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Date : 20071107

Dossier : IMM-1554-07

Référence : 2007 CF 1154

Ottawa (Ontario), le 7 novembre 2007

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE BEAUDRY

 

 

ENTRE :

IHEANYI VICTOR IHEJIETO

demandeur

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision en date du 23 mars 2007 par laquelle une agente d’immigration (l’agente) a refusé une demande de rétablissement du statut de visiteur présentée en vertu de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, 2001, ch. 27 (la Loi) et le Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (le Règlement). L’agente des visas n’était pas convaincue que le demandeur quitterait le Canada à la fin de la période de son séjour autorisé.

 

 

QUESTIONS EN LITIGE

[2]               La seule question que la Cour est appelée à trancher est celle de savoir si l’agente a commis une erreur justifiant notre intervention en refusant la demande de rétablissement du statut de visiteur du demandeur.

 

RAPPEL DES FAITS

[3]               Né le 21 novembre 1982, le demandeur est un citoyen du Nigéria. Il est arrivé au Canada le 3 novembre 2004 en tant que visiteur muni d’un visa de résident temporaire valide pour deux semaines, dans l’intention de participer à un colloque. Il a demandé que son statut de visiteur soit prorogé jusqu’au 2 novembre 2005, puis jusqu’au 2 mai 2006, ce qui lui a été accordé.

 

[4]               Le 8 janvier 2005, le demandeur a épousé une citoyenne canadienne du nom de Jennie Phillip, et il a peu de temps après soumis une demande de résidence permanente dans la catégorie des époux ou des conjoints de fait au Canada. Cette demande a été refusée en janvier 2006 au motif que son mariage n’était pas authentique et qu’il visait à faciliter l’immigration du demandeur au Canada. Mme Phillip a retiré son parrainage le 20 février 2006 en expliquant qu’elle avait l’intention de demander le divorce dans les plus brefs délais.

 

[5]               Le 15 février 2006, le demandeur a commencé à faire vie commune avec sa conjointe actuelle, Mme Nicole Bors, qui est aussi une citoyenne canadienne. Il a présenté une autre demande de résidence permanente, qui a été refusée en août 2006 parce que leur union existait depuis moins d’un an et qu’ils ne répondaient pas à la définition de conjoints de fait.

 

[6]               Le 27 avril 2006, le demandeur a réclamé pour la troisième fois la prorogation de son visa de visiteur. À l’appui de sa demande, il a soumis une note dans laquelle son médecin expliquait qu’il avait besoin d’une intervention chirurgicale, d’un suivi pour retoucher une intervention pour cryptorchidisme, suivi pour lequel il devait attendre au moins six mois. La demande a cependant été refusée en août 2006 parce que l’agent n’était pas convaincu que le demandeur quitterait le pays à la fin de la période de son séjour.

 

[7]               Le 14 octobre 2006, le demandeur a épousé Nicole Bors et a par la suite soumis une troisième demande de résidence permanente en tant que membre de la catégorie des époux ou des conjoints de fait au Canada.

 

[8]               Le 31 octobre 2006, le demandeur a présenté une demande de rétablissement de son statut de visiteur. La décision rendue en réponse à cette demande fait l’objet du présent contrôle judiciaire. Il a demandé de rester au Canada jusqu’au 1er novembre 2007. Il alléguait qu’il avait besoin que son statut de visiteur soit rétabli pour pouvoir prendre un rendez-vous pour une chirurgie de suivi et parce qu’il est maintenant marié à une citoyenne canadienne et que sa demande de résidence permanente est en instance.

