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Date : 20080404

Dossier : IMM-7117-05

Référence : 2008 CF 446

Ottawa (Ontario), le 4 avril 2008

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE RUSSELL

 

 

ENTRE :

DONNA MICHELLE WOODS

JANNIN MONIQUE WOODS

JASMIN KIMORNE NATASHA WOODS

demanderesses

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une demande présentée en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la Loi) visant le contrôle judiciaire d’une décision du 3 novembre 2005 (la décision) de la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission), dans laquelle la Commission a conclu que les demanderesses n’étaient pas des réfugiées au sens de la Convention conformément à l’article 96 de la Loi, ni des personnes à protéger conformément à l’article 97 de la Loi.

 

CONTEXTE

 

[2]               Les demanderesses, Jannin, Jasmin et Donna, sont trois sœurs. Elles sont citoyennes de Saint-Vincent. Elles allèguent craindre la persécution à Saint-Vincent de la part de leur frère, Ronald Woods (demi-frère de Donna), en raison de son caractère violent.

 

[3]               Les demanderesses disent avoir subi des sévices physiques et sexuels de la part de Ronald pendant des années. Il a menacé de les tuer à de nombreuses reprises et les a attaquées à l’aide d’objets tels que des pierres et une machette. Son comportement violent et menaçant est connu de la communauté, de la famille et des autorités de Saint-Vincent.

 

[4]               Les demanderesses ne craignent personne d’autre à Saint-Vincent.

 

[5]               À l’audience de la Commission, Donna a produit un rapport de police faisant état de trois condamnations de Ronald, qui avait été accusé et condamné pour coups et blessures à son endroit. En 1988, Ronald a été condamné aux travaux forcés pour deux mois. En 1990 et en 1991, il a été condamné à un an de travaux forcés. Les demanderesses ont témoigné qu’il avait fait l’objet d’autres condamnations pour voies de fait à leur endroit, notamment pour une tentative de viol, qui ne figurait pas sur le rapport de police. Elles ont également témoigné que le tribunal avait prononcé deux ordonnances d’interdiction à l’encontre de Ronald lui ordonnant de ne pas s’approcher de la résidence familiale, la dernière prononcée en 1998 à la libération de Ronald d’une peine d’emprisonnement de deux ans.

 

[6]               Selon les demanderesses, malgré ses condamnations, Ronald a continué de traquer la famille et son comportement violent à leur endroit s’est poursuivi. Elles ont aussi témoigné que la police craignait Ronald et que celui-ci n’obéissait pas aux ordonnances d’interdiction prononcées par les tribunaux.

 

[7]               Jannin est arrivée au Canada le 14 mars 1999; Jasmin est arrivée peu après, le 28 mars 1999. En 1992, Donna a déménagé à Trinidad et Tobago où elle est restée jusqu’en 2001; elle est revenue pour un court séjour à Saint-Vincent, puis est venue au Canada le 12 octobre 2001. Les trois femmes ont demandé la protection en vertu du statut de réfugié le 26 novembre 2004.

 

LA DÉCISION FAISANT L’OBJET DU CONTRÔLE JUDICIAIRE

 

[8]               La Commission a accepté le témoignage des demanderesses, mais rejeté leur demande de protection au titre du statut de réfugié sur la base de la protection que pouvait offrir l’État, affirmant que [traduction] « les revendicatrices […] n’avaient pas repoussé par une preuve claire et convaincante la présomption selon laquelle le gouvernement démocratiquement élu de Saint‑Vincent avait la capacité d’assurer la protection de ses citoyens et qu’aucun élément de preuve n’établissait que le gouvernement était dans un état de chaos ou de désordre et qu’il était incapable de gouverner » (décision, à la page 4). La Commission a également noté la lenteur avec laquelle les demanderesses avaient demandé la protection en vertu du statut de réfugié, mais déclaré que la question déterminante était la capacité de l’État à assurer la protection.

 

[9]               La Commission a noté que des éléments de preuve appuyaient les allégations portant que [traduction] « les femmes subissent effectivement des sévices sexuels, physiques et émotionnels à Saint-Vincent, comme dans de nombreuses régions du monde », mais elle a conclu qu’il existait une preuve documentaire selon laquelle le gouvernement [traduction] « faisait de sérieux efforts pour corriger le problème » (décision, à la page 4).

 

[10]           Après avoir déclaré que la police de Saint-Vincent avait arrêté, accusé et poursuivi Ronald en justice à diverses reprises, la Commission a conclu que la notion d’une protection adéquate de l’État ne requiert pas un degré parfait de protection, ni la protection de tous les citoyens en tout temps.

