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Date : 20080521

Dossier : IMM-4359-07

Référence : 2008 CF 604

ENTRE :

Vignarajah SELLATHURAI

Jeyanthi VIGNARAJAH

 

demandeurs

et

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Pinard

 

[1]       Il s’agit d’une demande qui vise à obtenir un bref de mandamus enjoignant le défendeur de compléter le traitement des demandes de résidence permanente des demandeurs et de prendre une décision en ce sens. Le 21 avril 2008, les demandeurs ont déposé une lettre auprès de la Cour confirmant que l’affaire avait été réglée, mais que les parties se présenteraient à l’audience pour demander une ordonnance sur consentement  et pour présenter leurs arguments au sujet des dépens. Les parties ont déposé la demande d’ordonnance sur consentement et ont présenté leurs arguments au sujet des dépens lors de l’audience qui s’est déroulée devant moi. 

 

[2]       Les demandeurs sont mari et femme et sont citoyens du Sri Lanka. M. Sellathurai est entré au Canada seul et a été reconnu comme réfugié. Il a ensuite déposé une demande de résidence permanente en son nom et au nom de son épouse le 17 avril 1998.

 

[3]       Après avoir attendu pendant deux ans pour que leurs demandes soient examinées, Mme Vignarajah est entrée au Canada seule et a été reconnue comme réfugiée le 25 janvier 2002. La même année, elle a déposé sa propre demande de résidence permanente.

 

[4]       Un certain nombre de communications ont été échangées entre les demandeurs et le défendeur, ainsi qu’entre d’autres autorités concernées par le traitement des demandes.  Le 28 juin 2002, le Service canadien du renseignement de sécurité (le SCRS) a avisé les demandeurs, par lettre, qu’ils avaient communiqué les résultats de leur enquête à Citoyenneté et Immigration Canada (CIC). Les demandeurs ont été, en même temps, priés de se présenter à des entrevues et de fournir des renseignements à jour ainsi que des compléments d’information. Il ressort du dossier que les demandeurs se seraient conformés à toutes les demandes du défendeur en temps utile.

 

[5]       Le 22 octobre 2007, les demandeurs ont déposé la présente demande de contrôle judiciaire. Le défendeur a déposé l’affidavit d’Amandeep Sangha, superviseure de l’Unité de traitement des demandes du bureau de CIC à Vancouver. Selon Mme Sangha, le dossier des demandeurs avait été envoyé à l’Agence des services frontaliers du Canada (l’ASFC) en juillet 2007. L’ASFC a informé Mme Sangha qu’elle aura complété le traitement du dossier au plus tard le 30 juin 2008. Mme Sangha affirme que CIC complétera le traitement de la demande au plus tard le 30 août 2008, à condition que les demandeurs se conforment aux demandes de CIC et, en particulier, qu’ils se soumettent à un nouvel examen médical.

 

[6]       Comme mentionné précédemment, les parties ont conclu une entente dont voici les termes :

1) L’Agence des services frontaliers du Canada fera une recommandation relativement à la vérification de sécurité concernant les demandeurs à Citoyenneté et Immigration Canada au plus tard le 30 juin 2008;

2) Immigration Canada prendra une décision définitive relativement à la demande de résidence permanente au plus tard le 30 juin 2008;

3) Si les demandeurs sont envoyés à Immigration Canada pour traitement, ce traitement sera complété au plus tard le 30 août 2008;

4) Les demandeurs se conformeront en temps utile à toutes demandes de renseignements de sorte à faciliter le traitement de leurs demandes de résidence permanente.

 

 

[7]       La seule question qui se pose donc est celle de savoir s’il convient de rendre une ordonnance d’adjudication des dépens.

 

[8]       En matière d’immigration, c’est l’article 22 des Règles des Cours fédérales en matière d’immigration et de protection des réfugiés, DORS/93-22, qui régit


l’adjudication des dépens. Voici le texte de cette disposition :

  22. Sauf ordonnance contraire rendue par un juge pour des raisons spéciales, la demande d’autorisation, la demande de contrôle judiciaire ou l’appel introduit en application des présentes règles ne donnent pas lieu à des dépens.

  22. No costs shall be awarded to or payable by any party in respect of an application for leave, an application for judicial review or an appeal under these Rules unless the Court, for special reasons, so orders.

 

[9]       Dans l’arrêt Kalachnikov c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2003), 236 F.T.R. 142, la Cour a estimé qu’un retard de trois ans- dus à des préoccupations en matière de sécurité selon le défendeur- pour traiter de la demande du demandeur était déraisonnable. Toutefois, la Cour n’a pas adjugé des dépens, car elle a conclu que le demandeur n’avait pas démontré l’existence de « raisons spéciales ».

