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Date : 20080418

Dossier : IMM-4099-07

Référence : 2008 CF 507

Toronto (Ontario), le 18 avril 2008

En présence de Monsieur le juge Zinn

 

 

ENTRE :

LUIS ARMANDO RUELAS AGUILERA, ROSA LINDA FLORES MOLINA,

FERNANDA DICE RUELAS FLORES, LUIS ARMANDO RUELAS FLORES

et VALERIA RUELAS FLORES

 

demandeurs

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               La Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission) a conclu que Luis Armando Ruelas Aguilera, son épouse Rosa Linda Flores Molinda et leurs trois enfants n’avaient pas qualité de réfugié au sens de la Convention ni de personne à protéger en vertu de l’article 96 et du paragraphe 97(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27.

 

[2]               La Commission a conclu qu’il n’existait pas de preuve crédible et digne de foi suffisante pour appuyer leur demande. En bref, la Commission n’a pas cru la preuve présentée par M. Aguilera concernant les circonstances qui avaient cours avant le départ de sa famille du Mexique.

 

I.  LE CONTEXTE

 

[3]               M. Aguilera était un vendeur pour Nextel, une société de télécommunications au Mexique. Il travaillait dans la ville de Celaya, dans l’État de Guanajuato, une région située à environ trois heures d’autobus de la ville de Mexico. Comme sa mère vivait dans son territoire de vente, il vivait avec sa mère pendant la semaine et avec son épouse et ses trois enfants à Mexico pendant les fins de semaine.

 

[4]               Le 2 janvier 2006, il assurait un suivi auprès d’un client potentiel, Jose Angel Rodriguez, qui avait déclaré être propriétaire d’un service de banquet. M. Rodriguez avait fait l’objet d’une vérification de crédit défavorable et, par conséquent, Nextel n’autoriserait pas qu’il devienne un de ses clients. Au cours d’une visite à M. Rodriguez pour tenter de démêler la question du crédit, M. Aguilera a vu des devises américaines et des sacs de plastique contenant de la poudre blanche dans le porte-documents de M. Rodriguez lorsque celui-ci est tombé à terre par accident. Alors que M. Aguilera quittait la maison il a vu un politicien local, M. Ortiz, entrer dans le bureau de M. Rodriguez. Plus tôt, M. Rodriguez avait informé M. Aguilera qu’un homme important viendrait sous peu le rencontrer pour une question d’affaires.

 

[5]               Bien qu’on lui eût demandé d’attendre, M. Aguilera a décidé de se retirer de la situation. Comme il quittait, il a rencontré deux membres de la police judiciaire locale. M. Rodriguez s’est adressé aux policiers pour empêcher M. Aguilera de partir. M. Aguilera prétend que les policiers lui ont tiré des balles. Une balle lui a éraflé le devant du tibia droit. Les policiers l’ont forcé à retourner à la maison.

 

[6]               M. Rodriguez et M. Ortiz ont posé des questions à M. Aguilera et, selon le demandeur, ils ont dit qu’ils devraient le faire disparaître parce qu’ils ne pouvaient risquer de lui rendre sa liberté. Les deux policiers ont alors conduit M. Aguilera à un endroit non divulgué à environ une heure et demie de distance et l’ont battu jusqu’à ce qu’il devienne inconscient. Lorsqu’il a repris conscience, il a découvert que son téléphone cellulaire et ses papiers d’identité, qui contenaient l’adresse de sa résidence, avaient été volés.

 

[7]               M. Aguilera a réussi à se rendre à la route et par la suite jusqu’à la maison de sa mère. Il n’a pas signalé l’incident à la police locale, puisque deux de ses policiers avaient participé à l’agression. Il a également refusé d’être soigné à l’hôpital par crainte de voir l’incident signalé à la police. Il a plutôt soigné ses blessures au moyen d’herbes médicinales. Il a de plus fait remplacer une dent avant, qu’il avait perdue pendant l’incident, par un dentiste de Mexico.

 

[8]               Quelques jours après l’agression, M. Aguilera est retourné à Mexico. Le 9 janvier 2006, il a déposé une dénonciation auprès de la police de Mexico. Il n’a jamais personnellement assuré de suivi auprès de la police pour vérifier si des mesures avaient été prises à l’égard de sa plainte. Il a toutefois découvert par la suite sur Internet un avis de recherche indiquant que Jose Angel Rodriguez, son client potentiel, faisait l’objet d’accusations de meurtre.

