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Date : 20071221

Dossier : IMM-727-07

Référence : 2007 CF 1357

Ottawa (Ontario), le 21 décembre 2007

EN PRÉSENCE DE MADAME LA JUGE DAWSON

 

ENTRE :

 

SOFYA DOSMAKOVA

 

 

demanderesse

 

et

 

LA MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ
ET DE L’IMMIGRATION

 

défenderesse

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Sofya Dosmakova est une citoyenne du Kazakhstan qui a demandé l’asile du fait de son orientation sexuelle, ainsi que de ses croyances religieuses en tant que musulmane devenue membre de l’Église chrétienne orthodoxe russe. Sa demande a été rejetée parce que la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission) a conclu que Mme Dosmakova manquait de crédibilité et lui avait présenté de faux documents.

 

[2]               La présente demande de contrôle judiciaire concernant cette décision est accueillie car, lorsqu’elle s’est prononcée sur la crédibilité de Mme Dosmakova, la Commission a manqué à son obligation d’équité envers cette dernière et a tiré un certain nombre de conclusions manifestement déraisonnables.

 

[3]               Le manquement à l’équité procédurale découle de difficultés subies lors d’une partie de l’audience relativement à la qualité des services d’interprétation fournis à Mme Dosmakova.

 

[4]               Au début de l’audience, la commissaire a commencé à interroger Mme Dosmakova. Le premier sujet abordé avait trait à la demande de protection fondée sur la conversion religieuse. Dès le début, il est devenu évident que l’interprète avait de la difficulté avec divers termes religieux, comme le « Carême ». L’interprète confondait aussi une église et une mosquée.

 

[5]               Voici les échanges qui ont eu lieu ensuite :

[traduction]

LA DEMANDERESSE :      Oui, dans les mosquées. Oui, il s’agit uniquement de messes célébrées en langue arabe.

 

LA COMMISSAIRE :    On ne dirait pas d’un office islamique qu’il s’agit d’une messe.

 

L’INTERPRÈTE :           C’est là encore une erreur de ma part, mais je ne sais pas vraiment quel serait le terme exact.

 

LA COMMISSAIRE :    Bien. Monsieur l’avocat?

 

L’AVOCAT :                    Oui?

 

LA COMMISSAIRE :    Que diriez-vous d’une petite réunion?

 

L’AVOCAT :                    Nous pourrions avoir un petit entretien.

 

L’INTERPRÈTE :           Si vous voulez changer – trouver quelqu’un d’autre, n’hésitez pas. Je ne m’y connais pas assez.

 

L’AVOCAT :                    Laissez-nous quelques minutes, si vous n’y voyez pas d’inconvénient.

 

LA COMMISSAIRE :    Oui, est-ce que cela vous convient?

 

L’AVOCAT :                    Quittez la pièce une minute toutes les deux.

 

LA COMMISSAIRE :    Les deux, s’il-vous-plaît?

 

L’AVOCAT :                    Vous pouvez amener votre eau.

 

LA COMMISSAIRE :    Étant donné que la moitié de sa demande est fondée sur la religion, si l’interprète […] ce qui m’inquiète, c’est que l’interprète ne connaît pas […]

 

L’AVOCAT :                    L’interprète a des problèmes avec les concepts religieux et manifestement – j’ai assisté à de nombreuses audiences avec cette interprète et elle est excellente.

 

LA COMMISSAIRE :    Oui, elle l’est.

 

L’AVOCAT :                    Mais, manifestement, et elle le sait, les termes religieux lui sont étrangers, et les distinctions ainsi que l’importance de ce qu’est une église, une mosquée, un sermon, ce ne sont pas des choses qu’elle saisit.

 

LA COMMISSAIRE :    Oui.

 

L’AVOCAT :                    Mais il y a deux façons de voir les choses. À mon avis, en bout de ligne, lorsque vous allez trancher cette demande, l’aspect religieux est aussi […] ce n’est pas un élément principal, je ne dirais même pas qu’il s’agit d’une moitié.

