Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

 

 

Date : 20080417

Dossier : IMM-3883-07

Référence : 2008 CF 495

Ottawa (Ontario), le 17 avril 2008

EN PRÉSENCE DE MADAME LA JUGE HANSEN

 

ENTRE :

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

demandeur

 

et

 

JOSE FRANCISCO CARDOZA QUINTEROS

 

 

défendeur

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]        Le 13 septembre 2007, à la clôture du contrôle des motifs de détention, un commissaire de la Section de l’immigration de la Commission de l’immigration et du statut de réfugiés a ordonné la mise en liberté sous conditions du défendeur. Le ministre demande que cette décision soit infirmée.

 

[2]        Dans le cadre de l’évaluation du danger que constitue une personne pour la sécurité publique dans le contexte d’un contrôle des motifs de détention, le sous‑alinéa 246f)(ii) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (le Règlement), dispose que doit être pris en compte le fait que la personne a été mise en accusation ou déclarée coupable à l’étranger d’une infraction qui, « si elle était commise au Canada, constituerait une infraction à une loi fédérale : […] [notamment, une] infraction commise avec violence ou des armes ».  Étant donné que la question déterminante en l’espèce concerne la conclusion du Commissaire portant sur cette disposition, seul un bref exposé des faits est nécessaire.

 

[3]        Le défendeur, citoyen du Salvador, a demandé l’asile à son arrivée au Canada le 2 septembre 2007.

 

[4]        Lors d’une entrevue ultérieure tenue le 4 septembre 2007 par l’Agence des services frontaliers du Canada (l’ASFC), le défendeur a admis avoir été membre d’un gang salvadorien, le Mara Salvatrucha (les MS-13), pendant cinq ans. Il a donné une déclaration détaillée au sujet des violentes activités criminelles du gang et de sa propre participation à de multiples actes de violence. Il a également affirmé avoir été déclaré coupable de vol qualifié. En conséquence, l’ASFC a déclaré le demandeur interdit de territoire en vertu de l’alinéa 37(1)a) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27.

 

[5]        Le premier contrôle des motifs de détention s’est terminé par la prolongation de la détention du défendeur parce que son identité n’avait pas pu être établie. Lors du deuxième contrôle des motifs de détention, le ministre a demandé que se poursuive la détention du défendeur au motif qu’il représentait un danger pour le public et qu’il était peu probable qu’il se présente à l’audience relative à l’interdiction de territoire. Lorsque le commissaire a demandé qu’elle montre les éléments de preuves justifiant ses allégations de fait relatives au sous‑alinéa 246f)(ii) du Règlement, l’avocate du ministre a été incapable de mentionner un élément de preuve en particulier. Dans sa réponse aux arguments du ministre, l’avocat commis d’office pour le défendeur a affirmé que son client niait être un membre des MS‑13, que tout ce qu’il avait affirmé lors de l’entrevue était erroné et qu’il n’avait qu’une seule déclaration de culpabilité de vol.

 

[6]        Dans le cadre de l’analyse du critère constitué par le sous‑alinéa 246f)(ii), le commissaire a affirmé que «  [d]’après ce que je peux en dire jusqu’ici, la seule déclaration de culpabilité prononcée contre vous se rapporte à une infraction de vol, ou peut-être de vol qualifié, concernant un téléphone cellulaire. Cette infraction n’est pas visée par l’alinéa 246f) ».

 

[7]        Le demandeur soutient que le commissaire a commis une erreur de droit en tirant cette conclusion.

 

[8]        Étant donné que la conclusion du commissaire selon laquelle l’alinéa 246f) du Règlement ne vise pas le vol qualifié, soulève une question générale de droit, la norme de contrôle applicable est la décision correcte; voir Dunsmuir c. Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, paragraphe 60.

 

[9]        Le défendeur soutient qu’il n’y avait pas suffisamment de preuve relative aux circonstances concernant les prétendues déclarations de culpabilité à l’égard du défendeur pour que le tribunal leur accorde une grande importance.

