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Date : 20071016

Dossier : T-2148-05

Référence : 2007 CF 1059

Ottawa (Ontario), le 16 octobre 2007

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE PHELAN

 

 

ENTRE :

MELISSA GUILLE

demanderesse

et

 

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

I.          INTRODUCTION

[1]               Il s’agit du contrôle judiciaire d’une décision par laquelle la Commission canadienne des droits de la personne (la Commission) demande au président du Tribunal canadien des droits de la personne (le Tribunal) d’instruire une plainte portée contre la demanderesse et la Canadian Heritage Alliance (CHA). La CHA n’est pas partie au présent contrôle judiciaire.

[2]               La décision de la Commission est fondée sur l’affirmation portant que la demanderesse administre le site Web de la CHA et en assure le fonctionnement, et que la demanderesse et la CHA ont communiqué ou fait communiquer sur ce site Web des textes qui exposeraient à la haine ou au mépris les personnes de toute confession autre que chrétienne ou de race, de nationalité ou d’origine ethnique autre que caucasienne, ainsi que les personnes homosexuelles.

 

II.         LES FAITS

[3]               M. Richard Warman a déposé une plainte contre la demanderesse et la CHA. La plainte est divisée en deux parties, l’une visant exclusivement la demanderesse, à qui le plaignant reproche d’avoir diffusé de la propagande haineuse, et l’autre visant à la fois la demanderesse et la CHA, qui ont ménagé une tribune permettant la communication et l’échange de propagande haineuse. 

 

[4]               Le plaignant allègue que la demanderesse (et la CHA) a contrevenu au paragraphe 13(1) de la Loi canadienne sur les droits de la personne (la Loi). Voici le libellé de l’article 13 :

13. (1) Constitue un acte discriminatoire le fait, pour une personne ou un groupe de personnes agissant d’un commun accord, d’utiliser ou de faire utiliser un téléphone de façon répétée en recourant ou en faisant recourir aux services d’une entreprise de télécommunication relevant de la compétence du Parlement pour aborder ou faire aborder des questions susceptibles d’exposer à la haine ou au mépris des personnes appartenant à un groupe identifiable sur la base des critères énoncés à l’article 3.

 

 

 

 (2) Il demeure entendu que le paragraphe (1) s’applique à l’utilisation d’un ordinateur, d’un ensemble d’ordinateurs connectés ou reliés les uns aux autres, notamment d’Internet, ou de tout autre moyen de communication semblable mais qu’il ne s’applique pas dans les cas où les services d’une entreprise de radiodiffusion sont utilisés.

 

 

 

 (3) Pour l’application du présent article, le propriétaire ou exploitant d’une entreprise de télécommunication ne commet pas un acte discriminatoire du seul fait que des tiers ont utilisé ses installations pour aborder des questions visées au paragraphe (1).

13. (1) It is a discriminatory practice for a person or a group of persons acting in concert to communicate telephonically or to cause to be so communicated, repeatedly, in whole or in part by means of the facilities of a telecommunication undertaking within the legislative authority of Parliament, any matter that is likely to expose a person or persons to hatred or contempt by reason of the fact that that person or those persons are identifiable on the basis of a prohibited ground of discrimination.

 

 (2) For greater certainty, subsection (1) applies in respect of a matter that is communicated by means of a computer or a group of interconnected or related computers, including the Internet, or any similar means of communication, but does not apply in respect of a matter that is communicated in whole or in part by means of the facilities of a broadcasting undertaking.

 

 (3) For the purposes of this section, no owner or operator of a telecommunication undertaking communicates or causes to be communicated any matter described in subsection (1) by reason only that the facilities of a telecommunication undertaking owned or operated by that person are used by other persons for the transmission of that matter.

 

[5]               Dans sa plainte, M. Warman a fourni à la Commission certains extraits des communications affichées sur le site Web de la CHA. La demanderesse affirme n’avoir reçu initialement de la Commission que 8 articles sur les 37 articles soumis. Son représentant n’a soulevé ce point qu’au stade des plaidoiries. 

[6]               En réponse à la plainte, la demanderesse a nié toute responsabilité à l’égard des articles publiés sur le site Web, soutenant que le site Web de la CHA constitue une entreprise de télécommunication au sens du paragraphe 13(3) de la Loi, ce qui soustrait la plainte à la compétence de la Commission.

