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Date : 20080115

Dossier : IMM-7574-05

Référence : 2008 CF 47

Ottawa (Ontario), le 15 janvier 2008

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE KELEN

 

 

ENTRE :

BALJINDER KAUR VIRK

JOBANDEEP KAUR VIRK

demanderesses

et

 

LE MINISTRE DE  

LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               La présente demande de contrôle judiciaire vise une décision par laquelle la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission) concluait le 22 novembre 2005 que les demanderesses n’étaient pas des réfugiées au sens de la Convention ni des personnes à protéger aux termes des articles 96 et 97 de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la Loi).

 

[2]               Dans la présente affaire, l’avocate des demanderesses a abandonné à l’audience son argument relatif au « changement dans l’ordre des interrogatoires » en raison duquel l’autorisation a probablement été accordée. Elle a plutôt cherché à faire annuler la décision de la Commission compte tenu de ses conclusions quant à la crédibilité, même si la preuve révélait clairement l’existence de mensonges dans les documents produits par les demanderesses ou dans le témoignage de vive voix rendu à l’audience par la demanderesse principale. À la fin de l’audience, j’ai informé les parties que je rejetterais la demande et que je fournirais les motifs de ma décision, lesquels sont exposés plus bas.

 

LES FAITS

[3]               La demanderesse principale, Baljinder Kaur Virk, et sa fille, Jobandeep Kaur Virk, sont arrivées au Canada en mars 2005. Les deux demanderesses sont des citoyennes de l’Inde et demandent l’asile parce qu’elle craignent d’être persécutées et d’être exposées à une menace à leur vie par la police en Inde.

 

[4]               La demanderesse principale prétend avoir fait l’objet d’un mariage arrangé le 13 avril 2000. Dans son Formulaire de renseignements personnels (le FRP), elle affirme qu’elle a appris, peu après son mariage, que son époux, Rattandeep Singh Virk, était un terroriste recherché du Mouvement pour la libération du Khalistan, et qu’il avait fait l’objet d’accusations criminelles. La demanderesse principale soutient qu’après qu’elle eut été devenue enceinte, la police indienne a fait une descente à la ferme où résidait la famille de son époux visant à arrêter ce dernier. Elle dit qu’elle a vu son époux pour la dernière fois peu de temps après et elle s’est tenue cachée par la suite.

 

[5]               Pendant qu’elle se tenait cachée, la demanderesse principale vivait dans la crainte constante d’être trouvée et battue, torturée ou tuée par la police qui voulait savoir où était son mari. Elle affirme que sa fille est née en février 2002 pendant qu’elle vivait cachée. Elle ajoute qu’elle a cru qu’il était trop dangereux, sans toutefois savoir où se trouvait son mari et les activités qu’il exerçait au sein du Mouvement pour la libération du Khalistan, de révéler quoi que ce soit à la police indienne.

 

[6]               Les demanderesses ont quitté l’Inde avec l’assistance d’un agent. À son arrivée au Canada, la demanderesse principale a dit aux agents d’immigration que c’était son beau-frère et non son mari qui était recherché par la police. Elle prétend avoir agi ainsi par crainte d’être renvoyée en Inde si elle disait la vérité.

 

La décision faisant l’objet du présent contrôle

[7]               Le 22 novembre 2005, la Commission a conclu que les demanderesses n’étaient pas des réfugiées au sens de la Convention ni des personnes à protéger. La conclusion principale tirée par la Commission était que la demanderesse principale n’avait pas présenté suffisamment d’éléments de preuve crédibles et dignes de foi.

 

[8]               La Commission a conclu qu’il y avait d’« importantes divergences » entre la version présentée par la demanderesse principale aux agents d’immigration au point d’entrée, celle fournie dans l’exposé circonstancié de son FRP et celle exposée dans le témoignage oral qu’elle a produit devant la Commission. Elle a jugé comme peu vraisemblable l’explication donnée par la demanderesse principale au sujet de ces divergences, et elle a tiré d’autres conclusions, notamment :

1.         il est peu vraisemblable que la police ait pu s’intéresser à la demanderesse principale puisqu’elle a déclaré dans son témoignage qu’elle n’était pas au courant des activités de son mari et qu’elle ne connaissait pas le groupe auquel il était lié parce que la communication de tels renseignements entre époux ne se fait pas dans sa culture;

2.         la demanderesse principale a déposé un article de journal à l’appui de sa demande qui en fait contredisait son propre témoignage;