 

DÉCISION À L’EXAMEN

[9]               La décision défavorable a été rendue sous forme de lettre le 23 mars 2007. Les notes prises par l’agente avec le logiciel libre et Open-Source (FOSS) constituent les motifs de sa décision. Voici les deux motifs qu’elle a  invoqués dans ses notes du 23 mars 2007 pour justifier son refus :

a)      L’agente n’était pas convaincue que le demandeur était un visiteur authentique qui quitterait le pays à la fin de la période de séjour autorisée. Elle a fait observer que le demandeur avait affirmé qu’il n’avait pas de billet de retour et qu’il espérait que la demande de parrainage de son épouse puisse être évaluée avant son départ.

b)      L’agente a également estimé que le demandeur n’avait pas soumis suffisamment de documents pour la convaincre que la date de l’intervention chirurgicale était déjà fixée et qu’elle aurait lieu dans un délai raisonnable. Le demandeur a soumis une note datée du 16 mars 2007 dans laquelle le médecin traitant avait écrit les deux notes suivantes à la main : [traduction] « rendez-vous pour test nerveux au cours des prochains mois » et [traduction] « en attente d’une chirurgie par urologie » (Dossier du tribunal, page 9).

 

DISPOSITIONS LÉGISLATIVES APPLICABLES

[10]           L’article 182 du Règlement prévoit que l’agent rétablit le statut de visiteur de l’étranger si celui-ci le convainc qu’il satisfait aux exigences initiales de sa période de séjour. En l’espèce, l’agente n’était pas convaincue que le demandeur quitterait le Canada à la fin de la période de son séjour autorisé. Cette condition est imposée à tous les résidents temporaires par l’alinéa 183(1)a) du Règlement.

182. Sur demande faite par le visiteur, le travailleur ou l’étudiant dans les quatre-vingt-dix jours suivant la perte de son statut de résident temporaire parce qu’il ne s’est pas conformé à l’une des conditions prévues à l’alinéa 185a), aux sous-alinéas 185b)(i) à (iii) ou à l’alinéa 185c), l’agent rétablit ce statut si, à l’issue d’un contrôle, il est établi que l’intéressé satisfait aux exigences initiales de sa période de séjour et qu’il s’est conformé à toute autre condition imposée à cette occasion.

 

183. (1) Sous réserve de l’article 185, les conditions ci-après sont imposées à tout résident temporaire :

 

a) il doit quitter le Canada à la fin de la période de séjour autorisée;

182. On application made by a visitor, worker or student within 90 days after losing temporary resident status as a result of failing to comply with a condition imposed under paragraph 185(a), any of subparagraphs 185(b)(i) to (iii) or paragraph 185(c), an officer shall restore that status if, following an examination, it is established that the visitor, worker or student meets the initial requirements for their stay and has not failed to comply with any other conditions imposed.

 

183. (1) Subject to section 185, the following conditions are imposed on all temporary residents:

 

(a) to leave Canada by the end of the period authorized for their stay;

 

ANALYSE

Norme de contrôle

[11]           Le demandeur exhorte la Cour de procéder au contrôle judiciaire de la décision de l’agente au motif que la décision de cette dernière est manifestement déraisonnable. Le défendeur est d’accord avec le demandeur quant à la norme de contrôle applicable. Dans une décision récente de notre Cour, Patel c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 224, [2006] A.C.F. no 295 (QL),  au paragraphe 12, le juge Luc Martineau écrit :

[…] Il est donc nécessaire d'examiner le fond de la demande. À cet égard, je suis convaincu que la norme de contrôle applicable à une décision refusant le rétablissement d'un statut est la décision raisonnable simpliciter : Lim c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2005] A.C.F. no 810, au paragraphe 5 (C.F.) (QL), 2005 CF 657, décision du juge von Finckenstein; Novak c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2004] A.C.F. no 307, au paragraphe 17 (C.F.) (QL) 2004 CF 243, décision de la juge Mactavish.

                                                            [Non souligné dans l’original.]

 

 

[12]           Dans le cas qui nous occupe, j’estime qu’aucune erreur justifiant notre intervention n’a été commise et ce, indépendamment de la norme appliquée.

 

L’agente a-t-elle commis une erreur en refusant de rétablir le statut de visiteur du demandeur?

