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Cour fédérale

 

Federal Court


 

Date : 20080214

Dossier : T-1183-07

Référence : 2008 CF 190

Ottawa (Ontario), le 14 février 2008

EN PRÉSENCE DE MADAME LA JUGE MACTAVISH

 

 

ENTRE :

LE MATELOT DE PREMIÈRE CLASSE D.M. MORPHY (RETRAITÉ)

demandeur

et

 

 

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

 

[1]               Le matelot de première classe David M. Morphy (retraité) sollicite le contrôle judiciaire de la décision du Chef d’état-major de la Défense rejetant son grief concernant la qualité des soins médicaux qu’il a reçus pendant qu’il était membre des Forces canadiennes.

 

[2]               Le matelot de première classe fait valoir qu’en rejetant son grief, le Chef d’état-major de la Défense a erronément omis de fournir les motifs de son désaccord avec les conclusions et recommandations du Comité des griefs des Forces canadiennes. 

 

[3]               Selon le matelot de première classe Morphy, le Chef d’état-major de la Défense a commis une autre erreur en ne tenant pas compte de la preuve et en se fondant sur une preuve dont la non‑fiabilité peut être démontrée.

 

[4]               Enfin, le matelot de première classe Morphy fait valoir que le Chef d’état-major de la Défense a agi d’une manière inéquitable au point de vue procédural en se fondant sur une preuve médicale obtenue du directeur général – Autorité des griefs des Forces canadiennes, sans l’avoir au préalable présentée au Comité des griefs des Forces canadiennes pour qu’il puisse l’examiner.

 

[5]               Pour les motifs qui suivent, je conclus que, contrairement à ce qu’exige la Loi sur la Défense nationale, le Chef d’état-major de la Défense n’a pas fourni les motifs de son désaccord avec les principales conclusions formulées par le Comité des griefs des Forces canadiennes. Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire sera accueillie.

 

Contexte

[6]               En 1983, le matelot de première classe Morphy s’est enrôlé dans la Marine canadienne à titre de technicien en approvisionnement au Service de la logistique des Forces canadiennes. À l’été de 1985, il s’est blessé au dos au cours d’un entraînement obligatoire. Quelques semaines plus tard, sa blessure s’est aggravée lors d’un cours d’aptitude physique. Le matelot de première classe Morphy a alors cherché de l’aide médicale auprès du personnel médical des Forces canadiennes, qui a diagnostiqué qu’il souffrait d’une « tension musculaire lombaire ».

[7]               Le matelot de première classe Morphy a continué d’éprouver des difficultés en raison de sa blessure au dos, ce qui l’amené à demander de l’aide médicale de temps à autre pendant plusieurs années.

 

[8]               En mars 1990, pendant qu’il était cantonné en Allemagne, le matelot de première classe Morphy a une fois encore demandé des soins médicaux pour ses maux de dos. À cette époque, le personnel médical des Forces canadiennes lui a demandé de subir une scintigraphie osseuse et une radiographie pour déterminer s’il souffrait de spondylolyse bilatérale.

 

[9]               La scintigraphie osseuse a été effectuée par le Dr Merette, médecin des Forces canadiennes. Celui‑ci a indiqué dans son rapport qu’il n’avait pas la formation nécessaire pour interpréter les résultats du test. Toutefois, il a déclaré qu’il ne voyait aucun signe de capitation importante du rachis lombaire.

 

[10]            À cette époque, le matelot de première classe Morphy a également été aiguillé vers un radiologiste allemand, le Dr Christian Gospos, qu’il a vu le 12 avril 1990. Après avoir examiné la scintigraphie osseuse du matelot de première classe Morphy, le Dr Gopos a recommandé un tomodensitogramme du rachis lombaire.

 

[11]           Le tomodensitogramme n’a pas été effectué en 1990, manifestement parce que la douleur au dos du matelot de première classe Morphy s’était calmée depuis. Il ignorait à l’époque que le Dr Gopos avait recommandé un tomodensitogramme.

 

[12]           Le matelot de première classe Morphy est retourné au Canada au printemps 1993. Il a continué de ressentir des douleurs au bas du dos et a encore, de temps à autre, demandé de l’aide au personnel médical des Forces canadiennes.

 

[13]           Selon les dossiers médicaux des Forces canadiennes, le matelot de première classe Morphy a été vu par un médecin pour ses douleurs persistantes au dos. Le médecin a prescrit une radiographie du rachis. Bien qu’il ait noté qu’un tododensitogramme avait été demandé en 1990 et n’avait jamais été fait, le médecin n’en a pas demandé un à ce moment‑là.

 

[14]           Le matelot de première classe Morphy a été voir le personnel médical des Forces canadiennes en raison de ses douleurs au dos à l’automne 1993, puis de nouveau en 1994 et au début de 1998. À aucun moment un tomodensitogramme n’a été fait.

 

[15]           En juillet 1998, son dos lui causait encore des problèmes. Il a été suivi par des médecins des Forces canadiennes entre juillet et novembre 1998 et a également reçu une physiothérapie intensive.

 

[16]           Vers cette époque, le matelot de première classe Morphy a présenté une demande d’accès à l’information concernant ses dossiers médicaux. Ce n’est qu’à la réception de son dossier médical des Forces canadiennes qu’il a découvert que le Dr Gopos avait recommandé un tomodensitogramme en 1990.

