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Date : 20080114

Dossier : IMM-2296-07

Référence : 2008 CF 26

ENTRE :

Juan Rafael BARAJAS BERNAL

Gloria Concepci GOMEZ MORONES

Elias BARAJAS GOMEZ

Sara Isabel BARAJAS GOMEZ

 

Partie demanderesse

 

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

Partie défenderesse

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Pinard

[1]          Il s’agit ici d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision de la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la « SPR »), statuant que les demandeurs ne sont pas des réfugiés ou des personnes à protéger selon les définitions données aux articles 96 et 97 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. (2001), ch. 27.

 

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[2]          Les demandeurs sont des citoyens du Mexique qui sont venus au Canada le 14 juillet 2006 pour y présenter leurs demandes d’asile quelques jours plus tard. Les demandes sont basées sur les risques allégués par le demandeur principal, Juan Rafael Barajas Bernal (ci-après le demandeur).

 

[3]          Le demandeur était membre du Parti révolutionnaire institutionnel (le « PRI ») depuis 1993 et a travaillé pour cette organisation de 1997 à 2001. Il allègue avoir reçu, en 1994, les deux premiers tomes de l’enquête sur l’assassinat de Luis Donaldo Colosio Murrieta (ci-après « les documents Colosio »), le candidat pour le PRI dans l’élection de cette même année. Le demandeur a gardé une copie de ces documents à son domicile.

 

[4]          En avril 2001, il a été congédié par son employeur, mais a poursuivi ce dernier avec succès et a reçu un jugement favorable qui a ordonné à ce dernier de lui payer un montant d’argent important. L’acte d’exécution a été émis le 21 juin 2006.

 

[5]          Ce n’est que le 9 juillet 2006 que, selon le demandeur, ses problèmes ont commencé. Il dit avoir reçu un appel de Daniel Penaloza Duarte, un individu qui travaillait pour le PRI et qui a dit être entré dans sa maison, sous les ordres des hauts fonctionnaires du PRI, et y avoir trouvé les documents concernant l’assassinat de M. Colosio. Le demandeur ajoute que lorsque les officiels ont appris qu’il avait une copie de ces documents, ils ont ordonné à M. Duarte « to make me [le demandeur] and my family disappear. » Cette même journée, le demandeur dit avoir décidé de fuir, avec sa famille, au Canada.

[6]          Le 15 septembre 2007, le frère du demandeur a été tué dans la rue. Le demandeur allègue que le meurtre de son frère est lié aux menaces qu’il aurait lui-même reçues, considérant que son frère avait déposé une plainte auprès de la police du Mexique à l’effet que sa vie avait été menacée, le 5 septembre 2007, par deux hommes qui cherchaient le demandeur.

 

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[7]          Après avoir résumé les faits allégués, la SPR conclut que les difficultés entre le demandeur et le PRI concernant son emploi n’ont aucun lien avec la Convention. De plus, la SPR conclut que le demandeur n’est pas crédible concernant ni le conflit entre lui et le PRI, ni les documents Colosio.

 

[8]          La SPR souligne notamment que le demandeur et sa famille avaient déjà obtenu leurs passeports avant le 9 juillet 2006. Selon la SPR, l'explication de l'épouse du demandeur que la famille avait planifié un voyage à Cuba n'est pas convaincante. La SPR conclut que les demandeurs avaient l'intention de venir au Canada avant le 9 juillet 2006 et que les « important omissions, the inconsistencies and the general lack of credibility of the claimants » justifient le rejet de la demande d’asile.

 

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[9]          Les demandeurs prétendent que la SPR a erré en droit parce qu’elle a déterminé qu’ils n’ont démontré aucun lien avec la Convention, et ce, malgré la preuve sans équivoque qu’ils étaient menacés de mort au Mexique. À mon avis, la SPR n’a pas déterminé que les menaces de mort ne démontraient aucun lien avec la Convention. Sa décision est plutôt que, concernant le conflit relatif à son congédiement par le PRI, le demandeur n’a démontré aucun lien avec la Convention. À cet égard, je suis d’accord avec le défendeur que la conclusion de la SPR n’est nullement erronée et que de surcroît, cette même conclusion n’est pas déterminante puisque le tribunal n’a pas jugé cette partie de l’histoire crédible, tel qu’il appert des motifs de la décision.

 

[10]      Je note aussi que, contrairement aux prétentions des demandeurs, la SPR n'a pas « omis de mentionner la découverte d'un rapport d'analyse que le demandeur avait effectué plusieurs années auparavant et que les membres du PRI avaient trouvé dans son domicile. » La SPR considère cette découverte dans une section entière de la décision, intitulée « The Colosio Affair ».

 

[11]      Les problèmes soulevés par les demandeurs concernant la détermination de crédibilité de la SPR sont que, contrairement à la preuve, la SPR a déterminé que le demandeur a répondu pendant son témoignage de manière vague et évasive sur les questions de l’information contenue dans les documents Colosio ainsi que pour les circonstances entourant le meurtre de son frère.

 

[12]      La norme de contrôle applicable aux déterminations de la SPR concernant la crédibilité d’un demandeur est celle de la décision manifestement déraisonnable. La SPR peut baser sa décision sur le comportement d'un demandeur. La Cour, qui n’est « pas présent[e] lorsque la requérante a rendu son témoignage » et ne peut pas « surveiller son comportement de même que la façon dont elle répondait aux questions », doit se montrer d’une large retenue judiciaire (Lobo c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1995] A.C.F. no 597 au par. 13 (1re inst.) (QL)). La SPR peut aussi baser sa décision sur le fait que, contrairement au témoignage du demandeur, ce dernier avait l'intention de quitter son pays avant le début des problèmes qu’il allègue (Conte c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2005 CF 963, [2005] A.C.F. no 1212 (1re inst.) (QL)).

 

[13]      Sans nécessairement endosser toute l’analyse faite par la SPR des allégations du demandeur en rapport avec le meurtre de son frère, mon examen de la preuve complète ne me permet pas d’écarter l’appréciation faite par la SPR du comportement et de la façon de répondre du demandeur. De plus, à mon avis, la décision de la SPR peut raisonnablement être soutenue par sa conclusion que les demandeurs préparaient leurs départs du Mexique avant le 9 juillet 2006, la date où leurs problèmes auraient commencé. La SPR a clairement considéré l'explication de l'épouse du demandeur, voulant que la famille avait planifié un voyage à Cuba, mais ne l'a pas trouvé convaincante. Ainsi il n'était pas manifestement déraisonnable pour la SPR de conclure que la crédibilité des demandeurs était entachée.

 

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[14]      Pour toutes ces raisons, l’intervention de la Cour n’est pas justifiée et la demande de contrôle judiciaire est rejetée.

 

« Yvon Pinard »

Juge

 

Ottawa (Ontario)

Le 14 janvier 2008

 


 

 

 

 

COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-2296-07

 

INTITULÉ :                                       Juan Rafael BARAJAS BERNAL, Gloria Concepci GOMEZ MORONES, Elias BARAJAS GOMEZ, Sara Isabel BARAJAS GOMEZ c. LE MINISTRE DE LA

                                                            CITOYENNETÉ ET DE  L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 6 décembre 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT :            Le juge Pinard

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 14 janvier 2008

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Me Jean Cantin                                    POUR LA PARTIE DEMANDERESSE

 

Me Michèle Joubert                             POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Jean Cantin                                                                   POUR LA PARTIE DEMANDERESSE

Montréal (Québec)

 

John H. Sims, c.r.                                                         POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE

Sous-procureur général du Canada

 

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