 

LA COMMISSAIRE :    Fort bien.

 

L’AVOCAT :                    En fait, c’est un à-côté. Je ne pense pas que l’on puisse faire valoir qu’au Kazakhstan une personne convertie serait persécutée ou courrait un danger de mort  pour avoir renoncé à l’Islam. Il n’est pas question ici de l’Iran.

 

LA COMMISSAIRE :    Non.

 

L’AVOCAT :                    Donc, dans la présente affaire, s’il y a bel et bien un motif de persécution, il faut que ce soit l’orientation sexuelle, et non la religion.

 

LA COMMISSAIRE :    Fort bien.

 

L’AVOCAT :                    Je me demande donc si nous ne pourrions peut-être pas mettre cet aspect de côté pour le moment […]

 

LA COMMISSAIRE :    Très bien.

 

L’AVOCAT :                    […] et nous concentrer sur ce qui constitue, selon moi, l’élément principal de la demande, pour lequel je me dis que l’interprète se débrouillera bien.

 

LA COMMISSAIRE :    Oui. Elle est une excellente interprète et […]

 

L’AVOCAT :                    Je ne voudrais pas que l’on trouve quelqu’un d’autre. Pour l’interprète, ce n’est pas juste non plus. Je l’aime bien et je sais qu’elle fait des efforts. Elle sait qu’elle n’est pas une experte dans ce domaine, et elle est la première à nous dire : « S’il vous faut quelqu’un d’autre, cela ne m’offusquera pas ».

 

LA COMMISSAIRE :    Oui. Oui.

 

L’AVOCAT :                    Mais je me demande s’il est vraiment nécessaire de faire un changement.

 

LA COMMISSAIRE :    Eh bien, voyons donc la question de l’orientation sexuelle, et [… ]

 

L’AVOCAT :                    Oui, il s’agit là du cœur de la demande et c’est là que se trouve la véritable crédibilité.

 

LA COMMISSAIRE :    Très bien.

 

L’AVOCAT :                    C’est ce que c’est. Disons, et je vous pose la question par curiosité, parce que je ne sais rien non plus sur cet aspect religieux. Cette prière dont vous parlez, de quoi s’agit‑il?

 

LA COMMISSAIRE :    Le Credo.

 

L’AVOCAT :                    Qu’est-ce que le Credo?

 

LA COMMISSAIRE :    C’est une prière qui dit : « Je crois en Dieu, le Père tout-puissant », ce genre de chose. Cette prière est légèrement différente dans chacune des religions chrétiennes, mais elle est prononcée à presque tous les offices, ainsi qu’en son fils, Jésus-Christ […]

 

L’AVOCAT :                    Et nous avons là un problème bien concret, parce qu’il nous semble que la demanderesse ne connaît pas cette prière, mais nous devons nous demander : est-ce qu’elle la connaît? Il est possible aussi qu’elle ne comprenne pas parce que l’interprète n’est pas […]

 

LA COMMISSAIRE :    C’est exact, oui.

 

L’AVOCAT :                    […] versée dans ce domaine. Mettons donc cet aspect de côté et, s’il faut que nous y revenions, nous pourrons alors décider s’il faudra trouver un autre interprète, parce que ce ne sera peut-être pas nécessaire. [Non souligné dans l’original.]

 

[6]               Après qu’il eut été demandé à Mme Dosmakova de revenir dans la salle d’audience, la commissaire lui a donné l’explication suivante :

[traduction

LA COMMISSAIRE :    […]

 

Pendant que vous étiez hors de la salle, votre avocat et moi avons discuté du fait que l’interprète n’est pas vraiment au courant des religions et de ce qu’un office religieux peut comporter. Cependant, votre avocat croit que l’élément fondamental de votre demande est votre orientation sexuelle et que votre conversion à l’Église orthodoxe est nettement moins importante.

