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Date :  20080205

Dossier :  IMM-2563-07

Référence :  2008 CF 136

Ottawa (Ontario), le 5 février 2008

En présence de Monsieur le juge Shore 

 

ENTRE :

ALEX POTIKHA

demandeur

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

INTRODUCTION

[1]               Lorsqu’un dossier est transmis à l’unité d’Évaluation des risques avant renvoi (ERAR), ceci ne constitue pas un refus d’exercer la juridiction sous l’article 25 de la Loi sur l’immigration et la protection de réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (LIPR), puisque l’agent ERAR procède à l’analyse du dossier aussi sous l’angle des considérations d’ordre humanitaire.

 

[2]               La Cour a déjà statué que les agents ERAR étaient habilités à évaluer les demandes pour considérations d’ordre humanitaire dans Zolotareva c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CF 1274, [2003] A.C.F. no 1596 (QL) :

[18]      À la lumière de ce qui précède, il est évident que l'agente ERAR a compétence pour prendre une décision conformément au paragraphe 25(1) de la Loi. (La Cour souligne.)

 

(Voir aussi Zolotareva, ci-dessus, aux par. 12 à 17; Krotov c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 438, [2005] A.C.F. no 541 (QL), par. 8; Ageel c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 1498, [2006] A.C.F. no 1895 (QL), par. 9.)

 

[3]               Le demandeur a eu droit à une évaluation approfondie et complète de son dossier, autant sur les risques que sur les considérations d’ordre humanitaire, et ne peut en avoir subi aucun préjudice.

 

PROCÉDURE JUDICIAIRE

[4]               Il s’agit d’une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire à l’encontre d’une décision, rendue le 5 juin 2007, rejetant la demande de résidence permanente pour considérations humanitaires (CH).

 

FAITS

[5]               Le demandeur, monsieur Alex Potikha, citoyen du Ukraine, a choisi d’immigrer en Israël en 1995.

 

[6]               Le service militaire est obligatoire en Israël et monsieur Potikha allègue avoir refusé de faire son service militaire, parvenant à éviter l’armée et la police militaire pendant plusieurs années.

 

[7]               Monsieur Potikha a quitté Israël le 23 août 2003 et est venu au Canada. Il a demandé l’asile cinq mois plus tard, soit le 19 janvier 2004.

 

[8]               Sa demande d’asile a été refusée, le 13 juillet 2004, par la Section de la protection des réfugiés (SPR) de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié. Le 22 novembre 2004, la Cour a rejeté la demande d’autorisation et de contrôle judicaire à l’encontre de cette décision.

 

[9]               Monsieur Potikha a demandé une dispense de l’obligation de déposer sa demande de résidence permanente à l’étranger pour des motifs d’ordre humanitaire.

 

[10]           La demande CH a été refusée le 5 juin 2007 et fait l’objet de la présente demande d’autorisation et de contrôle judiciaire.

 

POINT EN LITIGE

[11]           La décision de l’agent contient-elle des erreurs de droit et est elle manifestement déraisonnable eu égard aux faits?

 

 

 

ANALYSE

            Dispositions législatives

[12]           L’article 11(1) de la LIPR, prévoit que la demande de visa et de résidence permanente doit être complétée à l’extérieur du Canada.

 

[13]           Ce n’est que de façon exceptionnelle qu’il sera permis à une personne de faire sa demande de résidence permanente à partir du Canada. (Article 25 de la LIPR; Serda c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 356, [2006] A.C.F. no 425 (QL), par. 20.)

 

[14]           Il revient à la personne qui désire être autorisée à faire sa demande à partir du Canada de démontrer à l’agent que l’obligation de faire sa demande de l’extérieur du Canada lui créerait des difficultés inhabituelles et injustifiées ou excessives. (Paragraphes 6.5 à 6.8 du Guide IP-5 de Citoyenneté et Immigration Canada (CIC), « Demande présentée par des immigrants au Canada pour des motifs d’ordre humanitaire » (Guide IP-5); Legault c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CAF 125, [2002] A.C.F. no 457 (QL), par. 20.)

