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Date : 20080530

Dossier :  IMM-3660-07

Référence :  2008 CF 692

Ottawa (Ontario), le 30 mai 2008

En présence de Madame le juge Tremblay-Lamer 

 

ENTRE :

Madre Erielle KIBANGOUD

demanderesse

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire fondée sur le paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la Loi) à l’encontre d’une décision rendue le 27 juin 2007 par une agente des visas (l’agente) selon laquelle la demande de permis d’études de la demanderesse fut rejetée.

 

[2]               La demanderesse est citoyenne du Congo-Brazzaville. Elle a soumis une demande de permis d’études à l’Ambassade du Canada à Dakar au Sénégal afin d’obtenir l’autorisation de venir étudier au Canada dans un programme d’études à l’Université de Montréal.

 

[3]               Dans sa décision, l’agente a rejeté la demande parce qu’elle n’était pas satisfaite que la demanderesse avait les moyens financiers de régler ses frais de scolarité et d’hébergement durant son séjour au Canada, et que celle-ci quitterait le Canada au terme de la période de séjour autorisée.

 

Objections préliminaires

[4]               Le défendeur prétend qu’aucun affidavit valable n’a été produit par la demanderesse au soutien de sa demande. Le seul affidavit déposé dans le dossier, par Claude François Itsouhou, rapporte des informations générales sur sa propre situation personnelle ainsi que sur son opinion personnelle quant au refus de la demande de permis d’études.

 

[5]               Dans un tel cas « lorsqu’aucune preuve fondée sur la connaissance personnelle n’est produite au soutien d’une demande de contrôle judiciaire, toute erreur alléguée par le demandeur doit être manifeste à la vue du dossier » (Turcinovica c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CFPI 164, [2002] A.C.F. no 216 (QL), au par. 14; Moldeveanu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] A.C.F. no 55 (QL), au par. 15). 

 

[6]               Le défendeur soulève une seconde objection préliminaire portant sur le dépôt de documents qui n’étaient pas en preuve devant l’agente.

 

[7]               La jurisprudence a établi que la révision du bien-fondé de la décision contestée s’effectue à la lumière des éléments ayant été mis en preuve devant l’office fédéral au moment de sa prise de décision (Zolotareva c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CF 1274, [2003] A.C.F. no 1596 (QL), au par. 36; voir Noor c. Canada (Développement des ressources humaines), [2000] A.C.F. no 574 (QL), au par. 6; Rodbom c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1999] A.C.F. no 636 (QL), au par. 1). En conséquence, ces documents seront ignorés dans l’analyse du présent dossier.

 

La norme de contrôle

[8]               La demanderesse prétend que les conclusions de l’agente portant sur la suffisance des ressources financières de la demanderesse et sur son intention de quitter le Canada après ses études sont erronées.

 

[9]               À la lumière de l’affaire Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, la Cour suprême du Canada et de la jurisprudence antérieure de cette Cour, je conclus que la norme applicable est celle de la décision raisonnable.

 

[10]           Quant aux questions portant sur l’équité procédurale, soit la convocation à une entrevue ou la demande d’informations supplémentaires, elles ne sont pas assujetties à la norme de contrôle. « Il appartient aux tribunaux judiciaires et non au ministre de donner une réponse juridique aux questions d'équité procédurale. » (Syndicat canadien de la fonction publique (S.C.F.P.) c. Ontario (Ministre du Travail), [2003] 1 R.C.S. 539, [2003] A.C.S. no 28 (QL), au par. 100).

 

 

 

L’analyse

 

[11]           Pour obtenir un permis d’études, un demandeur doit remplir les critères d’admission établis par le Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (le règlement). En particulier, selon l’article 216 du règlement, un demandeur doit démontrer à l’agente qu’ « il quittera le Canada à la fin de la période de séjour qui lui est applicable » et selon l’article 220 qu’il possède les ressources financières suffisantes pour « acquitter les frais de scolarité des cours qu’il a l’intention de suivre », « subvenir à ses propres besoins et à ceux des membres de sa famille qui l’accompagnent durant ses études », et pour « acquitter les frais de transport pour lui-même et les membres de sa famille […] pour venir au Canada et en repartir ». Le fardeau repose sur la demanderesse d’établir tous ces critères (Ramzi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 486, [2007] A.C.F. no 656 (QL), au par. 14).

