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Date : 20070924

Dossier : T-830-05

Référence : 2007 CF 957

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Vancouver (Colombie-Britannique), le 24 septembre 2007

En présence du protonotaire Roger R. Lafrenière

 

Entre :

 

ROBBINS & MYERS CANADA, LTD.

 

demandeur

(défendeur reconventionnel)

 

et

 

 

TORQUE CONTROL SYSTEMS LTD;

ET ANDREW WRIGHT

 

défendeurs

(demandeurs reconventionnels)

 

 

ORDONNANCE ET MOTIFS

 

[1]               La Cour est saisie d’une demande d’ordonnance présentée par le demandeur, Robbins & Myers Canada, Ltd. (Robbins), pour empêcher le cabinet d’avocats Ridout & Maybee, LLP (Ridout) de représenter Torque Control Systems Ltd (TCS) et Andrew Wright (Wright), les défendeurs dans la présente action pour contrefaçon de brevet, en raison d’un conflit d’intérêts.

 

[2]               Les défendeurs s’opposent à la motion au motif que leurs avocats n’ont jamais eu aucune relation que ce soit avec Robbins et n’ont reçu aucun renseignement confidentiel donnant lieu à un conflit d’intérêts. Ils déplorent aussi avoir subi un préjudice causé par le retard de Robbins à s’opposer aux allégations de conflit d’intérêts.

 

[3]               La question centrale de la présente motion est celle de savoir si un avocat qui a représenté un ancien client dans la préparation et le dépôt d’une demande qui a mené à la délivrance d’un brevet peut accepter de représenter un autre client pour invalider le même brevet obtenu par un tiers.

 

[4]               Une analyse minutieuse des faits présentés par les parties à la présente motion me permet de conclure que l’acceptation du mandat par Ridout a toutes les caractéristiques d’une irrégularité et constitue un conflit d’intérêts qui l’empêche de représenter son nouveau client.

 

Contexte factuel

 

[5]               Pour appuyer sa motion, Robbins se fonde sur quatre affidavits : l’affidavit de Curtis Ring (Ring) donné sous serment le 28 juin 2006; l’affidavit de Amy L. Jobson donné sous serment le 20 août 2006; un second affidavit de Ring donné sous serment le 18 octobre 2006; et l’affidavit de Chris Blundell (Blundell) donné sous serment le 12 octobre 2006. À l’appui de leur position, les défendeurs ont déposé deux affidavits, tous les deux donnés sous serment par Wright. Ring et Wright ont été contre-interrogés sur leurs affidavits respectifs.

 

[6]               Le brevet qui est en cause dans cette procédure porte le titre [Traduction] « Rotateur de tubage pour puits de pétrole » (le brevet ‘975). L’invention visée par le brevet ‘975 (l’invention), était initialement la propriété d’une société dénommée Alberta Basic Industries Ltd. (ABIL), dont les employés sont les auteurs de l’invention.

 

[7]               ABIL a retenu les services de Peter Everitt (Everitt), et ensuite de Kvas Miller Everitt (Kvas Miller), pour préparer et déposer les demandes de brevet pour l’invention aux États-Unis et au Canada. Everitt a fait déposer la demande de brevet aux É.-U. le 25 février 1999 (la demande aux É.-U.), identifiant trois employés d’ABIL comme inventeurs : Ring, Blundell et Wright.

 

[8]               Ring était directeur technique d’ABIL de 1997 à 2001. Il a déclaré que Everitt et son ancien cabinet, Kvas Miller, avaient reçu dans le secret des renseignements confidentiels et privilégiés se rapportant au brevet ‘975 en raison de la participation de Everitt à la préparation et au dépôt du brevet ‘975.

