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Date : 20080124

Dossier : T-1177-07

Référence : 2008 CF 95

Ottawa, Ontario, le 24 janvier 2008

En présence de Monsieur le juge de Montigny

 

ENTRE :

SANDRA SIGOUIN

demanderesse

et

 

BANQUE NATIONALE DU CANADA

défenderesse

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire d’une sentence arbitrale rendue le 30 mai 2007, rejetant la plainte de la demanderesse, et confirmant la justesse du congédiement décrété par la défenderesse. J’accueillerais cette demande de contrôle judiciaire pour les motifs qui suivent.

 

FAITS

[2]               La demanderesse travaille pour la défenderesse depuis le 30 juin 1986; elle a occupé plusieurs postes au sein de divers départements. Le 2 mai 2005, la demanderesse pose sa candidature pour le poste d’agente administration/Unité d’intervention. Malgré le fait qu’elle ne détient pas la formation académique suggérée pour le poste, elle l’obtient et débute ses nouvelles fonctions le 18 juillet 2005.

 

[3]               Pendant les deux semaines suivantes, la demanderesse travaille sous la supervision de madame Christine Dusseault. La demanderesse soutient cependant qu’elle n’a pas pu être adéquatement formée durant cette période en raison du grand nombre de dossiers s’étant accumulés suite aux vacances de madame Dusseault. À l’expiration de cette période, la demanderesse conserve la possibilité de consulter madame Dusseault au besoin.

 

[4]               La supérieure du département, madame Chantal Evoy, remarque rapidement les erreurs d’inattention commises par la demanderesse. La demanderesse promet de faire attention lorsqu’elle en est avertie.

 

[5]               Le 14 novembre 2005, la demanderesse effectue une auto-évaluation dans laquelle elle reconnaît certaines de ses lacunes. Elle rencontre madame Evoy afin de compléter cette évaluation le 7 décembre 2005. Un plan d’action pour l’amélioration du rendement est préparé par madame Evoy et accepté par la demanderesse le 14 décembre 2005.

 

[6]               La demanderesse se voit toutefois dans l’impossibilité d’atteindre les objectifs fixés; madame Evoy communique donc avec le bureau des ressources humaines afin d’entamer la procédure prévue en cas d’incompétence. Le 23 janvier 2006, une lettre est envoyée à la demanderesse pour l’aviser qu’il y aura congédiement si les objectifs fixés ne sont pas rencontrés avant le 15 février 2006.

 

[7]               Le 27 janvier 2006, la demanderesse omet de renouveler une lettre de crédit, ce qui occasionne une perte de 830 000$ US pour la défenderesse. Lors de son témoignage devant l’arbitre, elle admet qu’il s’agit de son erreur; elle n’a pas vu cette date, malgré l’échéancier qui lui parvenait chaque jour. Par conséquent, la demanderesse reçoit une lettre de congédiement le 31 janvier 2006.

 

[8]               Le 9 juin 2006, la demanderesse dépose une plainte pour congédiement injustifié auprès du ministère du Développement des Ressources humaines Canada, en vertu de l’article 240 du Code canadien du travail, L.R.C. 1985, c. L-2 (le Code). Cette plainte est rejetée par un arbitre, le 30 mai 2007.

 

DÉCISION CONTESTÉE

[9]               La demanderesse a prétendu que son congédiement était une mesure disciplinaire, qui faisait suite à son omission de renouveler une lettre de crédit, et non une mesure administrative relevant de son incompétence. Elle a demandé sa réintégration ou, à défaut, un paiement compensatoire d’un montant équivalant à une année de salaire.

 

[10]           La défenderesse, de son côté, a soutenu qu’il s’agissait d’une mesure purement administrative découlant des nombreuses erreurs d’inattention commises par la demanderesse. Elle a reconnu avoir fixé la date du 15 février 2006 pour mettre fin à l’emploi, mais considérait qu’il était justifié de le faire immédiatement suite à l’omission grave de la demanderesse qui lui a fait perdre 830 000 $ US. La défenderesse a mentionné qu’elle a fait tout ce qui était en son pouvoir pour aider la demanderesse à pallier ses lacunes.

 

[11]           L’arbitre a conclu que le congédiement était bel et bien une mesure administrative prise en raison de l’incompétence démontrée par la demanderesse dans l’exécution de ses fonctions.

