarcération. Il  a été libéré selon la procédure d’examen expéditif après avoir purgé sept mois d’emprisonnement.

 

[7]               En raison de ses condamnations au criminel, une ordonnance d’expulsion a été prononcée contre lui; en tant que résident permanent, il a interjeté appel de cette ordonnance à la Section d’appel de l’immigration (SAI), qui aurait pu surseoir à son renvoi à certaines conditions après avoir examiné les « facteurs énoncés dans Ribic », approuvés par la Cour suprême du Canada dans Chieu c. Canada (Ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2002] 1 R.C.S. 84, au paragraphe 40, à savoir les circonstances à l’origine de l’expulsion, la gravité de l’infraction, la possibilité de réadaptation, la durée de la période passée au Canada, le degré d’établissement au Canada et l’importance des difficultés que l’expulsion causerait au demandeur et à sa famille.

 

[8]               La LIPR est toutefois entrée en vigueur le 28 juin 2002, soit avant l’instruction de l’appel à la SAI. La SAI a rejeté l’appel pour des motifs de compétence parce que le demandeur s’était vu imposer une peine de plus de deux ans. Le demandeur a présenté une demande de contrôle judiciaire de la décision de la SAI, laquelle a été rejetée après que la Cour suprême du Canada ait prononcé l’arrêt Medovarski c. Canada (Ministère de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2005] 2 R.C.S. 539. En novembre 2006, son appel de la décision de la SAI a été rejeté.

 

[9]               Le 2 janvier 2007, l’agente a eu un entretien avec le demandeur en vue de l’exécution de son renvoi. Dans les notes relatives à sa décision, l’agente a résumé le déroulement de cette rencontre et consigné les événements subséquents comme suit :

[traduction]

02 JANV 2007  L’intéressé a participé à une entrevue au CELTM et a rempli une demande de document de voyage. L’intéressé a été informé que la date de son renvoi serait fixée une fois qu’un document de voyage valide aurait été obtenu et qu’il devrait commencer à prendre des dispositions pour vendre son entreprise. L’intéressé a demandé et a reçu une autre demande d’ERAR mais a été informé du fait qu’aucun SURSIS n’est prévu dans le cadre d’une autre demande d'ERAR. L’intéressé a informé l’agente qu’une demande CH à son nom était pendante depuis MAI 2006 – l’agente a vérifié et a noté au dossier qu’il n’y a pas de demande CH pendante dans le système.

05 FÉVR 2007  Demande CH reçue par le CTD de Vegreville

02 MAI 2007  Le consulat d’Équateur veut qu’on lui retourne le passeport. Le passeport a été remis à l’intéressé afin de satisfaire à la requête du consulat – L’intéressé a indiqué qu’il souhaitait acheter lui‑même son billet.

21 JUIN 2007  Les observations concernant la demande CH indiquent que Rachel Rotenberg a été informée que le CTD de Vegreville traite actuellement les demandes CH reçues jusqu’au 13 MAI 2006

03 JUILL 2007  L’intéressé reçoit l’instruction de se présenter à LBPIA T. 1 en vue de son renvoi le 17 JUILL 2007, à 15 h 30, sur le vol AC962 via Bogota à Guayaquil, Équateur, en vue de son expulsion sous escorte.

05 JUILL 2007  La demande visant à différer le renvoi envoyée par messager est reçue au CELTM à 15 h 30.

[Je souligne.]

 

[10]           Le 4 juillet 2007, les conseillers juridiques de M. Ferraro ont demandé que son renvoi soit différé en attendant qu'il soit statué sur sa demande CH dont ils ont déclaré qu’elle avait été présentée [traduction] « en 2006 […] et dont le traitement avait commencé en février 2007 ».

