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Date : 20080430

Dossier : T-520-07

Référence : 2008 CF 563

Ottawa (Ontario), le 30 avril 2008

En présence de madame la juge Heneghan

 

 

Entre :

DAWIT TUQUABO

demandeur

 

et

 

le procureur général du Canada
et l’agence du revenu du Canada

défendeurs

 

 

motifs du jugement et jugement

 

 

I.          Introduction

[1]               M. Dawit Tuquabo (le demandeur) sollicite le contrôle judiciaire de la décision arbitrale rendue le 22 novembre 2006 par M. Ian R. Mackenzie. Dans cette décision, l’arbitre a conclu qu’il n’avait pas la compétence pour entendre un grief présenté par le demandeur.

 

II.         Le contexte

[2]               Le demandeur a été un employé nommé pour une période déterminée à l’Agence du revenu du Canada (l’ARC) pendant la période du 15 mars 2004 au 12 février 2006. Il était employé à titre de commis aux Services aux cotisations de la Division du traitement des déclarations (l’organisme d’attache) au Bureau international des services fiscaux du 15 mars au 18 juillet 2004. Il a alors accepté une mutation latérale temporaire au Centre du service à la clientèle pour la rémunération (l’organisme d’accueil). Le 12 janvier 2006, le directeur de l’organisme d’attache a décidé de ne pas renouveler l’emploi pour une période déterminée du demandeur qui prenait fin le 3 février 2006.

 

[3]               Le demandeur a écrit au commissaire de l’ARC le 13 janvier 2006, lui demandant de mener une enquête sur ce qu’il estimait être un [traduction] « abus de pouvoir » de la part de ses superviseurs. Il alléguait également un traitement discriminatoire. Le demandeur considérait que cette lettre était son grief.

 

[4]               Le 27 janvier 2006, la sous-commissaire a répondu au demandeur l’avisant que ses conclusions n’indiquaient aucun abus de pouvoir de la part de l’organisme d’accueil. La sous‑commissaire a réitéré qu’un emploi pour une période déterminée ne peut pas être considéré comme une offre de nomination pour une période indéterminée et qu’il peut être mis fin à l’emploi pour manque de travail, cessation des fonctions à exécuter et rendement au travail.

 

[5]               La convention collective applicable conclue entre l’ARC et l’Alliance de la Fonction publique du Canada prévoit que le dernier palier de la procédure de grief est la Commission ou son représentant autorisé.

 

[6]               L’audience devant l’arbitre a eu lieu le 18 septembre 2006. La question dont il était saisi était celle de savoir si la lettre du demandeur datée du 13 janvier 2006 était un « grief » conformément à la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22, article 2, qui est la partie I de la Loi sur la modernisation de la fonction publique, L.C. 2003, ch. 22 (la Loi). La deuxième question était celle de savoir si le renvoi du demandeur à l’arbitrage était un renvoi valide.

 

[7]               L’arbitre a conclu que la procédure de grief dont disposait le demandeur était énoncée dans la convention collective. Le Règlement de la Commission des relations de travail dans la fonction publique, DORS/2005-79 (le Règlement) établit le cadre de base de la procédure de grief. Selon ce qu’exige le Règlement, un employé qui souhaite présenter un grief « remplit » la formule établie par son employeur et approuvée par la Commission. L’arbitre a conclu que le demandeur n’avait pas présenté une formule de grief.

 

[8]               Le paragraphe 241(1) de la Loi prévoit qu’un « vice de forme » ne rend pas une procédure invalide. L’arbitre a conclu que la lettre du demandeur datée du 13 janvier 2006 demandait une enquête et le maintien de son statut d’emploi pendant l’enquête. L’arbitre a décidé qu’une demande d’enquête n’est pas la même chose qu’un grief à l’encontre d’une allégation de cessation d’emploi pour motif disciplinaire et que le demandeur n’avait pas demandé d’audience relative au grief au dernier palier.

 

[9]               L’arbitre a conclu que la lettre du demandeur au commissaire ne pouvait pas être considérée comme un grief valide et, par conséquent, il n’avait pas compétence pour procéder à l’arbitrage des plaintes du demandeur.

 

III.       Analyse et décision

 

[10]           La seule question à trancher dans la présente demande de contrôle judiciaire est celle de savoir si l’arbitre a commis une erreur susceptible de contrôle.