 

[7]               La question afférente au paragraphe 13(3) de la Loi n’a pas été soulevée par les parties au présent contrôle judiciaire. L’enquêteur de la Commission a conclu que l’exemption prévue au paragraphe 13(3) ne s’appliquait pas parce que le site Web était desservi par un fournisseur d’accès Internet (FAI) situé au New Jersey. La demande de contrôle judiciaire ne soulève pas précisément cette question de compétence, aussi la Cour laissera-t-elle la décision à cet égard être prise dans une autre procédure.  

 

[8]               La Commission a mené une enquête dans le cadre de laquelle la demanderesse a déposé des réponses et fait valoir sa position. La demanderesse a aussi répondu au rapport d’enquête (le rapport), dans lequel l’enquêteur a recommandé à la Commission de désigner un membre du Tribunal pour instruire la plainte.

 

[9]               Les textes publiés sur le site Web comprenait des « billets » comparant l’immigration des non-Blancs, les croisements, le métissage, la fusion et l’assimilation avec la peste du XIIIe siècle, des déclarations selon lesquelles les Juifs sont littéralement les enfants de Satan et autres commentaires semblables sur divers groupes raciaux, ethniques, religieux ou autres.

 

[10]           Le rapport a conclu que les textes en cause avait été observés sur Internet, que la communication avait eu lieu en partie au Canada puisque le site Web de la CHA désignait la demanderesse comme l’administratrice résidant en Ontario, que la CHA et la demanderesse avaient fait en sorte que soient communiqués ces textes, lesquels seraient susceptibles d’exposer des personnes à la haine ou au mépris en raison de leur orientation sexuelle, de leur religion, de leur race, de la couleur de leur peau ou de leur origine nationale ou ethnique. 

 

[11]           La Commission a souscrit pour l’essentiel aux recommandations contenues dans le rapport et a demandé au Tribunal d’instruire la plainte. La demanderesse attaque la décision de la Commission en contestant l’enquête. Dans son mémoire des faits et du droit, elle soulève trois points principaux : 

1.         la Commission a violé les principes de justice naturelle en permettant qu’un rapport erroné soit présenté et utilisé;

2.         la Commission n’a pas tenu une enquête rigoureuse;

3.         la Commission a entrepris une procédure de nature pénale et a porté atteinte au droit à la présomption d’innocence garanti à la demanderesse par l’alinéa 11d) de la Charte.

 

[12]           À l’audience devant la Cour, la demanderesse a soulevé des motifs de contestation additionnels :

·                    la Commission aurait dû exiger que le plaignant informe la demanderesse des communications offensantes avant d’enquêter sur la plainte, parce que le plaignant était tenu d’épuiser les recours internes et les procédures d’appel conformément aux alinéas 41(1)a) et 44(2)a), reproduits ci‑dessous :

41. (1) Sous réserve de l’article 40, la Commission statue sur toute plainte dont elle est saisie à moins qu’elle estime celle-ci irrecevable pour un des motifs suivants :

 

a) la victime présumée de l’acte discriminatoire devrait épuiser d’abord les recours internes ou les procédures d’appel ou de règlement des griefs qui lui sont normalement ouverts;

 

...

 

44. (2) La Commission renvoie le plaignant à l’autorité compétente dans les cas où, sur réception du rapport, elle est convaincue, selon le cas :

 

a) que le plaignant devrait épuiser les recours internes ou les procédures d’appel ou de règlement des griefs qui lui sont normalement ouverts;

41. (1) Subject to section 40, the Commission shall deal with any complaint filed with it unless in respect of that complaint it appears to the Commission that

 

(a) the alleged victim of the discriminatory practice to which the complaint relates ought to exhaust grievance or review procedures otherwise reasonably available;

 

...

 

44. (2) If, on receipt of a report referred to in subsection (1), the Commission is satisfied

 

 

 

(a) that the complainant ought to exhaust grievance or review procedures otherwise reasonably available,

 

 

·                    les droits reconnus à la demanderesse par l’article 7 de la Charte ont été violés, parce qu’elle doit justifier ses actes sans bénéficier des services juridiques requis et en subissant les inconvénients personnels découlant de sa situation de mère seule; 

·                    la demanderesse n’a obtenu copie que de quelques-unes des communications offensantes au stade de l’enquête;

·                    la Commission n’a pas analysé la plainte pour vérifier si elle était frivole, vexatoire ou entachée de mauvaise foi;

·                    la Commission se trouve en conflit d’intérêts (crainte raisonnable de partialité) en raison du degré élevé de succès obtenu par le plaignant au regard des plaintes qu’il a déposées à la Commission.