 

[11]           La Commission a en outre conclu à l’absence de raisons impérieuses dans la présente affaire du fait que la preuve n’établissait pas que la persécution des demanderesses avait atteint un tel degré d’atrocité ou d’horreur qu’elles en subiraient des préjudices psychologiques justifiant qu’elles ne puissent retourner à Saint-Vincent. La Commission a noté également que la preuve établissait qu’à Saint-Vincent on était sensibilisé à la situation des demanderesses et en mesure de les soutenir.

 

LES QUESTIONS EN LITIGE

 

[12]           Les demanderesses soulèvent la question suivante :

 

1.      La conclusion de la Commission sur la protection offerte par l’État était-elle déraisonnable?

 

L’ARGUMENTATION

 

Les observations des demanderesses

 

[13]           Les demanderesses disent que la Commission leur a imposé un fardeau de preuve déraisonnable. Elles invoquent la décision Franklyn c. (Canada) Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, 2005 CF 1249, [2005] A.C.F. nº 1508 (QL) [Franklyn], décision récente de la Cour qui vise aussi une demande pour violence familiale à Saint-Vincent. Dans cette décision, la Cour a conclu que la Commission avait attaché trop d’importance au fait que Saint-Vincent était un État démocratique et souligné que, malgré les efforts sérieux faits pour maîtriser la violence familiale, cela ne suffisait pas pour démontrer que l’État était capable de protéger les femmes dans la situation des revendicatrices. Dans la décision Franklyn, la Cour a conclu qu’il était déraisonnable d’attendre de la revendicatrice qu’elle insiste pour obtenir la protection de l’État après qu’on l’ait « envoyée promener » et noté au paragraphe 23 :

[…] lorsque, comme en l’espèce, les démarches exercées n’ont abouti à aucun résultat et que la documentation portant sur le pays montre clairement que la violence familiale ne suscite que l’indifférence et l’inaction de la police, il me semble qu’il faut être moins exigeant pour reconnaître l’incapacité de l'État de protéger ses citoyens.

 

 

[14]           Les demanderesses notent que, dans la présente affaire, la Commission avait été saisie d’éléments de preuve établissant que Ronald les battait, les menaçait, les poursuivait et avait tenté de les tuer à de nombreuses reprises. Elles font valoir qu’il a fait à maintes reprises de la prison, mais que cela n’a pas eu et n’aura pas d’effet dissuasif sur lui. Pour reprendre leurs mots, [traduction] « il ne s’arrêtera pas avant de nous avoir tuées ». Selon les demanderesses, la Commission ayant conclu que la preuve des demanderesses était crédible, elle était tenue d’accepter leur [traduction] « appréciation raisonnable et leur expérience vécue du fait qu’une ordonnance d’interdiction ne le dissuaderait pas de continuer de les persécuter ».

 

[15]           Les demanderesses soutiennent ensuite que la Commission a pris en compte la preuve documentaire de manière sélective et ne s’est pas référée aux éléments de preuve qui contredisaient ses conclusions et appuyaient leurs prétentions. Les demanderesses notent que l’analyse que la Commission a faite de la preuve documentaire sur l’état du pays tenait tout entière en deux lignes de sa décision et que la Commission n’a fait état que de la Loi sur la violence familiale de 1995 et d’une demande d’information de la CISR, VCT 42714.E. Suivant les demanderesses, l’analyse de la Commission n’a pas traité des renseignements contraires que contenait le document en question et qui se trouvaient dans d’autres demandes d’information de la CISR.

 

[16]           Les demanderesses ajoutent que, bien que la Commission ne soit pas tenue de faire référence à chacune des pièces de la preuve documentaire, elle doit établir dans ses motifs qu’elle a lu tous les éléments de preuve dont elle était saisie et en a évalué la nature. En l’espèce, soutiennent les demanderesses, la Commission n’a pas tenu compte de la lettre de M. Sylvester Raymond‑Cadette, avocat et ancien magistrat de Saint-Vincent, qui confirmait un grand nombre des affirmations des demanderesses, notamment les menaces perpétuelles que proférait Ronald à l’endroit de sa famille et le fait qu’il constitue une menace constante pour la vie des membres de la famille qui vivent à Saint-Vincent. Selon les demanderesses, la Commission a rejeté leur témoignage et effectué une lecture sélective et minimale de la preuve documentaire dont elle était saisie. En outre, elles suggèrent que la preuve documentaire au sujet de Saint‑Vincent indiquait que le gouvernement avait commencé à prendre des mesures timides, mais que celles‑ci étaient très loin d’assurer une protection réelle. Elles font valoir que, dans leur situation particulière, elles ont reçu une certaine protection temporaire à quelques occasions, mais que l’État avait continué de ne pas les protéger et qu’elles faisaient toujours face à un risque grave.

