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Date : 20071126

Dossiers : IMM-1817-07

IMM-1834-07

 

Référence : 2007 CF 1221

Ottawa (Ontario), le 26 novembre 2007

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE BLAIS

 

 

ENTRE :

Dossier : IMM-1817-07

 

TEMITOPE J. AKINBOWALE

OLAOTAN AKINBOWALE

demandeurs

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

 

- et -

 

 

Dossier : IMM-1834-07

YETUNDE FOLASAD AKINBOWALE

OLAOTAN AKINBOWALE

demandeurs

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeurs

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit de deux demandes de contrôle judiciaire déposées en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (LIPR), visant une décision rendue le 15 février 2007 par l’agent d’ERAR J. Gullickson (l’agent) dans laquelle il a rejeté les demandes de résidence permanente fondées sur des circonstances d’ordre humanitaire (demandes CH) présentées au Canada par les demandeurs. M. Temitope J. Akinbowale (le père) et son fils Olaotan Akinbowale (le premier enfant) sont les demandeurs dans le dossier numéro IMM‑1817‑07. Le premier enfant est également un demandeur dans le dossier numéro IMM‑1834‑07, de même que sa mère, Yetunde Folasad Akinbowale (l’épouse). Les deux demandes ont été entendues en même temps. Elles sont fondées sur le même ensemble de faits et soulevaient des questions identiques.

 

LE CONTEXTE

[2]               Le 24 janvier 2000, le père est entré au Canada et a alors demandé l’asile.

 

[3]               Le 14 août 2000, son épouse et son premier enfant sont entrés au Canada et ont demandé l’asile le 22 août 2000. Son épouse était alors enceinte et elle a donné naissance à un garçon à Montréal, en octobre 2000.

 

[4]               La Section de la protection des réfugiés (la SPR) leur a refusé le statut de réfugié le 7 août 2003.

 

[5]               Dans sa décision datée du 7 août 2003, la SPR a conclu que le père ne se trouvait pas au Nigeria au moment où il prétendait avoir été persécuté, mais qu’il se trouvait plutôt aux États‑Unis, où il a été déclaré coupable une fois de vol au premier degré en 1992 et deux fois de possession de faux titres en 1996 et en 1997.

 

[6]               Pour ces motifs, la SPR n’a pas cru le témoignage de l’épouse sur son arrestation en raison des opinions politiques de son mari ni sa déclaration selon laquelle elle a fait connaissance avec son mari au Nigeria et qu’elle y a vécu avec lui de 1993 à 1997. La Cour n’a pas accordé l’autorisation de contrôle judiciaire visant cette décision le 13 janvier 2004.

 

[7]               L’épouse a donné naissance à une fille le 20 juin 2005.

 

LES QUESTIONS À EXAMINER

[8]               Je crois que les questions devraient être reformulées de la manière suivante :

1.                  L’agent a‑t‑il commis une erreur dans son évaluation des facteurs d’ordre humanitaire?

2.                  L’agent a‑t‑il appliqué le bon critère juridique dans son analyse des circonstances d’ordre humanitaire?

 

LES DISPOSITIONS PERTINENTES

[9]               L’exemption pour circonstances d’ordre humanitaire se trouve au paragraphe 25(1) de la Loi, lequel est rédigé ainsi :

25. (1) Le ministre doit, sur demande d’un étranger interdit de territoire ou qui ne se conforme pas à la présente loi, et peut, de sa propre initiative, étudier le cas de cet étranger et peut lui octroyer le statut de résident permanent ou lever tout ou partie des critères et obligations applicables, s’il estime que des circonstances d’ordre humanitaire relatives à l’étranger — compte tenu de l’intérêt supérieur de l’enfant directement touché — ou l’intérêt public le justifient.