 

[12]           Il a noté qu’aucune preuve ne permettait d’affirmer que la demanderesse commettait ce type d’erreur antérieurement ni que ses problèmes d’inattention découlaient de son état de santé. En fait, rien dans la preuve ne permettait d’expliquer les difficultés éprouvées par la demanderesse. L’arbitre a mentionné également que la superviseure de la demanderesse savait, trois mois après l’arrivée de la demanderesse dans ce nouveau poste, qu’elle n’arriverait pas à remplir adéquatement ses fonctions. Cependant, l’arbitre a signalé que la demanderesse ne fut pas avisée clairement qu’elle devrait être mutée dans un autre département et, qu’à défaut, elle serait congédiée.

 

[13]           L’arbitre a examiné, par la suite, la question de savoir si la défenderesse avait respecté les exigences pour se départir d’un employé incompétent. L’arbitre a mentionné que la défenderesse devait avoir signalé à la demanderesse les lacunes dans son travail, lui avoir donné le support adéquat afin de corriger ces lacunes et d’atteindre les objectifs fixés, lui fournir un délai raisonnable pour ce faire, et l’avoir avertie du risque de congédiement auquel elle s’exposait à défaut d’amélioration de sa part.

[14]           L’arbitre a considéré qu’il s’agissait d’un congédiement valable puisque la défenderesse a respecté toutes les exigences requises. Il a mentionné que la demanderesse connaissait les attentes de son employeur. Non seulement fut-elle avisée verbalement à des nombreuses reprises, mais elle le fut également par écrit lors de son évaluation du 7 décembre 2005. L’arbitre a également noté qu’un plan d’action avait été mis en place pour aider la demanderesse à respecter ses objectifs. Il a considéré qu’elle avait bénéficié d’un support adéquat : elle a travaillé deux semaines sous la supervision de madame Dusseault; elle avait la possibilité d’être aidée par ses collègues de travail; et elle devait faire vérifier tous les documents qu’elle rédigeait. L’arbitre a mentionné que madame Evoy était justifiée de refuser la demande de cours de perfectionnement de la demanderesse puisqu’à ce moment, il était déjà acquis qu’elle ne pourrait remplir les conditions d’emploi. Finalement, l’arbitre a signalé que la demanderesse fut avisée, par la lettre du 23 janvier 2006, du congédiement auquel elle s’exposait si elle ne rencontrait pas les objectifs le 15 février 2006.

 

QUESTIONS EN LITIGE

[15]           Il s’agit de déterminer si l’arbitre, chargé de se prononcer sur la justesse du congédiement, a erré en concluant qu’il s’agissait d’un congédiement valable pour cause d’incompétence puisque la défenderesse avait respecté les exigences requises pour se départir de son employée. Plus particulièrement, la Cour devra examiner si l’arbitre a erré en omettant de se demander si l’employeur avait fait tous les efforts raisonnables pour trouver à la demanderesse un emploi alternatif au sein de son entreprise.

 

 

ANALYSE

1) Quelle est la norme de contrôle applicable?

[16]           La défenderesse a soumis de nombreux arrêts à l’effet que la décision de l’arbitre doit faire l’objet d’une très grande déférence de la part de cette Cour. Elle prétend que la demanderesse, en alléguant que l’arbitre avait l’obligation d’analyser les efforts faits par l’employeur pour lui trouver un emploi alternatif, réclame, en fait, une révision du remède ordonné par l’arbitre. La défenderesse soutient donc qu’il est de jurisprudence constante d’appliquer la norme de contrôle la moins exigeante soit celle de la décision manifestement déraisonnable et de ne réviser la décision de l’arbitre que si elle est « clairement irrationnelle, c’est-à-dire, de toute évidence non-conforme à la raison » (Conseil de l’éducation de Toronto (Cité) c. F.E.E.E.S.O., district 15, [1997] 1 R.C.S. 487 au para. 46).

 

[17]           Il est vrai que la Cour doit faire preuve d’une grande retenue en ce qui concerne la révision de questions de fait et d’inférence. Non seulement le Code prévoit-il une clause privative très stricte et des pouvoirs étendus pour l’arbitre, mais il confie également à ces arbitres ayant une expertise particulière le soin de résoudre rapidement et efficacement les litiges résultant d’un congédiement injuste.