 

[11]           Le premier point à examiner est la norme de contrôle applicable. Dans le récent arrêt de la Cour suprême du Canada dans Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, la cour a déclaré que les décisions administratives des décideurs pouvaient être examinées selon la norme de la décision correcte ou la norme de la décision raisonnable. En l’espèce, l’arbitre devait décider si le demandeur avait déposé un grief conformément à la Loi, donnant ainsi lieu à la procédure de grief. Il est possible de qualifier cette question de question mixte de fait et de droit. À mon avis, la norme de contrôle applicable en l’espèce est la norme de la décision raisonnable. Voir l’arrêt Dunsmuir, au paragraphe 53 :

En présence d’une question touchant aux faits, au pouvoir discrétionnaire ou à la politique, la retenue s’impose habituellement d’emblée (Canada (Procureur général) c. Mossop, [1993] 1 R.C.S. 554, p. 599‑600; Dr Q, par. 29; Suresh, par. 29‑30). Nous sommes d’avis que la même norme de contrôle doit s’appliquer lorsque le droit et les faits s’entrelacent et ne peuvent aisément être dissociés.

 

[12]           L’article 208 de la Loi énonce comme suit les droits d’un employé relativement à la présentation d’un grief :

208. (1) Sous réserve des paragraphes (2) à (7), le fonctionnaire a le droit de présenter un grief individuel lorsqu’il s’estime lésé :

 

a) par l’interprétation ou l’application à son égard :

 

 

(i) soit de toute disposition d’une loi ou d’un règlement, ou de toute directive ou de tout autre document de l’employeur concernant les conditions d’emploi,

 

(ii) soit de toute disposition d’une convention collective ou d’une décision arbitrale;

 

b) par suite de tout fait portant atteinte à ses conditions d’emploi.

 

 

Réserve

(2) Le fonctionnaire ne peut présenter de grief individuel si un recours administratif de réparation lui est ouvert sous le régime d’une autre loi fédérale, à l’exception de la Loi canadienne sur les droits de la personne.

 

Réserve

(3) Par dérogation au paragraphe (2), le fonctionnaire ne peut présenter de grief individuel relativement au droit à la parité salariale pour l’exécution de fonctions équivalentes.

 

Réserve

(4) Le fonctionnaire ne peut présenter de grief individuel portant sur l’interprétation ou l’application à son égard de toute disposition d’une convention collective ou d’une décision arbitrale qu’à condition d’avoir obtenu l’approbation de l’agent négociateur de l’unité de négociation à laquelle s’applique la convention collective ou la décision arbitrale et d’être représenté par cet agent.

Réserve

(5) Le fonctionnaire qui choisit, pour une question donnée, de se prévaloir de la procédure de plainte instituée par une ligne directrice de l’employeur ne peut présenter de grief individuel à l’égard de cette question sous le régime de la présente loi si la ligne directrice prévoit expressément cette impossibilité.

 

 

 

Réserve

(6) Le fonctionnaire ne peut présenter de grief individuel portant sur une mesure prise en vertu d’une instruction, d’une directive ou d’un règlement établis par le gouvernement du Canada, ou au nom de celui-ci, dans l’intérêt de la sécurité du pays ou de tout État allié ou associé au Canada.

Force probante absolue du décret

(7) Pour l’application du paragraphe (6), tout décret du gouverneur en conseil constitue une preuve concluante de ce qui y est énoncé au sujet des instructions, directives ou règlements établis par le gouvernement du Canada, ou au nom de celui-ci, dans l’intérêt de la sécurité du pays ou de tout État allié ou associé au Canada.

208. (1) Subject to subsections (2) to (7), an employee is entitled to present an individual grievance if he or she feels aggrieved

 

(a) by the interpretation or application, in respect of the employee, of

 

(i) a provision of a statute or regulation, or of a direction or other instrument made or issued by the employer, that deals with terms and conditions of employment, or

(ii) a provision of a collective agreement or an arbitral award; or

 

(b) as a result of any occurrence or matter affecting his or her terms and conditions of employment.

 

Limitation

(2) An employee may not present an individual grievance in respect of which an administrative procedure for redress is provided under any Act of Parliament, other than the Canadian Human Rights Act.


Limitation

(3) Despite subsection (2), an employee may not present an individual grievance in respect of the right to equal pay for work of equal value.

 

 

 

Limitation

(4) An employee may not present an individual grievance relating to the interpretation or application, in respect of the employee, of a provision of a collective agreement or an arbitral award unless the employee has the approval of and is represented by the bargaining agent for the bargaining unit to which the collective agreement or arbitral award applies.

 

 

Limitation

(5) An employee who, in respect of any matter, avails himself or herself of a complaint procedure established by a policy of the employer may not present an individual grievance in respect of that matter if the policy expressly provides that an employee who avails himself or herself of the complaint procedure is precluded from presenting an individual grievance under this Act.
 