 

[15]           Le juge James Russell, dans Pashulya c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 1275, [2004] A.C.F. no 1527 (QL), explique :

[43]      Un demandeur doit satisfaire à un critère élevé lorsqu'il demande d'être exempté de l'application du paragraphe 11(1) de la LIPR. La Cour a à maintes reprises affirmé que la raison d'être du processus CH était non pas d'éliminer les difficultés inhérentes au départ d'une personne qui a séjourné pendant un certain temps au pays, mais de dispenser de cette exigence le demandeur qui subirait des difficultés "inhabituelles, injustes ou excessives" s'il devait quitter le Canada pour présenter sa demande de l'étranger de la façon habituelle...

 

[16]           Le rôle de l’agent est de déterminer si le demandeur, qui a le fardeau de preuve, a démontré que l’obligation de faire sa demande de l’extérieur du Canada lui créerait des difficultés inhabituelles et injustifiées ou excessives.

 

Juridiction de l’agent ERAR sur une demande pour considérations d’ordre humanitaire

 

[17]           Considérant que la demande pour considérations d’ordre humanitaire comportait une allégation de risque de retour, le dossier a été transmis à l’unité ERAR, le 6 avril 2006. (Dossier du demandeur (DD), Communication de CIC, datée le 28 juillet 2006, p. 64.)

 

[18]           Monsieur Potikha soumet avoir déposé une demande pour considérations d’ordre humanitaire et non une demande de protection sous les articles 97, 112 et 113 de la LIPR, et considère donc que sa demande n’aurait pas dû être transférée à l’unité ERAR pour une évaluation des risques. (DD, Mémoire du demandeur, p. 88.)

 

[19]           Dans sa demande pour considérations d’ordre humanitaire, monsieur Potikha alléguait, entre autres, par rapport à Israël :

…I WENT INTO HIDING, MOVING FROM ONE PLACE TO ANOTHER, UNTIL I WAS ABLE TO LEAVE ISRAEL WITH THE HELP OF SOME FRIENDS…

 

…I SUFFERED IN ISRAEL, BEFORE MY DEPARTURE… I WAS BEATEN BY NATIVE ISRAELIS AND I LIVED MY TIME IN ISRAEL MOSTLY AS A FUGITIVE…

 

…I WAS FORCED TO BECOME A CITIZEN UPON MY ARRIVAL WITHOUT MY OPINION…I DON’T EVER WANT TO RELIVE THE NIGHTMARE(sic) THAT I WENT THROUGH IN ISRAEL. I DON’T WANT TO BE SENT TO PRISON FOR REFUSING TO SERVE IN THE MILITARY OF A COUNTRY THAT I NEVER WANTED TO BELONG TO…

 

(TRADUCTION NON DISPONIBLE.)

 

(DD, Supplementary Information – Humanitarian & Compassionate Cases, “3. Reasons for seeking exceptional consideration”, p. 30.)

 

[20]           Bien que n’étant pas lié par les directives, on ne peut reprocher à l’agent, qui a référé le dossier à l’unité ERAR, d’avoir agit conformément à ce qui est recommandé par les directives du Guide IP-5:

13.4. Renvoi à l’unité ERAR

 

Si, sur la base de l’examen préliminaire, ou sur la base de l’évaluation des facteurs autres que le risque par l’agent ERAR, on estime que les motifs autres que le risque ne sont pas suffisants pour justifier l’approbation par la section CH, et que le demandeur a présenté des facteurs détaillés de risque.

13.4. Referral to PRRA Unit

 

Where, on the basis of the preliminary screening, or on the basis of the assessment of non-risk factors by the H&C officer, there are insufficient non-risk grounds for approval by the H&C Unit, and the applicant has claimed personal risk factors, the application is referred to the PRRA unit.

 

[21]           Ce n’est pas parce que monsieur Potikha les qualifies autrement que les allégations dans sa demande pour considérations d’ordre humanitaire ne pouvaient pas être raisonnablement considérées comme étant des allégations de risque.

