Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

Date : 20071130

Dossier : T-1796-07

Référence : 2007 CF 1257

Ottawa (Ontario), le 30 novembre 2007

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE HARRINGTON

 

 

ACTION RÉELLE EN MATIÈRE D’AMIRAUTÉ CONTRE LE NAVIRE

IMMATRICULÉ SOUS LE NUMÉRO QFY10703E709 ET SON NAVIRE-JUMEAU, IMMATRICULÉ SOUS LE NUMÉRO QFY96003E507

et ACTION PERSONNELLE CONTRE SPLASH HOLDINGS LTD.

 

ENTRE :

F.C. YACHTS LTD.

demanderesse

et

 

LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES

AYANT UN DROIT SUR LE NAVIRE IMMATRICULÉ

SOUS LE NUMÉRO QFY10703E709 ET SON NAVIRE-JUMEAU,

IMMATRICULÉ SOUS LE NUMÉRO QFY96003E507

et SPLASH HOLDINGS LTD.

 

défendeurs

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               À première vue, la présente action est fort inusitée. Un propriétaire de navire a saisi son propre navire en vue de formuler une réclamation contre le créancier hypothécaire, qu’il qualifie de « véritable propriétaire ». Le créancier hypothécaire affirme que cela ne peut être fait et qu’il n’est pas le véritable propriétaire. Il a saisi la Cour d’une requête visant à faire annuler la saisie. J’en suis arrivé à la conclusion que le créancier hypothécaire a raison.

 

[2]               La demanderesse, F.C. Yachts Ltd., est en train de construire deux yachts pour le compte de la personne morale défenderesse Splash Holdings Ltd., qui n’aurait pas effectué les paiements partiels exigibles pour le second yacht. D’où l’action personnelle qui a été intentée contre elle et qui relève de la compétence de notre Cour puisque, pour reprendre le libellé de l’alinéa 22(2)n) de la Loi sur les Cours fédérales, il s’agit d’une « demande fondée sur un contrat de construction, de réparation ou d’équipement d’un navire ».

 

[3]               Le premier yacht, immatriculé sous le numéro QFY96003E507, et qui est couramment désigné sous le nom de « 100 » étant donné qu’il a 100 pieds de longueur, en est à une étape avancée de sa construction et a, pour le moment, une valeur beaucoup plus élevée que le second yacht, le « 107 ». F.C. Yachts a introduit une action réelle contre les deux yachts. Elle a fait saisir le 100, en tant que navire-jumeau du 107, le navire qui fait l’objet de la présente action. Dans les documents contractuels (un contrat distinct par yacht), F.C. Yachts est qualifiée de propriétaire. C’est ainsi qu’elle figure dans les registres publics conservés par le registrateur des navires. Toutefois, une fois le contrat exécuté et le paiement effectué, F.C. Yachts est tenue de livrer le yacht et d’en transférer le titre de propriété à Splash. Splash s’est à son tour vue accorder par F.C. Yachts, en tant que constructeur, certaines garanties sur les yachts en cas de défaut au cours des travaux de construction. Elle détient une hypothèque sur bâtiment en construction sur chacun des yachts.

 

[4]               Si Splash était la propriétaire inscrite des yachts (un navire en construction est « inscrit » plutôt qu’« enregistré » dans les registres publics), F.C. Yachts aurait pu intenter une action réelle contre le 107 et aurait pu saisir le 100 en tant que navire-jumeau. Elle doit cependant composer avec les contrats qu’elle a signés et j’estime qu’elle ne peut poursuivre ni l’un ni l’autre des yachts par voie d’action réelle. Bien que la propriété comporte des avantages, force est de constater, vu les faits de la présente affaire, que F.C. Yacht aurait été dans une meilleure position si elle avait obtenu une hypothèque sur bâtiment en construction, voire même si elle ne détenait aucune garantie.