 

III.       ANALYSE

[13]           La Cour traitera brièvement de chacun des motifs soulevés par la demanderesse, mais elle doit d’abord décider de la norme de contrôle judiciaire applicable à la décision de la Commission. La demanderesse n’a présenté aucune observation sur ce point.

 

A.        Norme de contrôle judiciaire

[14]           La Cour doit procéder à une analyse pragmatique et fonctionnelle dans chaque affaire dont elle est saisie, comme il a été décidé dans l’arrêt Sketchley c. Canada (Commission des droits de la personne), 2005 CAF 404. Cela ne signifie pas, cependant, que la Cour ne peut pas adopter l’analyse utilisée dans une décision antérieure de la Cour portant sur un cas semblable.

 

[15]           Il importe de bien comprendre la nature de la décision contestée – en l’espèce, une décision de renvoyer l’affaire en vue d’une autre instruction. Cette décision ne met pas fin au processus de plainte, de sorte que les décisions judiciaires qui statuent sur des décisions de la Commission rejetant une plainte présentent une pertinence limitée quant à la norme de contrôle applicable.

 

[16]           Dans Banque canadienne impériale de commerce c. Durrer, 2005 CF 1064, la juge Snider a fait l’analyse pragmatique et fonctionnelle d’une décision de la Commission de déférer une plainte au Tribunal. J’adopte son analyse ainsi que sa conclusion selon laquelle la norme de contrôle applicable est celle de la décision manifestement déraisonnable. La Cour reconnaît que cette norme élevée de retenue ne doit être invoquée qu’avec parcimonie, ainsi qu’a mis en garde la Cour suprême dès le début de l’application de l’analyse relative à la norme de contrôle judiciaire. Néanmoins, la décision de la Commission se limite à faire en sorte que se poursuive une procédure dans laquelle la demanderesse aura toute possibilité de répondre aux allégations formulées contre elle.

 

[17]           En ce qui touche les questions d’équité procédurale, il est admis que dans le genre de cas qui nous occupe, la norme applicable est celle de la décision correcte. Cela dit, la nature de l’obligation d’équité procédurale, au stade actuel du processus de plainte, est différente de celle que doit respecter un tribunal administratif. Dans la décision Miller c. Canada (Commission des droits de la personne) (re Goldberg), [1996] A.C.F. no 735 (QL), le juge Dubé a décrit en ces termes la substance de cette obligation, au paragraphe 22 :

Selon la règle d’équité procédurale, un plaignant doit connaître les allégations formulées contre lui. Il n’a pas le droit d’en connaître les moindres détails, mais il devrait être informé des prétentions générales de la partie adverse. Le plaignant n’a pas le droit d’exiger les notes d’entrevues de l’enquêteur ou les déclarations obtenues des personnes interrogées. Il a le droit d’être informé du fond de l’affaire et de s’attendre à ce que l’enquêteur résume entièrement et fidèlement la preuve obtenue au cours de son enquête. Il doit avoir la possibilité de répondre. 

 

B.         Rapport erroné/rigueur de l’enquête

[18]           Ces deux questions, telles qu’elles ont été présentées, sont suffisamment semblables pour être abordées comme une seule et même question. Dans Slattery c. Canada (Commission des droits de la personne), [1994] A.C.F. no 181 (QL), conf. par [1996] A.C.F. no 385 (C.A.) (QL) (le juge Nadon, maintenant juge à la Cour d’appel fédérale), aux paragraphes 53 à 57, la Cour a réaffirmé l’exigence de « rigueur de l’enquête », mais a aussi précisé qu’il faut faire preuve d’un degré élevé de retenue à l’égard de la façon dont un enquêteur fait enquête. 

 

[19]           Même si la demanderesse n’est pas d’accord avec le rapport et les conclusions qu’il contient, aucun élément de preuve n’indique que l’enquête n’a pas été rigoureuse, que le point de vue de chaque partie n’a pas été pris en compte ou que l’on a refusé à la demanderesse la possibilité de répondre au rapport. Elle a reçu le rapport de huit pages, le sommaire ainsi que le formulaire de plainte.

 

[20]           À l’audience, la demanderesse a élargi la portée de son argument sur la rigueur de l’enquête pour y inclure l’omission, de la part de la Commission, de lui transmettre tous les articles annexés à la plainte initiale.