 

[17]           De plus, les demanderesses soutiennent que la Commission a commis une erreur en concluant qu’elles n’avaient pas exploré d’autres avenues et qu’elles n’avaient pas de renseignements sur les services fournis par la Marion House. Les demanderesses prétendent que cette conclusion est erronée et fondamentalement viciée pour deux raisons : premièrement, les demanderesses ont attesté qu’elles avaient entendu parler de la Marion House et qu’elles croyaient que cet organisme aidait à la formation des jeunes gens qui n’étaient plus aux études (opinion que soutient la preuve documentaire, selon les demanderesses); deuxièmement, elles font valoir que la Commission a confondu la disponibilité et l’efficacité de la protection de l’État avec la fourniture d’orientation et de conseils. À l’appui de cet argument, les demanderesses invoquent une décision du juge McKeown, Cuffy c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), (1996), 121 F.T.R. 81 [1996] A.C.F. n° 1316 (QL) [Cuffy], dans laquelle il a statué que la Commission avait confondu la preuve documentaire portant sur l’existence du service d’orientation et d’autres ressources avec la capacité de l’État à assurer la protection. Dans la décision Cuffy, la Cour a conclu que « l’orientation ne remplace pas l’absence de protection de la police » (Cuffy, au paragraphe 15).

 

[18]           Les demanderesses poursuivent en suggérant que la Commission a également commis une erreur dans son appréciation de la capacité du gouvernement de Saint-Vincent d’assurer une protection d’État adéquate et efficace. Dans sa décision, la Commission a noté aux pages 4 et 5 :

[traduction]… Je conclus que la police de Saint-Vincent avait poursuivi Ronald car il avait été arrêté, accusé et poursuivi en justice à diverses reprises et la norme en matière de protection adéquate de l’État n’est pas la protection parfaite, ni la protection de tous les citoyens en tout temps.

 

 

Les demanderesses font valoir que la jurisprudence de la Cour a établi que la volonté d’assurer la protection de l’État aux victimes de violence familiale ne suffit pas à conclure à la protection adéquate de l’État. Les demanderesses s’appuient sur une décision de la Cour, Bobrick c. (Canada) Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, (1994), 85 F.T.R. 13 [1994] A.C.F. n° 1364 (QL), où la juge Tremblay-Lamer a conclu au paragraphe 13 :

[…] même si lÉtat veut protéger ses citoyens, un demandeur remplira le critère du statut de réfugié si la protection offerte est inefficace. Un État doit donner réellement de la protection, et non simplement indiquer la volonté daider. Lorsque la preuve révèle quun demandeur a connu de nombreux incidents de harcèlement ou de discrimination ou à la fois de harcèlement et de discrimination sans que lÉtat le défende efficacement, la présomption joue, et on peut conclure que lÉtat veut peut-être protéger le demandeur, mais quil ne peut le faire.

 

 

[19]           Les demanderesses soutiennent que la Commission n’a pas été attentive à la réalité de leur situation. Elles ont demandé la protection de l’État à de nombreuses reprises et, si elles ont réussi à obtenir une protection temporaire de l’État certaines fois et si Ronald a été incarcéré pour de courtes périodes de temps, il n’en reste pas moins vrai que Ronald est [traduction] « incontrôlable » et que ses incarcérations n’ont aucun effet dissuasif sur lui. Il est irréaliste, soutiennent les demanderesses, de conclure qu’elles devraient continuer de mettre leur vie en danger. Les demanderesses appuient leur assertion sur un arrêt de la Cour suprême du Canada, Canada (Procureur général) c. Ward, [1993] 2 R.C.S. 689 à la page 724, 103 D.L.R. (4th) 1 [Ward, cité selon les R.C.S.], où la Cour suprême a conclu que « le fait que le demandeur doive mettre sa vie en danger en sollicitant la protection inefficace d’un État, simplement pour démontrer cette inefficacité, semblerait aller à l'encontre de l’objet de la protection internationale ». Par conséquent, selon les demanderesses, la Commission a appliqué un critère juridique erroné en matière de protection de l’État et ne s’est pas demandé si l’État de Saint‑Vincent peut assurer une protection efficace aux victimes de la violence domestique.

 

[20]           L’observation finale des demanderesses sur ce point consiste à dire que la Commission a appliqué une norme trop élevée dans son appréciation de la protection de l’État. Dans ses motifs, la Commission, s’appuyant sur l’arrêt Ward, a conclu à la page 4 :

[traduction] Je conclus que les demanderesses n’ont pas repoussé par une preuve claire et convaincante la présomption selon laquelle le gouvernement démocratiquement élu de Saint-Vincent a la capacité d’assurer la protection de l’État à ses citoyens et qu’aucun élément de preuve n’établissait que le gouvernement était dans un état de chaos ou de désordre et qu’il était incapable de gouverner.