 

[5]               La demanderesse fonde sa demande sur l’article 43 de la Loi sur les Cours fédérales, qui porte sur la compétence réelle et personnelle de notre Cour en matière d’amirauté. C’est la compétence réelle de la Cour qui est contestée en l’espèce. Le paragraphe 43(2) prévoit que la Cour peut exercer sa compétence en matière réelle dans toute action portant sur un navire. Malgré ce libellé général, il est de jurisprudence constante que le droit réel prévu par la loi qui n’est pas accompagné d’un privilège maritime ne donne ouverture à une action réelle que si la responsabilité personnelle du propriétaire est engagée (Westcan Stevedoring Ltd. c. Armar (Le), [1973] A.C.F. 152, [1973] C.F. 1232, Mount Royal/Walsh Inc. c. Jensen Star (Le)(C.A.), [1990] 1 C.F. 199, 99 N.R. 42 (C.A.F.), Maritima De Ecologia, S.A. de C.V. c. Maersk Defender (Le), [2007] A.C.F. 709, 366 N.R. 162). La question qu’il y a donc lieu de se poser est la suivante : qui est le propriétaire?

 

[6]               Les paragraphes 43(3) et 43(8) prévoient par ailleurs ce qui suit :

43. (3) Malgré le paragraphe (2), elle ne peut exercer la compétence en matière réelle prévue à l'article 22, dans le cas des demandes visées aux alinéas 22(2) e), f), g), h), i), k), m), n), p) ou r), que si, au moment où l'action est intentée, le véritable propriétaire du navire, de l'aéronef ou des autres biens en cause est le même qu'au moment du fait générateur.

 

(8) La compétence de la Cour fédérale peut, aux termes de l'article 22, être exercée en matière réelle à l'égard de tout navire qui, au moment où l'action est intentée, appartient au véritable propriétaire du navire en cause dans l'action.

 

43. (3) Despite subsection (2), the jurisdiction conferred on the Federal Court by section 22 shall not be exercised in rem with respect to a claim mentioned in paragraph 22(2)( e), ( f), (g), (h), (i), ( k), ( m), ( n), ( p) or (r) unless, at the time of the commencement of the action, the ship, aircraft or other property that is the subject of the action is beneficially owned by the person who was the beneficial owner at the time when the cause of action arose.

 

(8) The jurisdiction conferred on the Federal Court by section 22 may be exercised in rem against any ship that, at the time the action is brought, is beneficially owned by the person who is the owner of the ship that is the subject of the action.

 

La question modifiée à laquelle il faut répondre est donc la suivante : qui est le véritable propriétaire?

 

[7]               Comme la demande fondée sur un contrat de construction de navire ne comporte pas de privilège maritime, le paragraphe 43(3) exige que, pour pouvoir intenter une action réelle, il ne doit pas y avoir eu de changement de propriétaire entre le moment du fait générateur du litige et celui où l’action a été introduite. Dans le cas qui nous occupe, il n’y a jamais eu de changement en ce qui concerne le propriétaire légal ou le véritable propriétaire.

 

[8]               Pour déterminer si Splash est le véritable propriétaire, il faut recourir aux contrats de construction des navires. Splash invoque les articles 221 et 488 des Règles des Cours fédérales. Dans la mesure où la requête repose sur l’argument que la déclaration ne révèle l’existence d’aucune cause d’action réelle valable, aucune preuve n’est admissible. Il est toutefois permis de présenter des éléments de preuve si la requête est fondée sur l’argument, par exemple, que l’action est vexatoire ou qu’elle constitue un abus de procédure. La mauvaise foi n’est en tout cas pas alléguée. L’article 488 des Règles prévoit que lorsqu'un navire autre que celui contre lequel l'action est intentée a été saisi, le propriétaire ou toute autre personne qui a un droit sur le navire (c.-à-d. le créancier hypothécaire) peut saisir la Cour d’une requête visant à obtenir la mainlevée de la saisie du navire. Comme les requêtes sont habituellement accompagnées d’affidavits, j’estime que les affidavits déposés par les parties sont pertinents.