 

[10]     Dans l’arrêt Abdolkhaleghi c. Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, 2005 CF 729, [2005] A.C.F. no 967 (1re inst.) (QL), le demandeur a sollicité un bref de mandamus après avoir attendu quatre ans pour que sa demande soit traitée. Durant ce temps, le défendeur avait tout simplement déclaré que son enquête était en cours. La Cour a conclu que le retard du défendeur avait été  déraisonnable et injustifié, et elle a adjugé des dépens calculés conformément à la colonne V du tarif B  des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106.

 

[11]     J’estime que l’arrêt Khorrami c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2002), 223 F.T.R. 149, cité par le défendeur, n’est pas utile, car la Cour a refusé d’adjuger des dépens dans cette affaire du seul fait qu’il manquait de preuve et d’arguments concernant la raisonnabilité du retard. Dans la présente instance, le demandeur a soutenu en fait que le retard était déraisonnable et il a déposé des éléments de preuve convaincants en ce sens.

 

[12]     Le défendeur fait aussi référence à l’arrêt Singh c. Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, 2005 CF 544, [2005] A.C.F. no 669 (1re inst.) (QL), et soutient qu’il ne devrait pas être pénalisé pour avoir effectué les vérifications des antécédents qui s’imposaient. Dans cette affaire, le demandeur avait cherché à obtenir des dépens avocat‑client après un retard de douze ans dans le traitement de sa demande de résidence permanente. Toutefois, la Cour a conclu que même si le défendeur avait pris un temps déraisonnable pour arriver à sa décision quant au droit d’établissement du demandeur, il ne s’était pas comporté d’une manière qui justifiait l’adjudication des dépens avocat‑client. Plus particulièrement, le défendeur ne s’était pas opposé à une demande d’autorisation de solliciter un bref de mandamus et avait accéléré le traitement de la demande du demandeur. La Cour a, néanmoins, adjugé des dépens partie-partie.

 

[13]     Dans la présente instance, il y a un retard de dix ans pour lequel le défendeur a fourni peu ou point d’explication. Le défendeur fait valoir que les dossiers des demandeurs avaient été envoyés à l’ASFC en juillet 2007. Toutefois, les demandeurs ont déposé leurs demandes de résidence permanente en 1998 et en 2002. Le défendeur n’a pas fourni d’explication quant au temps qu’il a pris pour envoyer le dossier à l’ASFC pour commencer. À mon avis, si le défendeur s’était acquitté de ses obligations dans un délai raisonnable, les demandeurs n’auraient pas été obligés d’engager des frais pour introduire la présente demande de contrôle judiciaire (voir Dragan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2003] 4 C.F. 189). Par conséquent, je conclurai qu’il convient dans la présente instance d’adjuger des dépens sur une base partie-partie, dépens que je fixe au montant forfaitaire de 2 500 $ en vertu du paragraphe 400(4) des Règles des Cours fédérales.

 

« Yvon Pinard »          

_____________________

Juge                

 

 

Ottawa (Ontario)

Le 21 mai 2008

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

David Aubry, LL.B.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                               IMM-4359-07

 

INTITULÉ :                                                              VIGNARAJAH SELLATHURAI

                                                                                   JEYANTHI VIGNARAJAH

                                                                                   c.

                                                                                   LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                       VANCOUVER

(COLOMBIE-BRITANNIQUE)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                      LE 30 AVRIL 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                   LE JUGE PINARD

 

DATE DES MOTIFS :                                            LE 21 MAI 2008

 

 

COMPARUTIONS :

 

Daniel K. McLeod                                                      POUR LES DEMANDEURS

 

Kimberly Shane                                                          POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Preston Clark McLeod                                               POUR LES DEMANDEURS

Avocats

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

John H. Sims, c.r.                                                       POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

 



Date : 20080521

Dossier : IMM-4359-07

Ottawa (Ontario), le 21 mai 2008

En présence de monsieur le juge Pinard

ENTRE :

VIGNARAJAH SELLATHURAI

JEYANTHI VIGNARAJAH

 

demandeurs

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

défendeurs

 

 

Avec l’accord des parties qu’une ordonnance accueillant la demande des demandeurs d’un bref de mandamus soit rendue;

 

Avec l’accord des parties que :

1) L’Agence des services frontaliers du Canada fera une recommandation relativement à la vérification de sécurité concernant les demandeurs à Citoyenneté et Immigration Canada au plus tard le 30 juin 2008;

2) Immigration Canada prendra une décision définitive relativement à la demande de résidence permanente au plus tard le 30 juin 2008;

3) Si les demandeurs sont envoyés à Immigration Canada pour traitement, ce traitement sera complété au plus tard le 30 août 2008;

4) Les demandeurs se conformeront en temps utile à toutes demandes de renseignements de sorte à faciliter le traitement de leurs demandes de résidence permanente.

 

ORDONNANCE

 

            La demande de mandamus est accueillie par la présente, sous réserve de l’entente mentionnée précédemment entre les parties. Des dépens pour un montant de 2 500 $ sont adjugés en faveur des demandeurs.

 

« Yvon Pinard »          

______________________

Juge                

 

 

Traduction certifiée conforme

David Aubry, LL.B.

 

 

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