 

[21]           Les demanderesses citent la décision du juge O’Reilly, Carrillo c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 320, [2007] A.C.F. n° 439 (QL) [Carrillo], dans laquelle il a statué que la présomption de la protection de l’État n’entraîne pas que les demandeurs doivent assumer un fardeau de preuve plus élevé dans les cas où intervient cette question. La présomption « signifie simplement que, dans ces affaires, les demandeurs d’asile doivent fournir une preuve digne de foi sur cette question sans quoi ils risquent de ne pas tomber dans le champ d’application de la définition de réfugiés. En d’autres mots, la présomption n’est pas un obstacle spécial que les demandeurs d’asile doivent surmonter dans les cas où la question de la protection de l’État est soulevée – plutôt, elle établit simplement un point de départ quant à l’analyse du bien-fondé d’une demande d’asile ». (Carrillo, au paragraphe 15).

 

[22]           Les demanderesses notent en outre que dans la décision Carrillo, le juge O’Reilly a conclu :

Les mots « confirmer d’une façon claire et convaincante » pourraient être interprétés de façon à créer une norme de preuve. Ils sont parfois utilisés pour renvoyer à une norme de preuve plus stricte que la norme de la prépondérance des probabilités et un peu moins stricte que celle de la preuve hors de tout doute raisonnable (voir Kenneth S. Brown, ed. McCormick on Evidence, 6th ed. (St. Paul, Minn. : Thomson West, 2006, au paragraphe 340)). Cependant, cette utilisation est rare. À mon avis, le juge La Forest ne peut pas avoir eu l’intention d’établir une telle norme de preuve unique et élevée par rapport à la protection de l’État sans avoir aucunement traité de ce point ou sans aucunement renvoyer à la jurisprudence antérieure qui traitait du fardeau de la preuve dans les affaires de demandeurs d’asile. En particulier, il n’a pas renvoyé à l’arrêt Adjei, précité, dans lequel la Cour d’appel fédérale a expressément traité du fardeau de la preuve pour les demandeurs d’asile par rapport à l’élément objectif de la définition de réfugié.

 

 

 

Les observations du défendeur

 

[23]           Le défendeur soutient que l’argumentation des demanderesses sur la question de la protection de l’État constitue en fait une demande de réexamen de la preuve, ce qui n’est pas le rôle de la Cour dans le contrôle judiciaire. Selon le défendeur, les demanderesses n’ont pas établi que les conclusions de la Commission sont des conclusions qu’il ne lui était pas loisible de tirer. De plus, les conclusions de la Commission portaient sur des faits. Comme la Commission est la mieux placée pour apprécier la preuve, tant orale que documentaire, et évaluer le bien-fondé de la demande, la décision de la Commission appelle la déférence.

 

[24]           Le défendeur fait valoir qu’il est bien établi que le demandeur du statut de réfugié doit produire une preuve claire et convaincante de l’incapacité de l’État d’assurer la protection. Il n’est donc pas suffisant pour un demandeur d’établir simplement qu’un gouvernement n’est pas toujours parfait sur le plan de la protection de ses citoyens et ce n’est pas un fardeau de preuve déraisonnable que d’exiger du demandeur qu’il demande la protection de son pays avant de demander ailleurs une protection de suppléance.

 

[25]           Le défendeur s’appuie sur la jurisprudence de la Cour pour affirmer qu’il n’est pas déraisonnable pour la Commission de compter que les demandeurs prendront toutes les mesures raisonnables pour assurer leur propre protection. L’État devrait avoir la possibilité de fournir la protection qu’il met à la disposition de ses citoyens. Le défendeur poursuit en notant que la Commission, en l’espèce, était saisie d’éléments de preuve établissant que Ronald avait été accusé et condamné pour violence commise à l’endroit des demanderesses. Par conséquent, la police de Saint-Vincent a répondu aux demandes de protection des demanderesses.

 

[26]           Le défendeur fait ensuite valoir que la position des demanderesses postule nettement une norme trop rigoureuse de protection de l’État, qui ne correspond pas à la jurisprudence de la Cour d’appel fédérale. Suivant le défendeur, cette jurisprudence établit que c’est une position insoutenable que d’exiger d’un pays qu’il soit en mesure de garantir la protection de tous ses citoyens en tout temps. Se fondant sur l’arrêt Ward, le défendeur soutient que la protection étatique n’a pas à être parfaite. À l’appui de cet argument, le défendeur renvoie aussi à la décision Resulaj c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), (2006), 53 Imm. L.R. (3d) 229, 2006 CF 269 au paragraphe 20 [Resulaj], où la juge Layden-Stevenson s’est penchée sur l’arrêt Ward de la Cour suprême du Canada et sur un arrêt de la Cour d’appel fédérale, Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration c. Villafranca (1992), 99 D.L.R. (4th) 334, [1992] A.C.F. n° 1189 (QL) autorisation de pourvoi refusée, [1993] C. S.C.R. nº 76 :

