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Date : 20080429

Dossier : 07-T-60

Référence : 2008 CF 557

Ottawa, Ontario, le 29 avril 2008

En présence de Monsieur le juge Harrington

 

ENTRE :

JEAN-PIERRE SAMSON

demandeur

 

et

 

 

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               Au mois de septembre 2005, un gestionnaire pour la Ministre de la sécurité publique et de la protection, en vertu de l’article 133 de la Loi sur les douanes, a confirmé par une décision ministérielle l’émission d’une amende au montant de deux mille dollars (2 000 $) qui a été imposée à monsieur Samson pour avoir erronément déclaré la valeur de la marchandise qu’il a importé au Canada. Monsieur Samson aimerait obtenir le contrôle judicaire de cette décision. L’article 18.1(2) de la Loi sur les cours fédérales requiert qu’une telle demande soit faite dans les trente (30) jours qui suivent la décision contestée ou « dans le délai supplémentaire qu’un juge de la Cour fédérale peut, avant ou après l’expiration de ces trente jours, fixer ou accorder.» Monsieur Samson voudrait maintenant qu’un tel délai supplémentaire lui soit accordé.

 

[2]               Le demandeur, monsieur Samson, exerce son activité sous le nom commercial et le style d’identité « Boutique de timbres, postes et monnaies ». Dans cette capacité, il fait régulièrement l’importation des timbres. En effectuant un contrôle choisi au hasard, l’Agence des douanes et du revenu du Canada était d’avis que les renseignements liés à une cargaison de marchandises en particulier étaient incorrects. Selon l’article 7.1 de la Loi sur les douanes, il faut que « …les renseignements fournis à un agent … doivent être véridiques, exactes et complets. »

 

[3]               En septembre 2004, un agent des douanes a émis un « avis de cotisation de pénalité » au montant de 2 000 $ à l’encontre du demandeur déclarant qui ce dernier « …a intentionnellement fournis de faux renseignements sur un permis, un certificat, une licence, un document ou une déclaration qui est exigé pour l’importation … de marchandise, en vertu de la Loi sur les douanes… ». Monsieur Samson a contesté cette décision par l’envoie d’une lettre au Ministre demandant une révision en premier instance. Ultimement, il a reçu deux décisions de l’Agence dans une lettre datée du 14 septembre 2005 énonçant qu’ :

« après avoir considéré toutes les circonstances de votre dossier, j’ai décidé qu’en vertu de l’article 131 de la Loi sur les douanes, il y a eu infraction à la Loi sur les douanes ou aux règlements quant à l’avis signifié en vertu de l’article 109.3. En vertu de l’article 133 de la Loi sur les douanes, la présente est une demande de paiement pour la somme de 2,000.00$ qui constitue une créance de Sa Majesté. »

 

[4]               La Loi sur les douanes est quelque peu particulière en raison qu’il est possible de porter la question à savoir si l’infraction a même été commise ou pas devant une audience de novo par voie d’action régulière, alors qu’un recours par rapport à une pénalité émise sous les auspices de l’article 133 est strictement lié à une demande de contrôle judicaire. Le tout a été expliqué clairement par le juge Mackay dans l’arrêt ACL Canada Inc. c. Canada (Ministre du Revenu national -M.R.N.),  [1993] A.C.F. no 1048, 68 F.T.R. 180. Les deux différents recours se retrouvent aussi dans la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, et ont été discuté dans Dokaj c. Canada (Ministre du Revenu national - M.R.N.), [2005] A.C.F. no 1783, [2006] 2 R.C.F. 152 et dans Tourki c. Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), 2006 CF 50, [2006] A.C.F. no 52, qui a été confirmé par la Cour d’appel fédérale (2007 CAF 186, [2007] A.C.F. no 685).

 

[5]               Ça implique, donc, qu’il vaut mieux déposer une demande de contrôle judiciaire de l’émission d’une pénalité avant même la tenue d’une audience statuant sur le motif de l’infraction. Évidemment, s’il serait déterminé qu’il n y a jamais eu d’infraction commise, la pénalité tomberait et le contrôle judiciaire deviendrait sans objet. Quoi qu’il en soit, le contrôle judiciaire devrait être suspendu pendant que l’affaire soit décidée devant la Cour.