 

[9]               La saisie d’un bien maritime, comme un navire ou de la cargaison, a pour effet d’interrompre le commerce. Les modalités de la saisie devraient par conséquent être arrêtées sans délai. La partie 13 des Règles des Cours fédérales, qui commence à l’article 475, prévoit la possibilité de présenter d’autres requêtes, ce qui pourrait conduire à la fixation du montant de la garantie d'exécution ou à la mainlevée de la saisie des biens, en tout temps, avec ou sans garantie d’exécution. Il ne s’ensuit pas pour autant que toutes les questions se rapportant à la saisie du bien, y compris l’annulation du mandat, peuvent être traitées dès le début de l’instance. Il peut se présenter des cas où les faits ne sont pas clairs ou bien où la thèse juridique est inextricablement liée aux faits en question, au point où il n’est pas possible de rendre une décision par voie sommaire (voir, par exemple, l’arrêt rendu par la Cour d’appel de l’Ontario dans l’affaire Law Society of Upper Canada c. Ernst & Young (2003), 65 O.R. (f3d) 577, 222 D.L.R. (4th) 577). Nous ne sommes toutefois pas en présence d’un de ces cas.

 

[10]           La propriété du navire lors de la construction de celui-ci est, entre le constructeur et l’acquéreur, une question qui relève de la liberté de contracter. Comme les parties ont clairement exprimé leur volonté, il n’est pas nécessaire de citer la Sale of Goods Act, 1893 (du R.-U.), qui fait partie du droit maritime canadien (ITO-International Terminal Operators Ltd. c. Miida Electronics Inc., [1986] 1 R.C.S. 752, 28 D.L.R. (4th) 641), ou la British Columbia Sale of Goods Act, puisque les contrats doivent être interprétés [traduction] « selon les lois de la province de la Colombie‑Britannique et les lois du Canada qui s’y appliquent ».

 

[11]           Il existe deux décisions qui illustrent bien ce principe : Sir James Laing & Sons Limited c. Barclay, Curle & Co., Limited, [1908] A.C. 35, un arrêt de la Chambre des lords, qui était saisie de l’appel d’un jugement de la Court of Session d’Écosse, et Re Blyth Shipbuilding and Dry Docks Company Limited, Forster c. Blyth Shipbuilding and Dry Docks Company Limited, [1926] 1 Ch. 494 (C.A.). Dans l’affaire Sir James Laing, la question du droit de propriété n’était pas directement abordée dans le contrat. Le contrat stipulait toutefois que le navire ne serait livré et finalement accepté qu’une fois que les conditions prévues au contrat seraient remplies et que les essais de navigabilité au long cours seraient effectués. Puis, sur constitution d’une garantie bancaire pour le paiement partiel final, les « certificats habituels » seraient délivrés. Le tribunal a jugé que la volonté des parties était que le droit de propriété ne soit pas transmis avant la livraison. Voici les propos qu’a tenus le lord juge Loreburn à la page 43 :

[traduction]

 

Je crois que le contrat visait un navire dont les travaux de construction seraient achevés et que le risque reposait sur le constructeur jusqu’au moment de la livraison et que les parties n’avaient pas l’intention de livrer le bien ou de s’en départir tant que les travaux de construction ne seraient pas achevés.

 

 

[12]           Dans l’affaire Re Blyth, tout comme dans l’affaire Sir James Laing, le prix d’achat était acquitté par versements. Le contrat prévoyait toutefois expressément que, dès que les acquéreurs auraient effectué le premier versement, le navire et tous les matériaux y afférents deviendraient la propriété absolue des acquéreurs, sous réserve du privilège du constructeur. Il a été jugé que le droit de propriété sur le navire en cours de construction avait été transmis aux acquéreurs (voir Halsbury's Laws of England, 4e éd., vol. (43(1)), page 113, para. 159).