À défaut dune situation deffondrement complet de lappareil étatique, il est généralement présumé quun État est en mesure d'assurer la protection de ses citoyens. Cette présomption sert à renforcer la raison profonde de la protection internationale offerte en remplacement, laquelle entre en jeu lorsque celui qui la réclame na plus d'autre solution. Les demandeurs dasile doivent présenter une preuve corroborant de façon claire et convaincante lincapacité de l'État à assurer leur protection pour réfuter la présomption voulant que lÉtat soit en mesure de protéger ses citoyens : Canada (Procureur général) c. Ward, [1993] 2 R.C.S. 689. La protection étatique na pas à être parfaite, mais elle doit être adéquate. Il ne suffit pas de démontrer quun gouvernement n'a pas toujours été efficace pour protéger les personnes dans la situation particulière du demandeur. Toutefois, lorsque lÉtat se révèle si faible, et sa maîtrise si ténue, quil nest quun gouvernement nominal, il peut être justifié daffirmer être incapable dobtenir sa protection : Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Villafranca [renvois omis].

 

 

[27]           Le défendeur soutient que la transcription et le propre témoignage des demanderesses établissent à l’évidence que la police a répondu continuellement à la demande de protection des demanderesses, notamment en poursuivant et en incarcérant Ronald pour voies de fait à diverses reprises. Le fait que Saint-Vincent a la capacité d’offrir aux demanderesses la protection de l’État, fait valoir le défendeur, est déterminant. Par conséquent, étant donné la preuve documentaire ainsi que la réponse de la police à la situation particulière des demanderesses, les conclusions de la Commission sur la protection de l’État ne peuvent être qualifiées de déraisonnables.

 

[28]           S’agissant de l’allégation portant que la Commission n’a pas tenu compte de la lettre de M. Sylvester Yamond-Cadetter, le défendeur soutient que la Commission n’est pas tenue de faire état de toutes les pièces produites en preuve dont elle est saisie; en outre, la Commission a admis que le frère des demanderesses a proféré des menaces contre sa famille à de nombreuses reprises. Le défendeur ajoute que la Commission a bien fait référence à la lettre de M. Yamond-Cadetter, comme l’atteste la référence à la lettre en note de bas de page dans la décision de la Commission.

 

[29]           Le défendeur fait également valoir que les arguments des demanderesses au sujet des observations de la Commission sur la Marion House ne sont pas fondés. Il suggère qu’il est évident d’après la décision que la mention de la Marion House qu’y fait la Commission reprend simplement le fait que les demanderesses n’avaient pas de renseignements sur cet établissement. La Commission ne s’est pas appuyée sur l’existence de la Marion House comme source de protection des demanderesses à Saint-Vincent. La Commission s’est plutôt fondée sur la protection qu’offrait l’État lui-même.

 

LES MOTIFS

 

1.      La conclusion de la Commission sur la protection offerte par l’État était-elle déraisonnable?

 

 

                        La norme de contrôle

 

 

[30]           S’agissant de la norme de contrôle applicable à la conclusion de la Commission sur la protection de l’État, la demanderesse fait valoir qu’il s’agit d’une question mixte de fait et de droit qui commande une révision fondée sur la norme du caractère raisonnable simpliciter. Le défendeur soutient que la norme est le caractère manifestement déraisonnable de la décision, du fait que les conclusions de la Commission sont de nature factuelle et justifient le plus haut degré de retenue.

 

[31]           Récemment, dans l’arrêt Dunsmuir c. New Brunswick, 2008 CSC 9 [Dunsmuir], la Cour suprême du Canada a reconnu qu’en dépit de la différence théorique entre la norme du caractère raisonnable simpliciter et celle du caractère manifestement déraisonnable, les « difficultés analytiques soulevées par l’application des différentes normes réduisent à néant toute utilité conceptuelle découlant de la plus grande souplesse propre à l’existence de normes de contrôle multiples » (Dunsmuir, au paragraphe 44). Par conséquent, la Cour a conclu qu’il y avait lieu de fondre en une seule les deux normes de raisonnabilité pour le contrôle de la « raisonnabilité ».

