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Date :  20080211

Dossier : T-412-07

Référence :  2008 CF 89

Ottawa (Ontario), le 11 février 2008

En présence de Monsieur le juge Beaudry 

 

ENTRE :

DENIS BÉGIN

demandeur

et

 

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire, présentée en vertu de l’article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales, L.R., 1985, c. F-7, qui vise une décision au troisième palier de la procédure de grief du Service correctionnel du Canada (le SCC), datée du 1 décembre 2006.  La demande de corrections de certains renseignements contenus dans le dossier correctionnel du demandeur aux termes de l’article 24 de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, L.C. 1992, ch. 20 (la Loi) a été rejetée, au motif que la procédure suivie par le SCC était conforme à la Loi.

 

QUESTIONS EN LITIGE

[2]               Le Commissaire du SCC a-t-il commis une erreur déraisonnable en concluant que la procédure suivie et le refus d’effectuer les corrections demandées étaient conformes à l’article 24 de la Loi?

 

CONTEXTE FACTUEL

[3]               Le demandeur est incarcéré à l’établissement La Macaza depuis le 25 novembre 1997. 

 

[4]               Il a été trouvé coupable de meurtre au premier degré sur la personne de Ricardo Gizzi.  Suite à une décision de la Cour d’appel du Québec, un nouveau procès a été ordonné car la Cour d'appel en est arrivé à la conclusion que la déclaration du demandeur du 8 mars 1996 devait être exclue parce qu'elle avait été faite dans l'espoir d'un avantage et n'était donc pas volontaire (R. c. Bégin, [2002] J.Q. no 3546).  Lors de l’enquête policière du meurtre de Ricardo Gizzi, le demandeur a fait une autre déclaration (le 11 mars 1996) où il a admis avoir participé à un autre meurtre.

 

[5]               Lors du nouveau procès pour le meurtre de Ricardo Gizzi, le demandeur a plaidé coupable de meurtre au deuxième degré, et il purge actuellement une peine à perpétuité. Aucune poursuite criminelle n’a été entamée contre lui suite à son admission au sujet du deuxième meurtre.

 

[6]               En 1995, le demandeur a fait l’objet d’une plainte à la police par son ex-conjointe pour voies de fait, menaces de mort et agressions sexuelles. Une demande d'intenter des procédures a été rédigée mais aucune accusation n’a été déposée contre lui suite à cette plainte.

[7]               La déclaration statutaire du 11 mars 1996 lors de l’enquête policière, ainsi que la plainte de son ex-conjointe, font partie du dossier correctionnel du demandeur.  Les faits allégués dans ces deux documents sont mentionnés dans d’autres documents de son dossier correctionnel.

 

[8]               Le demandeur a déposé trois griefs.  Le premier grief (#V30400021298) vise à modifier sa fiche intitulée Information de Statistique sur la Récidive (ISR).  Le deuxième (#V30A0021378) a pour objet de faire radier les renseignements référant aux faits contenus dans la déclaration statutaire du 11 mars 1996 et la plainte de son ex-conjointe dans le document gestion de cas (SCCP-PU-042), le rapport psychologique (SCCP-PU-076), et le rapport de sécurité préventif (SCCP-PU-065).  Le troisième grief (#V30A00021571) vise à modifier la fiche intitulée Évaluation du risque de violence familiale (ERVF).

 

[9]               Dans le premier grief portant sur le fichier ISR, le demandeur allègue que l’agent de libération conditionnelle (ALC) en charge de son dossier a fait preuve d’harcèlement et d’intimidation à son égard. Il invoque à titre de preuve le fait que l’ACL s’est basé sur des faits rapportés dans sa déclaration du 11 mars 1996 et dans la plainte déposée par son ex-conjointe.

 

DÉCISION CONTESTÉE

[10]           Les trois procédures de griefs ont chacune prise un cheminement différent, c'est-à-dire qu’elles ont toutes été déposées à différentes dates. Les réponses aux griefs au premier et deuxième palier ont aussi été rendues à différentes dates.  Dans son mémoire, le défendeur a inséré un tableau pour chacun des griefs illustrant ainsi les démarches suivies et les décisions rendues à chaque étape (voir pages 549 à 554). Pour les fins de la présente instance, il suffit d’indiquer que chaque grief a été refusé au premier palier.  Ils ont été maintenus en partie au deuxième palier pour permettre à l’ACL de procéder à une étude plus approfondie des demandes.

 

[11]           Les trois griefs ont effectivement été réunis le 8 septembre 2006, suivant les décisions au deuxième palier.