 

[21]           Tous les articles en cause sont de nature semblable; ils comportent des attaques sur la race, la religion, l’orientation sexuelle, etc. À cet égard, la demanderesse n’a jamais ignoré la teneur de la plainte portée contre elle, même si elle n’a pas reçu tous les articles annexés à la plainte. Le juge Dubé, dans la décision Miller, précitée, a résumé :

Pour que l’erreur soit susceptible de révision, le plaignant doit démontrer que les renseignements ont été retenus à tort et que ces renseignements sont fondamentaux pour le résultat de la cause.

 

[22]           La demanderesse n’a pas satisfait à ce fardeau. Si certains des articles ont été retenus (le dossier n’est pas clair sur ce point), il en est fait mention dans la plainte. La demanderesse n’a pas demandé les documents en cause et essuyé un refus. Dans les circonstances, je ne saurais conclure, puisque la demanderesse connaissait la nature des renseignements en cause, que celle‑ci a été privée de renseignements fondamentaux pour lui permettre de répondre à la plainte. 

 

[23]           Quant aux erreurs de faits alléguées, l’argument de la demanderesse repose en grande partie sur son désaccord avec les conclusions à tirer des faits plutôt que sur les faits eux-mêmes. Par exemple, la demanderesse prétend que la conclusion selon laquelle elle est la propriétaire du site Web constitue une erreur de fait; or, cette affirmation est contredite par la preuve qui indique que la demanderesse est désignée sur le site Web de la CHA comme étant l’administratrice du site, et par le fait que la demanderesse se réclame elle-même de l’exemption prévue au paragraphe 13(3), qui ne s’applique qu’à l’égard du propriétaire ou de l’exploitant d’une entreprise de télécommunication.

 

[24]           La demanderesse n’a pas satisfait au fardeau de démontrer qu’une conclusion de fait a été tirée de façon abusive ou arbitraire ou qu’il n’existait pas d’autres faits sur lesquels les conclusions pouvaient raisonnablement être fondées (voir Stelco Inc. c. British Steel Canada Inc. (C.A.), [2000] 3 C.F. 282 (C.A.)).

 

C.        Avis à la demanderesse

[25]           La demanderesse prétend que la Commission n’avait pas compétence parce que la victime présumée (alinéa 41(1)a)) ou le plaignant (alinéa 44(2)a)) n’a pas épuisé les recours internes ou les procédures d’appel avant que la Commission n’engage d’autres démarches. Cet argument repose sur le fait que le plaignant n’a pas d’abord adressé ses griefs à la demanderesse, ce qui aurait permis à celle-ci de retirer les communications offensantes du site Web. La demanderesse fait valoir que l’exigence d’un tel avis est inhérente au caractère réparateur de la Loi.

 

[26]           Premièrement, il n’existe ni recours interne ni procédures d’appel, consensuels ou prévus par la loi, auxquels le plaignant doive se conformer. Ces mesures s’appliquent surtout en situation d’emploi et ont été intégrées dans la Loi pour prescrire que les problèmes qui surviennent en situation d’emploi, manifestement, soient au premier chef traités au moyen des recours internes avant d’être déférés à la Commission. Elles ne s’appliquent pas au plaignant. 

 

[27]           Qui plus est, le caractère réparateur de la Loi ne signifie pas que si, avertie au préalable de l’imminence d’une plainte, la partie fautive met un terme à la conduite fautive, la Commission n’a pas compétence pour faire enquête. La demanderesse n’a pas droit en quelque sorte à un [traduction] « laissez-passer exempt de conséquence » du fait qu’elle a remédié à son comportement fautif, si le Tribunal conclut qu’un tel comportement a existé.

 

D.        La Charte

[28]           La demanderesse prétend qu’il y a violation de l’alinéa 11d) et de l’article 7 de la Charte parce qu’elle a fait l’objet d’une enquête et qu’elle doit maintenant justifier sa conduite devant un tribunal. Son mémoire traite uniquement de l’alinéa 11d).

 

[29]           Le juge Evans, alors qu’il siégeait à la Section de première instance, a bien décrit, dans Zündel c. Canada (Procureur général), [1999] A.C.F. no 964 (QL), la nature des conséquences d’une enquête de la Commission, au paragraphe 25 :

Bien entendu, même si la décision de la Commission n'est pas déterminante quant à la responsabilité légale de M. Zündel au regard de l'article 13, il est évident qu'elle a eu de graves conséquences pour lui. En particulier, elle l'a exposé aux dépenses, à l'anxiété et aux pertes de temps qui découlent inévitablement des longues poursuites judiciaires, sans oublier le risque que le tribunal rende une décision défavorable en ce qui concerne ses droits. Toutefois, j'aimerais ajouter, incidemment, que pour les personnes, comme M. Zündel, dont les opinions politiques sont très différentes de celles du grand public, les audiences devant les tribunaux engendrent une publicité dont ils ne bénéficieraient pas autrement et qui, dans une certaine mesure, n'est pas pour leur déplaire.

