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Date :  20070326

Dossier :  IMM-4863-06

Référence :  2007 CF 318

Ottawa (Ontario), le 26 mars 2007

En présence de Monsieur le juge Beaudry 

 

ENTRE :

KINIQUE KEMIRA WOODS

demanderesse

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire, présentée en vertu du paragraphe 82.3 (1) de la Loi sur l’Immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, c. 27 (la Loi), de la décision de Joel Moss, de la Section de la protection des réfugiés (le Tribunal), rendue le 9 août 2006. Le Tribunal a conclu que la demanderesse n'était pas «une réfugiée au sens de la Convention » ou une « personne à protéger ». La décision du Tribunal ainsi que les éléments de preuves sont en anglais tandis que les mémoires des parties sont en français. Les plaidoiries orales ont eu lieu en français, la présente décision sera donc en français.

 

QUESTION EN LITIGE

[2]                La décision du Tribunal est-elle manifestement déraisonnable?

 

[3]               Pour les motifs suivants, la réponse à cette question est négative. Par conséquent, la présente demande de contrôle judiciaire sera rejetée.

 

CONTEXTE FACTUEL

[4]               Citoyenne de Saint Vincent, la demanderesse est née le 1er  février 1994. Lors de l’audience du 26 juillet 2006, la demanderesse avait douze ans. Sa représentante désignée est sa mère, madame Astrid Lolita Woods, qui a témoigné au nom de la demanderesse.

 

[5]               Madame Woods vit au Canada depuis 2000. Elle a laissé la demanderesse sous la garde d’une amie puisque le père de celle-ci n’était pas disponible pour en prendre charge. Madame Woods a décidé de faire venir la demanderesse chez elle au Canada lorsque la gardienne désignée est tombée malade.

 

[6]               Madame Woods déclare que si la demanderesse devait retourner à Saint Vincent, elle serait entièrement abandonnée à ses propres moyens, se retrouverait dans la rue, le régime social pour les enfants de Saint Vincent étant inadéquat pour subvenir à ses besoins.

 

[7]               L’avocat de la demanderesse a reconnu qu’elle ne satisfait pas aux critères établis à l’article 96 de la Loi pour obtenir le statut de réfugiée au titre de la Convention. Son dossier a donc été examiné par le Tribunal en vertu de l’article 97 de la Loi. La décision négative établissant que la demanderesse ne soit pas une personne à protéger est l’objet de la présente demande de contrôle judiciaire.

 

DÉCISION CONTESTÉE

[8]               Ayant considéré l’ensemble du dossier et en se référant à la preuve documentaire concernant les services sociaux à Saint Vincent, le Tribunal a conclu ainsi :

 [. . .] Although the child welfare system is limited and is not up to the standards we have in Canada, nonetheless, the evidence before the tribunal does not suggest that on the balance of probabilities Kinique’s life would be in danger should she return to Saint Vincent and be referred to the child welfare authorities as an abandoned child.

 

 

[9]               Le Tribunal a aussi reconnu que la situation de la demanderesse peut donner lieu à des considérations humanitaires en vertu de l’article 25 de la Loi. Toutefois, il a trouvé qu’elle n’a jamais été victime d’abus et son retour éventuel dans son pays ne mettrait pas sa vie en danger.

 

Analyse

1)         La décision du Tribunal est-elle manifestement déraisonnable?

 

[10]           La jurisprudence nous enseigne que la Cour ne peut substituer son opinion à celle du tribunal à moins d'une conclusion erronée, tirée de façon arbitraire et sans tenir compte de la preuve (Sheikh c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2004 CF 8, [2004] A.C.F. no 64 (C.F.) (QL)).

 

[11]            La demanderesse prétend que le tribunal a erré parce qu’elle serait en danger si elle devait retourner à Saint Vincent où les services sociaux sont inadéquats.

 

[12]           Pour sa part, le défendeur plaide que le Tribunal a tenu en compte l’intérêt de la jeune demanderesse et note également que cette dernière est venue au Canada bien avant que la mère aie supposément appris que la gardienne ne pouvait plus s’occuper d’elle. Enfin, la mère ne possède pas de statut légal au Canada et peut être l’objet d’un renvoi dans son pays à tout moment.

 

[13]           Bien que la situation de cette jeune demanderesse puisse justifier de la compassion, il n’en demeure pas moins qu’elle n’a pas su convaincre le Tribunal du bien fondé de sa demande. Ayant revu l’ensemble du dossier, je partage la position du défendeur que le Tribunal a été sensible aux meilleurs intérêts de la demanderesse.

 

[14]           Le principal reproche adressé au Tribunal est d'avoir ignoré la preuve documentaire concernant les enfants abandonnés à Saint-Vincent. Cependant, à la lecture de cette preuve et des notes sténographiques, on s'aperçoit qu'il en a été question. Le Tribunal en a discuté avec le procureur de la demanderesse mais n'était pas d'accord avec l'argumentation de ce dernier.

 

[15]           Ce n'est pas le rôle de cette Cour d'apprécier la preuve documentaire de nouveau à moins d'une erreur manifestement déraisonnable, ce qui n'est pas le cas ici.

 

[16]           Si la Cour avait été appelée à rendre elle-même cette décision difficile, elle en serait peut-être venue à une autre conclusion mais ce n'est pas le critère à appliquer lors d'un contrôle judiciaire (Tawfik c. Canada (ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1993] A.C.F. no 835 (C.F. 1ère inst.) (QL)).

[17]           La Cour constate que la demanderesse dispose d'un autre recours soit celui sous l'article 25(1) afin de demander pour des raisons humanitaires qu'elle demeure avec sa mère jusqu'à ce que les autorités décident du sort de cette dernière.

 

[18]           Les parties ont eu l'opportunité de soumettre des questions à certifier mais elles ont décliné. Ce dossier n'en contient aucune.


 

JUGEMENT

LA COUR ORDONNE que

1.      La demande de contrôle judiciaire soit rejetée;

2.      Aucune question n’est certifiée.

 

« Michel Beaudry »

Juge


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-4863-06

 

INTITULÉ :                                       KINIQUE KEMIRA WOODS et

                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE                                                                           L’IMMIGRATION

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               le 22 mars 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              Le juge Beaudry

 

DATE DES MOTIFS :                      le 26 mars 2007

 

 

 

COMPARUTIONS :                       

 

Alain Joffe                                                                    POUR LA DEMANDERESSE

 

 

Gretchen Timmins                                                         POUR LA DÉFENDERESSE

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Alain Joffe                                                                    POUR LA DEMANDERESSE

Montréal (Québec)

 

John Sims, c.r.                                                              POUR LA DÉFENDERESSE 

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

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