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Date : 20080516

Dossier : IMM-3866-07

Référence : 2008 CF 601

ENTRE :

AJIT PAL SINGH RANDHAWA

 

Demandeur

 

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

Défendeur

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Pinard

[1]          Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire de la décision de la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (ci-après la « SPR »), statuant que le demandeur, un citoyen de l’Inde, n’est pas un « réfugié » au sens de la Convention, ni une « personne à protéger » selon les définitions données aux articles 96 et 97 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. (2001), ch. 27.

 

[2]          La SPR s’est basée sur le manque de crédibilité du demandeur, l’existence d’une possibilité de refuge intérieur (ci-après « PRI »), ainsi que l’existence de la protection de l’État, pour conclure que la demande du demandeur devait être rejetée.

 

[3]          Au sujet d’abord de l’existence d’une PRI, un revendicateur d’asile doit démontrer qu’il risque sérieusement d’être persécuté dans son pays, et ceci dans le pays entier. Si la SPR présente la possibilité d’une PRI, c’est au demandeur de démontrer que celle-ci n’existe pas (Rasaratnam c. Canada (ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1992] 1 C.F. 706 (C.A.), Thirunavukkarasu c. Canada (ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1994] 1 C.F. 589 (C.A.), Sarker c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 353, [2005] A.C.F. no 435 (1re inst.) (QL)).

 

[4]          En l’espèce, le demandeur prétend que les conclusions de la SPR concernant l’existence d’une PRI sont le résultat de conclusions négatives concernant sa crédibilité. Toutefois, voici ce que la SPR a exprimé :

     The panel finds that the claimant has not established that the family had a dealership and rented rooms to the alleged militants and does not find his testimony credible. Alternatively, the panel finds that the claimant has a viable [internal flight alternative].

 

 

 

[5]          Il est clair que la conclusion de la SPR concernant l’existence d’une PRI est une alternative à ses conclusions concernant la crédibilité du demandeur. La SPR a conclu que le demandeur pourrait vivre dans une autre ville en Inde sans avoir à craindre d’y être recherché par la police. À cet égard, le demandeur n’a soumis aucun autre argument que celui d’une conclusion reliée à celle du manque de crédibilité du demandeur. Ainsi, ce dernier n’a pas démontré le caractère déraisonnable de la conclusion d’existence d’une PRI.

 

[6]          Par ailleurs, en ce qui a trait à la conclusion de l’existence de la protection de l’État, il n’est pas facile de déterminer, à la lecture de la décision de la SPR, si sa conclusion que la protection de l’État existait en Inde est basée sur ses conclusions concernant le manque de crédibilité du demandeur. Il m’apparaît, de l’extrait suivant de la décision, qu’elle a considéré que, même si le demandeur avait été torturé par la police, il existait des recours :

     The documentary evidence indicates that some police officers were dealt with and some were not. There were guidelines implemented to be followed. Police disciplinary action is conducted internally and sometimes courts are not aware of this. However, these methods are in place.

 

 

 

[7]          Cependant, dans les paragraphes suivants, la SPR fait des commentaires qui semblent indiquer que sa conclusion concernant la protection de l’État est dépendante de sa conclusion concernant la crédibilité :

     The claimant testified of two incidents when he was arrested and both times he was released. The claimant despite his problems with the police was able to obtain a passport and a visa to travel to Canada and had no problems leaving India.

 

     The panel finds that implausible if he was being sought by the police. The panel does not find his story credible. The panel does not give any weight to his medical letter because the civil and political system is so corrupt (Information Request: Number: IND1007769) that such documents from a local politician can be obtained with the payment of a bribe.

 

 

 

[8]          Quoi qu’il en soit, je suis d’avis que l’intervention de la Cour concernant la question de l’existence de la protection de l’État n’est pas justifiée en l’espèce. Selon la Cour suprême du Canada, sans effondrement complet de l’appareil étatique, le fardeau incombe au revendicateur d’asile de démontrer, de façon claire et convaincante, qu’il ne peut pas réclamer la protection de son État (Canada (Procureur général) c. Ward, [1993] 2 R.C.S. 689). Dans The Minister of Citizenship and Immigration and Maria Del Rosario Flores Carrillo, 2008 FCA 94, la Cour d’appel fédérale a aussi exprimé ce qui suit :

A refugee who claims that the state protection is inadequate or non-existent bears the evidentiary burden of adducing evidence to that effect and the legal burden of persuading the trier of fact that his or her claim in this respect is founded. The standard of proof applicable is the balance of probabilities and there is no requirement of a higher degree of probability than what that standard usually requires. As for the quality of the evidence required to rebut the presumption of state protection, the presumption is rebutted by clear and convincing evidence that the state protection is inadequate or non-existent.

 

 

 

[9]          Ici, même si le demandeur avait eu des difficultés avec la police, la SPR a raisonnablement conclu à l’existence de recours utiles. À mon avis, le demandeur n’a donc pas présenté la preuve voulue pour repousser la présomption de l’existence de la protection de l’État.

 

[10]      Dans les circonstances, chacune des conclusions de la SPR, celle concernant l’existence d’une PRI et celle concernant l’existence de la protection de l’État, est suffisante en soi pour soutenir sa conclusion ultime que le demandeur n’est pas un réfugié ou une personne à protéger, et donc, pour rejeter cette demande de contrôle judiciaire (voir Jasvir Singh c. Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, 2003 CFPI 185, [2003] A.C.F. no 291 (1re inst.) (QL)).

 

[11]      En conséquence, la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

 

 

« Yvon Pinard »

Juge

 

Ottawa (Ontario)

Le 16 mai 2008

 

 

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-3866-07

 

INTITULÉ :                                       AJIT PAL SINGH RANDHAWA c. LE MINISTRE DE LA

                                                            CITOYENNETÉ ET DE  L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 8 avril 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT :            Le juge Pinard

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 16 mai 2008

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Me Michel Le Brun                              POUR LE DEMANDEUR

 

Me Isabelle Brochu                              POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Michel Le Brun                                                             POUR LE DEMANDEUR

Montréal (Québec)

 

John H. Sims, c.r.                                                         POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

 

 

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