 

[22]           Ainsi que l’a exprimé le juge Simon Noël dans El Doukhi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 FC 1464, [2006] A.C.F. no 1843 (QL) :

[26]      Taking into account the Applicant's own submissions as to his risk of persecution, in my view it is logical that the Officer would undertake an analysis as to whether the Applicant would face persecution if returned to Lebanon... (La Cour souligne.) (TRADUCTION NON DISPONIBLE.)

 

[23]           La Cour ne comprend pas l’insistance de monsieur Potikha à vouloir réduire l’évaluation des risques au seul risque à la vie et à reprocher au défendeur et à ses agents d’avoir voulu s’assurer que la demande pour considérations d’ordre humanitaire soit traitée de la manière la plus complète qui soit.

 

[24]           Considérant les extraits de sa demande pour considérations d’ordre humanitaire, cités ci-haut, ainsi que les soumissions claires de monsieur Potikha que toute peine de prison pour refus d’effectuer son service militaire serait persécutrice, ne pas référer le dossier du demandeur à l’unité ERAR aurait pu être considéré comme une erreur.

 

Le défendeur et ses agents ont exercé leur juridiction sous l’article 25 de la LIPR

[25]           Lorsqu’un dossier est transmis à l’unité ERAR, ceci ne constitue pas un refus d’exercer la juridiction sous l’article 25 de la LIPR, puisque l’agent ERAR procède à l’analyse du dossier aussi sous l’angle des considérations d’ordre humanitaire.

 

[26]           La Cour a déjà statué que les agents ERAR étaient habilités à évaluer les demandes pour considérations d’ordre humanitaire dans Zolotareva, ci-dessus:

[18]      À la lumière de ce qui précède, il est évident que l'agente ERAR a compétence pour prendre une décision conformément au paragraphe 25(1) de la Loi. (La Cour souligne.)

 

(Voir aussi Zolotareva, ci-dessus, aux par. 12 à 17; Krotov, ci-dessus, par. 8; Ageel, ci-dessus, par. 9.)

 

[27]           Monsieur Potikha a eu droit à une évaluation approfondie et complète de son dossier, autant sur les risques que sur les considérations d’ordre humanitaire, et ne peut en avoir subi aucun préjudice.

 

Le demandeur n’a pas démontré qu’il n’avait pas déjà effectué son service militaire et n’a déposé aucune preuve

 

[28]           L’agent ERAR a évalué les allégations de monsieur Potikha et a conclu qu’il n’avait pas démontré qu’il aura l’obligation de se conformer au service militaire. (Motifs, « Section 3 Decisions and reasons » - « a. Risk Factors » - « Assessment », p. 3.)

 

[29]           Monsieur Potikha allègue que l’agent ERAR aurait dû lui donner l’opportunité de présenter de nouveaux éléments de preuve qui n’étaient pas disponibles lors du rejet de sa demande d’asile.

 

[30]           Tout d’abord, monsieur Potikha ne précise pas quels sont les documents qu’il croit qu’il aurait pu ainsi soumettre et qu’il n’a pas soumis.

 

[31]           Par ailleurs, il est clair que monsieur Potikha, bien qu’il ait été en désaccord, savait depuis juillet 2006, que la demande pour considérations d’ordre humanitaire serait évaluée par un agent ERAR en raison des risques allégués.

 

[32]           Que monsieur Potikha considère que sa demande aurait dû être évaluée par un agent sur la base uniquement d’une demande pour considérations d’ordre humanitaire sans allégations de risque n’y change rien. Il devait faire la preuve des éléments à la base de ses allégations.

 

[33]           Au cœur des difficultés ou risques alléguées en Israël, par monsieur Potikha, se trouve son refus d’effectuer son service militaire et le risque d’avoir à effectuer une peine de prison.

 

[34]           Ces difficultés ont été une première fois alléguées dans une demande d’asile, laquelle a été refusée, entre autres, parce que monsieur Potikha n’avait pas réussi à démontrer qu’il n’avait pas déjà effectué son service militaire. (Motifs, ci-dessus.)