 

[9]               Ring affirme que la fiche technique de l’invention a été préparée par Everitt. Il affirme que les services de Everitt avaient antérieurement été retenus pour préparer plusieurs demandes de brevet pour d’autres inventions en propriété de ABIL et que, pour les questions où il était identifié comme inventeur, il s’entretenait généralement avec Everitt avant de déposer ces demandes. D’après Ring, ces discussions portaient généralement sur les caractéristiques innovantes de l’invention, les avantages de l’invention sur les autres produits déjà divulgués au ou connus du public, les autres versions de l’invention (y compris les avantages des autres versions), des explications sur la terminologie employée dans la description du brevet, et la portée opportune des revendications dans les demandes se rapportant à l’invention. Ring prétend avoir eu de multiples discussions téléphoniques avec Everitt concernant l’invention, y compris deux appels qui ont eu lieu en février 1999.

 

[10]           En contre-interrogatoire, Ring a reconnu qu’il ne se souvenait pas des renseignements précis ou des détails sur ses conversations avec Everitt se rapportant à l’invention. Il a aussi reconnu avoir mépris la poursuite sur le brevet ‘975 avec celle sur les autres brevets au nom d’ABIL gérée par Everitt. Il a toutefois insisté, dans un interrogatoire subséquent, avoir parlé avec Everitt avant de déposer le brevet ‘975.

 

[11]           Wright travaillait chez ABIL comme directeur et commercial de 1996 de 1999, et est identifié sur la liste des inventeurs du brevet ‘975. Il n’était pas présent lorsqu’ont eu lieu les conversations entre Ring et Everitt. Il a toutefois été informé par Everitt (qui a refusé de déposer son propre affidavit en réponse à la motion de Robbins) que Everitt [Traduction] « ne détient aucun renseignement confidentiel » se rapportant à tout aspect de l’invention défini dans le brevet ‘975, ou se rapportant à la préparation et au dépôt de la demande préalables à l’obtention du brevet ‘975. Everitt a aussi dit à Wright que tout renseignement qu’il détenait se rapportant à la nature, à la structure et au fonctionnement du dispositif décrit dans le brevet ‘975, ou à ses caractéristiques propres d’invention et à ses avantages sur les dispositifs antérieurs, ou encore sur la portée du brevet, se trouvent dans les documents publiés par le Bureau des brevets au Canada.

 

[12]           Le 24 janvier 2000, Everitt a déposé une demande au Canada au nom d’ABIL pour l’invention, qui a mené à la délivrance du brevet ‘975, revendiquant la priorité sur la demande aux É.-U. La requête jointe à la demande identifie le cabinet de Kvas Miller comme représentant inscrit au dossier de ABIL. Le cabinet est demeuré l’agent et le représentant inscrit pour ABIL pour la demande de brevet ‘975 au Canada jusqu’au 24 avril 2001.

 

[13]           Le 12 juin 2001, ABIL a attribué l’invention, y compris la demande de brevet ‘975, à Robbins. Le brevet ‘975 a été délivré le 14 décembre 2004, et indiquait que Robbins en était le propriétaire.

 

[14]           Dans sa demande introductive délivrée en mai 2005, Robbins allègue que les défendeurs ont violé de multiples revendications du brevet ‘975. Le 27 mai 2005, Everitt s’est entretenu avec Michael Manson, l’avocat de Robbins, pour l’informer que les services de Kvas Miller avaient été retenus pour défendre l’action et demander un prolongement des délais impartis pour déposer la défense. Wright a été informé par Everitt que Manson avait été mis au courant que Kvas Miller avait auparavant représenté ABIL, et qu’aucune opposition n’avait été soulevée à ce moment. Les défendeurs ont déposé leur défense reconventionnelle le 27 juin 2005, dans laquelle Kvas et Everitt, et le cabinet Kvas Miller étaient inscrits au dossier comme avocats représentant les défendeurs.

 

[15]           Le 16 mars 2006, l’avocat de Robbins s’est adressé par écrit à Kvas Miller pour demander que le cabinet se retire immédiatement comme avocats au motif de [Traduction] « conflit d’intérêts manifeste” émanant de son travail antérieur visant le brevet ‘975. Kvas Miller a refusé de le faire.