 

[17]           Le matelot de première classe Morphy a alors demandé à son médecin des Forces canadiennes de lui faire subir le tomodensitogramme. Il a été par la suite aiguillé vers un spécialiste en orthopédie, qui a demandé une « tomomyélographie » de son rachis lombaire.

 

[18]           Un tomodensitogramme a été effectué en décembre 1998. Il a révélé un « bombement annulaire du disque intervertébral L4‑L5 » et une sténose modérée à sévère au niveau L4‑L5.

 

[19]           À la suite de ce diagnostic, le matelot de première classe Morphy a subi une arthrodèse, le 6 janvier 2000.

 

[20]           Le 9 novembre 2000, pendant qu’il se rétablissait de la chirurgie, le matelot de première classe Morphy a été promu matelot‑chef. Cependant, la promotion a été reportée par son commandant, qui l’avait jugé temporairement inapte sur le plan physique.

 

[21]           On a ensuite jugé que le matelot de première classe Morphy souffrait d’une incapacité permanente et il a, pour cette raison, été libéré des Forces canadiennes le 16 janvier 2002.

 

Grief du matelot de première classe Morphy

[22]           Le 12 juillet 2002, le matelot de première classe Morphy a présenté à son commandant un grief dans lequel il a allégué que les autorités médicales à l’emploi des Forces canadiennes ne lui ont pas prodigué des « soins médicaux appropriés et en temps opportun ». Il a fait valoir que cette inaction lui a causé des souffrances et des douleurs, a diminué ses capacités physiques, lui a fait perdre des possibilités d’avancement, des revenus et des prestations de pension ultérieures, et avait été à l’origine de sa libération prématurée des Forces canadiennes.

 

[23]           Le grief du demandeur est un long document. Toutefois, le matelot de première classe Morphy résume l’essence de son grief dans les termes suivants :

[traduction] Lésé par une série de décisions et/ou d’actes d’omission des autorités médicales des FC dès 1985, et ce, jusqu’à la date de l’intervention chirurgicale que j’ai subie en 2000, situation pour laquelle aucun autre recours n’est prévu dans la Loi sur la défense nationale, je formule un grief fondé sur l’omission de la part des autorités médicales des FC de me prodiguer les soins médicaux appropriés et en temps opportun qu’elles étaient tenues de me fournir et auxquels j’avais droit; leur inaction m’a causé des souffrances physiques sur une période prolongée, a détérioré ma qualité de vie et a contribué à la perte de grandes possibilités d’avancement ainsi que des revenus qui s’y rattachent et de prestations de pension ultérieures, pour aboutir à ma libération prématurée des Forces canadiennes en juillet 2002, ce qui a ajouté à mes pertes économiques.

 

 

 

[24]           Comme réparation, le matelot de première classe Morphy a demandé un jugement déclarant que les autorités médicales des Forces canadiennes ne lui ont pas prodigué des soins médicaux appropriés. De plus, il a sollicité des excuses du Chef d’état-major de la Défense et a demandé qu’un conseil de promotion réévalue son rendement de 1990 à 1998 de façon à déterminer l’impact de son handicap sur son rendement et ses chances de promotion au cours de cette période. Il a également demandé une compensation financière pour ses souffrances et blessures.

 

Traitement du grief du matelot de première classe Morphy

[25]           La Loi sur la défense nationale et les Ordonnances et règlements royaux applicables aux Forces canadiennes prévoient les procédures à suivre pour les griefs déposés par les membres des Forces canadiennes. Les dispositions pertinentes de la loi sont énoncées dans une annexe jointe à la présente décision.

 

[26]           Suivant ces procédures, un grief doit d’abord se décider par une « autorité de première instance ». Lorsque la réparation demandée par la personne s’estimant lésée n’est pas accordée par l’autorité de première instance, elle peut alors présenter le grief au Chef d’état-major de la Défense pour examen et décision.

 

[27]           Toutefois, lorsqu’un grief porte sur « le droit aux soins médicaux ou dentaires », l’alinéa 7.12(1)d) des Ordonnances et règlements royaux prévoit que le Chef d’état‑major de la Défense doit d’abord envoyer le grief au Comité des griefs des Forces canadiennes (CGFC).

 

[28]           Conformément à ces procédures, le commandant du matelot de première classe Morphy a envoyé le grief au directeur général des Services de santé (DGS San), comme autorité de première instance. Le 16 décembre 2002, le DGS San a jugé que le matelot de première classe avait reçu des soins de santé [traduction] « appropriés et en temps utile compte tenu de son état pathologique ».

 

[29]           Plus précisément, le DGS San a indiqué qu’en 1990 la notation « Asx », signifiant « asymptomatique », avait été inscrite sur la copie de dossier de la scintigraphie osseuse du matelot de première classe Morphy. Le DGS San était d’avis que cela signifiait que l’état de santé du matelot de première classe Morphy avait été évalué et le fait qu’il était devenu asymptomatique laissait entendre qu’un tomodensitogramme n’était pas approprié à l’époque.

 

[30]           Le DGS San a également indiqué que le matelot de première classe Morphy n’avait pas demandé d’être traité pour sa blessure au dos pendant les trois ans qui ont suivi la première recommandation d’un tomodensitogramme. De plus, en 1998, les spécialistes que le matelot de première classe Morphy avait consultés ont indiqué qu’il avait reçu un excellent traitement et que, malgré le succès de l’intervention chirurgicale, il continuait de souffrir de douleurs au dos.