 

[35]           Monsieur Potikha savait que l’absence de documents appuyant son allégation selon laquelle il n’avait pas effectué son service militaire était importante, puisqu’elle fut un des éléments cruciaux de la décision négative de la SPR.

 

[36]           Monsieur Potikha a reçu une lettre, datée du 15 mai 2007, de la part d’une adjointe ERAR, l’informant qu’il devait soumettre une nouvelle mise à jour et soumettre les documents requis. (DD, pp. 66 et 67.)

 

[37]           Dans la liste des documents ainsi requis, la mention « Any other document or information you may deem pertinent for your application » est cochée par , imprimé en caractère gras, souligné et dans une police de caractère plus grande que pour le reste du document. (DD, p. 68.)

[38]           La situation de monsieur Potikha est similaire, mutatis mutandis, à celle décrite dans la décision John c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 468, [2007] A.C.F. no 634 (QL) :

[30]      Or il appert qu'à l'occasion de la première demande CH, non satisfait de la preuve soumise l'agent a spécifiquement demandé au demandeur l'information additionnelle suivante:

 

Please indicate what role you play in your daughter's life and how it is that you are supporting her. What role does her mother play in her life? It is imperative that you outline in detail the risk or hardship you will encounter if you had to go back to Grenada with supportive evidence. Please ensure that and all information you wish considered is provided"

 

[31]      De plus, lors de la deuxième demande CH en litige, l'agent a demandé au demandeur de lui fournir tout document ou information qui peuvent être pertinents pour son dossier. Il ne pouvait alors ignorer la demande précise faite à l'occasion de la première demande CH. (La Cour souligne.)

 

 

[39]           Monsieur Potikha savait, suite à la décision de la SPR, en juillet 2004, que les documents démontrant sa situation face au service militaire étaient nécessaires pour soutenir ses allégations. Également, la possibilité de soumettre tout document ou information qui pouvait être pertinent pour sa demande pour considérations d’ordre humanitaire lui a été offerte.

 

[40]           La Cour d’appel fédérale dans Owusu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CAF 38, [2004] A.C.F. no 158 (QL) dit:

[5]        [...] De surcroît, le demandeur a le fardeau de prouver toute allégation sur laquelle il fonde sa demande pour des raisons humanitaires. Par voie de conséquence, si un demandeur ne soumet aucune preuve à l'appui de son allégation, l'agent est en droit de conclure qu'elle n'est pas fondée. (La Cour souligne.)

 

 

[41]           Monsieur Potikha ne pouvait ignorer l’importance de démontrer son statut face au service militaire. Monsieur Potikha allègue craindre en raison de service militaire depuis sa demande d’asile, en janvier 2004, et n’a, à ce jour, déposé aucune preuve au soutien de son allégation selon laquelle il n’a pas effectué son service militaire.

 

Le demandeur n’a pas démontré qu’il ferait face à une peine de prison

[42]           Monsieur Potikha allègue que l’agent a refusé d’exercer sa juridiction en « refusant d’évaluer la peine de prison à laquelle le demandeur ferait face ».

 

[43]           Cet argument est sans mérite. À la lecture de la décision, il est clair que l’agent a évalué la question de la peine de prison.

 

[44]           Néanmoins, il est important de préciser que l’agent a conclu que monsieur Potikha n’avait pas démontré qu’il serait dans l’obligation de faire son service militaire :

Assessment

 

It is still not a known if the applicant did or did not carry out his obligatory military service in Israel

 

The allegations presented by the applicant in the present request for Examination from Immigrant Visa Requirement are the same than the ones presented before the IRB (i.e. please refer to the history of facts presented before the IRB). Although the applicant was confronted by the IRB on the lack of proof regarding military service and employment, he did not provide any documents to support his allegation. Therefore, he did not establish that he will have to comply with military service

 

Since the applicant did not provide documents establishing his allegations regarding the military service, I conclude that he did not support his risks by liable and personal evidence. (La Cour souligne.) (TRADUCTION NON DISPONIBLE.)