 

[16]           En juin 2006, Chris Kvas (Kvas) et Everitt se sont tous les deux joints au cabinet d’avocats Ridout, lequel a aussi refusé de se retirer comme avocats des défendeurs, et continue de les représenter.

 

 

Discussion

 

[17]           Dans le jugement fondateur Macdonald Estate c. Martin, [1990] 3 R.C.S. 1235 (Martin), la Cour suprême du Canada a établi qu’un cabinet d’avocat ne peut agir lorsque : (a) un avocat du cabinet dispose de renseignements confidentiels attribuables à une relation avocat-client antérieure ou actuelle; (b) le renseignement confidentiel se rapporte à une question faisant l’objet d’un examen en cours; et (c) la position de l’avocat ou du cabinet d’avocats lui permettrait d’utiliser le renseignement contre l’ancien client.

 

[18]           Pour répondre à la question de savoir s’il existe un conflit d’intérêts inhabilitant, l’auteur de la motion n’est pas obligé de démontrer la probabilité de méfait. Le critère est plutôt celui de savoir si le public, représenté par une personne raisonnablement informée, serait convaincu que le renseignement confidentiel ne serait pas utilisé. Cette politique de premier ordre s’applique et fondera l’examen par la Cour de la question suivante : « Existe-t-il un intérêt exigeant que l’avocat se retire? »

 

[19]           Si ABIL était restée propriétaire de l’invention et avait instauré la présente action en son propre nom, je n’aurais eu aucune réserve à conclure que Ridout s’était placé en conflit d’intérêts. Une relation avocat-client existait manifestement une relation avocat-client entre Kvas Miller et ABIL lorsque la demande de brevet ‘975 a été préparée et déposée. D’ailleurs, il est incontestable que le premier mandat de représentation de ABIL par Kvas Miller est suffisamment lié à la présente procédure, à savoir une action pour contrefaçon du brevet ‘975 que Ridout cherche maintenant à faire invalider au nom des défendeurs.

 

[20]            Les défendeurs prétendent me convaincre que Everitt n’a reçu aucun renseignement confidentiel de ses liens avec Ring. Toutefois, toute la preuve déposée par les défendeurs se rapportant à la question de savoir si oui ou non des renseignements confidentiels ont été divulgués repose sur des renseignements et des convictions. Wright, le seul déposant des défendeurs, n’était dans le secret d’aucune des conversations entre Ring et Everitt se rapportant à l’invention, et de ce fait ne peut témoigner quant à la nature des renseignements échangés entre Ring et Everitt. En fait, Wright n’a jamais eu aucun échange avec Everitt se rapportant à l’invention au moment où a été préparée la demande aux É.-U. et la demande de brevet ‘975, ni à aucun autre moment pendant l’examen de la demande.

 

[21]           Bien que certains renseignements divulgués par Ring à Everitt concernant l’invention auraient été intégrés au texte du brevet ‘975, il n’en va pas de même pour les pensées, les idées, et les réflexions de Ring qu’il a sans doute partagées avec Everitt. Je suis convaincu, d’après le récit de Ring, que Everitt a eu des discussions confidentielles avec Ring pour préparer et déposer la demande aux É.-U. et la demande de brevet ‘975, lesquelles auraient inclus l’étude de l’antériorité, des caractéristiques propres à l’invention, des différentes versions, le sens des mots employés, et la portée des revendications. 

 

[22]           Ring a reconnu en contre-interrogatoire qu’il n’avait aucun souvenir spécifique des sujets abordés avec Everitt. Toutefois, un client ne peut raisonnablement se souvenir de tous les renseignements communiqués à son avocat, ni juger de ce qui pourrait être confidentiel dans le sens pertinent pour répondre à la seconde question.

 

[23]           Quoi qu’il en soit, vu le rôle fondamental que joue un avocat en brevets, je ne vois pas comment Everitt aurait pu être efficace ou utile s’il n’avait pas au préalable reçu des renseignements confidentiels et des consignes de son client. Par sa nature même, le travail de l’avocat consiste à consulter le client, à solliciter des renseignements auprès de lui, et à lui donner des conseils juridiques. Par conséquent, en l’absence de toute preuve contredisant directement la preuve de Ring, je conclus que des renseignements confidentiels pertinents ont vraisemblablement été communiqués à Everitt par Ring au nom d’ABIL.