3.         la personne qui a témoigné pour les demanderesses a admis ne jamais avoir vu le visage de la demanderesse principale en Inde, parce que la seule fois qu’ils se sont rencontrés, la demanderesse portait un voile;

4.         la carte de rationnement présentée par la demanderesse principale à titre de preuve du mariage ne constituait pas un élément digne de foi pour établir son  identité en tant qu’épouse de Rattandeep Singh Virk;

5.         la lettre émanant de la mission de Khalra produite à l’appui de la demande d’asile des demanderesses contenait « manifestement de faux » renseignements, ce qui démontrait le manque général de crédibilité de toute la demande;

6.         il n’est pas vraisemblable que la demanderesse principale ait eu un « mariage relativement imposant de deux jours » si son époux était à l’époque un fugitif.

 

 

 

LES QUESTIONS EN LITIGE

[9]               Les demanderesses ont soulevé deux questions dans leurs observations écrites :

1.         La Commission a-t-elle violé les règles de justice naturelle et d'équité procédurale en rejetant la requête des demanderesses portant sur le « changement dans l’ordre des interrogatoires »?

2.         La Commission a-t-elle commis une erreur en ne tenant pas compte de la preuve ou en interprétant mal celle-ci lorsqu’elle a jugé que les demanderesses et la pièce d’identité produite n’étaient pas suffisamment crédibles?

 

LA NORME DE CONTRÔLE

[10]           La première question en litige est de savoir si la Commission a violé les principes de justice naturelle et d'équité procédurale. Pour répondre à cette question, la cour de révision doit « examiner les circonstances particulières de l'affaire et décider si le [décideur] en cause a respecté les règles de justice naturelle et d'équité procédurale » : Thamotharem c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 16, [2006] 3 R.C.F. 168, au paragraphe 15. La norme de contrôle applicable à une telle décision est celle de la décision correcte. Si elle arrive à la conclusion qu’il y a eu manquement aux principes de justice naturelle ou d’équité procédurale, la cour n’est pas tenue de faire montre de déférence et elle doit annuler la décision : Sketchley c. Canada (Procureur général), 2005 CAF 404, [2006] 3 R.C.F. 392.

 

[11]           La deuxième question en litige concerne les conclusions de fait et de crédibilité que la Commission a tirées, des questions qui relèvent de l’expertise particulière de la Commission. Ces conclusions seront annulées seulement si elles sont manifestement déraisonnables : Aguebor c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1993), 160 N.R. 315 (C.A.F.). Dans l’arrêt Barreau du Nouveau‑Brunswick c. Ryan, 2003 CSC 20, [2003] 1 R.C.S. 247, la Cour suprême du Canada a décrit la conclusion manifestement déraisonnable comme étant « clairement irrationnelle » ou « de toute évidence non conforme à la raison ».

 

L’ANALYSE

 

Première question en litige : La Commission a-t-elle violé les règles de justice naturelle et d'équité procédurale en rejetant la requête des demanderesses portant sur le « changement dans l’ordre des interrogatoires »?

 

 

[12]           À l’audience, les demanderesses ont abandonné l’argument portant sur le « changement dans l'ordre des interrogatoires » prévu par les Directives n7, qui imposent une procédure uniforme selon laquelle le commissaire commence l’interrogatoire, mais qui permettent au conseil du demandeur de commencer l’interrogatoire dans des « circonstances exceptionnelles » si l’équité l’exige.

 

[13]           La Cour a été étonnée que l’avocate des demanderesses abandonne son argument, car celui‑ci a probablement précipité l’autorisation accordée par la juge Carolyn Layden-Stevenson. Compte tenu des documents écrits qui ont été présentés à la Cour, je suis d’avis qu’il n’existait pas en l’espèce de « circonstances exceptionnelles » pour justifier un changement dans l’ordre des interrogatoires. De plus, l’interrogatoire mené par la Commission n’a pas entraîné une violation des règles de justice naturelle et d'équité procédurale. Par conséquent, je m’attendais à ce que l’avocate des demanderesses ait des difficultés à prouver ses prétentions sur ce point.

 

 

Deuxième question en litige :            La Commission a-t-elle commis une erreur en ne tenant pas compte de la preuve ou en interprétant mal celle-ci lorsqu’elle a jugé que les demanderesses et la pièce d’identité produite n’étaient pas suffisamment crédibles?