 

[32]           La question centrale en l’espèce est de savoir si, compte tenu des faits établis par la preuve des demanderesses, que la Commission a acceptés, la présomption relative à la protection adéquate de l’État a été repoussée. Je considère qu’il s’agit là d’une question mixte de fait et de droit et qui peut faire l’objet d’un contrôle selon la norme du caractère raisonnable. Dans la foulée de l’arrêt Dunsmuir, l’analyse de la décision de la Commission s’attachera « à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel » (Dunsmuir, au paragraphe 47). Si la décision n’appartient pas « aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit », elle sera annulée.

 

Le fond de la demande

 

[33]           S’agissant de l’argument des demanderesses selon lequel la Commission a pris en compte de manière sélective les éléments de preuve et n’a pas tenu compte des éléments de preuve qui contredisaient ses propres conclusions, la Commission a noté dans sa décision, à la page 4, les points suivants au sujet de la preuve documentaire touchant la situation du pays :

[traduction] Il y a des éléments de preuve qui appuient les allégations des demanderesses portant que les femmes subissent effectivement des sévices sexuels, physiques et émotionnels à Saint‑Vincent, comme dans de nombreuses régions du monde. La preuve documentaire établit que le gouvernement de Saint‑Vincent fait de sérieux efforts pour corriger le problème.

 

[34]           S’agissant de l’observation de la Commission dans la première phrase, la Commission renvoie de manière générale au dossier d’information de la SPR et cite spécifiquement le point 5 d’un rapport du Département d’État américain sur les pratiques en matière de droits de l’homme. À l’appui de sa conclusion selon laquelle [traduction] « le gouvernement fait de sérieux efforts pour corriger le problème », la Commission renvoie à la Loi sur la violence familiale de 1955 et à la réponse à la demande d’information VCT42714.E de la CISR, datée du 26 mai 2004.

 

[35]           Il est bien établi qu’il existe une présomption portant que la Commission a pris en considération tous les éléments de preuve dont elle est saisie (Florea c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1993] A.C.F. n° 598 au paragraphe 1 (C.A.F.) (QL)). Par conséquent, la Commission n’est pas tenue de mentionner chaque pièce de la preuve documentaire dans ses motifs. De plus, le fait que la Commission n’ait pas fait état de certains éléments de la preuve documentaire dont elle était saisie n’est pas fatal pour la décision (Hassan c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (C.A.F.), (1992), 147 N.R. 317, [1992] A.C.F. n° 946 (C.A.F.) (QL)). Cela dit, je dois toutefois avoir en tête la mise en garde bien connue du juge Evans dans la décision Cepeda-Gutierrez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1998), 157 F.T.R. 35, [1998] A.C.F. n° 1425 (QL), au paragraphe 17 :

[…] plus la preuve qui na pas été mentionnée expressément ni analysée dans les motifs de lorganisme est importante, et plus une cour de justice sera disposée à inférer de ce silence que lorganisme a tiré une conclusion de fait erronée « sans tenir compte des éléments dont il [disposait] » : Bains c. Canada (Ministre de lEmploi et de lImmigration) (1993), 63 F.T.R. 312 (C.F. 1re inst.). Autrement dit, lobligation de fournir une explication augmente en fonction de la pertinence de la preuve en question au regard des faits contestés. Ainsi, une déclaration générale affirmant que lorganisme a examiné lensemble de la preuve ne suffit pas lorsque les éléments de preuve dont elle na pas discuté dans ses motifs semblent carrément contredire sa conclusion. Qui plus est, quand lorganisme fait référence de façon assez détaillée à des éléments de preuve appuyant sa conclusion, mais quelle passe sous silence des éléments de preuve qui tendent à prouver le contraire, il peut être plus facile dinférer que lorganisme na pas examiné la preuve contradictoire pour en arriver à sa conclusion de fait.

 

[36]           Dans le contexte de la protection de l’État, les mots de la juge Layden-Stevenson dans la décision Castillo c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 56, [2004] A.C. F. n° 43 au paragraphe 9 (QL), sont particulièrement instructifs en l’espèce :

La question de lefficacité de la protection de lÉtat a été identifiée comme étant la question principale. Lorsquune preuve qui a trait à la question principale est soumise, le fardeau dexplication qui incombe à la Commission augmente quand celle-ci naccorde que peu ou pas de poids à cette preuve ou quand elle retient une certaine preuve documentaire de préférence à une autre. En lespèce, il n'y a presque aucun indice qui montre que la DPR a examiné la preuve documentaire des demanderesses ou les observations de leur avocat concernant la question de la protection de lÉtat. Les demanderesses avaient le droit de savoir si la Commission navait pas ignoré ces questions. Dans les circonstances, une déclaration générale indiquant que la totalité de la preuve a été examinée ne suffit pas.

 

Par conséquent, l’obligation de fournir une explication croît avec la pertinence de la preuve en regard des questions centrales dont est saisie la Commission.