 

[11]           Les motifs invoqués dans l’argument et incitant vivement l’agente à exercer favorablement son pouvoir discrétionnaire pour différer le renvoi étaient les suivants :

 

·        La demande de résidence permanente de M. Ferraro est solide pour les raisons suivantes : son degré d’établissement, sa réadaptation, son mariage, ses enfants et sa famille étendue au Canada. Le Canada est le pays où il habite depuis 1972;

 

·        Il subvient seul aux besoins de son beau‑fils et de sa conjointe de fait. [Traduction] « S’il est expulsé, ils subiraient un préjudice irréparable, c’est‑à‑dire qu’ils perdraient un père et un conjoint, perdraient leur maison, n’auraient plus la vie qu’ils ont actuellement, etc. »;

 

·        Il finance les études postsecondaires de sa fille aînée. [Traduction] « S’il est expulsé, elle subira un préjudice irréparable en ce sens qu’elle ne pourra pas poursuivre ses études postsecondaires, ce qui aura de sérieuses répercussions sur son avenir »;

 

·        Il assure un soutien financier à ses enfants [sic] issus d’une autre relation et, sans ce soutien, les enfants [sic] subiraient un préjudice irréparable;

 

·        Il dirige une entreprise prospère [traduction] « qui emploie un certain nombre de Canadiens qui subiront un préjudice irréparable s’il est expulsé ».

 

[12]           Dans ses observations, le demandeur mentionnait que sa famille serait responsable des engagements contractuels relatifs à son entreprise et qu’elle risquait de perdre tous les actifs de celle‑ci. Le dossier indique que le demandeur est propriétaire d'une entreprise de location de limousines et de voitures exotiques et qu’il emploie entre 15 et 20 employés à plein temps et à temps partiel.

 

La décision de l’agente

[13]           Je résume les motifs de la décision de l’agente de ne pas différer le renvoi de M. Ferraro. Ses motifs sont contenus dans ses notes au dossier.

 

[14]           Premièrement, elle a mis en doute la date à laquelle le demandeur a présenté sa demande CH. Selon le SSOBL, qui est le système utilisé par le gouvernement du Canada pour les questions d’immigration, la demande CH a été reçue à Vegreville, en Alberta, seulement en février 2007. Elle a déclaré qu’elle avait demandé au demandeur de lui fournir un numéro de suivi postal afin de confirmer que la demande CH avait été présentée en 2006. Elle affirme ne jamais avoir reçu cette confirmation. Elle note par ailleurs que le traitement de la demande CH n’a pas encore commencé à Vegreville et qu’il faudrait encore10 ou 11 mois pour qu’une décision soit rendue. Pour cette raison, elle a conclu que l’examen de la demande CH n’était pas près d’avoir lieu et que, par conséquent, rien ne justifiait de reporter le renvoi du demandeur.

 

[15]           Deuxièmement, elle n’a pas accepté que le fait pour le demandeur d’être propriétaire d’une entreprise de location de véhicules justifiait son non‑renvoi. Elle a noté que le demandeur a été informé en janvier 2007, lors de l’entrevue préalable au renvoi, qu’il serait expulsé dès que ses documents de voyage seraient disponibles et qu’il devrait commencer à prendre des arrangements pour se défaire de son entreprise. Elle a écrit dans ses notes qu’elle n’avait aucune preuve qu’il aurait pris de telles mesures et qu'au contraire, il a continué de louer des véhicules jusqu'en juin 2007.

 

[16]           Troisièmement, elle a reconnu que M. Ferraro subvenait aux besoins de sa conjointe de fait, qui était une mère au foyer élevant son fils de 9 ans. Elle a reconnu qu’il versait une pension alimentaire pour sa fille Victoria, qui habite avec sa mère. Elle a noté que le père de M. Ferraro touchait une pension et l’aidait dans son entreprise. Elle a dit qu’il n’y avait aucune preuve qu’il aidait sa fille Vanessa inscrite à l’université. Elle a noté que Vanessa est une adulte et que si elle s’inscrivait dans un établissement d’enseignement, elle pourrait obtenir un prêt étudiant pour terminer ses études.