 

 

[14]           La conclusion essentielle de la Commission était que la demanderesse principale n’avait pas établi son identité en tant qu’épouse de Rattandeep Singh Virk. Les demanderesses plaident que la Commission a commis une erreur en ne tenant pas compte de la preuve ni des explications fournies par la demanderesse principale, ou en les interprétant mal, et, par conséquent, qu’elle a tiré des [traduction] « inférences injustifiées » qui étaient manifestement déraisonnables.

 

[15]           La norme de la décision manifestement déraisonnable est importante et impose un lourd fardeau aux demanderesses pour qu’elles puissent réfuter la conclusion de la Commission selon laquelle la demanderesse principale n’était pas crédible. Le juge Joyal a écrit dans la décision Culinescu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1997), 136 F.T.R. 241, au paragraphe 13 :

[13]      Il est bien établi que la crédibilité est une question de fait qui relève entièrement de la compétence de la Commission en sa qualité de juge des faits. Il est loisible au tribunal de conclure qu'un requérant n'est pas digne de foi en se fondant sur des invraisemblances relevées dans le témoignage de ce dernier, dans la mesure où ses conclusions ne sont pas déraisonnables et que ses motifs sont exposés en des « termes clairs et explicites » […] Il appert aussi que l'obligation des requérants de réfuter les conclusions de non-crédibilité de la Commission est très lourde. [Renvois omis.]

 

[16]           Pour en arriver à sa décision, la Commission s’est appuyée sur les divergences entre les renseignements fournis par les demanderesses au point d’entrée, ceux contenus dans le FRP de la demanderesse principale et ceux donnés dans le témoignage oral que cette dernière a produit devant la Commission. La Commission n’a pas retenu l’explication de la demanderesse principale au sujet de ces divergences, à savoir qu’elle était non instruite et illettrée et qu’elle s’était fiée uniquement à l’avis de son agent.

 

[17]           Les demanderesses allèguent que la conclusion d’invraisemblance tirée par la Commission, selon laquelle la demanderesse principale n’intéressait pas la police, n’avait aucun lien avec la preuve et qu’elle constituait donc une erreur. Les demanderesses ont ensuite fait valoir que, comme la demanderesse principale n’était pas instruite, la Commission ne pouvait trouver aucune autre explication plausible que celle voulant que les renseignements fournis au point d’entrée l’avaient été conformément à l’avis de leur agent.

 

[18]           Cependant, il ressort clairement du dossier que, outre la preuve contradictoire présentée par la demanderesse principale, la décision de la Commission était fondée sur divers éléments, dont un bon nombre n’a pas été contesté, notamment une lettre du comité de la mission de Khalra que M. Waldman, conseil des demanderesses, a produite à l’appui de la demande. La Commission a reproduit la lettre dans sa décision. Dans cette lettre, il est précisé que Baljinder Kaur est l’épouse de Rattandeep Singh et que l’asile politique devrait lui être accordé au Canada en raison du harcèlement qu’elle a subi par la police qui tentait d’obtenir des renseignements au sujet de son époux. Il s’agit de faux renseignements et d’un mensonge éhonté. Il convient d’exposer cette lettre en détail pour s’assurer que les lettres qui émaneront de ce groupe soient considérées dans l’avenir comme étant susceptibles de ne pas être suffisamment crédibles. Je vais aborder la question en détail plus loin.

 

Premièrement, la lettre du conseil des demanderesses (Lorne Waldman)

[19]           Le 25 juillet 2005, M. Waldman a écrit à la Commission et joint une lettre du comité de la mission de Khalra qu’il disait vouloir présenter à l’audience avec d’autres documents. Dans la lettre, il demandait un ajournement de l’audience relative à la demande d’asile en raison d’un conflit d’horaire, et il disait que [traduction] « la demande [des demanderesses] soul[evait] des questions délicates et [qu]’il [était] important pour [lui] de les représenter ». M. Waldman a représenté les demanderesses lors de l’audience tenue par la Commission. À l’audience devant la Cour, c’est l’associée de M. Waldman qui a comparu en qualité d’avocate pour le compte des demanderesses.