 

[9]               Peu de temps après avoir déposé la dénonciation, M. Aguilera a commencé à recevoir des menaces de mort de la part d’un homme inconnu qui lui téléphonait chez lui presque tous les jours.

 

[10]           Deux mois plus tard, le 31 mars 2006, M. Aguilera s’est enfui du Mexique pour se rendre au Canada. Il est venu seul, puisque les menaces avaient été faites uniquement contre lui et que sa famille n’était pas en mesure de réunir les fonds nécessaires pour que tous les membres puissent quitter le Mexique. Il a présenté une demande d’asile. Selon son témoignage, il croyait qu’une personne s’était rendue à sa maison au cours des deux mois entre le début des menaces et son départ du Mexique, mais il n’était pas en mesure de l’affirmer avec certitude.

 

[11]           Les appels téléphoniques de menaces ont continué après son départ. Son épouse a déménagé ailleurs dans la ville Mexico, mais les appels téléphoniques de menaces l’ont suivie. Lorsque sa fille est devenue la cible d’une tentative d’enlèvement par la police judiciaire, son épouse et ses trois enfants se sont enfuis du Mexique à destination du Canada. L’épouse et les enfants sont arrivés au Canada le 26 juin 2006.

 

II.  LA DÉCISION

 

[12]           Bien que la Section de la protection des réfugiés ait reconnu que les demandeurs étaient des citoyens mexicains, elle n’a pas tenu pour véridique l’histoire de M. Aguilera concernant l’agression, le vol et l’intimidation par la police. La Commission a tiré des conclusions défavorables en matière de crédibilité parce que M. Aguilera, le demandeur principal, a été proactif pour documenter ses blessures, déposer la dénonciation et prendre des mesures pour le passeport des membres de sa famille et son voyage à lui, mais il n’a rien fait pour quitter la résidence familiale à Mexico au cours des deux mois qui ont précédé son départ. La Commission était d’avis qu’une personne qui craignait pour sa sécurité et qui recevait des appels téléphoniques de menaces aurait quitté son foyer. Elle a conclu qu’il n’était pas vraisemblable que M. Aguilera n’ait pas quitté Mexico pendant deux mois après le début des appels téléphoniques de menaces allégués parce qu’il était [traduction] « extrêmement stressé » et qu’il ne savait que faire, selon l’explication donnée à la Commission.

 

[13]           La Commission a également conclu qu’il était invraisemblable qu’un homme recherché, M. Rodriguez, exploite une entreprise au grand jour sous le même nom que celui qui apparaissait sur l’avis de recherche présenté en preuve par M. Aguilera.

 

[14]           La Commission a estimé qu’il n’existait pas de preuve crédible suffisante pour conclure que les demandeurs craignaient avec raison d’être persécutés.

 

III.  LES QUESTIONS EN LITIGE

 

[15]           Les demandeurs soutiennent que la Commission a commis deux erreurs.

 

[16]           Premièrement, les demandeurs ont soutenu que la Commission n’a pas tenu compte d’éléments de preuve pertinents qui lui avaient été présentés, à savoir les déclarations inexactes faites par l’ancien avocat récemment radié, le rapport psychologique concernant Mme Flores et la lettre de divulgation de la belle-sœur de M. Aguilera présentée après l’audience.

 

[17]           Deuxièmement, les demandeurs ont allégué que la Commission a commis une erreur en formulant une hypothèse ou en tirant des inférences déraisonnables par rapport à la preuve dont elle était saisie.

 

[18]           Pour les motifs qui suivent, je ne suis pas convaincu que la décision de la Commission est susceptible de contrôle pour l’une des raisons invoquées par les demandeurs.

 

IV.  la commission a-t-elle OMIS DE TENIR COMPTE D’éléments de preuve pertinents?

 

[19]           On a indiqué qu’à l’audience, la Commission s’est attachée à l’omission de M. Aguilera de mentionner M. Ortiz, le représentant local, dans son récit original à l’agent d’immigration. L’explication donnée pour cette omission était la négligence de son premier avocat.

 

[20]           Il a été soutenu que l’absence de la mention de M. Ortiz dans les notes au point d’entrée a été corrigée par M. Aguilera dans son récit supplémentaire déposé par son nouvel avocat avant l’audience de la Commission.

 

[21]           Bien qu’il soit vrai, comme l’a souligné l’avocat, que les demandeurs ont été interrogés par la Commission à propos de cette omission, rien dans la décision de la Commission n’indique qu’elle n’a pas accepté entièrement l’explication des demandeurs selon laquelle l’omission était imputable à la faute du premier avocat, récemment radié. En effet, rien dans le dossier ni dans la décision n’indique que cette omission, faite au début, a joué un rôle dans les conclusions définitives de la Commission en matière de crédibilité.