 

[17]           Quatrièmement, l’agente n’a pas accepté que ces facteurs relatifs à sa famille et à ses enfants étaient suffisants pour différer le renvoi, tout en reconnaissant que l’expulsion aurait une incidence sur la famille, sur le plan émotif et économique, mais que, par ailleurs, rien n’indiquait que le soutien financier ne se poursuivrait pas après le renvoi, puisqu’elle croyait que M. Ferraro, homme d’affaires prospère  [traduction] « pourrait accéder au marché local avec le temps ». Elle a aussi affirmé que [traduction] « il n’y avait aucune indication que la vente de son entreprise ne fournirait pas des ressources financières qui permettraient à M. Ferraro et à sa famille de continuer à vivre durant la transition ».

 

[18]           Fondamentalement, elle a accepté que le renvoi causerait des difficultés à la famille Ferraro, mais qu'il s’agissait là d’une conséquence difficile mais naturelle de l’expulsion. Sur ce point, elle a conclu que les difficultés qu’éprouverait la famille Ferraro n’étaient pas uniques, étant donné que toutes les familles touchées par le renvoi d’un de ses membres connaissent ce genre d’expériences.

 

Les arguments du demandeur

[19]           Je résume ci‑dessous les principaux arguments invoqués par le demandeur.

 

[20]           Premièrement, il fait valoir que le tribunal n’a pas appliqué aux circonstances particulières de sa situation le facteur des circonstances impérieuses de sa situation personnelle, tel qu’énoncé dans la décision Ramada, précitée, et en particulier, qu’il n’a pas bien tenu compte des aspects suivants :

 

·        Son établissement au Canada depuis 37 ans;

 

·        Il s’agissait de la première fois qu’un tribunal avait l’occasion d’examiner les considérations humanitaires applicables à sa situation, n’ayant pu faire valoir cet argument devant la SAI, dont le pouvoir de prononcer un sursis pendant l’appel lui avait été retiré en vertu de la nouvelle Loi dans le cas d’une personne interdite de territoire pour grande criminalité;

 

·        Le tribunal n’a pas tenu compte de l’incidence sur sa situation de l’interdiction de territoire pour grande criminalité dont il est l’objet. Il fait valoir que le tribunal n’a pas pris en considération l’exigence concernant la délivrance d’un permis de séjour temporaire en vertu de l’article 24 de la LIPR, ni de son inadmissibilité à demander un pardon jusqu’en 2009 et du délai de traitement de sa demande de réhabilitation en vertu de l’alinéa 36(3)b) de la LIPR;

 

·        Le tribunal n’a pas tenu compte du rôle central qu’il joue en subvenant aux besoins de sa famille et, en particulier, de sa conjointe de fait qui, sans son soutien, devrait retourner sur le marché du travail, ni du soutien financier qu’il fournit à sa fille en finançant ses études postsecondaires et en l’absence duquel elle serait obligée d’obtenir un prêt étudiant, ni du soutien financier qu’il fournit à son père pour répondre à ses besoins médicaux, ni du soutien financier qu’il assure à sa plus jeune fille, Victoria.

 

[21]           Deuxièmement, l’avocat du demandeur soutient que le tribunal n’a pas tenu compte du fait que l’intégration de son client en Équateur ne serait pas aussi facile que l’agente l’a déterminé; le demandeur ne parle pas espagnol et n’a plus de racines dans ce pays, qu’il a quitté depuis environ 39 ans.

 

[22]           Troisièmement, il affirme que le tribunal n’a tenu compte d’aucune des lettres versées au dossier dans lesquelles les personnes à la charge du demandeur attestent qu’elles ont besoin de son soutien financier, ni d’aucune autre lettre, en particulier celles de son conseiller externe en affaires commerciales décrivant les conséquences de la vente forcée de l’entreprise.

 

[23]           Quatrièmement, il a soulevé une question de droit préliminaire concernant l’inadmissibilité de certains passages des affidavits de Jason Atkinson et de Jillian Schneider. Il n’est pas nécessaire pour moi de statuer sur cette objection puisque les avocats des parties ont convenu que ces affidavits devraient être radiés du dossier, à condition qu’il soit possible de souscrire et déposer à la Cour de nouveaux affidavits, sans les paragraphes rayés d’un commun accord. Ces affidavits ont été déposés à la Cour.