 

[13]           Le contrat relatif au navire 107, qui comporte une entente de construction d’un yacht ainsi qu’une convention de garantie complétée par une hypothèque sur bâtiment en construction,  prévoit le paiement de versements échelonnés au cours des travaux de construction et il prévoit la livraison du navire à la suite des essais de navigabilité au long cours. Lors de la livraison, le constructeur est notamment tenu de remettre un acte de vente. Le contrat prévoit expressément que le constructeur est titulaire du droit de propriété durant la construction et que le titre de propriété et le risque ne sont transférés que lors de la livraison. En revanche, F.C. Yachts a, en tant que propriétaire, constitué en faveur de Splash l’hypothèque sur bâtiment en construction susmentionnée. À mon avis, les droits que Splash Holdings possède sur le yacht 107 correspondent en tous points à ce qui est stipulé au contrat. Elle est la créancière hypothécaire. Elle n’est pas la véritable propriétaire au sens du paragraphe 43(3) de la Loi sur les Cours fédérales. Aucune fiducie n’a été constituée.

 

[14]           On pourrait soutenir qu’il y a lieu d’établir une distinction entre les affaires Sir James Laing et Blyth parce qu’elles n’expliquent pas à fond les distinctions pouvant exister entre le propriétaire légal et le véritable propriétaire. D’ailleurs, à moins que des faits contraires ne soient allégués, on suppose que le propriétaire inscrit est à la fois le propriétaire légal et le véritable propriétaire. Bien que, du point de vue de la taxe sur les produits et services, il pouvait être avantageux pour l’acquéreur étranger de ne se voir dévolu le titre de propriété qu’une fois le bien livré à l’extérieur du Canada, il ne s’ensuit pas pour autant que F.C. Yachts détenait le titre de propriété au profit de l’acquéreur. Elle détenait le titre pour son propre profit. Malgré le fait que F.C. Yachts était tenue, aux termes du contrat, de remettre un acte de vente une fois que Splash avait rempli ses propres obligations, Splash n’avait à l’égard du navire que les droits d’un acquéreur, sans possession, d’un navire existant, aux termes d’un contrat de vente qui prévoyait que le titre de propriété n’était transmis que sur livraison.

 

[15]           L’affaire la plus pertinente est l’arrêt Jensen Star, précité, de la Cour d’appel fédérale. La demanderesse avait formulé une série de réclamations fondées sur l’alinéa  22(2)n) de la Loi en se fondant sur des contrats se rapportant à des réparations et matériaux fournis à un navire. Elle ne bénéficiait donc pas d’un privilège maritime. Entre la date des faits générateurs du litige et celle à laquelle l’action avait été introduite, le propriétaire du navire, Jensen Shipping Limited, avait obtenu un refinancement et avait vendu le navire à une nouvelle société, Jensen Holdings Limited, dont les actions étaient réparties entre plusieurs personnes. Jensen Marine Holdings Ltd. a aussitôt signé un contrat d'affrètement coque nue ayant pour effet de rétrocéder le navire à Jensen Shipping. Malgré le fait que le propriétaire du navire avait une action personnelle contre Jensen Shipping Limited pour les factures antérieures à la vente, il était irrecevable à intenter une action réelle. Bien que Jensen Shipping fût à la fois la propriétaire légale et la véritable propriétaire du Jensen Star avant la vente, elle n’en était pas demeurée la véritable propriétaire parce qu’elle en était l’affréteur coque nue ou l'affréteur par voie de cession à bail.

 

[16]           La Cour d’appel fédérale a déclaré, sous la plume du juge Marceau, aux pages 209 et 210 :

14     Le problème, toutefois, c'est que je ne comprends tout simplement pas comment un juge pourrait supposer que le législateur a pu vouloir inclure l'affréteur par voie de cession à bail dans l'expression « beneficial owner » qui figure au paragraphe 43(3). Quel que soit le sens du qualificatif « beneficial », le terme « owner » est normalement utilisé uniquement pour désigner celui qui possède un titre dans la chose elle-même, titre qui comporte principalement le droit d'aliéner la chose. Le terme français correspondant « propriétaire » est tout aussi clair. Ces mots ne sauraient désigner la possession d'un affréteur par voie de cession à bail. À mon avis, l'expression « beneficial owner » a été choisie pour indiquer que dans un système d'enregistrement des droits de propriété, il faut regarder au-delà du nom inscrit dans le registre. On ne saurait cependant remonter jusqu'à l'affréteur par voie de cession à bail, qui n'a aucun droit en equity ou à titre de propriétaire susceptible de grever le titre du propriétaire inscrit. Selon moi, cette expression permet d'inclure celui qui se dissimule derrière le propriétaire inscrit lorsque celui-ci sert purement d'intermédiaire, par exemple un fiduciaire, un ayant droit ou un mandataire. L'équivalent français « véritable propriétaire » (qui figure dans la refonte de 1985, L.R.C. (1985), chap. F-7) ne laisse subsister aucun doute à cet égard.