 

[22]           Ainsi, je ne peux pas conclure que l’argument selon lequel la Commission n’a pas tenu compte du récit supplémentaire ou a accordé quelque poids à l’omission dans les notes au point d’entrée est bien fondé.

 

[23]           Les demandeurs ont également soutenu que la Commission n’a pas tenu compte du rapport psychologique qui avait été présenté en preuve. Le rapport en cause était un rapport daté du 6 avril 2007 qui fournit une évaluation psychologique de Rosa Linda Flores Molina, l’épouse de M. Aguilera. Comme c’est le cas dans la plupart des évaluations de ce genre, elle s’appuie sur des faits fournis par la personne faisant l’objet de l’évaluation.

 

[24]           L’évaluation conclut en disant que [traduction] « Mme Flores répond aux critères diagnostiques du trouble dépressif majeur de sévérité moyenne (296.22) et du trouble de stress post‑traumatique chronique (309.81) décrit dans le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (4e éd., DSM-IV) » de l’American Psychiatric Association. L’avocat prétend que les conclusions de cette évaluation étayent l’affirmation de M. Aguilera selon laquelle il n’a pas quitté sa résidence à Mexico parce qu’il était [traduction] « extrêmement stressé et qu’il ne savait que faire » et que la Commission aurait dû tenir compte de cette évaluation, mais qu’elle ne l’a pas fait.

 

[25]           Le juge James O’Reilly a résumé la jurisprudence pertinente à l’égard de l’obligation d’une commission de se reporter à la preuve documentaire aux paragraphes 5 et 6 de la décision Min c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 1676:

La Commission n'est pas tenue de faire allusion à tous les documents dont elle dispose. Toutefois, plus le document est important, plus l'obligation de la Commission de le mentionner expressément est contraignante : Cepeda-Gutierrez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1998] A.C.F. no 1425 (C.F. 1re inst.) (QL). Dans la mesure où elle tire des conclusions quant à la crédibilité fondées sur des éléments à l'égard desquels ils sont pertinents, la Commission doit tenir compte de rapports médicaux et de rapports de psychologues : Bernardine c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2002 CFPI 1187 (CanLII), 2002 CFPI 1187, [2002] A.C.F. no 1590 (C.F. 1re inst.) (QL).

 

Par exemple, avant de tirer une inférence défavorable du comportement d'un demandeur, la Commission doit prendre en considération l'avis d'un spécialiste qui peut aider à expliquer le comportement en question : Sanghera c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1994] A.C.F. no 87 (C.F. 1re inst.) (QL). Par ailleurs, si la Commission estime que l'avis du psychologue n'explique pas le témoignage du demandeur, il lui est loisible de lui accorder un poids minime, voire nul : Dekunle c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2003 CF 1112 (CanLII), 2003 CF 1112, [2003] A.C.F. no 1403.

 

[26]           La preuve prétendument écartée vise uniquement Mme Flores et n’offre rien à propos de l’état psychologique de M. Aguilera pendant la période pertinente. Il a été soutenu que l’état psychologique de Mme Flores, précisément fondé sur les mêmes expériences que celles de M. Aguilera, illustre d’une certaine manière l’état psychologique de la famille et appuie de plus le témoignage de M. Aguilera selon lequel ces événements lui ont causé un stress extrême.

 

[27]           Je ne trouve pas cet argument convaincant. L’évaluation utilisée se rapporte directement et exclusivement à Mme Flores et vise une période postérieure aux événements survenus à Mexico et décrits par son mari. Si l’évaluation avait été celle de l’état psychologique de M. Aguilera, j’aurais pu être persuadé qu’il s’agissait d’un « document important ».

 

[28]           Je ne trouve pas que le rapport psychologique présenté par les demandeurs était un document important concernant l’état psychologique de M. Aguilera et, en tant que tel, il n’appuie en rien son témoignage selon lequel il était extrêmement stressé pendant la période de deux mois précédant son départ pour le Canada.

 

[29]           En conséquence, il n’était pas déraisonnable pour la Commission d’omettre de mentionner le rapport d’évaluation dans ses motifs et je ne relève aucune erreur à cet égard.