[13]           Le demandeur invoque deux motifs pour affirmer que la décision de l’agent est déraisonnable. En premier lieu, le demandeur fait valoir que la décision de l’agente est déraisonnable parce qu’elle a refusé de rétablir son statut de visiteur au motif que le demandeur espérait présenter sa demande dans la catégorie des époux ou des conjoints de fait au Canada et se prévaloir de la politique du Ministère concernant les époux. En second lieu, le demandeur affirme qu’il était déraisonnable de la part de l’agente d’exiger que la date de l’opération chirurgicale soit connue; la note du médecin déclarant que la date de l’intervention serait fixée une fois les résultats des tests urologiques reçus aurait dû suffire pour convaincre l’agente que l’opération chirurgicale aurait lieu dans un délai raisonnable.

 

[14]           La politique concernant les époux qui a été élaborée en vertu de l’article 25 de la Loi dispense les demandeurs de la catégorie des époux ou des conjoints de fait de l’obligation d’avoir le statut légal de résident temporaire au Canada. Voici ce qu’on trouve à l’Appendice H de la Politique d’intérêt public établie en vertu du paragraphe 25(1) de la LIPR pour faciliter le traitement selon les règles de la catégorie des époux ou conjoints de fait au Canada :

L’effet de cette politique est de dispenser le demandeur de l’obligation prévue au R124b) d’avoir un statut d’immigration et des exigences prévues au L21(1) et au R72(1)e)(i) de ne pas être interdit de territoire pour absence de statut; cependant, toutes les autres exigences de la catégorie s’appliquent et les cas des demandeurs seront traités en fonction des lignes directrices de l’IP2 et de l’IP8.

 [Non souligné dans l’original.]

 

[15]           Le litige porte sur la demande de rétablissement du statut de visiteur du demandeur. L’agente a, à juste titre, tenu compte de l’ensemble de la situation du demandeur pour décider s’il satisfaisait au critère du rétablissement prévu à l’article 182 du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés. L’agente n’a pas commis d’erreur en estimant que le demandeur ne l’avait pas convaincue qu’il quitterait effectivement le Canada à la fin de la période de son séjour autorisé.

 

[16]           Sur le second moyen invoqué par le demandeur, il était raisonnable de la part de l’agente de conclure qu’il n’y avait pas de délai prévisible dans lequel l’intervention de suivi aurait lieu. La note du médecin déclarant que la date de l’intervention dépendait des résultats des tests urologiques ne donne aucune idée du moment où l’on prévoyait qu’elle serait effectuée. Il n’y a rien dans la preuve qui permette de penser que le demandeur serait prêt à partir au plus tard le 1er novembre 2007, dernier jour de la prorogation réclamée, et encore moins que l’intervention aurait alors eu lieu.

 

[17]           Qui plus est, l’agente a fondé sa décision sur l’ensemble de la preuve. Pour pouvoir conclure à l’existence d’une erreur qui justifierait notre intervention, il faudrait que toute la décision soit déraisonnable. On ne peut isoler une conclusion de l’agente des autres motifs exposés de manière à rendre toute sa décision déraisonnable. Le demandeur n’a fourni aucun élément de preuve tendant à démontrer son intention de retourner au Nigéria au plus tard le 1er novembre 2007. Il ressort de l’examen de l’ensemble du dossier, y compris des éléments de preuve fournis à l’appui de la demande de rétablissement, de ses antécédents en matière d’immigration, et en particulier de son premier mariage, que le demandeur a plutôt l’intention de demeurer au Canada.

 

[18]           Aucune question à certifier n’a été proposée et aucune ne se pose.

 

 

JUGEMENT

 

LA COUR REJETTE la demande de contrôle judiciaire. Aucune question n’est certifiée.

 

 

« Michel Beaudry »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Christiane Bélanger, LL.L.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                    IMM-1554-07

 

INTITULÉ :                                                   IHEANYI VICTOR IHEJIETO et

                                                                        LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             VANCOUVER (COLOMBIE-BRITANNIQUE)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           LE 24 OCTOBRE 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                          LE JUGE BEAUDRY

 

DATE DES MOTIFS :                                  LE 7 NOVEMBRE 2007

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Me Martin Bauer                                                                       POUR LE DEMANDEUR

                                                                                               

 

Me Lisa Laird                                                                           POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Bauer & Company Law Offices                                                POUR LE DEMANDEUR

Burnaby (Colombie-Britannique)

 

John Sims, c.r.                                                                          POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

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