 

Deuxièmement, la lettre du comité de la mission de Khalra

[20]           Cette lettre signée le 17 juillet 2005 par le secrétaire général du comité de la mission de Khalra au Penjab, en Inde, est adressée « à qui de droit ». Le secrétaire général du comité de la mission de Khalra déclare par écrit que la demanderesse principale a été harcelée par la police du Penjab qui recherchait son mari. La lettre est ainsi rédigée : 

Je, Balwinder Singh Chabhal, secrétaire général du comité de la mission de Khalra, déclare par la présente que S. Malik Singh, de Tulchri P.S. Ismallabad Distt. Kuruksheter, est résident permanent dudit village. Sa fille, Baljinder Kaur, est l’épouse de Ratandip Singh, fils de Jagir Singh du village Rohd P.S. Safido mado Mandi, Distt. Jeend (HR). La police du Penjab et de l’Haryana a torturé et harcelé Ratandip Singh. Craignant la mort, il a quitté le village. La police ne sait pas où il se cache; elle harcelait Baljinder Kaur et l’interrogeait au sujet de son mari. Pour mettre fin à ce harcèlement de la police, elle a fini par quitter l’Inde et est allée au Canada

 

Je demande donc au gouvernement du Canada, vu que sa vie est en danger en Inde, de bien vouloir lui accorder l’asile politique.

 

Veuillez croire à l’expression de mon entière reconnaissance.

 

                                                                                    Balwinder Singh Chabhal

                                                                                                Secrétaire général

                                                                                    Comité de la mission de                                                                                                Kharla                                                                                                                                      Secrétaire général

Comité de la mission de Kharla

 

[Non souligné dans l’original.]

 

 

 

Troisièmement, le témoignage livré à l’audience tenue par la Commission

 

[21]           Lors du témoignage devant la Commission, la présidente de l’audience a demandé à la demanderesse principale si elle connaissait l’existence de la lettre en question. Selon la page 53 de la transcription (page 430 du dossier certifié du tribunal), la demanderesse a répondu de la façon suivante :

[traduction]

LA DEMANDERESSE :          Je ne suis pas au courant (de la lettre).

 

La demanderesse ajoute ensuite :

LA DEMANDERESSE :                      Je ne me souviens pas de cette lettre; d’où provient-elle?

 

La présidente de l’audience poursuit :

 

LA PRÉSIDENTE DE L’AUDIENCE :           Ce que dit cette lettre, dont vous n’avez pas connaissance, c’est que la police vous aurait harcelée et interrogée au sujet de votre mari, alors que vous m’avez dit ne jamais avoir eu de rapport direct avec la police.

 

LA DEMANDERESSE :                      Oui.

 

LA PRÉSIDENTE DE L’AUDIENCE :           Donc, pouvez-vous m’expliquer pourquoi cette information se trouve dans la lettre, même si vous m’ayez dit aujourd’hui n’avoir jamais communiqué par téléphone avec la police, ni eu de rapport direct avec elle?

 

LA DEMANDERESSE :                      La police ne m’a jamais parlée. Je me cachais d’elle en tout temps.

 

Par conséquent, le témoignage de vive voix révèle sans équivoque :

 

1.                  que la demanderesse principale n’a jamais vu cette lettre ni été au courant de son existence;

2.                  que le harcèlement de la police à l’égard de la demanderesse principale dont fait état la lettre est un mensonge.

 

 

Quatrièmement, la décision rendue par la Commission le 22 novembre 2005

[22]           La présidente de l’audience, Diane Smith, a conclu à la page 5 de la décision :

La demandeure d’asile adulte a soutenu qu’elle n’avait jamais eu de contacts avec qui que ce soit du Mouvement de libération du Khalistan et que les activités de ce mouvement étaient liées au Penjab alors qu’elle était de l’État d’Haryana. À ses dires, elle n’a jamais fait affaire directement avec la police. Elle ne connaissait pas l’existence de la lettre du comité de la mission de Khalra (KMC) à l’appui de sa demande d’asile ni les détails de cette lettre.

 

La Commission a ensuite reproduit la lettre dans son intégralité.

 

 

 

[23]           Plus loin, aux pages 9 et 10 de la décision, la présidente de l’audience a tiré la conclusion suivante :

Le tribunal conclut que la production d’une lettre photocopiée du comité de la mission de Khalra dans l’État du Penjab, du 14 juillet 2005, qui contient manifestement de faux renseignements, comme [traduction] « la police harcelait Baljinder Kaur et l’interrogeait au sujet de son mari », démontre le manque de crédibilité de toute cette demande d’asile, ainsi que de la pièce d’identité produite au nom de demandeure d’asile adulte.

 

La lettre provient du comité de la mission de Khalra, dans l’État du Penjab, et non de la force de commando du Khalistan, qui est l’organisation dont faisait partie Rattandeep et qui a son siège au Pakistan. Elle ne provient pas d’un organisme de l’État d’origine de la demandeure d’asile adulte (Haryana). Aucun élément de preuve n’a été présenté à l’audience pour montrer les liens entre le comité de la mission de Khalra (l’auteur de la lettre) et la force de commando du Khalistan (l’organisation dont faisait partie Rattandeep).