 

[18]           Les décisions citées par la défenderesse pour soutenir l’application de cette norme de contrôle ne sont cependant pas applicables à la présente instance en raison de la nature de la question soulevée. La question en l’espèce n’est pas tant de savoir si l’arbitre a mal évalué les faits l’amenant à conclure que le congédiement était pour incompétence (et donc, présumément, justifié), mais bien plutôt de déterminer s’il a appliqué les bon critères jurisprudentiels pour décider que le congédiement était justifié. Il s’agit là d’une question mixte de droit et de fait. Dans la décision Bitton c. Banque HSBC Canada, 2006 CF 1347, il m’a été donné d’analyser la norme de contrôle applicable à une telle question:

[44] Quant à la norme de contrôle judiciaire applicable en cette matière, il convient de souligner que l’erreur commise par l’arbitre porte ici sur une question mixte de droit et de faits. Ce qui est remis en question, ce ne sont pas les conclusions de faits qu’il tire de la preuve soumise par les parties. Comme je l’ai souligné précédemment, ces constats méritent la plus grande déférence et à cet égard, cette Cour doit en faire preuve. En aucun temps, les conclusions de fait auxquelles en vient l’arbitre ne sont clairement irrationnelles. Par exemple, les plaintes des entreprises clientes portées à l’attention de l’employeur en regard du travail insatisfait de M. Bitton ou les réprimandes verbales dont il a fait l’objet par ses superviseurs ne sont pas ici remises en question.

 

[45] Toutefois, lorsque l’arbitre escamote la dernière étape du test proposé par la Cour suprême dans l’arrêt Conseil de l’éducation de Toronto et qu’il saute à la conclusion que le congédiement était justifié sur la seule base de la faute commise, il commet une erreur dans l’application d’une norme juridique à des faits. Comme il s’agit là d’une question mixte de faits et de droit, le degré de déférence à l’endroit de la conclusion qu’il tire est nécessairement moindre et autorise cette Cour à intervenir dans la mesure où la décision de l’arbitre « n’est étayée par aucun motif capable de résister à un examen judiciaire assez poussé » (Canada (Directeur des enquêtes et recherches) c. Southam Inc., [1997] 1 R.C.S. 748, au paragraphe 56).

 

[19]           D’ailleurs, l’audition devant cette Cour ne portait aucunement sur les faits, qui ne sont pas contestés par les parties, mais bien sur les critères jurisprudentiels devant être considérés par un arbitre dans son analyse de la justesse d’un congédiement. Il s’agit donc clairement de l’application à des faits de critères développés par la jurisprudence, ce qui constitue une question mixte de fait et de droit justifiant l’application de la norme de contrôle raisonnable simpliciter.

2) l’arbitre a-t-il erré en omettant de se demander si l’employeur avait fait tous les efforts raisonnables pour trouver à la demanderesse un emploi alternatif au sein de son entreprise?

 

[20]           Le Code prévoit ce qui suit en ce qui concerne le pouvoir de l’arbitre en matière de congédiement :

242. (3) Sous réserve du paragraphe (3.1), l’arbitre :

a) décide si le congédiement était injuste;

b) transmet une copie de sa décision, motifs à l’appui, à chaque partie ainsi qu’au ministre.

 

242. (3) Subject to subsection (3.1), an adjudicator to whom a complaint has been referred under subsection (1) shall

(a) consider whether the dismissal of the person who made the complaint was unjust and render a decision thereon; and

(b) send a copy of the decision with the reasons therefor to each party to the complaint and to the Minister.

 

[21]           Aucune définition de ce qu’est un congédiement injuste n’est fournie par le Code; le législateur, en ne délimitant pas le cadre d’analyse, a donc voulu octroyer une plus grande flexibilité au décideur. Par conséquent, l’arbitre demeure libre dans son appréciation des circonstances de chaque cas et dans sa recherche d’une solution juste pour tous. Il possède ainsi une grande latitude pour considérer les particularités et les circonstances atténuantes dans son analyse. Chaque cas en est donc un d’espèce dont le résultat dépend essentiellement des faits.

 

[22]           Dans sa décision, l’arbitre a mentionné que la demanderesse avait fait l’objet d’un congédiement administratif pour incompétence, ce qui n’est pas contesté par les parties. Lors de l’audition, l’avocat de la défenderesse a précisé les différences existant entre un congédiement administratif par opposition à un congédiement disciplinaire, et mis l’accent sur le fait que, lorsqu’il s’agit d’un congédiement administratif, l’arbitre n’a pas le pouvoir de substituer sa propre sanction à celle de l’employeur. Par conséquent, elle prétend que l’arbitre n’avait pas le pouvoir d’ordonner à la défenderesse de trouver un emploi alternatif à la demanderesse puisque l’employeur possédait la prérogative de choisir la sanction appropriée.