 

25. (1) The Minister shall, upon request of a foreign national who is inadmissible or who does not meet the requirements of this Act, and may, on the Minister’s own initiative, examine the circumstances concerning the foreign national and may grant the foreign national permanent resident status or an exemption from any applicable criteria or obligation of this Act if the Minister is of the opinion that it is justified by humanitarian and compassionate considerations relating to them, taking into account the best interests of a child directly affected, or by public policy considerations.

 

LA NORME DE CONTRÔLE

[10]           Il s’agit d’une règle de droit bien connue que la norme de contrôle applicable aux décisions de demandes CH est la décision raisonnable simpliciter (Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817, au paragraphe 62). Dans la décision Ramirez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2006 CF 1404, le juge Yves De Montigny a conclu, au paragraphe 31 :

La Cour ne s’immiscera donc dans la décision CH que si aucun mode d’analyse ne pourrait raisonnablement amener l’agente d’immigration à conclure comme elle l’a fait, sur la base de la preuve soumise. Cela étant dit, je me rends bien compte que certains arguments des demanderesses nécessitent l’interprétation de concepts juridiques. D’une part, la question de la définition de « difficultés », dans le contexte de l’analyse de l’intérêt supérieur d’un enfant, ne comporte pas en tout premier lieu une appréciation des faits. Il en va de même pour la question de savoir si un agent d’immigration doit évaluer le risque différemment dans le contexte d'une demande d’ERAR et dans le contexte d’une demande CH. Ces questions peuvent être plus justement qualifiées de questions mixtes de fait et de droit plutôt que de questions de nature factuelle, mais je ne crois pas qu’elles justifient l’application d’une norme de contrôle différente. De fait, il me semble que la nature mixte de ces questions ne fait que renforcer le fait qu’il convient d’appliquer la norme de la décision raisonnable.

 

[11]           Cependant, pour les questions d’équité procédurale, la norme applicable est la décision correcte.

 

ANALYSE

1.  L’agent a‑t‑il commis une erreur dans son évaluation des facteurs d’ordre humanitaire?

[12]           Les demandeurs soutiennent que l’agent n’a pas analysé suffisamment l’intérêt des enfants dans sa décision, particulièrement le risque que sa fille subisse une mutilation génitale féminine (MGF) s’ils devaient retourner au Nigeria.

 

[13]           Les parties pertinentes de la décision de l’agent sont rédigées ainsi :

[traduction]

MGF

Les demandeurs prétendent que leur fille canadienne risquerait de subir une mutilation génitale féminine (MGF) au Nigeria ou qu’ils seraient obligés de laisser leur fille au Canada pour éviter qu’elle subisse une MGF au Nigeria, ce qui constituerait une difficulté excessive.

[…]

Les demandeurs n’ont pas montré suffisamment comment leur fille serait sérieusement exposée au risque de subir une MGF. Yetunde, la mère de l’enfant, n’a pas fait savoir qu’elle ou un membre de sa famille avait subi une MGF et elle n’a pas affirmé qu’il s’agissait d’une coutume dans sa famille ou dans une collectivité particulière. Des renseignements récents sur le Nigeria révèlent que seulement 19 p. 100 des femmes au Nigeria subissent une MGF et les demandeurs n’ont pas produit une preuve suffisamment convaincante démontrant qu’ils risqueraient sérieusement d’être obligés de faire subir une MGF à leur fille. Des rapports récents sur le pays montrent que 60 p. 100 des femmes yorubas ont subi une MGF. Cependant, les demandeurs, bien qu’ils ont fait savoir qu’ils étaient d’origine yoruba, n’ont pas mentionné que ce genre de renseignement constituait un facteur pertinent dans le cas de leur fille. En outre, ces rapports révèlent que les MGF sont en déclin et que les femmes éduquées habitant en milieu urbain ont moins de chances d’être en faveur de cette pratique et que la pression pour faire subir une MGF provient de la famille. Les demandeurs adultes, qui semblent eux‑mêmes s’opposer aux MGF, n’ont pas fourni suffisamment de renseignements montrant qu’ils seraient exposés à une telle pression pour faire subir une MGF à leur fille.