 

LA DEMANDERESSE :      Oui, Mme [N] m’a aidé à comprendre cela.

 

LA COMMISSAIRE :    Bien. Nous allons poursuivre avec la même interprète, qui n’aura pas de problème avec cet aspect-là, et nous allons mettre de côté pour l’instant l’aspect religieux1. [Non souligné dans l’original.]

 

[7]               On constate donc que la commissaire a convenu que l’aspect religieux de la demande de Mme Dosmakova serait « [mis] de côté pour l’instant », et qu’elle a souscrit à la remarque de l’avocat qui représentait à l’époque Mme Dosmakova, à savoir que l’incapacité de sa cliente à expliquer les éléments de sa nouvelle religion était peut-être attribuable à une interprétation erronée.

 

[8]               Dans ces circonstances, la Commission a manqué à son obligation d’équité envers Mme Dosmakova lorsqu’elle s’est fondée sur l’incapacité de Mme Dosmakova d’expliquer sa religion pour conclure, dans ses motifs, que cette dernière ne connaissait presque rien de sa nouvelle religion et qu’elle n’était pas un membre pratiquant de l’Église orthodoxe russe.

 

[9]               La Commission s’est ensuite fondée sur cette conclusion, de même que sur « la corruption galopante endémique qui règle au Kazakhstan », pour n’accorder aucun poids au certificat de baptême de Mme Dosmakova. Toutefois, la preuve documentaire citée par la Commission à l’appui de cette conclusion ne disait rien à propos de l’existence de documents faux ou frauduleux au Kazakhstan. Il y était plutôt question de corruption gouvernementale de haut niveau, de pots-de-vin et de fraude électorale.

 

[10]           Il était manifestement déraisonnable pour la Commission de rejeter le certificat de baptême sur ce fondement.

 

[11]           La Commission a également tiré deux conclusions d’invraisemblance à propos du témoignage de Mme Dosmakova sur son orientation sexuelle. Ces conclusions sont les suivantes :

La demandeure d’asile a été interrogée au sujet de son orientation sexuelle. Elle a expliqué que, au Kazakhstan, l’homosexualité est mal perçue. À l’époque de l’Union soviétique, une personne pouvait être emprisonnée à cause de son homosexualité; aujourd’hui, aucune loi n’interdit l’homosexualité, mais elle est perçue comme un grave péché, et les gais doivent se cacher, tandis que l’existence des lesbiennes est un sujet tabou. La demandeure d’asile a été appelée à préciser à quel moment elle s’était rendu compte de son orientation sexuelle. Elle a répondu que ce n’était qu’à l’époque où ses relations sexuelles avec N ont commencé. Il s’agit d’une situation exceptionnelle, mais tout de même possible. Cependant, les affirmations de la demandeure d’asile doivent être probables, et non simplement possibles. Selon la prépondérance des probabilités, je crois que la plupart des homosexuels prennent conscience de leur orientation sexuelle pendant leur adolescence ou leur vie de jeune adulte, au moment de leurs premières expériences sexuelles, même s’ils ne veulent pas le reconnaître, s’ils veulent le cacher, ou s’ils espèrent changer. Plus tard dans leur vie, quand ils y réfléchissent, ils se rendent compte qu’ils avaient déjà cette orientation sexuelle, qu’ils avaient peut-être gardée cachée. Ce n’est pas le cas de la demandeure d’asile. Elle a découvert son orientation sexuelle uniquement au début de sa relation avec une autre femme. Dans son FRP, la demandeure d’asile affirmait qu’elle était heureuse avec son mari, même si elle était entourée de femmes. Cette constatation n’est pas déterminante, mais elle ajoute au manque de crédibilité de la demandeure d’asile.