 

[30]           Il a été également soutenu que la Commission avait omis de tenir compte du témoignage de Mme Flores. Il est bien établi en droit qu’il n’est pas nécessaire que les motifs résument toute la preuve présentée au tribunal : Hassan c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1992] A.C.F. no 946 (C.A.F.). En l’espèce, l’avocat n’a rien souligné d’utile dans le témoignage de Mme Flores qui aurait pu indiquer un résultat différent. En effet, au mieux il est possible de dire de son témoignage qu’il était compatible avec celui de son mari.

 

[31]           À mon avis, dans de telles circonstances, on ne saurait présumer que la Commission a omis de tenir compte du témoignage.

 

[32]           Finalement, il a été soutenu que la Commission n’a pas tenu compte d’une communication postérieure à l’audience, une lettre datée du 27 avril 2007 de la part de la belle-sœur de M. Aguilera à Mexico. Dans cette lettre, elle déclare qu’elle avait récemment reçu un appel téléphonique d’une personne anonyme et qui, en réponse au commentaire selon lequel M. Aguilera n’était plus au Mexique, a déclaré que s’il y était, ils [traduction] « s’occuperaient de mettre fin au problème à leur manière ». Elle a tenté de signaler cet incident la police locale, mais s’est fait répondre qu’il ne s’agissait pas d’un problème et qu’elle devrait changer de numéro de téléphone. Elle s’est également renseignée concernant ce qui s’était produit relativement à la dénonciation antérieure que M. Aguilera avait déposée et s’est fait répondre que ce renseignement ne lui serait fourni que moyennant un pot-de-vin.

 

[33]           Dans les motifs de sa décision, la Commission déclare ce qui suit :

Le tribunal a reçu un élément de preuve à la suite de l’audience, soit une lettre provenant de la belle-soeur du demandeur d’asile principal, et en a tenu compte dans ses délibérations.

 

 

[34]            On a indiqué qu’il n’était pas clair si, en écrivant cela, la Commission disait qu’elle avait tenu compte du contenu de ce document lors de ses délibérations sur la conclusion qu’elle tirerait compte tenu de la preuve présentée, y compris la lettre, ou si la Commission avait simplement examiné la question de savoir si elle devait accepter cet élément de preuve postérieur à l’audience conformément avec ses règles, sans se pencher sur le contenu de la lettre. Il a été allégué en l’espèce que lorsque l’élément de preuve postérieur à l’audience a été présenté, la Commission avait l’obligation d’informer de la question de savoir si elle acceptait l’élément de preuve tel que présenté et de plus, elle avait l’obligation d’entendre leurs observations à l’égard de ce nouvel élément de preuve.

 

[35]           Ce document a été présenté à la Commission accompagné d’une lettre de transmission de la part de l’avocat des demandeurs et dont la partie pertinente se lit comme suit :

[traduction] La lettre est au cœur même de la question de crédibilité et, à notre humble avis, elle agit à titre d’élément de preuve crédible supplémentaire qui appuie l’affirmation de notre client.

 

Nous espérons que vous trouverez ces renseignements utiles. Si vous avez des questions ou si vous avez besoin de renseignements supplémentaires, n’hésitez pas à communiquer avec notre cabinet.

 

 

[36]           En conséquence, il semble que l’avocat avait déjà présenté ses observations à l’égard de ce nouvel élément de preuve lorsqu’il a été présenté à la Commission. Je ne peux pas reconnaître dans ces circonstances que la Commission a une obligation de fournir à l’avocat qui a présenté un élément de preuve postérieur à l’audience une occasion supplémentaire de présenter des observations à l’égard de cet élément de preuve.

 

[37]           Bien qu’il eût été préférable que la Commission déclare qu’elle avait accordé, le cas échéant, du poids à ce nouvel élément de preuve, je ne vois aucune raison de ne pas croire la Commission lorsqu’elle écrit qu’elle en a tenu compte dans ses délibérations, c’est-à-dire lors de ses délibérations sur l’issue de l’audience.

 

 

V.  la commission a-t-elle formulé une hypothèse ou tirÉ des inférences déraisonnables?

 

[38]           Les demandeurs soutiennent en partie que, dans le passage suivant, la Commission a rejeté le témoignage non contredit des demandeurs concernant M. Rodriguez, remplaçant par sa propre [traduction] « hypothèse abusive ».

Le tribunal estime qu’il est invraisemblable qu’un fugitif recherché pour meurtre tente d’ouvrir un commerce aussi public qu’un service de banquet, tout en menant dans l’ombre un présumé commerce de drogue.

 

 

[39]           La Commission n’est pas tenue d’accepter un témoignage simplement parce qu’il n’est pas contredit. Elle peut s’appuyer sur la raison, le bon sens et la rationalité : Aguebor c. (Canada) Ministre de l’Emploi et de l’Immigration (1993), 160 N.R. 315 (C.A.F.).