 

[14]           Il est établi que, dans le cadre de demandes d’exemption fondées sur des circonstances d’ordre humanitaire, il incombe aux demandeurs de prouver leurs prétentions. Comme l’a conclu le juge Richard Mosley dans la décision Bui c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2005 CF 816, aux paragraphes 11 et 12 :

[11]            La norme applicable aux difficultés inhabituelles, injustifiées et excessives aux fins de l’octroi de la dispense de l’obligation de demander un visa depuis l’étranger met en cause une exigence préliminaire rigoureuse : Lee c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) [2001] A.C.F. n139; Irimie c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2000), 10 Imm. L.R. (3d) 206 (C.F. 1re inst.).

 

[12]            Le demandeur a le fardeau de convaincre le décideur et il peut présenter les faits qu’il estime pertinents. Une déclaration indirecte, succincte et obscure n’impose pas à l’agent l’obligation de mener une enquête plus approfondie : Owusu, précité, au paragraphe 9.

 

 

[15]           Il ressort de la décision de l’agent que celui‑ci n’estimait pas avoir assez de preuve montrant que la fille des demandeurs aurait à subir une MGF. La preuve révélait que, sans pression exercée par la famille, il y avait moins de chances que la coutume soit suivie. Le fait que les demandeurs, dans leurs demandes CH, avancent l’argument que leur fille aurait à subir une MGF s’ils étaient renvoyés au Nigeria démontre certainement qu’ils s’opposent à cette pratique.

 

[16]           Les motifs de l’agent portant sur les intérêts des enfants sont rédigés ainsi :

[traduction]

Yetunde affirme qu’elle a deux enfants nés au Canada, en 2000 et en 2005, et que ces enfants n’ont connu aucun autre mode de vie ou culture que ceux du Canada. Elle prétend que ces enfants ont le droit de bénéficier des avantages qu’offre le Canada et qu’il serait injuste de les forcer à vivre dans une culture et selon un mode de vie qui leur sont inconnus. Elle prétend que l’aîné va à l’école et devrait pouvoir terminer son éducation, qu’il a des amis à l’école et à l’église, qu’il profite de la technologie moderne dans l’éducation et qu’il mène une vie plus structurée au Canada.

 

Les demandeurs n’ont pas précisé suffisamment quels seraient les avantages dont les demandeurs ou leurs enfants pourraient bénéficier au Canada et qu’ils n’auraient pas au Nigeria. Je conviens que le fait d’obliger les enfants à changer d’école et à quitter le Canada peut leur causer des difficultés et leur faire perdre des amis, mais la preuve ne me convainc pas que le déménagement constituerait une difficulté excessive pour les enfants.

 

[17]           Le juge Denis Pelletier a conclu, dans Irimie c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] A.C.F. n1906 (QL), au paragraphe 26, que la procédure d’exemption pour circonstances d’ordre humanitaire « n’est pas destinée à éliminer les difficultés; elle est destinée à accorder une réparation en cas de difficultés inhabituelles, injustifiées ou excessives ». Le paragraphe 12 de sa décision est rédigé ainsi :

[…] Il semblerait donc que les difficultés qui déclencheraient l’exercice d’un pouvoir discrétionnaire pour des raisons d’ordre humanitaire doivent être autres que celles qui découlent du fait que l’on demande à une personne de partir une fois qu’elle est au pays depuis un certain temps. Le fait qu’une personne quitterait des amis, et peut-être des membres de la famille, un emploi ou une résidence ne suffirait pas nécessairement pour justifier l’exercice du pouvoir discrétionnaire en question.