Limitation

(6) An employee may not present an individual grievance relating to any action taken under any instruction, direction or regulation given or made by or on behalf of the Government of Canada in the interest of the safety or security of Canada or any state allied or associated with Canada.

Order to be conclusive proof

 

(7) For the purposes of subsection (6), an order made by the Governor in Council is conclusive proof of the matters stated in the order in relation to the giving or making of an instruction, a direction or a regulation by or on behalf of the Government of Canada in the interest of the safety or security of Canada or any state allied or associated with Canada.

 

[13]           Un employé peut renvoyer un grief individuel à l’arbitrage conformément à l’article 209 de la Loi, comme suit :

209. (1) Après l’avoir porté jusqu’au dernier palier de la procédure applicable sans avoir obtenu satisfaction, le fonctionnaire peut renvoyer à l’arbitrage tout grief individuel portant sur :

 

 

 

a) soit l’interprétation ou l’application, à son égard, de toute disposition d’une convention collective ou d’une décision arbitrale;

 

b) soit une mesure disciplinaire entraînant le licenciement, la rétrogradation, la suspension ou une sanction pécuniaire;

 

c) soit, s’il est un fonctionnaire de l’administration publique centrale :

 

(i) la rétrogradation ou le licenciement imposé sous le régime soit de l’alinéa 12(1)d) de la Loi sur la gestion des finances publiques pour rendement insuffisant, soit de l’alinéa 12(1)e) de cette loi pour toute raison autre que l’insuffisance du rendement, un manquement à la discipline ou une inconduite,

 

(ii) la mutation sous le régime de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique sans son consentement alors que celui-ci était nécessaire;

 

d) soit la rétrogradation ou le licenciement imposé pour toute raison autre qu’un manquement à la discipline ou une inconduite, s’il est un fonctionnaire d’un organisme distinct désigné au titre du paragraphe (3).

 

Application de l’alinéa (1)a)

(2) Pour que le fonctionnaire puisse renvoyer à l’arbitrage un grief individuel du type visé à l’alinéa (1)a), il faut que son agent négociateur accepte de le représenter dans la procédure d’arbitrage.

 

Désignation

(3) Le gouverneur en conseil peut par décret désigner, pour l’application de l’alinéa (1)d), tout organisme distinct.

209. (1) An employee may refer to adjudication an individual grievance that has been presented up to and including the final level in the grievance process and that has not been dealt with to the employee’s satisfaction if the grievance is related to

 

(a) the interpretation or application in respect of the employee of a provision of a collective agreement or an arbitral award;

 

(b) a disciplinary action resulting in termination, demotion, suspension or financial penalty;

 

(c) in the case of an employee in the core public administration,

 

(i) demotion or termination under paragraph 12(1)(d) of the Financial Administration Act for unsatisfactory performance or under paragraph 12(1)(e) of that Act for any other reason that does not relate to a breach of discipline or misconduct, or

 

 

 

 

(ii) deployment under the Public Service Employment Act without the employee’s consent where consent is required; or

 

(d) in the case of an employee of a separate agency designated under subsection (3), demotion or termination for any reason that does not relate to a breach of discipline or misconduct.

 

 

 

Application of paragraph (1)(a)

(2) Before referring an individual grievance related to matters referred to in paragraph (1)(a), the employee must obtain the approval of his or her bargaining agent to represent him or her in the adjudication proceedings.

 

Designation

(3) The Governor in Council may, by order, designate any separate agency for the purposes of paragraph (1)(d).

 

[14]           Les articles 66 et 67 du Règlement décrivent les formalités à suivre pour la présentation d’un grief individuel. Les articles 66 et 67 prévoient ce qui suit :

66. (1) L’employeur établit une formule de grief individuel qui indique les renseignements à fournir par le fonctionnaire s’estimant lésé, notamment :

 

a) les nom et adresse du fonctionnaire, son numéro de téléphone, son lieu de travail, le nom de sa section ou de son unité, celui de sa direction ou division, le titre de son poste, sa classification et le nom de son employeur;

 

b) selon le cas :

 

(i) un exposé de la nature de chaque action, omission ou situation qui permettra d’établir la prétendue violation ou fausse interprétation ayant donné lieu au grief, y compris, le cas échéant, le renvoi à toute disposition pertinente d’une loi, d’un règlement, d’une convention collective, d’une décision arbitrale ou d’une directive ou autre document de l’employeur concernant les conditions d’emploi,

 

 

(ii) un exposé du prétendu fait portant atteinte à ses conditions d’emploi;

 

 

 

c) la date de la prétendue violation ou fausse interprétation ou du prétendu fait portant atteinte à ses conditions d’emploi;

 

 

 

d) les mesures correctives demandées.