 

La demandeure d’asile a affirmé, dans son témoignage, qu’elle était amie avec N depuis 1994, et qu’elle était tombée amoureuse d’elle en 2000, puis N a emménagé avec elle pour être plus près de son travail. La demandeure d’asile a été priée d’expliquer comment elle avait réagi en découvrant sa nouvelle orientation sexuelle. Elle a répondu qu’elle s’était sentie heureuse et comblée sur le plan sexuel, qu’elle était satisfaite de sa décision, et qu’elle n’avait aucun regret. Selon moi, cette allégation n’est pas crédible. La demandeure d’asile était une femme de 56 ans qui vivait dans une société qu’elle décrit comme homophobe. La rupture avec son ancien style de vie était radicale. J’estime que, selon la prépondérance des probabilités, si la demandeure d’asile avait soudainement découvert qu’elle était lesbienne dans de telles circonstances, elle aurait réagi différemment. Sa réaction émotive n’est pas celle d’une personne raisonnable et avisée. Selon la prépondérance des probabilités, même si la demandeure d’asile n’a aucun regret concernant sa relation avec N, il aurait été normal de s’attendre à ce qu’elle exprime certaines réserves concernant ses sentiments au départ. Je conclus donc que, selon la prépondérance des probabilités, la demandeure d’asile n’est pas un témoin crédible ni digne de foi.

 

[12]           La Cour a affirmé à maintes reprises que l’on ne peut pas tirer de conclusions d’invraisemblance en se fondant sur des attitudes stéréotypées ou un comportement prévu que la preuve n’étaie pas. Voir, par exemple, Boteanu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2003] A.C.F. no 424; Slim c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2004] A.C.F. no 879; Herrera c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2005] A.C.F. no 1499; Kamau c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2005] A.C.F. no 1505.

 

[13]           En l’espèce, je conclus que le dossier ne renferme aucune preuve établissant que les attitudes et le comportement que la Commission attendait de Mme Dosmakova étaient probables. Les deux conclusions d’invraisemblance que la Commission a tirées et qui sont exposées dans l’extrait qui précède ne sont donc pas appuyées par la preuve et elles sont manifestement déraisonnables.

 

[14]           La Commission a ensuite conclu que Mme Dosmakova n’était pas un témoin crédible ou digne de foi parce qu’elle n’avait pas expliqué « de quelle façon d’autres personnes avaient découvert sa présumée relation homosexuelle » et parce qu’elle avait présumé que la police avait appris qu’elle était lesbienne en interrogeant ses voisins. Ces conclusions posent problème, car la Commission n’explique pas comment il se fait que Mme Dosmakova était censée savoir de quelle façon d’autres personnes avaient appris ce qu’elles savaient ou soupçonnaient.

 

[15]           En outre, Mme Dosmakova a déclaré ce qui suit :

 

·        sa conjointe et elle vivaient ensemble;

·        les deux allaient partout ensemble, y compris lorsqu’elles rendaient visite à des membres de leur famille;

·        elles passaient tous leurs temps libres ensemble, y compris lorsqu’elles allaient à l’église ou prenaient un congé;

·        elles étaient allées à une soirée où elles avaient pris place à une table, avaient mangé et avaient parlé ensemble, et c’était après qu’elles avaient commencé à vivre ensemble que les gens avaient commencé à poser des questions sur leur relation.

 

[16]           Compte tenu de cette preuve et de la difficulté que comporte habituellement en soi le fait d’apprendre comment d’autres personnes ont acquis certaines connaissances, il était manifestement déraisonnable pour la Commission de conclure que Mme Dosmakova n’était pas crédible parce qu’elle n’avait pas expliqué de quelle façon d’autres personnes avaient pris connaissance de sa relation.