 

[12]           Le 21 septembre 2006, le demandeur a envoyé une lettre au décideur au troisième palier en y faisant des représentations à l'encontre des notes de service de l’ALC.

 

[13]           Le 1er décembre, à la suite d'une seule décision, les trois griefs ont été rejetés. Le présent contrôle judicaire porte sur cette décision rendue par le Commissaire du SCC au troisième palier.  Les motifs sont les suivants :

a)      Le Commissaire a constaté que la procédure suivie par les autorités de La Macaza à la suite des demandes de corrections du demandeur est conforme à l’article 24 de la Loi. 

b)      Le Commissaire a trouvé que l’inclusion des renseignements contestés dans le dossier du demandeur est conforme à l’article 23 de la Loi et à l’article 17 du Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, DORS/92-620 (le Règlement).

c)      La nature administrative du SCC est mise en relief. Le Commissaire a conclu que les règles de preuve en matière criminelle ne sont pas applicables dans le contexte correctionnel. Le SCC est un organisme administratif soumis à des règles distinctes, visant des buts différents. Même si des accusations sont rejetées, suspendues, retirées ou en instance, le SCC doit être satisfait que l'information est en toute probabilité exacte.

d)      Le Commissaire se base sur l’arrêt Mooring c. Canada (Commission nationale des libérations conditionnelles), [1996] 1 R.C.S. 75 pour établir que les règles de preuve traditionnelles régissant les procès criminels ne s’appliquent pas à la Commission nationale des libérations conditionnelles, et par extension ne s’appliquent pas au processus décisionnel du SCC.  Il conclut que le fardeau de preuve applicable à la décision en l’espèce est la prépondérance des probabilités.  La Commission (et donc le SCC) doit s’assurer que les renseignements sont sûrs et convaincants, et qu’il serait équitable de s’en servir.  Le critère prépondérant est la protection de la société.

e)      Il déclare aussi que les gestes reprochés à l’ALC ne constituent pas du harcèlement.

 

DISPOSITIONS PERTINENTES

[14]           Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, L.C. 1992, ch. 20.

3. Le système correctionnel vise à contribuer au maintien d’une société juste, vivant en paix et en sécurité, d’une part, en assurant l’exécution des peines par des mesures de garde et de surveillance sécuritaires et humaines, et d’autre part, en aidant au moyen de programmes appropriés dans les pénitenciers ou dans la collectivité, à la réadaptation des délinquants et à leur réinsertion sociale à titre de citoyens respectueux des lois.

 

 

 

 

23. (1) Le Service doit, dans les meilleurs délais après la condamnation ou le transfèrement d’une personne au pénitencier, prendre toutes mesures possibles pour obtenir :

 

a) les renseignements pertinents concernant l’infraction en cause;

 

b) les renseignements personnels pertinents, notamment les antécédents sociaux, économiques et criminels, y compris comme jeune contrevenant;

 

c) les motifs donnés par le tribunal ayant prononcé la condamnation, infligé la peine ou ordonné la détention — ou par le tribunal d’appel — en ce qui touche la peine ou la détention, ainsi que les recommandations afférentes en l’espèce;

 

 

d) les rapports remis au tribunal concernant la condamnation, la peine ou l’incarcération;

 

 

 

e) tous autres renseignements concernant l’exécution de la peine ou de la détention, notamment les renseignements obtenus de la victime, la déclaration de la victime quant aux conséquences de l’infraction et la transcription des observations du juge qui a prononcé la peine relativement à l’admissibilité à la libération conditionnelle.

 

24. (1) Le Service est tenu de veiller, dans la mesure du possible, à ce que les renseignements qu’il utilise concernant les délinquants soient à jour, exacts et complets.

 

(2) Le délinquant qui croit que les renseignements auxquels il a eu accès en vertu du paragraphe 23(2) sont erronés ou incomplets peut demander que le Service en effectue la correction; lorsque la demande est refusée, le Service doit faire mention des corrections qui ont été demandées mais non effectuées.

3. The purpose of the federal correctional system is to contribute to the maintenance of a just, peaceful and safe society by

 

(a) carrying out sentences imposed by courts through the safe and humane custody and supervision of offenders; and

 

(b) assisting the rehabilitation of offenders and their reintegration into the community as law-abiding citizens through the provision of programs in penitentiaries and in the community.