 

[31]           Mécontent de cette décision, le matelot de première classe Morphy a alors demandé que son grief soit envoyé au Chef d’état-major de la Défense. Toutefois, comme le grief concernait un traitement médical, il a été plutôt envoyé au CGFC, conformément à l’article 7.12 du chapitre 7 des Ordonnances et règlements royaux applicables aux Forces canadiennes.

 

[32]           Conformément à l’article 29.2 de la Loi sur la défense nationale et à l’article 7.13 des Ordonnances et règlements royaux, le mandat du CGFC consiste à formuler des conclusions et recommandations au Chef d’état-major de la Défense et au plaignant.

 

[33]           Le 28 avril 2006, le CGFC a conclu que [traduction] « compte tenu du fait qu’il était indiqué dans le dossier médical du plaignant qu’un spécialiste avait recommandé un tomodensitogramme, il est raisonnable de conclure que la mesure prudente à prendre aurait été d’effectuer le tomodensitogramme en 1990. »

 

[34]           Le Comité a de plus jugé que le DGS San avait abusivement attribué au Dr Gospos la notation selon laquelle le matelot de première classe Morphy était asymptomatique et que, quoi qu’il en soit, dans les huit années qui ont suivi cette notation, aucun médecin des Forces canadiennes n’a jugé indiqué de donner suite à la recommandation.

 

[35]           Par conséquent, le défaut des Forces canadiennes de donner suite à la recommandation du Dr Gospos, jumelé à la note écrite par le Dr Merette en 1990 indiquant qu’il n’avait pas la formation nécessaire pour examiner la scintigraphie osseuse du matelot de première classe Morphy, a amené le Comité à conclure qu’il [traduction] « n’y avait pas eu diligence raisonnable à l’égard du plaignant ».

 

[36]           Ces conclusions, jointes au fait que le rapport d’appréciation du rendement (RAR) du matelot de première classe Morphy indiquait que, depuis six ans, on recommandait fortement sa promotion immédiate, ont ensuite amené le Comité à conclure « qu’il n’avait pas été promu en raison de ses maux de dos ».

 

[37]           Le Comité a rejeté un certain nombre d’autres allégations soulevées par le matelot de première classe Morphy dans son grief. En particulier, le Comité n’a pas accepté l’allégation selon laquelle le DGS San, en qualité de première instance ayant examiné le grief, a fait preuve de partialité puisqu’il était également l’autorité chargée d’étudier les mesures prises par les médecins dont la conduite faisait l’objet d’examen. De l’avis du Comité, toute préoccupation quant à la partialité en première instance serait atténuée par les conclusions des décideurs subséquents.

 

[38]           Quant à la question de la réparation, le Comité a fait remarquer que l’article 9 de la Loi sur la responsabilité civile de l’État et le contentieux administratif interdisait le versement d’un paiement pour toute perte – notamment décès, blessures ou dommage ouvrant droit au paiement d’une pension ou indemnité.

 

[39]           Comme le matelot de première classe Morphy avait antérieurement reçu un paiement forfaitaire du ministère des Anciens Combattants, le Comité a jugé qu’il n’avait droit à aucune indemnité financière des Forces canadiennes.

 

[40]           Le Comité a également rejeté sa demande d’excuses. Toutefois, il a recommandé que le dossier du matelot de première classe Morphy soit examiné afin de déterminer dans quelle mesure ses blessures au dos avaient nui à ses possibilités d’avancement. Le Comité a de plus recommandé que le Chef d’état-major de la Défense lui accorde rétroactivement la promotion jugée appropriée.

 

[41]           Le 9 mai 2006, le matelot de première classe Morphy a été informé de l’envoi des conclusions et recommandations du Comité au Chef d’état-major de la Défense pour que celui‑ci prenne la décision définitive, conformément au paragraphe 29.2(1) de la Loi sur la défense nationale. Le matelot de première classe Morphy a par la suite été invité à présenter des observations en réponse au rapport du Comité, mais il a décliné l’invitation.

 

[42]           Bien que le Chef d’état-major de la Défense soit l’autorité de dernière instance en matière de griefs de cette nature, la responsabilité d’examiner les griefs en dernière instance afin de s’assurer que toute la documentation nécessaire pour rendre une décision définitive est disponible a été déléguée au directeur général – Autorité des griefs des Forces canadiennes (DGAGFC).

 

[43]           Un analyste des griefs du DGAGFC a alors examiné le dossier du matelot de première classe Morphy et a préparé à l’intention du Chef d’état-major de la Défense un rapport dans lequel il a recommandé le rejet du grief.

 

[44]           L’analyste n’a pas estimé que les Forces canadiennes avaient refusé de fournir au matelot de première classe Morphy les soins médicaux appropriés. Se fondant sur l’information reçue du directeur de la Politique de santé, qui avait évidemment consulté un spécialiste externe, l’analyste a jugé qu’il n’était pas déraisonnable de la part des médecins du matelot de première classe Morphy d’avoir choisi de reporter le tomodensitogramme compte tenu des résultats de la radiographie et de la scintigraphie osseuse effectuées en 1990.

 

[45]           De plus, il n’était pas clair que l’état de santé du matelot de première classe Morphy en 1990 justifiait une intervention chirurgicale ou que celle‑ci aurait réussi à soulager ses douleurs.

