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Date : 20080305

Dossier : IMM-5506-06

Référence : 2008 CF 283

Ottawa (Ontario), le 5 mars 2008

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE O'REILLY

 

 

ENTRE :

LENFORD RICHARDS

demandeur

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION et

LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE

ET DE LA PROTECTION CIVILE

défendeurs

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               M. Lenford Richards est arrivé au Canada en 1990 en provenance de la Jamaïque. Après avoir fait l’objet d’une mesure d’expulsion, il a réclamé un examen des risques avant le renvoi en expliquant qu’il craignait les représailles des gangs de la Jamaïque. Il a été témoin d’un meurtre lors d’un voyage en Jamaïque en 1992 et a par la suite fait l’objet de menaces de mort. Un autre témoin a été tué au cours du procès des présumés meurtriers. La gendarmerie jamaïcaine a confirmé que M. Richards court toujours un danger.

 

[2]               L’agent chargé de l’examen des risques a néanmoins conclu que M. Richards pouvait compter sur la protection de l’État en Jamaïque et qu’il n’était donc pas exposé à un risque de préjudice grave. L’agent a notamment signalé que M. Richards pouvait bénéficier d’un programme de protection des témoins.

 

[3]               M. Richards soutient que l’agent a commis une erreur dans son traitement de la preuve. Je suis d’accord avec lui pour dire que l’agent a commis une erreur et je vais donc faire droit à la présente demande de contrôle judiciaire.

 

I.     Question en litige

 

[4]               L’agent a-t-il commis une erreur en ne tenant pas compte d’éléments de preuve importants qui appuyaient les allégations de M. Richards?

 

II.   Analyse

 

[5]               L’agent a conclu que les éléments de preuve documentaires sur lesquels M. Richards se fondait démontraient qu’il existe un risque général d’être victime d’un crime en Jamaïque. Aucun des documents produits ne portait sur sa situation personnelle. De plus, les documents indiquaient que la police tentait de faire face à la situation difficile du pays en matière de criminalité.

 

[6]               L’agent a également examiné des rapports qualifiant la Jamaïque de démocratie constitutionnelle dotée d’une force de police professionnelle et d’une magistrature indépendante. Il a également cité un article du Jamaica Information Service qui parlait du programme de protection des témoins. L’agent a fait observer qu’il n’était pas mentionné, dans la lettre de la gendarmerie jamaïcaine que M. Richards avait produite, qu’il pouvait se prévaloir de ce programme. Tout en reconnaissant que la criminalité constitue un grave problème en Jamaïque, l’agent a conclu que M. Richards n’avait pas présenté d’éléments de preuve suffisants pour réfuter la présomption qu’il pourrait compter sur la protection de l’État à son retour.

 

[7]               L’agent ne mentionne cependant pas les éléments de preuve documentaires suivant lesquels les mesures de représailles représentent 39 p. 100 des meurtres commis en Jamaïque, que l’assassinat des témoins est un grave problème, surtout dans le cas des procès portant sur des crimes violents ou impliquant des gangs, et que la protection des témoins représente un défi de taille dans un pays aussi petit que la Jamaïque.

 

[8]               L’agent n’a pas non plus cité les documents démontrant que l’application du programme de protection des témoins souffre d’une grave pénurie de personnel et que de nombreux observateurs ont signalé les lacunes du programme. Même le document du Département d’État sur lequel l’agent a fortement tablé déclarait [traduction] qu’« il existe un manque de confiance général à l’égard du programme de protection des témoins offert par la police ».

 

[9]               À mon sens, l’agent devait tenir compte des éléments de preuve convaincants qui contredisaient sa conclusion que M. Richards pouvait obtenir la protection de l’État en Jamaïque (Cepeda-Gutierrez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1998] A.C.F. no 1425). Je dois donc accueillir la présente demande de contrôle judiciaire et ordonner un nouvel examen par un autre agent. Ni l’une ni l’autre des parties n’a proposé de question grave de portée générale à certifier et aucune n’est énoncée.

 


 

 

JUGEMENT

LA COUR :

 

1.                  ACCUEILLE la demande de contrôle judiciaire et ORDONNE la tenue d’un nouvel examen par un autre agent;

 

2.                  N’ÉNONCE aucune question grave de portée générale.

 

 

« James W. O’Reilly »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Christiane Bélanger, LL.L.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                    IMM-5506-06

 

INTITULÉ :                                                   RICHARDS c.

                                                                        MCI ET MSPPC

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           LE 1er NOVEMBRE 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                          LE JUGE O’REILLY

 

DATE DES MOTIFS :                                  LE 5 MARS 2008

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Timothy Wichert

POUR LE DEMANDEUR

 

Stephen H. Gold

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Jackman & Associates

Toronto (Ontario)

POUR LE DEMANDEUR

 

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Toronto  (Ontario)

 

 

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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