 

[18]           Dans la décision Liniewska c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 591, au paragraphe 20, j’ai fait observer qu’il incombe au demandeur d’établir que l’agent n’a pas tenu compte de la preuve concernant l’intérêt supérieur des enfants dans son évaluation des circonstances d’ordre humanitaire : 

[20]           La demanderesse conserve le fardeau de fournir une preuve quant aux inconvénients que les enfants risquent de subir si elle est forcée de partir. L’agent d’immigration a une obligation de prendre cette preuve en considération. Ce n’est pas suffisant pour la demanderesse de seulement dire que l’agent n’a pas pris en considération l’intérêt supérieur des enfants, elle doit démontrer que l’agent n’a pas pris en considération la preuve qui porte sur l’intérêt supérieur des enfants […]

 

 

 

[19]           Compte tenu de la preuve dont il disposait, j’estime que l’agent a tiré une conclusion raisonnable. Les demandeurs n’ont pas réussi à prouver que la preuve dont disposait l’agent ne lui permettait pas raisonnablement de rendre la décision qu’il a rendue.

 

2.  L’agent a-t-il appliqué le bon critère juridique dans son analyse des circonstances d’ordre humanitaire?

[20]           Les demandeurs soutiennent que l’agent a commis une erreur de droit en appliquant le mauvais fardeau de preuve quand il a jugé que [traduction] « [l]es demandeurs n’ont pas suffisamment établi de quelle façon [leur] fille est sérieusement exposée au risque de subir une mutilation génitale féminine » et ensuite que [traduction] « les demandeurs n’ont pas produit une preuve suffisamment convaincante démontrant qu’ils risqueraient sérieusement d’être obligés de faire subir une MGF à leur fille ». Ils soutiennent que l’agent aurait pu prendre en compte les difficultés liées à leur retour au Nigeria plutôt que les risques liés au retour de la fille des demandeurs, qui est citoyenne canadienne et donc qui n’est pas visée par le programme d’ERAR. À l’appui de cet argument, ils citent le paragraphe 42 de la décision rendue par le juge Yves De Montigny dans Ramirez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2006 CF 1404. Puisque cette décision établit une distinction claire entre l’analyse des risques dans le cadre d’un ERAR et dans le cadre d’une demande CH, je citerai également les paragraphes 44, 45 et 48 de cette décision :

[42]           Il va sans dire que la notion de « difficultés », dans une demande CH, et la notion de « risque » envisagée dans une ERAR ne sont pas équivalentes et doivent être appréciées selon une norme différente. Comme le juge en chef Allan Lutfy l'a expliqué dans la décision Pinter c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2005 CF 296 :

 

[3] Dans une demande fondée sur des raisons d’ordre humanitaire en vertu de l’article 25 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (la LIPR), le demandeur a le fardeau de convaincre le décideur qu’il y aurait des difficultés inhabituelles et injustifiées ou excessives à obtenir un visa de résident permanent de l’extérieur du Canada.

 

 

[4] Dans un examen des risques avant renvoi en vertu des articles 97, 112 et 113 de la LIPR, la protection peut être accordée à une personne qui, suivant son renvoi du Canada vers son pays de nationalité, serait exposée soit à une menace à sa vie ou au risque de traitements cruels et inusités.

 

 

[5] À mon avis, l’agente d’immigration a commis une erreur de droit en concluant qu’elle n’était pas tenue de traiter des facteurs de risque dans son examen de la demande fondée sur des raisons d’ordre humanitaire. Elle n’aurait pas dû se fermer aux facteurs de risque même si une décision défavorable valide avait pu être rendue à la suite d’un examen des risques avant renvoi. Il peut exister des considérations relatives au risque qui soient pertinentes à une demande de résidence permanente depuis le Canada, lesquelles sont loin de satisfaire le critère plus rigoureux de la menace à la vie ou du risque de traitements cruels et inusités. [Non souligné dans l’original.]