 

[46]           L’analyste a également conclu que le fait qu’une personne ait reçu des évaluations positives ne pouvait pas en soi être déterminant quant à la question de savoir si cette personne allait être promue puisque d’autres facteurs doivent également être pris en considération.

 

[47]           Se fondant sur un examen des statistiques sur les promotions, l’analyste a conclu que ce n’est qu’en 2000 que les notes du matelot de première classe Morphy ont été suffisamment élevées pour qu’il soit admissible à une promotion, époque à laquelle on lui avait offert la possibilité de participer à un cours de chef subalterne. Le candidat doit avoir réussi ce cours pour qu’il soit pris en considération pour une promotion.

 

[48]           L’avocat du matelot de première classe Morphy a reçu un résumé du rapport de l’analyste et on lui a donné la possibilité de présenter des observations en réponse au rapport.

 

[49]           Dans ses observations, le matelot de première classe Morphy a contesté la compétence du DGAGFC quant au [traduction] « réexamen d’une question soulevée dans la procédure de grief avant de la remette à l’autorité de dernière instance pour que celle‑ci rende une décision », à « la collecte et la présentation d’éléments de preuve “nouveaux” et la “reformulation de questions” » après la conclusion des audiences du CGFC et l’intervention illicite du DGAGFC entre les conclusions du CGFC et la présentation du dossier à l’autorité de dernière instance.

 

La décision du Chef d’état-major de la Défense

[50]           Le 10 mai 2007, le Chef d’état-major de la Défense a rejeté dans son intégralité le grief du matelot de première classe Morphy. C’est cette décision qui sous‑tend la demande de contrôle judiciaire.

 

[51]           Le Chef d’état-major de la Défense a d’abord examiné l’allégation suivant laquelle le DGAGFC a outrepassé son pouvoir et sa compétence. Se fondant sur l’arrêt Armstrong c. Canada (GRC), [1998] A.C.F. n 42 (C.A.F.), il a conclu que le processus suivi en l’instance était conforme à l’équité procédurale et à la prérogative du pouvoir juridictionnel de se faire aider dans son évaluation.

 

[52]           Le Chef d’état-major de la Défense a également rejeté la prétention du matelot de première classe Morphy selon laquelle une preuve médicale nouvelle avait été irrégulièrement présentée en dernière instance, sans avoir au préalable été soumise à l’examen du CGFC. À cet égard, il a noté que même si le Comité peut tenir des audiences, il n’a pas de pouvoir juridictionnel, et ses conclusions et recommandations ne lient pas le Chef d’état-major de la Défense.

 

[53]           En ce qui concerne le fond du grief du matelot de première classe Morphy, le Chef d’état‑major de la Défense a déclaré qu’il [traduction] « n’était pas en mesure de conclure qu’il y avait eu faute professionnelle ». Il a ensuite affirmé qu’il examinerait les allégations soulevées dans le grief du matelot de première classe Morphy [traduction] « dans la mesure où elles pourraient avoir une influence sur [sa] promotion, [sa] participation à la Qualification élémentaire en leadership (QEL) [qui remplace le cours de chef subalterne] et [sa] libération des FC. »

 

[54]           Le Chef d’état-major de la Défense a ensuite mentionné que le matelot de première classe Morphy a allégué dans son grief qu’il y a eu « pratique incompétente des médecins ». Malgré son affirmation antérieure qu’il n’était pas en mesure de conclure à la négligence professionnelle, il s’est appuyé sur la jurisprudence en matière de négligence médicale pour affirmer que [traduction] « la norme de diligence impose aux personnes douées d’aptitudes ou de connaissances exceptionnelles le devoir d’agir comme le ferait une personne prudente possédant des compétences ou connaissances identiques ou similaires dans des circonstances semblables ».

 

[55]           Le Chef d’état-major de la Défense a ensuite déclaré que pour conclure que le matelot de première classe Morphy avait été lésé en raison de la mauvaise qualité des soins médicaux reçus, il incombait à celui‑ci de le convaincre que les soins reçus ne satisfaisaient pas à la norme de diligence imposée aux médecins au moment en question et que le défaut de fournir des soins adéquats [traduction]  « avait causé ou contribué directement à causer l’état pathologique à l’origine du refus de [sa] promotion et de [sa] libération ».

 

[56]           L’essence de la conclusion du Chef d’état-major de la Défense selon laquelle le matelot de première classe Morphy n’avait pas démontré que les soins médicaux reçus n’étaient pas adéquats se trouve dans la déclaration suivante :

[traduction] Après examen du grief, je conclus que la preuve est insuffisante pour établir que les interventions de vos médecins en 1990 n’avaient pas satisfait à la norme de diligence à laquelle ils étaient assujettis ou qu’un diagnostic différent aurait donné un résultat différent. Je note que les résultats de votre test EXPRES indiquent que vous êtes resté physiquement apte et généralement en bonne santé jusqu’à l’année 2000. Bien que la continuité des soins que vous avez reçus ait pu ne pas paraître idéale, je ne puis conclure, sur le fondement de ce que j’ai lu dans votre grief, que vous avez été lésé en ce qui concerne la qualité des soins médicaux reçus en 1990, ni qu’il n’existe un lien de causalité entre ces soins et l’état pathologique à l’origine des contraintes à l’emploi imposées en 2000. Ces contraintes justifiaient le refus de votre promotion et votre libération.