 

23. (1) When a person is sentenced, committed or transferred to penitentiary, the Service shall take all reasonable steps to obtain, as soon as is practicable,

 

(a) relevant information about the offence;

 

 

(b) relevant information about the person’s personal history, including the person’s social, economic, criminal and young-offender history;

 

 

(c) any reasons and recommendations relating to the sentencing or committal that are given or made by

(i) the court that convicts, sentences or commits the person, and

(ii) any court that hears an appeal from the conviction, sentence or committal;

 

(d) any reports relevant to the conviction, sentence or committal that are submitted to a court mentioned in subparagraph (c)(i) or (ii); and

 

(e) any other information relevant to administering the sentence or committal, including existing information from the victim, the victim impact statement and the transcript of any comments made by the sentencing judge regarding parole eligibility.

 

 

 

 

24. (1) The Service shall take all reasonable steps to ensure that any information about an offender that it uses is as accurate, up to date and complete as possible.

 

 

(2) Where an offender who has been given access to information by the Service pursuant to subsection 23(2) believes that there is an error or omission therein,

 

(a) the offender may request the Service to correct that information; and

 

(b) where the request is refused, the Service shall attach to the information a notation indicating that the offender has requested a correction and setting out the correction requested.

 

 

[15]           Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, DORS/92-620

17. Le Service détermine la cote de sécurité à assigner à chaque détenu conformément à l'article 30 de la Loi en tenant compte des facteurs suivants :

 

 

a) la gravité de l'infraction commise par le détenu;

 

 

b) toute accusation en instance contre lui;

 

c) son rendement et sa conduite pendant qu'il purge sa peine;

 

 

d) ses antécédents sociaux et criminels, y compris ses antécédents comme jeune contrevenant s'ils sont disponibles;

 

e) toute maladie physique ou mentale ou tout trouble mental dont il souffre;

 

f) sa propension à la violence;

 

 

g) son implication continue dans des activités criminelles.

17. The Service shall take the following factors into consideration in determining the security classification to be assigned to an inmate pursuant to section 30 of the Act:

 

(a) the seriousness of the offence committed by the inmate;

 

(b) any outstanding charges against the inmate;

 

(c) the inmate's performance and behaviour while under sentence;

 

(d) the inmate's social, criminal and, where available, young-offender history;

 

 

 

(e) any physical or mental illness or disorder suffered by the inmate;

 

(f) the inmate's potential for violent behaviour; and

 

(g) the inmate's continued involvement in criminal activities.

 

 

 

 

ANALYSE

Norme de contrôle

[16]           Plusieurs juges ont entrepris l’analyse pragmatique et fonctionnelle pour déterminer la norme de contrôle applicable aux décisions du SCC. Dans les causes Ewert c. Canada (Procureur général), [2007] A.C.F. no 31 (QL), 2007 CF 13, et Mymryk c. Canada (Procureur général), [2007] A.C.F. no 60 (QL), 2007 CF 32, j’ai déjà écrit que la norme applicable est celle de la décision manifestement déraisonnable lorsqu’il s’agit d’une question de faits. Dans l’affaire Tehrankari c. Canada (Service correctionnel), [2000] A.C.F. no 495 (QL) au paragraphe 44, le juge Lemieux a déclaré ceci au sujet de la norme de contrôle :

Pour conclure sur ce point, je suis d'avis qu'il faut appliquer la norme de la décision correcte si la question porte sur la bonne interprétation de l'article 24 de la Loi, mais la norme de la décision raisonnable simpliciter si la question porte soit sur l'application des principes juridiques appropriés aux faits soit sur le bien-fondé de la décision de refus de corriger les renseignements dans le dossier du délinquant. La norme de la décision manifestement déraisonnable s'applique aux pures questions de fait (paragraphe 18.2(4) de la Loi sur la Cour fédérale, L.R.C. (1985), ch. F-7). [Je souligne]

 

 

[17]           L’application du paragraphe 24(2), en l’espèce, constitue une question mixte de faits et de droit.  Le Commissaire devait appliquer les principes juridiques aux faits. Je suis d’avis que la norme de la décision raisonnable simpliciter s’applique à la décision au sujet du paragraphe 24(2). 

 

[18]           Par contre, l’interprétation de l’alinéa 23(1)(b) et du paragraphe 24(1) de la Loi constitue une question de droit. Le Commissaire s'est basé sur l’arrêt Mooring, précité pour rendre sa décision. Alors, la norme de la décision correcte s'impose.

Le Commissaire du SCC a-t-il commis une erreur susceptible de révision?

[19]           Avec respect pour l'opinion contraire, je suis d'avis que le Commissaire n’a commis aucune erreur susceptible de révision en rendant sa décision.