 

[17]           La Commission n’a accordé aucun poids à deux rapports médicaux que Mme Dosmakova a produits afin de corroborer son témoignage sur une agression dont elle avait été victime. La Commission a conclu qu’il s’agissait de faux documents parce que la corruption est endémique au Kazakhstan2 et qu’« une personne informée ne s’attendrait raisonnablement pas à retrouver ce niveau de langue dans un rapport médical prétendument rédigé par des médecins, même en tenant compte des différences culturelles ». Au nombre des exemples donnés par la Commission figure le fait qu’il était question dans un des rapports d’une « fracture fermée de l’os de l’épaule droite » (le tribunal s’attendait à ce que le médecin utilise le terme médical désignant l’os de l’épaule), tandis que, dans l’autre, on pouvait lire : « [e]lle est malade depuis mars 2005, après avoir subi des blessures corporelles ».

 

[18]           La Commission n’a pas accordé de poids non plus à un rapport de police - qu’elle a considéré comme faux - concernant l’agression dont Mme Dosmakova dit avoir été victime. Là encore, la Commission a fait abstraction de ce document parce que « le niveau de langue du rapport est si peu professionnel que celui-ci perd toute crédibilité ». La Commission a cité l’exemple suivant, tiré du rapport : « Oui, il y a vraiment un cas d’agression contre vous, et vous avez été battue par des personnes non identifiées d’origine asiatique, pendant le jour, à l’endroit mentionné ci-dessus ».

 

[19]           Ces rapports ont tous été produits en langue kazakhe, accompagnés d’une traduction. La Commission n’a malheureusement pas fait état de ses doutes sur ces documents à l’audience, ce qui aurait permis à Mme Dosmakova de faire valoir, comme elle l’a fait dans le cadre de la présente demande, que le niveau de langue utilisé était celui du traducteur et non celui des auteurs des documents. Si la Commission avait fait part de ses doutes à l’audience, cela lui aurait également permis de demander à l’interprète présente à l’audience de traduire elle‑même les documents afin de voir, par exemple, si le terme médical désignant l’os de l’épaule se trouvait en fait dans le rapport médical.

 

[20]           À mon avis, il était injuste et manifestement déraisonnable pour la Commission de rejeter ces documents sans permettre à Mme Dosmakova de dissiper ses doutes.

 

[21]           Ces erreurs sont au cœur de la décision de la Commission concernant la crédibilité, et je ne suis pas convaincue que sa conclusion aurait été la même si elle n’avait pas commis ces erreurs. Pour cette raison, la demande de contrôle judiciaire est accueillie.

 

[22]           Mme Dosmakova soutient qu’il existe en l’espèce des raisons spéciales qui justifient qu’on lui accord les dépens. Elle dit que la ministre a prolongé inutilement l’instance en ne consentant pas à sa demande de réparation, et qu’il aurait fallu accorder ce consentement au vu des manquements évidents à l’équité procédurale.

 

[23]           À mon avis, les arguments de la ministre ne sont pas à ce point dénués de fondement que je puis conclure à une prolongation indue de l’instance. Plus particulièrement, la ministre a fait valoir que Mme Dosmakova, par les mesures que son avocat de l’époque avait prises, avait renoncé au droit de se plaindre de la qualité des services d’interprétation parce que cela avait une incidence sur l’équité de l’audience tout entière. Cependant, vu mon opinion sur la présente affaire, il ne s’agit pas là d’une question que j’avais à trancher. En définitive, aucuns dépens ne sont adjugés.

 

[24]           Les avocats n’ont posé aucune question à certifier sur les points que j’ai tranchés, et je conviens que la présente affaire n’en soulève aucune.

 

JUGEMENT

 

LA COUR STATUE que :

 

1.         La demande de contrôle judiciaire est accueillie et la décision de la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié, datée du 23 janvier 2007, est annulée.

 

2.         L’affaire est renvoyée à un tribunal différemment constitué de la Section de la protection des réfugiés pour que celui-ci rende une nouvelle décision.

 

 

 

« Eleanor R. Dawson »

Juge

Traduction certifiée conforme

David Aubry, LL.B.