 

 

 

[57]           Le Chef d’état-major de la Défense a reconnu que le Comité des griefs des Forces canadiennes avait recommandé une enquête plus poussée afin de déterminer si le matelot de première classe Morphy aurait dû avoir une promotion. Toutefois, après un examen des résultats passés du conseil de promotion au mérite en ce qui concerne les techniciens en approvisionnement, il a trouvé qu’il aurait été impossible pour le matelot de première classe Morphy d’obtenir une promotion avant 2000, car ses notes étaient trop faibles pour qu’il soit admissible à une promotion compte tenu du nombre de postes de techniciens en approvisionnement disponibles en 1998 et 1999.

 

[58]           Le Chef d’état-major de la Défense a également fait observer que la sélection du  matelot de première classe Morphy pour une promotion au poste de matelot-chef intérimaire (qualification insuffisante) en 2000, ainsi que sa participation au cours de Qualification élémentaire en leadership, avaient toutes deux été reportées en raison de son état de santé temporaire, et qu’il avait été libéré lorsqu’il a été établi que ses contraintes à l’emploi pour raisons médicales étaient de nature permanente. Selon le Chef d’état-major de la Défense, le matelot de première classe Morphy n’a pas réussi à établir que ces contraintes étaient inappropriées ou qu’il y avait un lien entre son état de santé et les prétendues lacunes dans les soins médicaux qu’il a reçus.

 

[59]           Par conséquent, le Chef d’état-major de la Défense a conclu que le matelot de première classe Morphy avait été traité avec justice et équité, conformément aux politiques pertinentes. En outre, vu qu’il n’avait pas eu droit à une promotion avant 2000, et qu’il avait été médicalement inapte depuis 2000, le grief et la réparation demandée ont été rejetés.

 

Questions

[60]           Bien que le matelot de première classe Morphy ait soulevé un certain nombre de questions dans la présente demande, je suis d’avis que les questions déterminantes sont celles de savoir si le Chef d’état-major de la Défense a commis une erreur en omettant d’examiner convenablement les questions essentielles soulevées dans le grief et si ses motifs répondent aux exigences de la Loi sur la défense nationale.

 

Norme de contrôle

[61]           Le matelot de première classe Morphy fait valoir que la norme de contrôle à appliquer aux décisions de dernière instance en matière de griefs du Chef d’état-major de la Défense est celle de la décision raisonnable, alors que le défendeur déclare que la décision doit être examinée selon la norme de la décision manifestement déraisonnable.

 

[62]           Bien qu’un litige quant au caractère suffisant des motifs donnés doive normalement être assimilé à une question d’équité procédurale, et que la question de la norme de contrôle ne se pose donc pas, en l’espèce, les questions qui découlent des motifs du Chef d’état‑major de la Défense sont celles de savoir dans quelle mesure ces motifs ont touché ou répondu aux questions essentielles soulevées dans le grief et dans quelle mesure ils satisfont aux exigences du paragraphe 29.13(1) de la Loi sur la défense nationale. Il s’agit de questions de droit et de questions mixtes de fait et de droit. Par conséquent, il est nécessaire de déterminer la norme de contrôle appropriée à appliquer à ces aspects de la décision faisant l’objet du contrôle.

 

[63]           Pour déterminer l’intention du Parlement quant au niveau de déférence à accorder à un décideur donné, il est nécessaire de procéder à une analyse pragmatique et fonctionnelle. En l’espèce, un examen des facteurs identifiés par la Cour suprême du Canada dans des affaires telles que Dr. Q. c. British Columbia College of Physicians and Surgeons, [2003] 1 R.C.S. 226, 2003 CSC 19, révèle que :

 

a)         La Loi sur la défense nationale contient une clause privative qui soustrait les décisions du Chef d’état-major de la Défense à tout examen, sauf à un examen judiciaire effectué par la présente Cour. Ce facteur milite en faveur d’une certaine retenue à l’égard de ces décisions.

 

b)         En ce qui concerne l’objet de la loi en cause, dans l’arrêt Armstrong c. Canada (Procureur général), 2006 CF 505, conf. par 2007 CFA 157, la juge Layden‑Stevenson a fait remarquer que la Loi sur la défense nationale vise à assurer la gestion, la direction et l’administration des Forces canadiennes. Les dispositions de la Loi relativement aux griefs visent à assurer le règlement efficace des griefs ou des différends. Ainsi, les questions ne sont pas polycentriques, elles sont plutôt de nature privée ou personnelle. La juge Layden-Stevenson a conclu que ce point laissait entendre qu’il convient de faire preuve d’une certaine retenue à l’égard des décisions du Chef d’état-major de la Défense, une opinion à laquelle je souscris.

 

c)         En ce qui concerne l’expertise du Chef d’état-major de la Défense, la juge Layden‑Stevenson a fait remarquer dans l’affaire Armstrong qu’en tant qu’officier ayant le grade le plus élevé au sein des Forces canadiennes, le Chef d’état-major de la Défense est chargé d’assurer la direction et l’administration des Forces canadiennes. À ce titre, contrairement aux tribunaux, il devrait bien connaître le contexte militaire sous tous ses aspects, facteur qui indique un degré élevé de retenue. Cela dit, bien que les procédures en matière de promotion dans les Forces canadiennes en litige dans la présente affaire relèvent précisément de la compétence du Chef d’état‑major de la Défense, dans la mesure où le grief porte sur la pertinence du traitement médical reçu par le matelot de première classe Morphy, il s’agit d’une question qui outrepasse la compétence du Chef d’état-major de la Défense. Ce facteur donnerait à penser que la norme de contrôle à appliquer à cet aspect de la décision devrait être moins rigoureuse.