 

 

[17]           Certes, celui qui possède, en vertu d’un contrat, le droit d’acquérir ultérieurement un navire, en supposant que toutes les conditions soient réunies, ne peut être considéré comme un propriétaire. Alors qu’il siégeait comme juge de première instance, le juge Marceau avait antérieurement jugé que celui qui acquiert un navire en vertu d’un contrat qui prévoit que le titre de propriété est transféré lors de la livraison n’en est pas le propriétaire (Magnolia Ocean Shipping Corporation c. Soledad Maria (Le), T-744-81, 30 avril 1981).

 

[18]           La distinction entre un droit réel prévu par la loi, qui exige que l’intéressé soit le véritable propriétaire à deux moments différents, et un privilège maritime, qui ne comporte pas cette exigence, s’explique par des raisons d’ordre historique. La plupart des privilèges maritimes sont nés avant l’adoption, au Royaume-Uni, des Admiralty Acts de 1840 et de 1861. Par la suite, les réclamations ne bénéficiaient habituellement que d’un droit réel prévu par la loi, qui a plus récemment été étendu aux navires-jumeaux. Dans l’arrêt Jensen Star, le juge Marceau cite l’arrêt Coastal Equipment Agencies Ltd. c. Comer (Le), [1970] R.C. de l’Éch. 13, dans lequel le juge Noël retrace l’essentiel de l’évolution de ces privilèges et de ces droits (voir également l’affaire Anglo‑Soviet Shipping Company c. Beldis (The) (1936), 53 Ll. L. Rep. 255 (C.A.) qui était formulée comme une action réelle intentée contre un navire-jumeau).

 

[19]           Je souscris à la proposition de F.C. Yachts suivant laquelle l’enregistrement ─ ou, dans le cas qui nous occupe, l’« inscription » ─ n’est pas déterminant et que la Cour doit vérifier toutes les circonstances ayant une incidence sur le droit de propriété des yachts. Toutefois, l’affaire Robillard c. Saint-Roch (Le), (1921) 21 R.C. de l’Éch. 132, illustre bien le type de circonstances dans lesquelles on peut être le véritable propriétaire d’un navire qui est enregistré au nom de quelqu’un d’autre. Dans cette affaire, la vente du navire avait été annulée, car l’acquéreur savait que le vendeur, le propriétaire enregistré, commettait une fraude envers le véritable propriétaire. Le juge de première instance a conclu que les propriétaires enregistrés n’étaient que des intermédiaires, des fiduciaires ou des prête-noms qui détenaient le titre de propriétaires au profit du véritable propriétaire. Dans l’arrêt Antares Shipping Corp. c. Capricorn (Le), [1980] 1 R.C.S. 553, 111 D.L.R. (3d) 289, on a renvoyé favorablement à cette affaire. Une chose est sûre : F.C. Yachts n’a agi d’aucune manière comme prête-nom de Splash.