 

[12]            À cet égard, sur le formulaire IMM1294 la demanderesse indique que ses dépenses au Canada seront assumées par ses parents ou par elle-même.  De plus, dans le document intitulé « Prise en charge » elle indique que son père s’engage à prendre en charge tous les frais relatifs à sa scolarité et à ses besoins d’études universitaires ainsi que ceux de son séjour au Canada. Par contre, le document intitulé « Autorisation – Parentale Aux Fins de Tutelle », sur lequel est inscrit le nom de M. Itsouhou, indique que « [M. Itsouhou] s'engage à assurer [l’]entretien et [l’]éducation [de la demanderesse] afin de promouvoir son épanouissement » ce qui n’est pas une déclaration explicite indiquant qu’il agira comme garant financier.

[13]           Selon l’information au dossier, le montant nécessaire pour une année d’étude au Canada dans le cas de la demanderesse est approximativement 22 000 $. La demanderesse a soumis une confirmation bancaire de la Banque Nationale du Canada, à son nom, indiquant qu’elle est cliente depuis octobre 2006 et qu’elle possède un montant de 11 005 $. Par ailleurs, la demanderesse a déclaré que le garant, son père, était inspecteur des douanes, et qu’il avait un salaire mensuel équivalent de 1 036,44 $ CAD. Le dossier démontre qu’il a cinq personnes à sa charge et son relevé bancaire du MUCODEC indique que ce salaire est la seule source de revenus de cette famille. Lagente n’était donc pas satisfaite que le père de la demanderesse, avec un salaire mensuel de 1 036,44 $ CAD pourrait subvenir aux besoins de la famille au Congo-Brazzaville, et financer les études de la demanderesse au Canada. 

 

[14]           À la lumière de cette preuve, il n’était pas déraisonnable à mon avis pour l’agente de conclure que les ressources financières de la demanderesse étaient insuffisantes pour défrayer les coûts relatifs au séjour d’études envisagé au Canada.

 

 

[15]           La demanderesse soutient également que l’agente a enfreint son obligation d’agir équitablement en ne lui accordant pas une entrevue ou en ne lui demandant pas de renseignements supplémentaires pour clarifier la situation.

 

[16]           Premièrement, je note qu’après une première étude du dossier, une lettre de l’Ambassade du Canada à Dakar a été remise à la demanderesse, un jour après le dépôt de sa demande, dans laquelle des informations supplémentaires étaient sollicitées afin de satisfaire l’agente qu’elle possède les fonds suffisants pour financer des études au Canada.

 

[17]           De plus, il est bien établi qu’un demandeur n’a aucun droit à une entrevue pour cause d’insuffisance de preuve à l’appui (Ramzi, ci-dessus, au par. 24; Dardic c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2001 CFPI 150, [2001] A.C.F. no 326 (QL), au par. 18). Il incombait à la demanderesse de faire parvenir à l’agente l’ensemble de la preuve qui pourrait satisfaire à l’égard de sa capacité financière. 

 

[18]           En espèce, l’agente n’avait pas l’obligation de demander encore une fois de l’information supplémentaire, ni de convoquer une entrevue.

 

[19]           En conséquence, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

 

JUGEMENT

 

LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire soit rejetée.

 

 

 

« Danièle Tremblay-Lamer »

Juge




COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-3660-07

 

INTITULÉ :                                       Madre Erielle KIBANGOUD c. MCI

 

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Montréal, Québec

 

DATE DE L’AUDIENCE :               le 28 mai 2008

 

MOTIFS  :                                         LE JUGE TREMBLAY-LAMER

 

DATE DES MOTIFS :                      le 30 mai 2008

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Me Stewart Istvanffy

 

POUR LA DEMANDERESSE

Me Liza Maziade

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Étude légale Stewart Istvanffy

Montréal, Québec

POUR LA DEMANDERESSE

 

 

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

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