 

d)         Le dernier facteur réside en la nature des questions soulevées dans la demande de contrôle judiciaire. Comme il a été indiqué plus tôt, il s’agit de questions de droit et de questions mixtes de fait et de droit, ce qui donne encore à entendre qu’il faudrait appliquer une norme moins rigoureuse.

 

[64]           Compte tenu de tous ces facteurs, je conviens avec le matelot de première classe Morphy que la norme de contrôle appropriée à appliquer à la décision visée par le contrôle est celle de la décision raisonnable, c’est‑à‑dire que la décision doit pouvoir résister à un « examen assez poussé » : Canada (Directeur des enquêtes et recherches) c. Southam Inc., [1997] 1 R.C.S. 748.

 

Analyse

[65]           L’examen du grief révèle qu’il portait sur les soins médicaux que le matelot de première classe Morphy a reçus des Forces canadiennes, pas seulement en 1990, mais pendant toute la période allant de 1985 à 2000.

 

[66]           En fait, le grief fait expressément état d’[traduction] « une série de décisions et/ou d’actes d’omission des autorités médicales des FC dès 1985, et ce, jusqu’à la date de [son] intervention chirurgicale [...] en 2000 ».

 

[67]           Bien que le grief reflète bien sûr la préoccupation du matelot de première classe Morphy relativement au fait qu’un tomodensitogramme n’a pas été effectué en 1990, comme l’avait recommandé le Dr Gospos, il est clair, de par la formulation du grief, que les préoccupations du demandeur portaient également sur l’omission du personnel médical des Forces canadiennes d’effectuer le test, alors qu’il était en proie à des douleurs récurrentes au dos pendant toute la décennie 90.

 

[68]           En fait, la partie clé du grief du matelot de première classe Morphy est intitulée « les autorités médicales ont refusé de recourir aux outils de diagnostic disponibles –1990-1998 ».

 

[69]           En outre, le paragraphe 17 du grief énonce ce qui suit :

[traduction] Toutefois, bien qu’on ait soupçonné qu’il souffrait de spondylose en 1990 et qu’on ait recommandé un tomodensitogramme du rachis lombaire, pendant les huit années qui ont suivi, les FC ont continué de ne pas tenir compte de cette recommandation, m’obligeant à maintenir mon régime de travail, ce qui n’a fait qu’aggraver mes douleurs … [Non souligné dans l’original.]

 

 

[70]           Le Comité des griefs des Forces canadiennes a jugé que, vu la recommandation du spécialiste de faire passer un tomodensitogramme, [traduction] « la mesure prudente à suivre aurait été d’effectuer le tomodensitogramme en 1990 ».

 

[71]           Toutefois, le Comité a jouté que :

[traduction] Pendant huit années suivantes, les médecins militaires ayant accès au dossier médical du plaignant et, donc, au diagnostic, n’ont pas tenu compte de ce dossier et ne lui ont pas fourni d’aide, pas plus qu’ils n’ont soulagé ses douleurs

 

Il est clair que les médecins du plaignant avaient le devoir de s’assurer qu’il recevait les soins médicaux que commandait le diagnostic de lombalgie … en 1990. Étant donné qu’on n’avait pas tenu compte pendant huit ans du dossier du plaignant, qui contenait la recommandation du spécialiste pour qu’un tomodensitogramme soit effectué et les notes du Dr Merette selon lesquelles il n’avait pas la formation nécessaire pour lire une scintigraphie osseuse et qu’une radiographie standard était requise, il est évident que la diligence requise n’a pas été exercée à l’égard du plaignant. [Non souligné dans l’original.]

 

 

 

[72]           Le Chef d’état-major de la Défense n’a pas accepté la conclusion du Comité selon laquelle les soins médicaux que le matelot de première classe Morphy avait reçus étaient inadéquats. En tirant cette conclusion, il a déclaré que [traduction« je conclus que la preuve est insuffisante pour établir que les interventions de vos médecins en 1990 n’avaient pas satisfait à la norme de diligence à laquelle ils étaient assujettis ou qu’un diagnostic différent aurait donné un résultat différent ». [Non  souligné dans l’original.]

 

[73]           Le Chef d’état-major de la Défense a ensuite ajouté : « Je ne puis conclure [...] que vous avez été lésé en ce qui concerne la qualité des soins médicaux reçus en 1990, ni qu’il existe un lien de causalité entre ces soins et l’état pathologique à l’origine des contraintes à l’emploi imposées en 2000 ». [Non souligné dans l’original.]

 

[74]           Donc, il est clair que l’analyse du Chef d’état-major de la Défense a porté sur l’omission des Forces canadiennes d’effectuer le tomodensitogramme lorsqu’il a été pour la première fois recommandé en 1990. Il n’a pas tenu compte des allégations du matelot de première classe Morphy concernant l’omission du personnel médical des Forces canadiennes d’effectuer le test lorsque ses douleurs ont continué de le faire souffrir tout au long des années 90.