 

[37]           La Commission a fourni une décision succincte et étroite en l’espèce. Il n’y avait pas de questions de crédibilité et la Commission semble avoir accepté le récit fait par les demanderesses des sévices subis par elles de la part de Ronald et de l’échec des tentatives des autorités de Saint‑Vincent pour le contrôler. La Commission a également accepté que la preuve établissait que les femmes subissent effectivement des sévices sexuels, physiques et émotionnels à Saint‑Vincent même si [traduction] « le gouvernement de Saint-Vincent fait de sérieux efforts pour corriger le problème ».

 

[38]           La demande a donc été rejetée au motif que les demanderesses [traduction] « n’avaient pas repoussé par une preuve claire et convaincante la présomption selon laquelle le gouvernement démocratiquement élu de Saint-Vincent avait la capacité d’assurer la protection de ses citoyens et qu’aucun élément de preuve n’établissait que le gouvernement était dans un état de chaos ou de désordre et qu’il était incapable de gouverner ».

 

[39]           Le fondement de la décision tient en trois simples lignes :

[traduction] Je conclus que la police de Saint-Vincent avait poursuivi Ronald, car celui-ci avait été arrêté, accusé et poursuivi en justice à diverses reprises et la norme de la protection adéquate n’est pas la protection parfaite ni la protection de tous les citoyens en tout temps.

 

[40]           La justification fondamentale de la décision est que les demanderesses n’avaient pas réfuté avec une preuve claire et convaincante le fait que Saint-Vincent n’est pas en mesure d’assurer une protection étatique adéquate parce que Ronald, le prédateur, avait effectivement été arrêté, accusé et poursuivi en justice [traduction] « à diverses reprises ». En d’autres termes, dans la mesure où la police arrête, accuse et poursuit en justice le prédateur de temps à autre (même si cela n’a pas d’effet dissuasif sur lui), la présomption d’une protection adéquate de l’État n’est pas repoussée.

 

[41]           Je ne crois pas que cette position reflète le droit sur la question ou constitue une réponse raisonnable à la preuve produite par les demanderesses en l’espèce.

 

[42]           Les demanderesses avancent une preuve claire et convaincante portant que, nonobstant les actions de la police cherchant à contrôler les menaces persistantes et la violence criminelle de leur frère, Ronald a continué de se comporter exactement de la même manière et, sauf si on l’en empêche, il pourrait fort bien tuer les demanderesses. Quelles que soient les mesures prises par les autorités de Saint-Vincent, Ronald n’a pas été dissuadé et les risques demeurent les mêmes si les demanderesses sont renvoyées à Saint-Vincent. La preuve établit clairement que les femmes sont menacées à Saint-Vincent et que l’État a fait la preuve de son incapacité de protéger les demanderesses.

 

[43]           Dans une situation où les demanderesses ont produit une preuve claire et convaincante d’un risque et où leur crédibilité n’est pas mise en question, ainsi qu’une preuve claire et convaincante que la police et les autorités de Saint-Vincent ne peuvent les protéger contre Ronald, la Commission doit faire plus que se replier sur des formules de routine glanées dans la jurisprudence portant [traduction] qu’« aucun élément de preuve n’établissait que le gouvernement était dans un état de chaos ou de désordre et qu’il était incapable de gouverner » et que la [traduction] « protection adéquate de l’État n’est pas la protection parfaite, ni la protection de tous les citoyens en tout temps ». À mon avis, cela n’a rien à voir avec une analyse et ces motifs ne sont pas adaptés aux faits de l’espèce. Si les lois du Canada exigent de ces trois femmes qu’elles retournent à Saint-Vincent et doivent subir de nouvelles violences, voire une mort possible aux mains d’un prédateur très dangereux que l’État de Saint-Vincent s’est montré incapable de dissuader, alors j’estime que la Commission est tenue d’expliquer pourquoi la présomption de la protection de l’État exige pareil résultat et pourquoi la présomption d’une protection adéquate n’a pas été repoussée dans une situation où la réponse de l’État s’est montrée totalement inefficace. À la lumière des faits qui ont été établis, le travail de la Commission n’est pas facile car il se peut, par exemple, que même le Canada ne puisse protéger les femmes contre les Ronalds de ce monde. Mais même dans des situations difficiles, le devoir de la Commission est d’expliquer ce qu’elle fait et pourquoi elle le fait dans les cas où les conséquences de sa décision sont si terribles.

 

[44]           Les poncifs de la Commission peuvent ne pas être faux comme énoncés généraux du droit, mais la Commission doit faire face aux faits dont elle est saisie et expliquer pourquoi, par exemple, l’arrestation, l’accusation et la poursuite de Ronald signifient, pour ce seul motif (la seule justification donnée), que la présomption de la protection de l’État n’est pas repoussée alors qu’il existe une preuve claire et convaincante que les actes de la police en l’espèce n’ont pas mis un terme au comportement de prédateur que craignent avec raison les demanderesses.