 

Norme de contrôle

[24]           Les parties avaient déposé leurs observations concernant la norme de contrôle applicable à la décision d’un agent d’exécution de ne pas différer l’exécution d’une mesure de renvoi avant que la Cour suprême du Canada prononce, le 7 mars 2008, l’arrêt Dunsmuir, qui a eu pour effet de modifier le droit régissant l’analyse de la norme de contrôle dans le cas des décideurs administratifs nommés par les provinces. Dans cette décision, la Cour suprême du Canada a éliminé la norme de la décision manifestement déraisonnable, de sorte que seules la norme de la décision correcte et la norme de la décision raisonnable demeurent. L’avocat du demandeur a demandé l’application de la norme de la décision raisonnable, tandis que l’avocat du défendeur a demandé l’application de la norme de la décision manifestement déraisonnable.

 

[25]           L’avocat du demandeur s’est fondé sur la décision du juge Campbell dans Cortes c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 78, pour justifier l’application de la norme de la décision raisonnable lors du contrôle sur le fond d’une décision comme celle de l’espèce. Le juge avait certifié une question pour qu’elle soit soumise à la Cour d’appel fédérale, qui a statué que l’affaire était sans objet et qu’elle n’exercerait pas son pouvoir discrétionnaire en vue d'instruire l’affaire (voir Le Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration c. Cortes, 2008 CAF 8).

 

[26]           L’avocat du demandeur a également mentionné la décision récente, Level c. Le Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, 2008 CF 227, rendue le 21 février 2008 par le juge Kelen, soit avant l'arrêt Dunsmuir, et dans laquelle le juge constate la divergence qui existe au sein de la Cour quant à savoir si la norme de contrôle applicable au bien‑fondé du refus d’un agent d’exécution de différer un renvoi est celle de la décision manifestement déraisonnable ou celle de la décision raisonnable simpliciter. Le juge Kelen a évoqué sa décision dans Ragupathy c. Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2006 CF 1370, où il a déclaré que la norme de la décision manifestement déraisonnable était souvent appliquée lorsque la question soumise à l’agent d’exécution est uniquement axée sur les faits. Dans cette affaire, il n’avait pas à décider de la norme de contrôle à appliquer, parce que la seule question en litige était une question d’équité procédurale et il a décidé qu’elle était assujettie à la norme de la décision correcte.

 

[27]           Dans Uthayakumar c. Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2007 CF 998, ma collègue la juge Dawson a reconnu ce qui suit au paragraphe 5 de ses motifs : « Bien qu’il existe des divergences dans la jurisprudence au sujet de la norme de contrôle applicable, il semble que, suivant la jurisprudence dominante, la norme de contrôle appropriée dans le cas du refus d’un agent de reporter un renvoi soit celle de la décision manifestement déraisonnable » tout en se reportant à l’analyse du juge Mosley dans Zenunaj c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 1715. La juge Dawson a indiqué que les avocats des parties s’entendaient pour dire que la norme de la décision manifestement déraisonnable constituait la norme de contrôle appropriée « du moins lorsque la question est essentiellement une question de fait » et qu’elle était disposée à appliquer cette norme de contrôle à la décision en cause.

 

[28]           Je suis d’accord avec l’approche de la juge Dawson lorsque la question dont est saisie la Cour est essentiellement une question de fait qui entraîne l’application de l’alinéa 18.1(4)d) de la Loi sur les Cours fédérales, qui confère à la Cour le pouvoir d’accorder réparation si elle est convaincue que l’office fédéral a rendu une décision ou une ordonnance fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont il dispose, ce qui, d’après la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes c. Healy, 2003 CAF 380, s’apparentait à la norme de la décision manifestement déraisonnable.

 

[29]           Un examen de la jurisprudence de notre Cour indique que la norme de la décision manifestement déraisonnable, telle qu’appliquée à un refus de différer un renvoi, a été formulée pour la première fois par le juge Martineau dans Adviento c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CF 1430; si elle s’applique c’est parce que, comme il l’a affirmé au paragraphe 29, la décision prise par un agent chargé du renvoi est essentiellement factuelle.