 

[20]           Malgré les légères différences constatées entre le libellé des deux contrats, le contrat relatif au navire-jumeau, le 100, va dans le même sens. F.C. Yachts est à la fois le propriétaire légal et le véritable propriétaire des deux navires et il ne peut donc saisir ni l’un ni l’autre. En conséquence, il n’est pas nécessaire que j’examine l’autre moyen invoqué par Splash, en l’occurrence que, pour pouvoir saisir un navire-jumeau, le véritable propriétaire doit en conséquence être le propriétaire enregistré du navire qui fait l’objet de l’action. Splash se fonde sur le jugement rendu par le juge Rothstein, maintenant juge à la Cour d’appel, dans l’affaire Hollandcshe Aannaming Maatschappij c. Ryan Leet (Le), [1997]  A.C.F. 1098, [1997] 135 F.T.R. 67. Le protonotaire Hargrave a établi une distinction entre l’affaire dont il était saisi et le jugement Ryan Leet dans Norcan Electrical Systems Ltd. (exerçant ses activités sous la dénomination de Feeding Systems Canada) c. Feeding Systems A/S, [2003] 4 F.C. 938, [2003] A.C.F. 904, et dans l’affaire Royal Bank of Scotland plc c. Golden Trinity (Le), [2004] A.C.F. 992, 254 F.T.R.1, au motif qu’il existait une différence marquée entre la version anglaise et la version française du paragraphe 43(8) et que seule la version anglaise semblait avoir été soumise au juge Rothstein.

 

[21]           Aussi horripilant que le paragraphe 43(8) de la Loi sur les Cours fédérales puisse être, notamment en raison de son emploi du terme « beneficially » plutôt que du mot « veritable » dans sa version anglaise, il n’est pas nécessaire que je l’interprète pour en arriver à une conclusion. Il est préférable d'attendre une autre occasion pour examiner cette question.

 

[22]           Pour ces motifs, les conclusions de la déclaration relatives aux demandes réelles sont radiées, le mandat de saisie est annulé et la saisie du navire 100 est levée sous réserve de l’envoi d’un préavis aux personnes qui ont déposé un caveat, le tout avec dépens. Les autres réparations que F.C. Yachts peut réclamer n’ont pas été portées à ma connaissance et la présente décision n’a aucune incidence sur elles.


ORDONNANCE

 

LA COUR, STATUANT SUR LA REQUÊTE présentée par Splash Holdings Ltd., ORDONNE :

1.         L’intitulé de la cause est modifié comme suit :

ENTRE :

F.C. YACHTS LTD.

demanderesse

et

SPLASH HOLDINGS LTD.

défenderesse

2.         Le paragraphe 7 de la déclaration modifiée de nouveau est radié, sans autorisation de le modifier.

3.         L’action réelle est rejetée en entier contre les deux navires.

4.         Le mandat de saisie du navire immatriculé sous le numéro QFY96003E507 est annulé, et la saisie de ce navire est levée sous réserve de l’envoi d’un avis à ceux qui ont déposé un caveat-mainlevée, conformément au paragraphe 493(2) des Règles.

5.         Les dépens de la requête en sa faveur sont fixés à la somme de 2 500 $, payables quelque soit l’issue de la cause.

 

« Sean Harrington »

Juge

 

Traduction certifiée conforme

Christiane Bélanger, LL.L.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

DOSSIER :                                        T-1796-07

 

INTITULÉ :                                       F.C. YACHTS LTD. c.

LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES  AYANT UN DROIT SUR LE NAVIRE IMMATRICULÉ SOUS LE NUMÉRO QFY10703E709 ET SON NAVIRE-JUMEAU IMMATRICULÉ SOUS LE NUMÉRO QFY96003E507 ET AL.

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 VANCOUVER (COLOMBIE-BRITANNIQUE)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               LE 19 NOVEMBRE 2007

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                       LE JUGE HARRINGTON

 

DATE DES MOTIFS :                      LE 30 NOVEMBRE 2007

 

COMPARUTIONS :

 

Me W. Gary Wharton

 

POUR LA DEMANDERESSE

Me Michael J. Bird

 

Me James D. Fraser

 

POUR LA DÉFENDERESSE,

Splash Holdings Ltd.

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Bernard & Partners

Avocats

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

POUR LA DEMANDERESSE

Bull, Housser & Tupper s.r.l.

Avocats

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

Lawson Lundell s.r.l.

Avocats

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

POUR LA DÉFENDERESSE,

Splash Holdings Ltd.

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.