 

[…]

 

[44]           Le passage précité ne renferme absolument aucune analyse des difficultés par opposition aux risques. Même dans sa conclusion, l'agente revient à cette idée et dit : [traduction] « Je suis convaincue que la demandeure pourrait demander à immigrer au Canada en ayant recours aux procédures normales qui s'appliquent outre‑frontières sans avoir à être dispensée des conditions habituelles, et ce, sans être exposée à une menace à sa vie ou à la sécurité personnelle de sa famille. »

 

[45]           Il se peut que la violence, le harcèlement et les mauvaises conditions sanitaires ne constituent pas un risque personnalisé pour l'application de la LIPR, mais ces facteurs peuvent bien être suffisants pour établir des difficultés inhabituelles, injustifiées ou excessives. […]

 

 

[48]           Plus précisément, les agents d'immigration qui procèdent à une ERAR évaluent des risques. Il est vrai que les demandes CH peuvent également comporter des « facteurs de risque », mais cela ne change rien au fait qu'une demande CH vise l'évaluation des difficultés. Le fait qu'une demande peut comporter des questions de risque ne la transforme pas pour autant en une seconde analyse du risque. D'autres questions, comme l'intérêt supérieur des enfants et les facteurs de risque, doivent être évaluées en tant que partie intégrante ou en tant que sous‑ensemble de cette analyse globale des difficultés.

 

 

[21]           Contrairement à la décision citée ci­‑dessus, ce n’est pas parce que l’agent cherchait un risque personnalisé, mais parce qu’il n’a pas jugé qu’il existait de risque sérieux que la fille subisse une MGF qu’il a finalement conclu que les demandeurs n’avaient pas prouvé qu’ils subiraient des difficultés inhabituelles, injustifiées ou excessives. Il s’agit d’une décision semblable à une autre décision rendue par le juge De Montigny dans Pannu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2006 CF 1356, au paragraphe 37, lequel est rédigé ainsi :

[37]           Je ne crois pas que la mention, dans la dernière phrase, du risque pour la vie ou la sécurité personnelle soit la preuve que l’agente a appliqué le mauvais critère. En premier lieu, l’agente pouvait certainement adopter les conclusions de fait de sa décision d’ERAR dans l’analyse qu’elle faisait de la demande CH (Liyanage c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 1045, au paragraphe 41). Deuxièmement, après lecture du paragraphe entier, il apparaît clairement que l’agente arrivait à la conclusion que la demanderesse ne connaîtrait pas de difficultés inhabituelles, injustifiées ou excessives puisqu’il n’existait aucune preuve objective d’un risque personnalisé. Non seulement l’agente a correctement exposé, au tout début de ses motifs, le critère d’appréciation des demandes CH, mais aussi elle a conclu de la manière suivante son examen des risques et difficultés allégués par la demanderesse :

 

[traduction] Au vu de la preuve que j’ai devant moi, je suis d’avis que la demanderesse n’a pas produit une preuve convaincante permettant d’établir qu’elle est exposée à un risque personnalisé pour sa vie ou à une menace venant de son ex‑mari pour la sécurité de sa personne si elle devait retourner en Inde. Pareillement, je suis d’avis que la demanderesse n’a pas produit une preuve suffisamment concluante pour établir que les difficultés afférentes à son retour en Inde équivalent à des difficultés inhabituelles, injustifiées ou excessives.

 

 

 

[22]           Dans la décision récente Radji c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2007 CF 836, le juge Max M. Teitelbaum a conclu, aux paragraphes 8 et 27 :

[8]               Pour ce qui est des allégations de risque concernant la demanderesse mineure, l’agente a signalé que la demanderesse n’avait produit aucune preuve à l’appui de l’allégation selon laquelle elle risquerait d’être victime de mutilation génitale si elle retournait au Bénin. Elle a ajouté que même s’il existe aujourd’hui une loi qui interdit la mutilation génitale des femmes, dans la pratique l’État n’est pas parvenu à éliminer entièrement cette coutume. Elle a fait référence aussi à la réponse à la demande d’information de la CISR où l’on cite la secrétaire administrative adjointe de la section béninoise de l’organisation Femmes, Droit et Développement en Afrique, qui a déclaré que le Bénin vivait dans une période de transition par rapport à cette coutume et qu’il se déroulait à ce moment-là une campagne de sensibilisation visant à informer la population de la nouvelle loi. Selon la preuve documentaire, environ 17 % des femmes au Bénin ont été victimes de mutilation génitale, dont 70 % des femmes appartenant aux groupes ethniques bariba, yoa-lokpa et peul. L’agente a signalé que la demanderesse principale n’appartenait à aucun de ces groupes, et elle a conclu que cette dernière n’avait pas établi que sa fille courait un risque de mutilation génitale.