 

[10]      À la lecture du dossier du tribunal, il ressort de la preuve qu’il y a possiblement eu deux déclarations de culpabilité. En ce qui concerne la première, l’avocat commis d’office a reconnu au nom du défendeur qu’il avait été déclaré coupable de vol. Quant à la deuxième, la transcription de l’entrevue menée par l’ASFC, qui a été déposée comme pièce lors du contrôle des motifs de détention, révèle que le défendeur a lui‑même admis qu’il avait été déclaré coupable de vol qualifié.

 

 

[11]      Le « vol qualifié » est défini à l’article 343 du Code criminel, L.R.C. 1985, ch. C-46 :

343.  Commet un vol qualifié quiconque, selon le cas :

 

a) vole et, pour extorquer la chose volée ou empêcher ou maîtriser toute résistance au vol, emploie la violence ou des menaces de violence contre une personne ou des biens;

 

b) vole quelqu’un et, au moment où il vole, ou immédiatement avant ou après, blesse, bat ou frappe cette personne ou se porte à des actes de violence contre elle;

 

 

c) se livre à des voies de fait sur une personne avec l’intention de la voler;

 

d) vole une personne alors qu’il est muni d’une arme offensive ou d’une imitation d’une telle arme.

343.  Every one commits robbery who

 

(a) steals, and for the purpose of extorting whatever is stolen or to prevent or overcome resistance to the stealing, uses violence or threats of violence to a person or property;

 

(b) steals from any person and, at the time he steals or immediately before or immediately thereafter, wounds, beats, strikes or uses any personal violence to that person;

 

(c) assaults any person with intent to steal from him; or

 

 

(d) steals from any person while armed with an offensive weapon or imitation thereof.

 

[12]      Bien que le simple vol ne constitue au Canada pas une infraction « commise avec violence ou des armes », par définition, le vol qualifié est clairement visé par le sous‑alinéa 246f)(ii) du Règlement. Indépendamment du fait que le commissaire a omis de déterminer si la preuve justifiait une conclusion selon laquelle le défendeur avait été déclaré coupable de vol qualifié, le commissaire a commis une erreur de droit en concluant que même si le défendeur avait été déclaré coupable de vol qualifié, cette déclaration de culpabilité ne serait pas visée par le sous‑alinéa 246f)(ii).

 

[13]      Lors de l’audience, le défendeur a également soutenu qu’étant donné que le ministre n’avait pas poursuivi le débat sur la déclaration de culpabilité lors du contrôle des motifs de détention, il ne devrait pas avoir le droit de le faire dans le cadre du contrôle judiciaire. Je rejette cet argument. Bien que lors du contrôle des motifs de détention l’avocate du ministre n’ait pas été en mesure de mentionner quelque preuve que ce soit en ce qui concerne la déclaration de culpabilité, il est évident que le commissaire était au fait de la preuve relative à la déclaration de culpabilité de vol qualifié et qu’il a tiré une conclusion.

 

[14]      Pour ces motifs, le contrôle judiciaire sera accueilli, et l’affaire sera renvoyée à un autre commissaire pour nouvel examen. Les parties n’ont proposé aucune question à certifier.

 

 

 

 

 


ORDONNANCE

 

LA COUR ORDONNE :

 

1.         que le contrôle judiciaire soit accueilli; que la décision du 13 septembre 2007 soit infirmée et que l’affaire soit renvoyée à un autre commissaire de la Section de l’immigration de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié pour nouvel examen.

 

2.         qu’aucune question grave de portée générale ne soit certifiée.

 

 

 

« Dolores M. Hansen »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Jean-François Martin, LL.B., M.A.Trad.jur.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                    IMM-3883-07

 

INTITULÉ :                                                   LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

                                                                        c.

 

                                                                        JOSE FRANCISCO CARDOZA QUINTEROS

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             VANCOUVER (COLOMBIE-BRITANNIQUE)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           LE 8 AVRIL 2008

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                                   LA JUGE HANSEN

 

DATE DES MOTIFS :                                  LE 17 AVRIL 2008

 

COMPARUTIONS :

 

Caroline Christiaens                                          POUR LE DEMANDEUR

 

Shepherd Moss                                                POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

John H. Sims, c.r.                                             POUR LE DEMANDEUR

Sous-procureur général du Canada

 

Shepherd Moss                                                POUR LE DÉFENDEUR

Avocat

Vancouver (Colombie‑Britannique)

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.