 

[40]           Le juge Luc Martineau a fourni un aperçu du droit concernant les conclusions en matière de crédibilité dans la décision R.K.L. c. Canada (Ministre de la Citoyenneté de l’Immigration), 2003 CFPI 116, [2003] A.C.F. no 162 (QL), aux paragraphes 9 à 11 :

Normalement, la Commission peut à bon droit conclure que le demandeur n'est pas crédible à cause d'invraisemblances contenues dans la preuve qu'il a présentée, dans la mesure où les inférences qui sont faites ne sont pas déraisonnables et que les motifs sont formulés « en termes clairs et explicites » [...]

 

La Commission peut aussi à bon droit tirer des conclusions raisonnables fondées sur des invraisemblances, le bon sens et la raison […] La Commission peut rejeter des preuves non réfutées si celles-ci ne sont pas compatibles avec les probabilités propres à l'affaire dans son ensemble, ou si elle relève des contradictions dans la preuve […]

Ce ne sont cependant pas tous les types d'incohérence ou d'invraisemblance contenue dans la preuve présentée par le demandeur qui justifieront raisonnablement que la Commission tire des conclusions défavorables sur la crédibilité en général. Il ne conviendrait pas que la Commission tire ses conclusions après avoir examiné « à la loupe » des éléments qui ne sont pas pertinents ou qui sont accessoires à la revendication du demandeur [...]

 

[Références omises]

 

 

[41]           À mon avis, l’inférence tirée par la Commission à l’égard de l’invraisemblance des circonstances alléguées concernant M. Rodriguez était une inférence qui lui était raisonnablement loisible de tirer, compte tenu de la preuve dont elle était saisie.

 

[42]           Les parties conviennent que le critère à appliquer dans la présente demande est la question de savoir si la décision de la Commission était raisonnable, comme l’a jugé récemment la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9.

 

[43]           La Cour suprême du Canada a statué que lorsque la norme est celle de la raisonnabilité, il existe un éventail de réponses possibles et le tribunal chargé du contrôle devrait faire preuve de retenue à l’égard du rôle du décideur à titre de délégué du Parlement. La décision devrait être annulée uniquement si elle ne relève pas de l’éventail des décisions raisonnables possibles, compte tenu de la preuve.

 

[44]           En l’espèce, je ne peux pas conclure que la décision de la Commission ne relevait pas de l’éventail des décisions raisonnables compte tenu de la preuve, pas plus que je peux conclure qu’elle a omis de tenir compte d’éléments de preuve pertinents ou qu’elle a tiré des conclusions déraisonnables à partir de ceux-ci.

 

 

VII.  question à certifier

 

[45]           L’avocat des demandeurs à demander que la Cour certifie la question suivante : [traduction] « Les règles d’équité procédurale ont-elles été violées par l’omission de la Section de la protection des réfugiés d’informer expressément les demandeurs qu’elle avait retenu un élément de preuve présenté après l’audience. »

 

[46]           L’exigence pour certifier une question est de savoir s’il existe une question grave de portée générale qui permettrait de faire droit à l’appel. À mon avis, la question présentée ne permettrait pas de faire droit à l’appel en l’espèce puisque je conclus que rien ne donne à penser que la Commission a omis de tenir compte de l’élément de preuve nouvellement présenté. En effet, je conclus que la Commission a tenu compte de cet élément de preuve.

 

 


 

JUGEMENT

 

 

LA COUR STATUE QUE :

 

 

1.                  La présente demande de contrôle judiciaire est rejetée.

 

2.                  Aucune question grave de portée générale n’est certifiée.

 

 

 

 

« Russel W. Zinn »

Juge

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Evelyne Swenne, traductrice


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-4099-07

 

 

STYLE OF CAUSE:                          LUIS ARMANDO RUELAS AGUILERA et al. c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :               LE 15 AVRIL 2008

 

 

Motifs du jugement

Et jugement :                              le juge ZINN

 

 

Date des motifs :                      le 18 avril 2008    

 

 

Comparutions :

 

Gleb Bazov                                                                              pour les demandeurs

 

Manuel Mendelzon                                                                   pour le défendeur

                       

 

Avocats inscrits au dossier :

 

Robert I. Blanshay                                                                    pour les demandeurs

Avocat  

Toronto (Ontario)

 

John H. Sims, c.r.                                                                     pour le défendeur

Sous-procureur général du Canada

 

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