 

Principes

[30]           Avant de formuler mes conclusions en l’espèce, j’estime utile de résumer un certain nombre de principes bien établis par la Cour fédérale et par la Cour d’appel fédérale relativement aux décisions des agents de renvoi qui refusent de différer l’expulsion du Canada d’un demandeur en attendant qu'il soit statué sur sa demande CH, situation qui est maintenant prévue expressément à l’article 25 de la LIPR, tout en gardant à l’esprit que la même loi prévoit ce qui suit à l’article 48 :

 

 

Mesure de renvoi

 

48. (1) La mesure de renvoi est exécutoire depuis sa prise d’effet dès lors qu’elle ne fait pas l’objet d’un sursis.

 

Conséquence

 

(2) L’étranger visé par la mesure de renvoi exécutoire doit immédiatement quitter le territoire du Canada, la mesure devant être appliquée dès que les circonstances le permettent.

 

Enforceable removal order

 

48. (1) A removal order is enforceable if it has come into force and is not stayed.

 

 

Effect

 

(2) If a removal order is enforceable, the foreign national against whom it was made must leave Canada immediately and it must be enforced as soon as is reasonably practicable.

 

 

[31]           On trouvait cette disposition législative, formulée de façon analogue, à l’article 48 de la Loi sur l’immigration, qui a été abrogée par la LIPR en juin 2002.

 

[32]           D’après un examen de la jurisprudence, il est bien établi en droit que :

 

·        l’agent d’exécution dispose d’un pouvoir discrétionnaire limité de différer l’exécution d’une mesure de renvoi exécutoire;

 

·        ce pouvoir discrétionnaire étant de portée limitée, il peut seulement être exercé correctement dans des circonstances appropriées ayant trait au moment de l’exécution de ladite mesure de renvoi;

 

·        il y a plusieurs années, dans Simoes c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2000] A.C.F. no 936, le juge Nadon, alors juge de notre Cour, a reconnu certains des facteurs qui permettent de différer le renvoi d’une personne du Canada, notamment « la maladie, d'autres raisons à l'encontre du voyage et les demandes fondées sur des raisons d'ordre humanitaire qui ont été présentées en temps opportun et qui n'ont pas encore été réglées à cause de l'arriéré auquel le système fait face [...] tant que l'enfant [...] n'avait pas terminé son année scolaire »;

 

·        à propos des demandes CH, le juge Nadon a reconnu que la simple existence d’une telle demande n’interdit pas nécessairement l’exécution d’une mesure de renvoi valide;

 

·        mon collègue le juge O’Reilly, dans Ramada, précitée, a décrit le pouvoir discrétionnaire dont dispose l’agent d’exécution comme étant sa capacité de prendre en considération « les motifs valables de retarder le renvoi ». Il a donné l’explication suivante : « Les motifs valables peuvent être liés à la capacité de voyager de la personne (maladie ou absence de documents de voyage appropriés), à la nécessité de satisfaire à d'autres engagements (obligations scolaires ou familiales) ou à des circonstances personnelles impérieuses (raisons d'ordre humanitaire) [...] Il est clair, toutefois, que le simple fait qu'une personne ait déposé une demande fondée sur des raisons d'ordre humanitaire n'est pas suffisant pour justifier le sursis au renvoi. Par contre, l'agent doit examiner si des circonstances personnelles impératives, surtout lorsqu'elles concernent un enfant, justifient le sursis »;

 

·        dans l’affaire dont il était saisi, le juge O’Reilly a indiqué que Mme Ramada avait demandé à l’agente de surseoir à son expulsion parce que le renvoi immédiat ne serait pas dans l’intérêt de sa plus jeune enfant, qui souffrait de crises fébriles; elle (Mme Ramada) souffre d’un diabète de type 2 et son renvoi pourrait nuire au bon contrôle de sa glycémie. En fin de compte, le juge O’Reilly a accueilli la demande de contrôle judiciaire parce que l’agente n’avait pas pris en considération le fait que la jeune enfant était âgée de trois ans et, plus particulièrement, son droit de rester au Canada et de bénéficier de son assurance‑santé, tandis qu’elle n’avait pas les mêmes perspectives ni les mêmes avantages au Portugal;

