Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

Date : 20080514

Dossier : IMM-4200-07

Référence : 2008 CF 600

Toronto (Ontario), le 14 mai 2008

En présence de madame la juge Dawson

 

 

ENTRE :

JIE DONG GONG

demandeur

 

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Jie Dong Gong est un citoyen de la République populaire de Chine (la RPC) qui est entré au Canada en 2000 et qui a demandé l’asile. La demande de M. Gong était fondée sur une crainte de persécution religieuse. Il a affirmé qu’il était un sympathisant de certains membres du Falun Gong et qu’il était associé à des membres du Falun Gong. Sa demande d’asile a été rejetée puisque la Section du statut de réfugié (la SSR) de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié a jugé qu’il n’était pas un témoin fiable ou digne de confiance. La SSR a conclu que les incidents que M. Gong avait décrits ne s’étaient pas produits.

 

[2]               Par la suite, M. Gong a présenté une demande d’examen des risques avant renvoi (l’ERAR) fondée sur les mêmes faits. La demande a été rejetée et, en l’espèce, M. Gong sollicite le contrôle judiciaire de cette décision défavorable.

 

[3]               Durant la plaidoirie, l’avocat de M. Gong n’a soulevé que deux questions. Premièrement, il a allégué que l’agent n’a pas évalué le dossier de M. Gong en se fondant sur les opinions politiques qu’on lui attribuait. Deuxièmement, l’avocat a plaidé que l’agent a commis une erreur en concluant que la preuve documentaire ne [traduction] « mentionnait pas que les sympathisants du FLG [Falun Gong] ou les personnes qui s’associent par inadvertance à des membres du FLG sont eux‑mêmes arrêtés et soumis à des traitements ou des peines cruels et inusités ».

 

[4]               La présente demande de contrôle judiciaire est rejetée puisqu’on ne m’a pas convaincue que l’agent a commis les erreurs qu’on lui reproche.

 

[5]               En ce qui concerne la première erreur alléguée, M. Gong soutient que l’agent n’a pas examiné le fondement véritable de sa demande. M. Gong allègue que la question n’est pas de savoir s’il est un membre ou un simple associé (ou sympathisant) du Falun Gong, mais plutôt de savoir comment les autorités de la RPC le perçoivent. Selon M. Gong, les autorités estiment qu’il a  commis des actes répréhensibles et qu’il devrait être puni pour de tels actes.

 

 

[6]               À mon avis, l’agent a bel et bien examiné ce fondement de la demande de M. Gong. À la page 4 de ses notes, l’agent a commencé ses motifs de la façon suivante : [traduction] « Je conclus que le demandeur a fourni peu d’éléments de preuve montrant qu’il est recherché par les autorités chinoises ou que celles-ci le considèrent comme un membre du FLG. » Cette conclusion repose sur le raisonnement suivant qui se trouve à la page 10 des motifs de l’agent :

[traduction]

 

Je conclus que le demandeur a fourni peu d’éléments de preuve montrant que les autorités chinoises le considèrent comme un membre de l’organisation du Falun Gong. Le demandeur a affirmé dans son FRP qu’il n’est pas un membre du FLG, et sa libération rapide après son arrestation initiale semblerait indiquer que les autorités chinoises ne le considéraient pas comme un membre du FLG.

 

Je conclus que le demandeur a fourni peu d’éléments de preuve montrant qu’après son départ de la Chine les autorités de ce pays l’avaient recherché pour l’arrêter, le détenir et l’interroger. Le conseil du demandeur a précisé dans les observations qu’il a présentées lors de l’ERAR qu’après le départ de la Chine du demandeur, le père de celui-ci avait été interrogé et harcelé par les autorités chinoises, mais je constate que le demandeur n’a pas indiqué cet incident dans son FRP ni, apparemment, à l’audience devant la CISR.

 

 

[7]               L’agent a examiné la preuve fournie par M. Gong selon laquelle il avait été relâché dans les 24 heures suivant son arrestation, après le paiement d’une caution et la promesse qu’il fournirait par écrit un aveu et un auto-examen. Cette preuve, combinée à l’absence d’éléments crédibles démontrant que les autorités de la RPC s’intéressaient encore à M. Gong, permettait raisonnablement à l’agent de conclure que le demandeur n’avait pas établi qu’il était recherché par les autorités de la RPC ou que celles-ci le considéraient comme un membre du Falun Gong.