 

 

 

Cinquièmement, les observations de la Cour au sujet de la lettre du comité de la mission de Khalra

 

[24]           Cette lettre, produite par le conseil des demanderesses devant la Commission, est un mensonge éhonté. La Cour s’étonne que le conseil ait produit une lettre que la demanderesse principale n’a jamais vue et dont elle n’a jamais entendu parler, et qu’elle qualifie de mensonge. De toute évidence, le conseil de la demanderesse principale recevait des instructions d’une personne autre que sa cliente lorsqu’il a présenté cette lettre et la demande d’asile.

 

[25]           Cette lettre n’est que l’une de plusieurs divergences importantes contenues dans la preuve. La Cour n’a nullement hésité à rejeter la demande à l’audience. Tout particulièrement, étant donné que l’argument relatif à la justice naturelle (« le changement dans l’ordre des interrogatoires »), en raison duquel l’autorisation a probablement été accordée, a été abandonné à l’audience par l’avocate lorsque je l’ai interrogée à cet égard.

L’article de journal

[26]           L’article de journal fourni par le conseil des demanderesses est un autre élément de preuve non contredit sur lequel s’est fondée la Commission; cet article contredit le témoignage rendu par la demanderesse principale au sujet de la date du mariage qu’elle aurait contracté et de ses connaissances sur les activités terroristes de son mari et du rôle qu’elle y aurait joué. L’un ou l’autre est un mensonge, soit l’article de journal, soit le témoignage de la demanderesse.

 

La carte de rationnement

[27]           Les demanderesses ont soutenu que, lorsqu’elle a examiné la pièce d’identité de la demanderesse principale, à savoir la carte de rationnement, la Commission a commis une erreur en ne justifiant pas sa décision de la rejeter au motif qu’elle était insuffisante, et que, si la Commission avait des doutes quant à l’authenticité de cette pièce d’identité, elle aurait alors dû en faire confirmer l’authenticité par des agents d’immigration.

 

[28]           Pour mettre en doute l’authenticité d’un document, la Commission peut faire des inférences fondées sur le bon sens en se demandant si le document constitue une preuve suffisante d’identité. Comme l’a exposé le juge Marcel Joyal dans la décision Culinescu, précitée, aux paragraphes 14 et 15 :

[14]     [Les requérants] soutiennent que la Commission avait l'obligation d'expertiser les documents qu'ils avaient déposés en preuve, surtout si elle avait des doutes quant à leur authenticité.

[15]      La Commission n'avait aucune obligation d'agir de la sorte. Il suffit qu'elle dispose de suffisamment d'éléments de preuve pour mettre en question l'authenticité de la citation à procès pour conclure que le témoignage des requérants était invraisemblable.           [Renvoi omis.]

 

 

La Cour a examiné la traduction de la carte de rationnement et la carte de rationnement elle‑même. Cet élément de preuve est contestable pour de nombreuses raisons que j’ai expliquées à l’avocate des demanderesses. À mon avis, la conclusion de la Commission, selon laquelle la carte de rationnement ne constituait pas une preuve suffisante pour établir l’identité de la demanderesse, n’était pas manifestement déraisonnable.

 

[29]           De plus, la référence qu’a faite la Commission à la carte de rationnement n’était pas essentielle à sa conclusion que la demanderesse principale n’était pas crédible. La carte de rationnement constitue une preuve supplémentaire du manque de crédibilité de la demanderesse principale.

 

[30]           Pour tous ces motifs, la présente demande sera rejetée. Les parties ont décidé que la présente demande ne soulevait pas de question qui devrait être certifiée et je suis du même avis.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

JUGEMENT

 

LA COUR STATUE QUE :

La présente demande de contrôle judiciaire est rejetée.

 

 

 

« Michael A. Kelen »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

 

Caroline Tardif, LL.B., B.A.Trad.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                                IMM-7574-05

 

INTITULÉ :                                                               BALJINDER KAUR VIRK ET AL.

                                                                                    c.

                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                         TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                       LE 8 JANVIER 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                                      LE JUGE KELEN

 

DATE DES MOTIFS :                                              LE 15 JANVIER 2008

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Krassina Kostadinov

 

             POUR LES DEMANDERESSES

Amy Lambiris

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Lorne Waldman

Waldman & Associates

Toronto (Ontario)

 

            POUR LES DEMANDERESSES

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

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