 

·        rien n’oblige l’agent d’exécution de procéder à une analyse approfondie de la situation personnelle des personnes visées par une mesure de renvoi. C’est ce qu’a exprimé le juge O’Reilly dans Ramada, précitée, au paragraphe 7 :

 

« J'éprouve quelques réticences à accueillir cette demande de contrôle judiciaire, soucieux de ne pas imposer aux agents d'exécution l'obligation de procéder à une analyse approfondie des circonstances personnelles des personnes visées par une mesure de renvoi. Évidemment, les agents ne sont pas en mesure d'évaluer tous les éléments de preuve qui pourraient être pertinents à une demande fondée sur des raisons d'ordre humanitaire. Leur rôle est important mais relativement limité. À mon avis, l'exercice de leur pouvoir discrétionnaire ne devrait être mis en question par la Cour que dans les cas où ils ont omis de tenir compte d'un facteur important ou commis une erreur grave dans l'évaluation de la situation de la personne visée par une mesure de renvoi. » [Je souligne.]

 

[33]           Récemment, la jurisprudence sur le refus de différer l’exécution d’une mesure de renvoi a surtout porté sur des questions comme la portée de l’obligation (dans quelle mesure l’analyse doit être approfondie ou exhaustive), particulièrement par rapport à l’intérêt supérieur des enfants, et la façon d’évaluer le caractère adéquat ou suffisant des motifs donnés par l’agent d’exécution pour ne pas différer le renvoi. Je résume cette jurisprudence :

 

·        Saisi d’une demande de différer un renvoi, l’agent d’exécution ne se prononce pas sur le fond de la demande CH qui, lorsqu’il est question de l’intérêt supérieur des enfants, porterait notamment sur les conséquences à long terme sur les plans financier, émotionnel et autre. Lorsqu’il examine une demande de report, l’agent d’exécution est seulement tenu de prendre en considération l’intérêt à court terme des personnes concernées, y compris, lorsqu’un parent est expulsé, le bien‑être des enfants. Pour reprendre les paroles de mon collègue le juge Barnes dans Griffiths c. Canada (Solliciteur général), 2006 CF 127, une affaire très semblable à celle de l’espèce : « Un report est évidemment une mesure temporaire, appliquée pour composer avec un obstacle concret et sérieux à un renvoi immédiat. Ce n'est pas l'équivalent d'un sursis d'exécution de la mesure de renvoi, et ce n'est pas un moyen par lequel la personne qui sera expulsée puisse obtenir un répit indéfini. » Dans l’examen de l’intérêt supérieur à court terme des enfants, dont il a parlé dans Munar c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 761, comme incluant les dispositions prises pour les soins aux enfants au moment de l’expulsion d’un parent (voir Uthayakumar, précitée), il a également mentionné la décision Varga c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2006 CAF 394, dans laquelle le juge Evans a conclu, au nom de la Cour d’appel fédérale, ce qui suit, en parlant d’un agent de renvoi qui exerce son obligation légale : « L’article 48 confère à ce dernier un pouvoir discrétionnaire limité mais non défini pour ce qui est des modalités de voyage concernant le renvoi, y compris le moment où la mesure sera appliquée [...] Compte tenu du peu de latitude dont jouit l’agent de renvoi pour l’accomplissement de ses tâches, son obligation, le cas échéant, de prendre en considération l’intérêt des enfants touchés est minime, contrairement à l’examen complet qui doit être mené dans le cadre d’une demande CH présentée en vertu du  paragraphe 25(1). »

 

[34]           Je cite le juge Von Finckenstein dans la décision Adomako c. Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2006 CF 1100, où au paragraphe 18, il a écrit :

 

« Les agents chargés du renvoi possèdent un pouvoir discrétionnaire limité et, par conséquent, leurs motifs de décision sont souvent peu étoffés et ne sont peut‑être pas aussi bien rédigés qu’ils devraient l’être. Il faut lire ces motifs dans leur ensemble au lieu de s’arrêter à une seule phrase et de l’interpréter d’une façon trop littérale. En l’espèce, il ressort de l’examen de la décision dans son ensemble que l’agent chargé du renvoi était au courant de toute la situation et qu’il a tenu compte de tous les facteurs pertinents. » [Je souligne.]