 

[8]               Durant la plaidoirie, j’ai porté à l’attention de l’avocat le fait qu’il semble que, contrairement à ce que l’agent a écrit, M. Gong a déclaré devant la SSR que le Bureau de la sécurité publique s’intéressait encore à lui. La SSR a jugé ce témoignage invraisemblable et l’a rejeté. L’avocat n’a pas contesté que rien n’en découle, et je suis d’accord avec lui. À cet égard, on ne sait pas exactement quel a été le témoignage de M. Gong devant la SSR. Même si je serais portée à déduire des motifs exprimés par la SSR que le demandeur a témoigné que sa famille était interrogée par les autorités de la RPC, si cela était effectivement le cas, il s’ensuivrait que M. Gong n’aurait produit aucune preuve nouvelle relativement à sa demande d’ERAR, ce qui porterait un coup fatal à sa demande parce que, lorsque le demandeur d’un ERAR est un demandeur d’asile débouté, il doit démontrer que des changements sont survenus soit dans sa situation personnelle, soit dans la situation du pays. Voir :  Raza c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2007] A.C.F. no 1632 (C.A.), aux paragraphes 10 à 13.

 

[9]               Pour ce qui est de la deuxième erreur alléguée, M. Gong conteste la conclusion de l’agent selon laquelle il aurait fourni [traduction] « peu d’éléments de preuve montrant que […] les personnes qui s’associent à des adeptes du FLG sans être membres de cette organisation seraient exposées au risque de persécution, au risque de torture, à une menace à leur vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités en Chine ». Même s’il y a très peu d’éléments de preuve, M. Gong allègue que ceux-ci signalent un problème et que l’agent a commis une erreur lorsqu’il a conclu que la preuve documentaire ne [traduction] « mentionnait pas que les sympathisants du FLG ou les personnes qui s’associent par inadvertance à des membres du FLG sont eux‑mêmes arrêtés et soumis à des traitements ou des peines cruels et inusités ». M. Gong fait état de certains éléments de preuve contenus dans les documents suivants :

 

·        La Réponse à la demande d’information CHN100430.EF

·        La Réponse à la demande d’information CHN04002 SND

·        Le rapport du Département d’État des États-Unis sur la Chine - 2006

·        La Réponse à la demande d’information CHN102560.EF

 

[10]           J’ai examiné attentivement ces documents. Les éléments de la preuve documentaire font respectivement ressortir les points suivants :

·        L’organisme « Human Rights in China » a entendu parlé d’incidents dans lesquels des personnes qui n’étaient pas des adeptes du Falun Gong ont été détenues après que des documents sur cette organisation eurent été glissés sous leur porte.

·        Un site Web sur le Falun Gong signale onze incidents impliquant des membres de la famille d’adeptes du Falun Gong ayant été arrêtés et interrogés par la police.  Dans un de ces cas, une personne a rapporté avoir fait l’objet de torture. Cependant, un professeur qui recueille de façon indépendante des témoignages sur le harcèlement dont sont victimes des membres de la famille d’adeptes du Falun Gong a laissé entendre que [traduction] « la plupart des cas de harcèlement contre des membres de la famille d’adeptes sont probablement assez subtils. J’ai l’impression que le harcèlement envers les membres de la famille correspond moins à de la torture et à des menaces physiques qu’à de la discrimination et à des menaces à la subsistance. »

·        La police aurait des quotas à respecter quant au nombre d’arrestations liées au Falun Gong.

·        Des représentants de l’Association Falun Dafa au Canada ont précisé que, selon certains rapports, les personnes qui apportent un soutien aux adeptes du Falun Gong risquent de faire l’objet [traduction] « d’amendes, de menaces et de harcèlement ».

 

[11]           À mon avis, de tels éléments de preuve ne rendent pas déraisonnable la conclusion de l’agent selon laquelle rien ne prouve que les personnes qui s'associent ou sympathisent avec des adeptes du Falun Gong sont [traduction] « arrêtées et soumises à des traitements ou des peines cruels et inusités ». La preuve documentaire invoquée par M. Gong concorde de façon générale avec du harcèlement ou de la discrimination, ce qui n’est pas prévu par les articles 96 et 97 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27.

 

[12]           Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire sera rejetée.

 

[13]           Les avocats n’ont proposé aucune question aux fins de certification et je conviens que la présente affaire n'en soulève aucune.

 

 

 

 

 

 

 

JUGEMENT

 

LA COUR STATUE que :

1.         La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

 

                                                                                                            « Eleanor R. Dawson »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

 

Caroline Tardif, LL.B., B.A. Trad.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                                            IMM-4200-07

 

INTITULÉ :                                                                           JIE DONG GONG

c.

                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                                                                ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                                     TORONTO (ONTARIO)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                                   LE 28 AVRIL 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                                                  LA JUGE DAWSON

 

DATE DES MOTIFS

ET DU JUGEMENT :                                                           LE 14 MAI 2008

 

 

COMPARUTIONS :

 

Lorne Waldman                                                                        POUR LE DEMANDEUR

 

Jamie Todd                                                                              POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Waldman & Associates                                                            POUR LE DEMANDEUR

Avocats

Toronto (Ontario)                                                                    

 

 

Sous-procureur général du Canada                                           POUR LE DÉFENDEUR

John H. Sims, c.r.                                                                    

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.