 

[30]           La décision de la Commission de déférer la plainte au Tribunal ne porte nullement atteinte au droit de la demanderesse à la présomption d’innocence; le processus de la Commission ne constitue pas non plus une [traduction] « procédure de nature pénale ». De plus, il est prématuré de présumer de la décision du Tribunal.

 

[31]           Quant à l’article 7 de la Charte, outre le fait que cette disposition n’a jamais été invoquée ni devant la Commission ni dans les documents de la demanderesse, aucune question en l’espèce ne met en cause l’article 7.

 

E.         Frivole/vexatoire

[32]           La demanderesse reproche maintenant à la Commission de n’avoir pas procédé à une analyse distincte pour apprécier si la plainte était « frivole, vexatoire ou entachée de mauvaise foi », ainsi que l’exige l’alinéa 41(1)d). Cet argument est dénué de fondement.

 

[33]           L’alinéa 41(1)d) constitue une exception à l’obligation première de la Commission – traiter toute plainte dont elle est saisie. Pour tomber sous le coup de l’exception, le caractère frivole ou vexatoire de la plainte devrait être manifeste ou être démontré par la personne qui fait l’objet de la plainte. Aucune de ces situations ne s’applique en l’espèce.

 

[34]           L’adoption du rapport par la Commission répond pleinement à la question de savoir si la plainte était frivole, vexatoire ou entachée de mauvaise foi. Il appert clairement que la Commission a examiné la plainte au fond; il n’est pas nécessaire qu’elle fasse une analyse distincte de l’applicabilité de cette exception.

 

F.         Partialité

[35]           Enfin, la demanderesse estime que la Commission se trouve en conflit d’intérêts. Ce conflit, présenté comme un parti pris ou une crainte raisonnable qu’il existe un parti pris, découlerait du fait que le plaignant, un ancien employé de la Commission, obtient souvent gain de cause au regard des plaintes déposées contre des personnes qui épousent les opinions que la demanderesse et la CHA auraient défendues sur le site Web.

 

[36]           Les principes applicables à cette prétention sont pleinement exposés aux paragraphes 17 à 25 de la décision Zündel. Les questions afférentes au rôle proactif et à la vocation de sensibilisation de la Commission ne se posent pas en l’espèce.

 

[37]           Aucun fait n’étaye l’allégation de la demanderesse à cet égard. Nulle personne raisonnable et informée des faits n’éprouverait une crainte raisonnable de partialité. Le fait que des plaintes portées par le plaignant dans le passé ont été retenues est attribuable avant tout, à vrai dire, au caractère bien fondé de ces plaintes.

 

G.        Contrôle de la décision

[38]           Compte tenu de la norme de contrôle de la décision manifestement déraisonnable, je n’annulerais la décision de la Commission que s’il n’existait aucun motif rationnel en droit ni au regard de la preuve pour appuyer les conclusions de la Commission. On peut raisonnablement penser qu’il vaut mieux que les questions soulevées dans la plainte, qui se rapportent à l’article 13 de la Loi, fassent l’objet d’un examen complet devant le Tribunal. Par conséquent, la décision de la Commission de déférer l’affaire au Tribunal n’est en rien manifestement déraisonnable.

 

[39]           Il n’y a eu aucun manquement aux principes d’équité ou de justice naturelle et il n’existe en l’espèce aucun argument soutenable fondé sur la Charte.

 

IV.       CONCLUSION

[40]           En conséquence, la demande de contrôle judiciaire sera rejetée avec dépens.

 

 

 


JUGEMENT

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est rejetée avec dépens.

 

 

 

« Michael L. Phelan »

Juge

 

Traduction certifiée conforme

 

Édith Malo, LL.B.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        T-2148-05

 

INTITULÉ :                                       MELISSA GUILLE

 

                                                            et

 

                                                            PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 20 septembre 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              Le juge Phelan

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 16 octobre 2007

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Melissa Guille

Alexan Kulbashian

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Shelley Quinn

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

LA DEMANDERESSE POUR SON PROPRE COMPTE

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

JOHN H. SIMS, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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