 

[75]           En outre, le Chef d’état-major de la Défense n’a pas du tout expliqué pourquoi il n’avait pas accepté la conclusion du Comité des griefs des Forces canadiennes selon laquelle des soins médicaux adéquats avaient été refusés au matelot de première classe Morphy étant donné que les professionnels de la santé des Forces canadiennes n’avaient pas effectué le tomodensitogramme au cours de la période allant de 1990 à 1998.

 

[76]           Il est vrai qu’en vertu du paragraphe 29.13(1) de la Loi sur la défense nationale, le Chef d’état-major de la Défense n’est pas lié par les conclusions et recommandations du Comité des griefs des Forces canadiennes.

 

[77]           Toutefois, le paragraphe 29.13(2) de la Loi sur la défense nationale prévoit que si le Chef d’état-major de la Défense nationale choisit de s’écarter des conclusions et recommandations du Comité, il doit motiver son choix dans sa décision.

 

[78]           En l’espèce, aucun motif n’a été fourni concernant la décision de ne pas accepter la conclusion du Conseil qui considérait que le matelot de première classe Morphy n’avait pas reçu les soins médicaux adéquats puisque le personnel médical des Forces canadiennes n’avait pas effectué le tomodensitogramme pendant les huit années qui ont suivi la première recommandation en ce sens.

 

[79]           Dans son argumentation, l’avocat du défendeur a fourni des observations détaillées quant aux raisons pour lesquelles la conclusion du Conseil à cet égard n’était pas soutenue par la preuve. Il s’agit peut‑être de raisons, mais là n’est pas la question. Étant donné que le Chef d’état‑major de la Défense a choisi de s’écarter de la conclusion du Conseil, à savoir que les soins médicaux fournis au matelot de première classe Morphy pendant la période 1990-1998 étaient inadéquats, il lui incombait de donner les motifs du rejet de la conclusion du Conseil à cet égard. Il ne l’a pas fait.

 

[80]           Le Chef d’état-major de la Défense a par la suite jugé qu’aucun lien causal n’avait été établi entre les soins médicaux reçus par le matelot de première classe Morphy en 1990 et ses limitations sur le plan médical et ses contraintes à l’emploi imposées en 2000, qui, à son avis, justifiaient le refus d’une promotion et une libération pour des raisons médicales. Toutefois, aucune analyse n’a été faite pour déterminer s’il y avait un lien causal entre les soins médicaux reçus par le matelot de première classe Morphy entre 1990 et 1998 et les conséquences professionnelles qu’il a subies au cours de cette période et par la suite.

 

[81]           En outre, bien que le Chef d’état-major de la Défense ait examiné la question de savoir si les scores de rendement du  matelot de première classe Morphy étaient suffisants pour le rendre admissible à une promotion en 1998, 1999 et 2000, il n’a pas agi selon les recommandations du CGFC et n’a pas examiné la question de savoir dans quelle mesure les maux de dos du matelot ont nui à ses chances de promotion. Il n’a pas non plus donné les motifs pour lesquels il ne l’a pas fait, comme l’exigeait le paragraphe 29.13(2) de la Loi sur la défense nationale.

 

Conclusion

[82]           Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire est accueillie avec dépens.

 

[83]           La décision du 10 mai 2007 du Chef d’état-major de la Défense est annulée, et l’affaire est renvoyée au Chef d’état-major de la Défense pour qu’il rende une nouvelle décision conformément aux présents motifs.


JUGEMENT

 

            LA COUR STATUE que la présente demande de contrôle judiciaire est accueillie avec dépens. La décision du 10 mai 2007 du Chef d’état-major de la Défense est annulée et l’affaire est renvoyée au Chef d’état-major de la Défense pour qu’il rende une nouvelle décision conformément aux présents motifs.

 

 

 

« Anne Mactavish »

Juge

 

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Sandra de Azevedo, LL.B.


ANNEXE

 

 Loi sur la défense nationale                                      National Defence Act

 

29. (1) Tout officier ou militaire du rang qui s’estime lésé par une décision, un acte ou une omission dans les affaires des Forces canadiennes a le droit de déposer un grief dans le cas où aucun autre recours de réparation ne lui est ouvert sous le régime de la présente loi.

 

[…]

 

29.11 Le chef d’état-major de la défense est l’autorité de dernière instance en matière de griefs.

 

29.12 (1) Avant d’étudier un grief d’une catégorie prévue par règlement du gouverneur en conseil, le chef d’état-major de la défense le soumet au Comité des griefs pour que celui-ci lui formule ses conclusions et recommandations. Il peut également renvoyer tout autre grief devant le Comité.

 

 

 

[…]

 

29.13 (1) Le chef d’état-major de la défense n’est pas lié par les conclusions et recommandations du Comité des griefs.

 

(2) S’il choisit de s’en écarter, il doit toutefois motiver son choix dans sa décision.

 

 

 

 

 

[…]

 

29.14 Le chef d’état-major de la défense peut déléguer à tout officier le pouvoir de décision définitive que lui confère l’article 29.11, sauf pour les griefs qui doivent être soumis au Comité des griefs; il ne peut toutefois déléguer le pouvoir de délégation que lui confère le présent article.

 

 

 

 

29.15 Les décisions du chef d’état-major de la défense ou de son délégataire sont définitives et exécutoires et, sous réserve du contrôle judiciaire prévu par la Loi sur les Cours fédérales, ne sont pas susceptibles d’appel ou de révision en justice.