(Motifs, ci-dessus, pp. 3 et 4.)

 

[45]           Monsieur Potikha, n’ayant pas démontré l’allégation à la base des difficultés ou risques alléguées, l’agent ERAR n’avait pas à évaluer la question de la peine de prison.

 

[46]           Néanmoins, l’agent ERAR a tout de même poursuivi son analyse et a évalué quel serait la situation de monsieur Potikha dans l’hypothèse ou il aurait à accomplir son service et refuserait de le faire :

...if the applicant did in fact have to accomplish his military service, the consequent hardship would not qualify as unusual and undeserved. It consists in a law of general application, for which the omission present himself would engendered a penalty that is not disproportionate in comparison to International standards. (TRADUCTION NON DISPONIBLE)

 

(Motifs, ci-dessus, p. 3.)

 

[47]           La Cour note que monsieur Potikha ne cite que la première partie du paragraphe des motifs, mais ne mentionne pas la dernière qui énonce clairement que l’agent ERAR a considéré le refus possible d’effectuer le service militaire, mais a conclu que la peine de prison découlerait d’une loi d’application générale et que la peine possible n’est pas disproportionné eu égard aux normes internationales.

 

[48]           La conclusion de l’agent ERAR, selon laquelle monsieur Potikha n’a pas démontré de risque puisqu’il n’a pas démontré qu’il n’avait pas effectué son service militaire, est basée sur les faits et est raisonnable.

L’agent ne s’est pas basé sur la décision de la SPR

[49]           Monsieur Potikha reproche à l’agent ERAR de s’être basé sur la décision de la SPR qui a rejeté sa demande d’asile.

 

[50]           Comme spécifié dans Hussain c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2000] A.C.F. no 751 (QL), une demande pour considérations d’ordre humanitaire n’est pas un appel de la décision de la SPR :

[12]      [...] Selon moi, ils sont dans l'erreur puisque l'agent qui traite une demande pour motifs humanitaires ne siège ni en appel ni en contrôle de la Commission du statut de réfugié ou de la décision de l'agente chargée de la CDNRSRC. Par conséquent, en traitant la demande pour motifs humanitaires, M. St. Vincent ne pouvait se fonder sur le fait que M. Hussain aurait été membre du MMQ, étant donné les conclusions de la Commission du statut de réfugié sur cette question. En bref, l'objectif d'une demande pour motifs humanitaires n'est pas de rediscuter des faits dont avait été saisie la Commission du statut de réfugié, non plus que de faire indirectement ce qui ne peut être fait directement, savoir contester les conclusions de la Commission du statut de réfugié. (La Cour souligne.)

 

(Voir aussi : Kouka c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 1236, [2006] A.C.F. no 1561 (QL), par. 26 à 28; Nkitabungi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 331, [2007] A.C.F. no 449 (QL), par. 8; Ahmed c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2001]189 F.T.R. 118, [2000] A.C.F. no 1365 (QL), par. 27; Herrada c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 1003, [2006] A.C.F. no 1274 (QL), par. 38.)

 

[51]           De plus, dans Nkitabungi, ci-dessus, la Cour a reconnu que l’agent ERAR pouvait se référer aux conclusions de la SPR :

[8]        L'agente pouvait également se référer aux conclusions antérieures de la Commission concernant la crédibilité du demandeur. [...] D'ailleurs, l'agent d'immigration qui traite une demande pour motifs humanitaires ne siège ni en appel ni en contrôle de la Commission (Hussain c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] A.C.F. No 751 (C.F. 1ère inst.)(QL) au paragraphe 12; Kouka c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2006] A.C.F. no 1561, 2006 CF 1236 au paragraphe 27). (La Cour souligne.)

 

 

[52]           L’agent ERAR a noté que les allégations de risque de monsieur Potikha étaient les mêmes que celles qui avaient été soumises par lui devant la SPR. (Motifs, ci-dessus.)