 

[20]           Le paragraphe 24(2) impose une obligation au SCC d'inclure les renseignements contenus dans le dossier du délinquant. Le SCC s'est acquitté de cette obligation. Lorsqu’une demande de correction des renseignements est faite par le délinquant et que cette demande est refusée, le SCC doit s’assurer que le dossier fait mention des corrections demandées mais non effectuées. Cette mention est présente dans le dossier du demandeur.

 

[21]           Afin de rencontrer les critères de la décision raisonnable simpliciter, la Cour suprême mentionne qu’une analyse assez poussée des motifs de la décision contestée soit entreprise (Barreau du Nouveau-Brunswick c. Ryan, [2003] 1 R.C.S. 247, 2003 CSC 20 au paragraphe 47).

 

[22]           L’article 24 de la Loi impose une deuxième obligation au SCC. Le paragraphe (1) impose au SCC de veiller à ce que les renseignements soient à jour, exacts et complets. Le sous-alinéa 23(1)(b) établit que le SCC doit prendre toute mesure possible pour obtenir toute information pertinente, notamment les antécédents sociaux, économiques et criminels du délinquant. L’inclusion de la déclaration statutaire et la plainte de l’ex-conjointe du demandeur est conforme à ces deux dispositions. J’y reviendrai plus loin.

 

[23]           La jurisprudence indique que les facteurs prédominants dans l'évaluation du risque sont ceux qui concernent la protection de la société. L'accent est mis sur l'examen de tous les renseignements sûrs et disponibles, pourvu que ceux-ci n'aient pas été obtenus irrégulièrement. L'intérêt primordial de la société l'emporte sur la protection de l'accusé visant à assurer la tenue d'un procès équitable (Mooring, précité, au paragraphe 27). 

 

[24]           La présence de la déclaration statutaire et la plainte de l’ex-conjointe au dossier ne peut permettre au SCC de conclure à la véracité des renseignements qui y sont inclus. Dans le contexte correctionnel, il incombe au décideur de déterminer s’il serait équitable de prendre en considération l’information contestée. Aux paragraphes 36 et 37 de Mooring, précité, la Cour s'exprime ainsi :

En quoi consiste «l'obligation d'agir équitablement» qui incombe à la Commission?   Le contenu de cette obligation varie selon la structure et la fonction de la commission ou du tribunal administratif en cause.  En matière de libération conditionnelle, la Commission doit s'assurer que les renseignements sur lesquels elle se fonde pour agir sont sûrs et convaincants.  Pour prendre un cas extrême, la Commission ne pourrait pas considérer comme sûrs des renseignements obtenus par la torture, et il serait inéquitable qu'elle agisse sur la foi de tels renseignements.  Il lui incomberait donc de les écarter, quelle que soit leur pertinence relativement à la décision à prendre.  Chaque fois que des renseignements ou des «éléments de preuve» lui sont soumis, la Commission doit en déterminer la provenance et décider s'il serait équitable qu'elle s'en serve pour prendre sa décision.

 

Pour déterminer s'il serait équitable de prendre en considération un renseignement donné, la Commission sera souvent guidée par la jurisprudence en matière d'exclusion d'éléments de preuve pertinents.  Par exemple, lorsque des déclarations incriminantes sont obtenues du contrevenant, le droit régissant les confessions, qui est fondé sur un mélange de fiabilité et d'équité, sera pertinent tout en n'ayant pas force obligatoire.  La Commission peut, dans des circonstances appropriées, conclure qu'il n'est pas équitable de se fier à un aveu obtenu sous la contrainte.  Les décisions relatives au par. 24(2) de la Charte lui seront également utiles pour prendre sa décision finale.  Cependant, elles ne devraient pas être déterminantes quant à sa décision de se fonder sur les principes d'équité pour écarter des renseignements pertinents.  Il est évident que des considérations différentes s'appliquent souvent dans le contexte des libérations conditionnelles.  Par exemple, l'al. 101a) de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition prévoit que «la protection de la société est le critère déterminant dans tous les cas».  Ce principe guidera donc la Commission lorsque celle-ci sera appelée à se prononcer sur l'admissibilité d'un renseignement donné.  L'expérience et l'expertise acquises par la Commission en matière de protection de la société l'aideront à tirer sa conclusion.  Dans l'hypothèse où la Commission manquerait aux principes d'équité en rendant ces décisions, il serait possible d'interjeter appel devant la Section d'appel en vertu de l'al. 147(1)a) de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition.  Les décisions de la Commission peuvent aussi faire l'objet d'un contrôle judiciaire. [Je souligne]

 

 