 

[23]           Le Code ne fait aucune distinction entre un congédiement administratif et disciplinaire; la seule tâche de l’arbitre consiste à déterminer si l’employé à injustement été congédié. Cependant, un congédiement peut être qualifié d’administratif ou de non-disciplinaire lorsque l’incompétence ou des problèmes de performance sont à la base du congédiement. Sans qu’aucun acte intentionnel ne soit posé par l’employé, il y a néanmoins une incapacité d’effectuer les tâches reliées à l’emploi avec un niveau minimum de compétence. Un congédiement disciplinaire a clairement une connotation punitive puisqu’il vise à sévir relativement à des actes négligents ou d’inconduite de la part d’un employé.

 

[24]           La principale différence entre ces deux types de congédiement semble résider dans la gradation des sanctions applicables. Lorsqu’il s’agit d’un congédiement administratif, l’employeur pourra congédier l’employé sans déterminer si une autre sanction serait davantage appropriée dans les circonstances. Toutefois, avant d’en arriver à cette sanction de dernier recours, l’employeur devra respecter certaines étapes afin de démontrer sa bonne foi et sa volonté de travailler avec l’employé et de l’assister dans l’amélioration de ses performances.

 

[25]           Les arbitres analysant la justesse d’un congédiement en vertu du Code ont développé certaines exigences procédurales devant être respectées par un employeur avant de pouvoir se départir d’un employé incompétent. Ces critères ont été résumés ainsi dans la décision arbitrale Edith Cavell Private Hospital and Hospital Employees’ Union Loc. 180 (1982), 6 L.A.C. (3d) 229 en vertu de laquelle l’employeur doit :

a.)                The employer must define the level of job performance required;

b.)                 The employer must establish that the standard expected was communicated to the employee;

c.)                The employer must show it gave reasonable supervision and instruction to the employee and afforded the employee a reasonable opportunity to meet the standard.

d.)                The employer must establish an inability on the part of the employee to meet the requisite standard to an extent that renders her incapable of performing the job and that reasonable efforts were made to find alternate employment within the competence of the employee;

e.)                The employer must disclose that reasonable warnings were given to the employee that a failure to meet the standard could result in dismissal.

 

[26]           Ces critères procéduraux établis par l’arbitre Hope ont été repris par la suite, même si l’obligation qu’aurait l’employeur de trouver un emploi alternatif à l’employé incompétent au sein de son entreprise n’est pas universellement acceptée par les arbitres.

 

[27]            Je ne crois pas que ces critères soit exhaustifs ou encore qu’ils lient les tribunaux dans l’application de l’article 242 du Code. Une telle approche irait à l’encontre de la grande latitude donnée à l’arbitre par le législateur. La seule exigence établie par le Code demeure la justesse du congédiement et, par conséquent, les critères à prendre en considération dépendront des faits particuliers de chaque affaire.

 

[28]           Au terme de son appréciation de la preuve au dossier, l’arbitre a constaté qu’aucun reproche n’avait jamais été formulé à l’endroit de la demanderesse, et ce, pendant ses vingt années de service précédant sa promotion. Or, six mois après avoir obtenu un emploi de cadre malgré son manque de qualification, elle est congédiée pour incompétence. L’arbitre a noté que sa supérieure, madame Evoy, savait que la demanderesse ne pourrait remplir ses fonctions correctement à peine trois mois après avoir commencé à exercer ses nouvelles fonction, sans pour autant que cela lui soit clairement communiqué.

 

[29]           L’arbitre a conclu que la procédure utilisée par la défenderesse pour se départir de la demanderesse était juste. Il a considéré que la demanderesse connaissait les attentes de ses supérieurs et que ses lacunes lui avaient été signalées autant verbalement que par écrit. L’arbitre a également approuvé l’aide fournie à la demanderesse par son employeur pour lui permettre de corriger et d’atteindre ses objectifs. Il a noté qu’un délai avait été fixé afin de rencontrer les objectifs fixés dans la lettre du 23 janvier 2006, et qu’à défaut de le respecter, la demanderesse savait qu’elle s’exposait à un congédiement. L’arbitre a donc conclu qu’il s’agissait d’un congédiement pour incompétence et que la défenderesse avait respecté les exigences auxquelles elle devait se conformer pour congédier la demanderesse.