 

[53]           L’agent ERAR a, par la suite, précisé que monsieur Potikha n’avait toujours pas soumis de preuves au soutien de ses allégations, et ne lui avait donc pas démontré qu’il ferait face à l’obligation de faire son service militaire.

 

[54]           En d’autres termes, monsieur Potikha n’a fourni, ni à la SPR, ni à l’agent ERAR, aucune preuve démontrant qu’il n’avait pas fait son service militaire. Il est donc raisonnable, que, dans les circonstances, l’agent ERAR arrive, de façon indépendante, à la même conclusion que la SPR.

 

Évaluation des considérations d’ordre humanitaire

[55]           Outre, la question du service militaire et tout ce qui en découle, monsieur Potikha ne mentionne, comme facteur pour considérations d’ordre humanitaire, que le fait qu’il n’ait pas de famille en Israël. (DD, Supplementary Information, above, p. 30.)

 

[56]           Monsieur Potikha ne donne aucune précision, quant à son allégation, selon laquelle l’agent ERAR a erronément évalué la demande selon les critères de l’ERAR et non selon ceux applicables à une demande pour considérations d’ordre humanitaire.

 

[57]           L’agent ERAR, ayant conclu que monsieur Potikha n’avait pas démontré qu’il ferait face à l’obligation de faire son service militaire, a donc conclu que monsieur Potikha n’a tout simplement pas établi que les difficultés inhabituelles et injustifiées ou excessives (ou les risques) qu’il alléguait, eu égard au service militaire, existaient.

 

[58]           Par ailleurs, sous l’intitulé « Links and integration », l’agent ERAR a évalué les facteurs d’intégration et de lien de monsieur Potikha avec le Canada. (Motifs, « Section 3 Decisions and reasons » - « b. Links and integration » p. 5.)

 

[59]           L’agent a pris en considération le fait que monsieur Potikha a un travail rémunérateur et que les documents soumis démontrent qu’il est indépendant financièrement.

 

[60]           Bien que considérant qu’il s’agissait d’un élément positif, l’agent ERAR a conclu que monsieur Potikha n’avait pas démontré que ces circonstances étaient de nature telle qu’il ferait face à des difficultés inhabituelles et injustifiées ou excessives s’il devait faire sa demande de résidence à l’extérieur du Canada.

 

[61]           De plus, l’agent a considéré comme un élément négatif le fait que monsieur Potikha ait continué de travailler malgré l’expiration de son autorisation d’emploi, le 31 mars 2007, sans faire de demande de renouvellement, en contravention avec la LIPR.

 

[62]           Par ailleurs, l’agent ERAR a noté que, bien que monsieur Potikha n’ait pas de famille en Israël, il n’en a pas plus au Canada.

 

[63]           Monsieur Potikha n’a pas satisfait à son fardeau de démontrer qu’il existait des considérations d’ordre humanitaire justifiant qu’il soit dispensé de l’obligation de faire sa demande de l’extérieur du Canada.

 

[64]           Monsieur Potikha n’a pas démontré en quoi la décision de l’agent ERAR sur les considérations d’ordre humanitaire n’est pas raisonnable.

 

CONCLUSION

[65]           Pour tous ces motifs, la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée.

 


 

JUGEMENT

LA COUR ORDONNE que

1.         La demande de contrôle judiciaire soit rejetée;

2.         Aucune question grave de portée générale soit certifiée.

 

 

« Michel M.J. Shore »

Juge


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-2563-07

 

INTITULÉ :                                       ALEX POTIKHA

                                                            c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                            ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Montréal, Québec

 

DATE DE L’AUDIENCE :               le 22 janvier 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE SHORE

 

DATE DES MOTIFS :                      le 5 février 2008

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Me Lucrèce M. Joseph

 

POUR LE DEMANDEUR

Me Patricial Nobl

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

ME LUCRÈCE M. JOSEPH, avocat

Montréal (Québec)

 

POUR LE DEMANDEUR

JOHN H. SIMS, c.r.

Sous-procureur général du Canada

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

 

 

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