 

[6]               La question portant sur la commission d’une infraction s’est bien retrouvée devant la Cour. Le 28 septembre 2007, madame la juge Tremblay-Lamer a décidé que l’infraction a été commise.  Elle était d’avis que la bonne foi de monsieur Samson n’était pas pertinente. Ses motifs se trouvent dans l’arrêt Samson c. Canada (Ministre du Revenu national - M.R.N.), 2007 CF 975,  [2007] A.C.F. no 1272. Monsieur Samson avait trente (30) jours pour porter cette décision en appel, ce qu’il n’a pas fait.

 

[7]               Le 30 décembre 2007, il a déposé la demande en l’espèce avec l’intention d’obtenir un délai prorogé pour pouvoir soumettre le somme de la pénalité à un contrôle judiciaire.

 

ANALYSE

[8]               Dans l’arrêt Canada (Procureur général) c. Hennelly, [1999] A.C.F. no 846, 244 N.R. 3996, la Cour d’appel fédérale a énoncé une liste de critères, bien que non-exhaustive, selon lesquelles la prorogation de délai nécessaire pourrait être accordée. Au paragraphe 3 de la dite décision, monsieur le juge McDonald a dit que :

Le critère approprié est de savoir si le demandeur a démontré :

 

1.  une intention constante de poursuivre sa demande;

 

2.  que la demande est bien-fondé;

 

3.  que le défendeur ne subit pas de préjudice en raison du délai; et

 

4.  qu'il existe une explication raisonnable justifiant le délai.

 

[9]               Le Ministre ne met pas en litige les points 2 et 3 susmentionnés. Les deux autres points pourraient être analysés ensemble.

 

[10]           Il y a plusieurs raisons valides pour excuser le défaut de monsieur Samson de ne pas avoir déposé la demande de contrôle judiciaire dans le délai de 30 jours stipulé par la loi. Le département avait mal lu sa propre législation en alléguant la mauvaise foi du demandeur. Ce dernier était confiant de sa bonne foi. De plus, monsieur Samson a été bien informé de son droit d’introduire une action, mais pas de l’option de demander un contrôle judiciaire traitant l’avis de cotisation de pénalité.

 

[11]           Cependant, après que le procureur général s’est impliqué en tant qu’avocat du dossier dans le procès devant la Cour, le tout a été corrigé. La loi et la jurisprudence étaient présentées en détail dans son mémoire de conférence préparatoire déposé au greffe le 6 février 2008, et même dans l’ordonnance émise le 24 avril 2007 par le protonotaire Morneau dans laquelle il avait clairement indiqué que la pénalité n’était pas une question en litige devant la Cour.

 

[12]           À ce moment là, monsieur Samson s’occupait lui-même de son dossier, et aurait pu être confiant d’avoir gain de cause nonobstant les prétentions claires et précises du procureur général que la bonne foi n’est pas un point pertinent dans cette affaire.

 

[13]           Monsieur Samson aurait dû réclamer à ce moment-là une prorogation de délai. Il est maintenant trop tard car il n’a pas démontré une intention constante de discuter la pénalité et ses explications raisonnables ont périmés vers la fin du mois de mai 2007.

 

[14]           Pour les motifs susmentionnés, je vais rejeter la requête, le tout avec dépens.


ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE que :

1.      Sur consentement des parties, l’intitulé est modifié par le retrait du « Ministre du revenu national » et par l’ajout du « Procureur général du Canada » en tant que défendeur.

2.      Sur consentement des parties, la requête est modifiée pour stipuler que la demande de prolongation du délai est reliée à la décision en date du 14 septembre 2005 imposant une pénalité administrative de 2 000 $.

3.      La requête visant à établir un délai supplémentaire soit rejetée.

4.      Le tout avec dépens.

 

 

« Sean Harrington »

 

Juge


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        07-T-60

 

INTITULÉ :                                       JEAN-PIERRE SAMSON c.

                                                            PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Québec, Québec

 

DATE DE L’AUDIENCE :               le 17 avril 2008

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE    LE JUGE HARRINGTON

ET ORDONNANCE :

 

DATE DES MOTIFS :                      le 29 avril 2008

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Me Pierre Fortin

 

POUR LE DEMANDEUR

Me Jean-Robert Noiseux

 

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Pierre Fortin

Avocat

Québec (Québec)

 

POUR LE DEMANDEUR

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

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