 

Approbation

(2) L’employeur soumet la formule à l’approbation de la Commission, qui l’approuve si elle demande tous les renseignements visés aux alinéas (1)a) à d) et si tout autre renseignement qu’elle demande est pertinent pour la résolution de griefs individuels.

 

Exemplaires

(3) Une fois la formule approuvée, l’employeur en met des exemplaires à la disposition de ses fonctionnaires.

 

67. Le fonctionnaire qui souhaite présenter un grief individuel remplit la formule établie par son employeur et approuvée par la Commission, et la remet à son supérieur hiérarchique immédiat ou à son chef de service local visé au paragraphe 65(1).

66. (1) An employer shall prepare a form for an individual grievance that sets out the information to be provided by the grievor, including

 

(a) the name, address, telephone number, place of work, position title, division and section or unit and classification of the grievor as well as the name of the grievor's employer;

 

 

 

(b) either

 

(i) a statement of the nature of each act, omission or other matter that establishes the alleged violation or misinterpretation giving rise to the grievance including, as the case may be, a reference to any relevant provision of a statute or regulation or of a direction or other instrument made or issued by the employer, that deals with the terms and conditions of employment or any relevant provision of a collective agreement or an arbitral award, or

 

(ii) a statement of the alleged occurrence or matter affecting the grievor's terms and conditions of employment;

 

(c) the date on which the alleged violation or misinterpretation or the alleged occurrence or matter affecting the grievor's terms and conditions of employment occurred; and

 

(d) the corrective action requested.

 

Approval

(2) The form shall be submitted to the Board for approval, and the Board shall approve it if the form requests the information that is required under paragraphs (1)(a) to (d) and if any other information requested on the form is relevant to resolving the individual grievance.

 

Copies

(3) The employer shall make copies of the approved form available to all of its employees.

 

 

67. An employee who wishes to present an individual grievance shall do so on the form provided by the employer and approved by the Board and shall submit it to the employee's immediate supervisor or the employee's local officer-in-charge identified under subsection 65(1).

 

[15]           L’arbitre a conclu que le demandeur n’avait pas présenté un grief selon la formule appropriée, comme l’exigent le Règlement et la Loi. L’article 241 porte sur l’effet d’un vice de procédure ou de forme, comme suit :

241. (1) Les procédures prévues par la présente partie ne sont pas susceptibles d’invalidation pour vice de forme ou de procédure.

 

Procédure de grief

(2) Pour l’application du paragraphe (1), l’omission de présenter le grief à tous les paliers requis conformément à la procédure applicable ne constitue pas un vice de forme ou de procédure.

241. (1) No proceeding under this Act is invalid by reason only of a defect in form or a technical irregularity.

 

 

Grievance process

(2) The failure to present a grievance at all required levels in accordance with the applicable grievance process is not a defect in form or a technical irregularity for the purposes of subsection (1).

 

[16]           Le paragraphe 241(2) prévoit qu’un vice dans la formule de grief ne sera pas excusé aux termes du paragraphe 241(1). Le paragraphe 241(2) stipule clairement qu’une personne lésée est tenue de suivre la procédure de grief à « tous les paliers requis » et que l’omission de le faire ne constituera pas un vice de forme ou de procédure, aux fins du paragraphe 241(1).

 

[17]           L’arbitre a conclu que le demandeur n’avait pas présenté un grief. Il a conclu que la lettre du 13 janvier 2006 ne respectait pas les exigences de la Loi ou du Règlement. Il a décidé que la lettre était une demande d’enquête, non un grief, et qu’il n’avait pas compétence pour procéder à un arbitrage de la plainte du demandeur.

 

[18]           Le demandeur soutient que cette conclusion est discriminatoire au sens de l’article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés, partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R.-U.), 1982, ch. 11 (la Charte). Il soutient que la conclusion de l’arbitre le privait d’une mesure de réparation, contrairement à l’article 24 de la Charte.

 

[19]           Le demandeur s’appuie sur l’article 24 de la Charte afin de justifier la présente demande devant la Cour. Il fait valoir que, puisque la décision de l’arbitre l’a privé de l’occasion d’une audience concernant les circonstances de la cessation de son emploi, il peut solliciter l’aide de la Cour. Il utilise l’expression la [traduction] « poursuite de la justice » pour qualifier son recours devant la Cour.