 

[35]           Je me réfère aussi à la décision Boniowski c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 1161, dans laquelle le juge Mosley a conclu que, vu l’objet du paragraphe 48(2) de la LIPR, dans le cadre du régime établi par la loi : « […] l'agente s'est acquittée de toute obligation de motiver qu'elle pouvait avoir dans sa lettre de décision du 12 septembre 2003, où elle dit avoir reçu et examiné les arguments des demandeurs et avoir décidé de ne pas surseoir au renvoi ». Le juge était d’avis que, dans ce type de décision, l’agent dispose d’un pouvoir discrétionnaire très limité, et que ni la loi ni le règlement n’exigent qu’il rende une décision concrète ou formelle pour surseoir au renvoi. Selon lui : « La jurisprudence exige plutôt que l'agent reconnaisse qu'il jouit d'un certain pouvoir discrétionnaire de surseoir au renvoi, si les circonstances ne permettent pas d'appliquer la mesure de renvoi à un moment en particulier. » Il n’était pas convaincu de l’existence d’une obligation plus contraignante de fournir des motifs formels ou écrits « à l’appui de ce type de décision administrative ».

 

[36]           Quant à l’argument selon lequel les motifs de décision de l’agente ne mentionnaient pas si elle s’était attardée à l’intérêt de leur enfant ni comment elle avait soupesé ou pris en considération cet intérêt pour parvenir à sa décision définitive de ne pas surseoir au renvoi, le juge Mosley l’a rejeté en affirmant que l’agente chargée du renvoi n’était pas obligée d’effectuer un examen approfondi des facteurs à prendre en considération pour trancher la demande CH, parce que ce n'est pas le rôle de l’agent d'exécution et que celui‑ci ne doit tenir compte de cet intérêt que dans la mesure minimale requise pour l’exercice de son pouvoir discrétionnaire lui permettant de décider du moment du renvoi.

 

Analyse et conclusions

(a) L’incidence de l’arrêt Dunsmuir

[37]           On peut se demander quelle est l’incidence de l’arrêt Dunsmuir sur cette jurisprudence. L’arrêt Dunsmuir n’a pas seulement ramené deux normes relatives au caractère déraisonnable de la décision à une seule. La Cour suprême du Canada a donné des indications sur ce qui constitue une décision raisonnable. Elle était appelée à statuer sur la décision d’un tribunal crée par une loi provinciale. Cet arrêt ne devrait avoir aucune incidence sur l’interprétation de l’article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales, qui permet à la Cour fédérale de prendre des mesures de redressement si un office fédéral a rendu une décision entachée d’une erreur de droit ou fondée sur une conclusion de fait erronée.

 

[38]           Dans l’arrêt Mugesera c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2005] 2 R.C.S. 100, la Cour a déclaré ceci au sujet de la Loi sur les Cours fédérales :

 

37        L’article 18.1 de la Loi sur la Cour fédérale régit la demande de contrôle judiciaire visant une décision administrative rendue sous le régime de la Loi sur l’immigration.  Les alinéas 18.1(4)c) et d) disposent plus particulièrement que les mesures prévues ne peuvent être prises que si l’office fédéral a commis une erreur de droit ou fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée.  Pour les besoins de ces dispositions, la norme de révision de la décision correcte s’applique à l’égard des questions de droit.