 

________________________________

 

 

1.         Par souci d’exhaustivité, je fais remarquer que le témoignage de Mme Dosmakova à l’audience tenue devant la Commission n’étayait pas l’opinion de l’avocat qui la représentait à l’époque, à savoir que l’aspect religieux de sa demande d’asile n’était pas important. C’est ce qui ressort de l’échange suivant, qui a eu lieu tout de suite après que la commissaire eut déclaré que l’aspect religieux de la demande serait [traduction] « [mis] de côté pour l’instant » :

 

[traduction]

L’AVOCAT :                    Si vous me permettez de poser une seule question, juste pour clore le sujet, cela pourrait être utile.

 

LA COMMISSAIRE :    Allez-y.

 

L’AVOCAT :                    Mme Dosmakova - ceci n’est qu’une  hypothèse – écoutez ma question et dites-moi ce que vous en pensez – disons que vous n’êtes pas lesbienne, c’est une hypothèse, [N] et vous êtes justes de bonnes amies, pas des amantes, et votre amie et vous allez à l’église et vous vous faites baptiser. Pensez‑vous que vous seriez victimes de persécution et de violence physique et que […] pensez-vous que votre vie serait en danger simplement parce que vous pratiquez la religion chrétienne au Kazakhstan?

 

LA DEMANDERESSE :      Vous savez quoi? Je dois dire que oui, j’ai reçu des appels téléphoniques où – on me disait de me débarrasser du crucifix.

 

L’AVOCAT :                    La croix.

 

L’INTERPRÈTE :           La croix.

 

L’AVOCAT :                    Mme Dosmakova, écoutez bien la question qui vous est posée. Vous devez y répondre par oui ou par non. Pensez-vous que le fait de vous être convertie et de fréquenter l’église serait en soi suffisant pour que vous soyez persécutée dans votre pays, pour que vous craignez pour votre vie?

 

LA DEMANDERESSE :      Je pense que ce ne serait pas assez –

 

L’AVOCAT :                    Merci. C’est tout ce que je voulais savoir. Vous serez donc d’accord avec moi pour dire que, sans l’élément de l’orientation sexuelle non traditionnelle, vous auriez peut-être des problèmes, mais ceux-ci ne menaceraient pas votre vie?

 

LA DEMANDERESSE :      Ce ne serait pas aussi grave que ce qui m’est arrivé. On me détesterait […]

 

L’AVOCAT :                    Excusez-moi. Madame, écoutez mes questions et répondez-y seulement. Comprenez-vous? Je vous ai posé une question. Il s’agit d’une question simple. Pensez-vous que votre vie serait en danger, votre vie […]

 

LA DEMANDERESSE :      Oui.

 

L’AVOCAT :                    Non, non, non. À cause de vos pratiques religieuses?

 

LA DEMANDERESSE :      Oui.

 

L’AVOCAT :                    Je ne crois pas qu’elle saisit. Je pense que je vais mettre cela de côté pour le moment.

 

2.         Pour étayer cette conclusion, la Commission s’est reportée à la même preuve documentaire que celle dont il est question au paragraphe 9 ci-dessus.

 

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                    IMM-727-07

 

INTITULÉ :                                                   SOFYA DOSMAKOVA

                                                                        c.

                                                LA MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET

                                                DE L’IMMIGRATION                                         

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                            TORONTO (ONTARIO)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           LE 5 DÉCEMBRE 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                          LA JUGE DAWSON

 

DATE DES MOTIFS :                                  LE 21 DÉCEMBRE 2007

 

COMPARUTIONS :

 

Michael F. Battista                                          POUR LA DEMANDERESSE

 

Negar Hashemi                                               POUR LA DÉFENDERESSE

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Jordan Battista LLP                                         POUR LA DEMANDERESSE

Avocats

Toronto (Ontario)

 

John H. Sims, c.r.                                            POUR LA DÉFENDERESSE

Sous-procureur général du Canada

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