 

[20]           À mon avis, l’argument du demandeur portant sur la Charte est mal fondé. La conclusion de l’arbitre, quant à la nature de la lettre du 13 janvier 2006, est raisonnable, eu égard aux exigences du Règlement en ce qui a trait à la forme d’un grief et eu égard au libellé clair du paragraphe 241(2) de la Loi. Dans sa lettre du 13 janvier 2006, le demandeur demandait une enquête. Il n’a pas présenté un grief et n’a pas suivi la procédure de grief énoncée dans la Loi.

 

[21]           Il s’ensuit que la conclusion définitive de l’arbitre, selon laquelle il n’avait pas compétence pour entendre la plainte du demandeur, est également raisonnable. Je suis d’accord avec les observations des défendeurs selon lesquelles le demandeur savait ou aurait dû savoir qu’une procédure de grief existait et que, conformément au paragraphe 241(2) de la Loi, cette procédure aurait dû être suivie. Dans Collin c. Canada (Procureur général), [2006] A.C.F. no 729, au paragraphe 5, la Cour a examiné l’importance de respecter la procédure interne de règlement des griefs, comme suit :

La Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition prévoit un mécanisme global de règlement des griefs. La jurisprudence démontre que la procédure interne de règlement des griefs prévue par la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition et son règlement d'application doit être épuisée avant de déposer une demande de contrôle judiciaire (Leach c. Établissement Fenbrook, 2004 CF 1570 (CanLII), 2004 CF 1570; Veley c. Établissement Fenbrook, [2004] A.C.F. no 1902 (1re inst.) (QL); Giesbrecht c. Canada, [1998] A.C.F. no 621 (1re inst.) (QL)). La décision définitive rendue à l'issue de la procédure de règlement des griefs est, elle, susceptible de faire l'objet d'une demande de contrôle judiciaire.

 

[22]           Le demandeur n’a pas démontré qu’il avait subi un acte discriminatoire contrairement à l’article 15 de la Charte. Il n’a pas démontré qu’il avait subi un traitement discriminatoire fondé sur l’un des motifs énumérés à l’article 15 ou qu’un système de résolution de plaintes liées au travail peut être considéré comme un motif de discrimination analogue. L’article 15 de la Charte ne s’applique pas en l’espèce.

 

[23]           De même, je ne vois aucun fondement à l’argument du demandeur basé sur l’article 24 de la Charte. Il a sollicité une réparation pour la perception d’un tort survenu dans le lieu de travail. Sa réparation repose sur la procédure de grief. Le demandeur connaît la procédure de grief. Comme l’ont souligné les défendeurs, il a déjà présenté, sans succès, une demande de contrôle judiciaire d’une décision de la Commission des relations de travail de l’Ontario; voir Tuquabo c. United Steel Workers of America, Local 9597, [2006] S.C.C.A. no 442, et Securitas Canada Ltd., [2003] O.L.R.D. no 2584, en ligne : QL (C.R.T.O.).

 

[24]           Le demandeur était tenu d’épuiser la procédure de grief avant d’amorcer la procédure d’arbitrage et de contrôle judiciaire; voir Estwick c. Canada (Conseil du trésor), [2004] A.C.F.no 1259, au paragraphe 34.

 

[25]           À l’audience de la présente demande, le demandeur a tenté de présenter des éléments de preuve supplémentaires, notamment des articles de journaux concernant l’accès aux tribunaux. L’avocat des défendeurs s’y est objecté, au motif que la demande de contrôle judiciaire devrait être examinée en fonction de la preuve dont était saisi l’arbitre.

 

[26]           L’objection des défendeurs était bien fondée et le demandeur s’est vu refuser la permission de présenter d’autres éléments de preuve qui, de toute manière, n’étaient pas pertinents.

 

[27]           Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire sera rejetée avec dépens.

 

 

 

JUGEMENT

 

La demande de contrôle judiciaire est rejetée avec dépens.

 

 

« E. Heneghan »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

 

Christian Laroche, juriste-traducteur

 


Cour fédérale

 

Avocats inscrits au dossier

 

 

 

Dossier :                                                                T-520-07

 

Intitulé :                                                               DAWIT TUQUABO

                                                                                    c.

le procureur général

du Canada et l’agence

du revenu du Canada

 

 

Lieu de l’audience :                                         Ottawa (Ontario)

 

Date de l’audience :                                       le 1er novembre 2007

 

Motifs du jugement
et jugement 
:                                                      la juge HENEGHAN

 

Date des motifs

ET DU JUGEMENT :                                               le 30 avril 2008

 

 

 

Comparutions :

 

Dawit Tuquabo (pour son compte)                                POUR LE DEMANDEUR

 

Simon Kamel                                                                POUR LES DÉFENDEURS

 

 

Avocats inscrits au dossier :

 

John H. Sims, c.r.                                                         POUR LES DÉFENDEURS
Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

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