 

38        En ce qui concerne la question de fait, le tribunal de révision ne peut intervenir que s’il est d’avis que l’office fédéral, en l’occurrence la SAI, « a rendu une décision ou une ordonnance fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont il dispose » (al. 18.1(4)d) de la Loi sur la Cour fédérale).  La SAI peut fonder sa décision sur les éléments de preuve qui lui sont présentés et qu’elle estime crédibles et dignes de foi dans les circonstances : par. 69.4(3) de la Loi sur l’immigrationLe tribunal de révision doit manifester une grande déférence à l’égard de ses conclusions.  La CAF a d’ailleurs elle‑même statué que la norme de contrôle applicable à une décision sur la crédibilité et la pertinence de la preuve était celle de la décision manifestement déraisonnable : Aguebor c. Ministre de l’Emploi et de l’Immigration (1993), 160 N.R. 315, par. 4. [Je souligne.]

 

[39]           Dans l’arrêt Dunsmuir, la Cour suprême du Canada a expliqué, au paragraphe 47, que le caractère raisonnable est une norme déférente qui procède du principe suivant : « certaines questions soumises aux tribunaux administratifs n’appellent pas une seule solution précise, mais peuvent plutôt donner lieu à un certain nombre de conclusions raisonnables.  Il est loisible au tribunal administratif d’opter pour l’une ou l’autre des différentes solutions rationnelles acceptables. » La Cour a ensuite ajouté qu’en matière de contrôle judiciaire, le caractère raisonnable « tient principalement à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à  l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit ». Au paragraphe 53, sous la rubrique « Détermination de la bonne norme de contrôle », la Cour a écrit ceci : « En présence d’une question touchant aux faits, au pouvoir discrétionnaire ou à la politique, la retenue s’impose habituellement d’emblée [...]  Nous sommes d’avis que la même norme de contrôle doit s’appliquer lorsque le droit et les faits s’entrelacent et ne peuvent aisément être dissociés. »

 

[40]           Bien que l’arrêt Dunsmuir ait réuni la norme de la décision manifestement déraisonnable et la norme de la décision raisonnable et, comme je l’ai mentionné, que l’incidence de l’article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales ne soit pas encore connu, je considère qu’en raison des circonstances en l’espèce, je dois appliquer la norme de la décision raisonnable parce que les questions soumises à la Cour ne sont pas essentiellement des questions de fait, mais qu’elles sont des questions mixtes de fait et de droit. La décision de l’agente devait appartenir aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit. En d’autres mots, pour parvenir à sa décision, l’agente devait tenir compte des observations présentées au nom du demandeur et apprécier les faits au regard du cadre législatif et jurisprudentiel. C’est ce qu'elle a fait, selon moi.

 

b) Conclusions

[41]           Je conclus que la demande de contrôle judiciaire doit être rejetée. Dans le contexte du droit et des faits, la décision de l’agente était raisonnable.

 

[42]           Le cadre jurisprudentiel indique clairement que la loi confère à l’agente un pouvoir discrétionnaire limité lui permettant différer un renvoi légitime. Sa décision devait porter sur le moment du renvoi. Le demandeur n’a soulevé qu’une seule question concernant le moment de son renvoi, soit celle de la demande CH. Il n'a pas réussi à établir, même s’il a eu l’occasion de le faire, que sa demande CH n’avait pas été réglée à cause d’un « arriéré ». Aucune erreur importante permettant de contester la décision de l’agente n’a été démontrée. Selon les termes de la décision du juge O’Reilly dans l’affaire Ramada, le demandeur n’a pas pu établir que l’agente n’avait pas tenu compte d’un fait important ou qu’elle avait commis une erreur grave dans l’évaluation des circonstances de son renvoi.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

JUGEMENT

 

LA COUR STATUE que la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée. Aucune question certifiée n’a été proposée.

 

 

                                                                                                            « François Lemieux »

                                                                                                ______________________________

                                                                                                                        Juge

 

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Édith Malo, LL.B.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-2784-07

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :            ALBERTO GIUSEPPE FERRARO c. LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 14 mai 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              Le juge Lemieux

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 27 juin 2008

 

 

COMPARUTIONS :

 

Mario Bellissimo

 

 

POUR LE DEMANDEUR

Asha Gafar

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Ormston, Bellissimo, Rotenberg

Avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

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