 

[…]

 

29.2 (1) Le Comité des griefs examine les griefs dont il est saisi et transmet, par écrit, ses conclusions et recommandations au chef d’état-major de la défense et au plaignant.

29. (1) An officer or non-commissioned member who has been aggrieved by any decision, act or omission in the administration of the affairs of the Canadian Forces for which no other process for redress is provided under this Act is entitled to submit a grievance.

 

[…]

 

29.11 The Chief of the Defence Staff is the final authority in the grievance process.

 

 

29.12 (1) The Chief of the Defence Staff shall refer every grievance that is of a type prescribed in regulations made by the Governor in Council to the Grievance Board for its findings and recommendations before the Chief of the Defence Staff considers and determines the grievance. The Chief of the Defence Staff may refer any other grievance to the Grievance Board.

 

[…]

 

29.13 (1) The Chief of the Defence Staff is not bound by any finding or recommendation of the Grievance Board.

 

(2) If the Chief of the Defence Staff does not act on a finding or recommendation of the Grievance Board, the Chief of the Defence Staff shall include the reasons for not having done so in the decision respecting the disposition of the grievance.

 

[…]

 

29.14 The Chief of the Defence Staff may delegate to any officer any of the Chief of the Defence Staff’s powers, duties or functions as final authority in the grievance process, except

 

(a) the duty to act as final authority in respect of a grievance that must be referred to the Grievance Board; and

 

(b) the power to delegate under this section.

 

29.15 A decision of a final authority in the grievance process is final and binding and, except for judicial review under the Federal Courts Act, is not subject to appeal or to review by any court.

 

 

[…]

 

29.2 (1) The Grievance Board shall review every grievance referred to it by the Chief of the Defence Staff and provide its findings and recommendations in writing to the Chief of the Defence Staff and the officer or non-commissioned member who submitted the grievance.

 

 

 

 

Ordonnances et règlements royaux applicables aux Forces canadiennes

The Queen's Regulations and Orders for the Canadian Forces

 

7.12 – RENVOI DEVANT LE COMITÉ DES GRIEFS

 

(1) Le chef d’état-major de la défense renvoie au Comité des griefs tout grief qui a trait aux questions suivantes :

 

[…]

 

d) le droit aux soins médicaux et dentaires.

 

 

(2) Le chef d’état-major de la défense renvoie au Comité des griefs pour que celui-ci formule ses conclusions et ses recommandations tout grief qui a trait à une de ses décisions ou un de ses actes à l’égard de tel officier ou militaire du rang.

7.13 – FONCTIONS DU COMITÉ DES GRIEFS

Le paragraphe 29.2(1) de la Loi sur la défense nationale prescrit :

«29.2(1) Le Comité des griefs examine les griefs dont il est saisi et transmet, par écrit, ses conclusions et recommandations au chef d’état-major de la défense et au plaignant.»

 

 

 

7.14 – MESURES À PRENDRE APRÈS L’EXAMEN DU COMITÉ DES GRIEFS

(1) Après avoir reçu les conclusions et les recommandations du Comité des griefs, le chef d’état-major de la défense doit :

a) étudier et décider du bien-fondé du grief;

b) informer par écrit le plaignant, par l’intermédiaire de son commandant, et le Comité des griefs de la décision et des motifs à l’appui;

 

[…]

 

 

 

7.12 – REFERRAL TO GRIEVANCE BOARD

 

(1) The Chief of the Defence Staff shall refer to the Grievance Board any grievance relating to the following matters:

[…]

 

(d) the entitlement to medical care or dental treatment.

 

(2) The Chief of the Defence Staff shall refer every grievance concerning a decision or an act of the Chief of the Defence Staff in respect of a particular officer or non-commissioned member to the Grievance Board for its findings and recommendations.

7.13 DUTIES AND FUNCTIONS OF GRIEVANCE BOARD

Subsection 29.2(1) of the National Defense Act provides:

"29.2(1) The Grievance Board shall review every grievance referred to it by the Chief of the Defence Staff and provide its findings and recommendations in writing to the Chief of the Defence Staff and the officer or non-commissioned member who submitted the grievance."

 

7.14 – ACTION AFTER GRIEVANCE BOARD REVIEW

 

(1) After receiving the findings and recommendations of the Grievance Board, the Chief of the Defence Staff shall:

(a) consider and determine the grievance;

(b) advise in writing the grievor, through the commanding officer, and the Grievance Board of the determination and the reasons for it;

 

[…]

 

 

 

 

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        T-1183-07                  

 

 

INTITULÉ :                                       MATELOT DE PREMIÈRE CLASSE D.M. MORPHY (RETRAITÉ) c. LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

                                                                                               

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Ottawa (Ontario)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :               le 11 février 2008

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET

JUGEMENT :                                    la juge Mactavish

 

 

DATE DES MOTIFS :                      le 14 février 2008        

 

 

COMPARUTIONS :

 

Me Marc-Aurèle Racicot

Col. Me Michel Drapeau

Me Zorica Guzina                                                                      POUR LE DEMANDEUR

 

M. Robert B. Carter                                                                  POUR LE DÉFENDEUR

                                                                                                           

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

BARRICK DOMEY TANNIS s.r.l.                                        

Avocats

Ottawa (Ontario)                                                                      POUR LE DEMANDEUR

                                                                                               

JOHN H. SIMS, c.r.                                                               

Sous-procureur général du Canada                                           POUR LE DÉFENDEUR

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