 

[45]           Je conviens avec la Commission que l’État de Saint-Vincent n’est pas tenu d’assurer une protection parfaite, mais, à mon avis, la Commission n’explique aucunement sur le plan de la preuve ou de la jurisprudence pourquoi, en l’espèce, l’existence d’une action limitée de la police entraîne que la présomption de la protection adéquate demeure intacte même en présence d’une preuve claire et convaincante établissant que cette action n’a pas dissuadé le prédateur et que les demanderesses seront soumises exactement à la même violence de la part du même homme si elles sont renvoyées.

 

[46]           Je ne veux pas dire que, sur le fondement des faits dont était saisie la Commission, celle-ci n’aurait pas pu dégager les mêmes conclusions sur les raisons pour lesquelles la présomption n’avait pas été repoussée en l’espèce. Mais la Commission se borne à dire que la protection adéquate de l’État n’est pas la protection parfaite ni la protection de tous les citoyens en tout temps. Le fait que la police ait pu arrêter, accuser et poursuivre Ronald en justice ne signifie pas, à mes yeux, qu’elle assure une protection adéquate ou qu’en exiger plus correspond à demander une protection parfaite.

 

[47]           L’analyse excessivement brève de la Commission est un exercice de routine et n’aborde pas ni ne traite la question centrale en l’espèce, soit le fait que les demanderesses ont été aux prises et seront aux prises, si elles sont renvoyées, avec un prédateur dangereux qui n’a pas été dissuadé par la police ou par le droit. Il ne s’arrêtera pas avant d’avoir tué quelqu’un.

 

[48]           Le défendeur dit qu’il s’agit simplement d’une situation malheureuse car aucun État ne peut protéger ses citoyennes contre de tels prédateurs. Toutefois, la Commission motive l’incapacité des demanderesses de repousser la présomption de la protection adéquate de l’État par le fait que la police de Saint-Vincent a déjà arrêté, accusé et poursuivi Ronald en justice et qu’en demander davantage revient à demander la protection parfaite. J’estime que le traitement qu’a fait la Commission de la question de la protection de l’État était déraisonnable et que les motifs de la Commission étaient inadéquats à la lumière de la preuve dont elle était saisie.

 

[49]           J’ai examiné les autres observations des demanderesses et je ne puis trouver aucune erreur justifiant le contrôle judiciaire sous d’autres aspects. En fait, la décision de la Commission sur la question principale est très succincte et ses motifs très étroits. Le maintien ou l’annulation de la décision repose sur cette question centrale.

 

[50]           S’agissant de l’argument de la demanderesse portant que la Commission n’a pas tenu compte de la lettre de M. Raymond-Cadette, la mention par la Commission de cette lettre dans les motifs, à la page 5 et à la note de bas de page 12, indique que la Commission a pris en compte cette lettre. En outre, je ne suis pas convaincu que la référence de la Commission à la Marion House et l’ignorance de la demanderesse à l’égard de cet établissement constituent une erreur justifiant un contrôle. Contrairement à ce que suggèrent les demanderesses, la Commission ne semble pas avoir fondamentalement mal cité leur témoignage ni confondu la disponibilité et l’efficacité de la protection de l’État avec la fourniture d’orientation et de conseils.

 

[51]           Sur la question centrale, toutefois, comme je l’ai exposé ci-dessus, je suis d’avis que la décision de la Commission est déraisonnable et que l’affaire doit être renvoyée en vue d’un nouvel examen.

 

[52]           Les avocats sont invités à signifier et déposer toute observation relative à la certification d’une question d’importance générale dans un délai de sept jours suivant la réception des présents motifs du jugement. Chaque partie disposera d’un délai supplémentaire de trois jours pour signifier et déposer toute réponse aux observations de la partie adverse. Un jugement sera alors rendu.

 

 

     « James Russell »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Christiane Bélanger, LL.L.

 

 

 

 

 

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                    IMM-7117-05

 

INTITULÉ :                                                   DONNA MICHELLE WOODS ET AL.

                                                                        c.

                                                                        LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                                        ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           LE 5 DÉCEMBRE 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                        LE JUGE RUSSELL

 

DATE DES MOTIFS :                                  LE 4 AVRIL 2008

 

 

OBSERVATIONS ÉCRITES :

 

Carol Simone Dahan                                                     POUR LA DEMANDERESSE

 

Ned Djordjevic                                                            POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Avocat                                                                         POUR LA DEMANDERESSE

Toronto (Ontario)

 

John H. Sims, c.r.                                                         POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

 

 

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