[25]           Quant à la déclaration du 11 mars 1996, le demandeur soutient qu'elle devrait suivre le même sort que celle du 8 mars 1996 étant donné que la Cour d'appel du Québec a ordonné un nouveau procès en déclarant que cette déclaration avait été obtenue dans l'obtention d'un avantage. En me basant sur les principes juridiques ci-haut énoncés, la preuve est absente au dossier que la déclaration du 11 mars 1996 a été obtenue à la suite d'une contrainte. Les éléments de faits sont pertinents et passent le test de la probabilité. Même si le demandeur n'a pas été accusé à la suite de cette confession, il m'apparaît important que le SCC le mentionne dans ses documents. Le SCC n'a pas jugé le demandeur à la suite de cette déclaration, elle a été insérée dans son dossier correctionnel avec la note que le demandeur nie ce crime. Je considère donc qu'il n'y a pas d'erreur révisable ici.

 

[26]           Quant à la plainte de l’ex-épouse et la demande d'intenter des procédures, le demandeur plaide que son ex-épouse a reconnu que cette plainte était fausse, qu'elle avait menti et qu'elle avait inventé cette affaire suite aux pressions de sa marraine au Canada, madame Barbosa, représentante du cartel mafieux colombien de Cali. Le demandeur ajoute que son ex-épouse a même « avoué lors d'un interrogatoire avoir menti ». Encore une fois, à part l'énoncé du demandeur dans son affidavit, il y a absence complète de preuve pour supporter ces allégations. Je note cependant que le SCC a indiqué dans ses documents que le demandeur n'est pas d'accord avec la version des faits dans la plainte. Même si aucune accusation n'a été déposée contre ce dernier à la suite de cette plainte, il m'est impossible d'ordonner d'écarter ces documents car le SCC possède un vaste mandat d’inclusion de renseignements (Mooring, précité).

 

[27]           Le demandeur conteste aussi les items 2, 9, 11, et 15 de son ISR. Les lignes directrices pour la notation dans la directive du Commissaire numéro 705-6 du 10 avril 2006 (milieu de l'onglet de 10 du dossier du demandeur) mentionne qu'il faut vérifier l'exactitude de l'information en consultant toutes les sources disponibles (le dossier, le délinquant, des tiers fiables, etc.).

 

[28]           J'ai pris soin de vérifier les motifs de contestation concernant ces items mais les explications fournies par le défendeur me convainquent qu'il n'y a pas lieu que la Cour intervienne. À titre d'exemple, le demandeur soutient qu'il travaillait à temps plein dans les six mois précédents la commission de son délit (items 15 : situation d'emploi lors de l’arrestation). La réponse du SCC est contenue dans la note de service du 8 septembre 2006 (dossier du défendeur, page 58) :

Le sujet prétend qu'il travaillait au moment de son arrestation. Nous savons à la lecture du dossier que la plupart de ses revenus provenant du trafic illicite de stupéfiants. Également, l'évaluation initiale du 97-12-08 mentionne qu'il opère des commerces et a les qualifications pour subvenir à ses besoins. (Nous ne savons pas s'il s'agissait d'un travail déclaré et honnête.) On retrouve également dans cette évaluation qu'il avait des problèmes d'emploi récent.

 

Considérant sa propension au mensonge et la supercherie, nous lui avions demandé le 06-02-28 de nous fournir des preuves à cet égard, tels que des rapports d'impôt ou autres documents qui ne sont pas falsifié (sic) et qui nous permettrait d'effectuer des vérifications quant à leur authenticité. Nous lui avions alors mentionné qu'avec de telles preuves, il nous fera plaisir d'amender l’ISR. Nous n'avons pas encore reçu ces documents.

 

 

[29]           Cette réponse n'est pas déraisonnable et démontre qu'il n'y a eu aucun manquement à l'équité de la part du SCC.

 

[30]           En conclusion, le SCC a bien interprété la loi et le règlement ainsi que les principes établis par la Cour suprême dans l'arrêt Mooring, précité. Il n'était donc pas déraisonnable pour le SCC de rejeter les griefs au troisième palier.

 

 


JUGEMENT

LA COUR ORDONNE ET ADJUGE que la demande de contrôle judiciaire soit rejetée.

 

« Michel Beaudry »

Juge

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        T-412-07

 

INTITULÉ :                                       DENIS BÉGIN ET

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               le 22 janvier 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              Le juge Beaudry

 

DATE DES MOTIFS :                      le 11 février 2008

 

 

 

COMPARUTIONS :                       

 

Denis Bégin                                                                  POUR LE DEMANDEUR

(se représente lui-même)

 

Nicholas R. Banks                                                        POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

John Sims, c.r.                                                              POUR LE DÉFENDEUR       

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

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