 

[…]

 

[27]           J’abonde dans le sens du défendeur. Les demanderesses ont élevé un nombre important de prétentions, mais elles n’ont pas produit de preuves à l’appui de celles-ci. Comme l’a fait remarquer le défendeur, les demanderesses n’ont produit aucune preuve sur la situation des femmes au Bénin, les mariages forcés, la mutilation génitale des femmes et la disponibilité de soins de santé mentale dans ce pays. Si la demanderesse principale estimait qu’elle avait droit à une décision favorable pour des motifs d’ordre humanitaire du fait de son état mental et qu’un renvoi au Bénin aurait pu l’affecter au point où sa fille s’exposerait à un risque, elle aurait alors dû soulever la question dans ses observations et produit les preuves corroborantes. […]

 

 

 

[23]           Les faits et les conclusions de cette décision sont semblables à ceux en l’espèce, mais je soulignerai uniquement que le risque de MGF avait été évalué dans cette demande CH et que la décision de l’agent avait été confirmée.

 

[24]           En l’espèce, je suis d’avis que « [l]a lecture de la décision dans son ensemble montre clairement que la décision de l’agent a été rendue dans le contexte de l’évaluation des facteurs pertinents invoqués par le[s] demandeur[s], et il faut démontrer que ces facteurs ont été évalués à l’aide du critère préliminaire approprié applicable aux demandes CH, à savoir l’existence de difficultés inhabituelles, injustifiées ou démesurées” » (Doukhi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 1464, au paragraphe 27).

 

[25]           Pour les motifs exposés ci‑dessus, les présentes demandes de contrôle judiciaire sont rejetées.

 

[26]           Ni l’un ni l’autre des avocats n’ont présenté de question à certifier.  

 

 

JUGEMENT

 

1.                  Les demandes sont rejetées.

2.                  Aucune question à certifier n’a été énoncée et aucune ne sera certifiée.

 

 

 

« Pierre Blais »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Elisabeth Ross

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

DOSSIER :                                                    IMM-1817-07

 

INTITULÉ :                                                   TEMITOPE J. AKINBOWALE  et OLAOTAN AKINBOWALE

                                                                        c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

 

LIEU DE L'AUDIENCE :                             MONTRÉAL (QUÉBEC)

 

DATE DE L'AUDIENCE :                           LE 20 NOVEMBRE 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT 

ET JUGEMENT :                                          LE JUGE BLAIS

 

DATE DES MOTIFS :                                  LE 26 NOVEMBRE 2007

 

 

COMPARUTIONS :

 

Nataliya Dzera

 

POUR LES DEMANDEURS

Normand Lemyre

 

 

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Waice Ferdoussi,

Avocats

Montréal (Québec)

 

POUR LES DEMANDEURS

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

 

 

 

 

 

COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

                                                                                               

DOSSIER :                                                    IMM-1834-07

 

INTITULÉ :                                                   YETUNDE FOLASAD AKINBOWALE et OLAOTAN AKINBOWALE

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

 

LIEU DE L'AUDIENCE :                             MONTRÉAL (QUÉBEC)

 

DATE DE L'AUDIENCE :                           LE 20 NOVEMBRE 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT 

ET JUGEMENT :                                          LE JUGE BLAIS

 

DATE DES MOTIFS :                                  LE 26 NOVEMBRE 2007

 

 

COMPARUTIONS :

 

Jean-François Bertrand

 

POUR LES DEMANDEURS

Normand Lemyre

 

 

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Bertrand, Deslauriers

Montréal (Québec)

 

POUR LES DEMANDEURS

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

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