 

[30]           À aucun moment, cependant, l’arbitre n’a-t-il analysé le congédiement en regard du long historique d’emploi de la demanderesse au sein de la Banque et de son dossier jusqu’alors impeccable. Si je suis prêt à concéder que l’arbitre n’a pas à considérer systématiquement les efforts de l’employeur pour replacer l’employé dans un autre emploi, je considère que de ne pas le faire dans les circonstances présentes constitue une erreur justifiant l’intervention de cette Cour. Il est pertinent de se demander quel serait le message donné aux employés dans le cas contraire. Un employeur pourrait alors permettre à un employé ne détenant pas les qualifications requises d’accéder à une promotion pour le congédier par la suite. Dans ces circonstances, on peut imaginer que peu d’employés prendraient le risque de postuler pour l’obtention d’une promotion en sachant pertinemment que leur congédiement pourrait s’ensuivre s’ils ne sont pas à la hauteur de la situation. On peut d’ailleurs se demander, en l’espèce, si l’employeur n’est pas en partie responsable des déboires de la demanderesse et n’a pas commis une erreur de jugement en lui accordant une promotion pour laquelle elle ne rencontrait pas les exigences requises.

 

[31]           Il ne m’appartient pas de me prononcer sur la justesse du congédiement; cette analyse relève exclusivement de la juridiction de l’arbitre. Je crois cependant que l’arbitre avait à tout le moins l’obligation de considérer le fait que la demanderesse a été à l’emploi de la Banque pour une vingtaine d’années sans qu’aucune faute ne lui soit jamais reprochée. Il m’est difficile de considérer qu’une décision n’en tenant pas compte est raisonnable.

 

[32]           Qui plus est, l’arbitre n’a jamais explicitement mentionné qu’il considérait le congédiement de la demanderesse juste. Je considère qu’il est insuffisant de simplement mentionner qu’il s’agit d’un congédiement administratif pour incompétence, sans plus. La décision Bell Canada c. Hallé (1989), 29 C.C.E.L. 213 (aux p. 217-218) met en cause un congédiement pour travail insatisfaisant d’un employé ayant travaillé pour l’employeur sept années. La Cour d’appel fédérale, sous la plume du juge Pratte, a déterminé les critères à analyser pour déterminer la justesse d’un congédiement. L’arbitre doit s’interroger sur la nature, la suffisance et le bien-fondé des motifs de congédiement. L’employeur doit donc avoir des motifs raisonnables de se plaindre du rendement de la demanderesse qui justifiait un congédiement. Si de tels motifs existaient, l’arbitre doit ensuite déterminer si la procédure de congédiement suivie par la défenderesse était juste. Bien qu’il ait considéré que la procédure suivie par la défenderesse était juste, l’arbitre a omis de se prononcer sur les motifs invoqués pour congédier la demanderesse.

 

[33]           Je ferais donc droit à cette demande de contrôle judiciaire et retournerais l’affaire devant le même arbitre. La preuve semble toutefois contradictoire en ce qui concerne la question de savoir si la demanderesse souhaitait obtenir un autre poste au sein de la Banque. Alors que la défenderesse prétend que des offres ont été faites et refusées, la demanderesse soumet plutôt qu’en aucun moment on ne lui a offert un autre emploi. Il s’agira d’un point qui devra être clarifié par l’arbitre lors d’une nouvelle audition; ce dernier déterminera alors s’il possède suffisamment de preuve sur la question ou s’il est souhaitable de permettre aux parties d’en soumettre davantage.

 


ORDONNANCE

 

LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire soit accueillie et que le dossier soit retourné au même arbitre pour redétermination.

 

 

« Yves de Montigny »

Juge


 

 

 

 

COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        T-1177-07

 

INTITULÉ :                                       Sandra Sigouin

                                                            c.

                                                            Banque National du Canada

 

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Montréal, Québec

 

DATE DE L’AUDIENCE :               10 janvier 2008

 

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE PAR :              Justice de Montigny

 

DATE DES MOTIFS :                      24 janvier 2008

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Me Irving Gaul

 

POUR LE(S) DEMANDEUR(ERESSE)(S)

Me Lukasz Granosik

 

POUR LE(S) DÉFENDEUR(ERESSE)(S)

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Me Irving Gaul

267, boul. de Mortagne

Boucherville (Québec)  J4B 1B2

 

POUR LE(S) DEMANDEUR(ERESSE)(S)

Me Lukasv Granosik

Ogilvy Renault

1981, McGill College, Bureau 1100

Montréal (Québec)  H3A 3C1

 

POUR LE(S) DÉFENDEUR(ERESSE)(S)

 

                                                                             

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