 

[24]           Mais qu’en est-il de Robbins, l’ayant cause de l’invention et du brevet ‘975? Une condition préliminaire que doit remplir l’auteur d’une motion est celle de démontrer l’existence d’une relation antérieure suffisamment liée au mandat dont il souhaite retirer l’avocat. Dans le présent dossier, les défendeurs remarquent, à raison, que leurs anciens et actuels avocats n’ont jamais eu aucune relation avec Robbins.

 

[25]           Toutefois, avant de décider sur l’existence d’une relation antérieure existe, le mot "client" doit être interprété comme [Traduction] « toute personne ayant participé ou qui a été liée » au client dans le cadre d’une entreprise antérieure : UCB Sidac International Ltd. c. Lancaster Packaging Inc., (1993), 51 C.P.R. (3d) 449, 452 (Ont Ct GD) (Sidac). Cette interprétation élargie de la définition de « client » a été adoptée par le juge Barry Strayer dans Almecon Industries Ltd. c. Nutron Manufacturing Ltd. (1994), 55 C.P.R. (3d) 327, et ultérieurement confirmée par la Cour d’appel fédérale dans (1994), 57 C.P.R. (3d) 69.

 

[26]           Dans Almecon, deux actions pour contrefaçon du même brevet avaient deux défendeurs distincts, nommément Anchortek et Nutron.  L’avocat en question avait initialement participé à la défense au nom d’Anchortek pour l’une des deux poursuites en contrefaçon. L’avocat a ensuite été embauché dans un autre cabinet d’avocats, et ce nouveau cabinet d’avocats représentait le propriétaire du brevet dans l’autre poursuite pour contrefaçon de brevet contre l’autre défendeur, Nutron. Après avoir relevé que des discussions avaient eu lieu entre les avocats d’Anchortek et de Nutron concernant le brevet en question, la Cour avait ensuite présumé que, puisque Nutron avait droit de s’attendre à la confidentialité de la relation avocat-client dans le contexte d’échange de renseignements et d’opinions entre ses avocats et ceux d’Anchortek, des [Traduction] « renseignements confidentiels avaient été communiqués". Le nouveau cabinet de l’avocat qui travaillait auparavant avec Anchortek n’était de ce fait plus autorisé à représenter le propriétaire du brevet contre Nutron, nonobstant le fait que Nutron n’avait pas eu de relation avocat-client avec le cabinet initial de l’avocat.

 

[27]           Devant Sidac et Almecon, la Cour doit adopter une perspective élargie au-delà de la relation avocat-client au sens strict. Ainsi que le déclare la Cour d’appel fédérale dans Almecon à la page 88 [Traduction] : “[i]l est possible, dans les cas où une relation antérieure établit un lien manifeste avec l’embauche de l’avocat, de conclure que le critère Martin devrait être appliqué.”

 

[28]           ABIL a attribué l’invention et la demande de brevet ‘975 à Robbins dans une transaction commerciale de valeur. ABIL avait un intérêt commercial à assurer que l’acquéreur de sa propriété intellectuelle obtenait les titres légitimes, y compris tous les droits, intérêts, et avantages liés à la propriété. À titre de cessionnaire des droits dans et à l’invention et à la demande de brevet ‘975, Robbins pouvait raisonnablement présumer que l’avocat de ABIL n’agirait pas à l’encontre de ses intérêts concernant la validité du brevet, dans la mesure où lesdits intérêts sont en adéquation avec ceux d’ABIL. 

 

 

[29]           Dans R. c. Neil, [2002] 3 R.C.S. 631, la Cour suprême du Canada a conclu que la relation fiduciale entre un avocat et son client impose à l’avocat d’aller au-delà de son obligation de ne pas divulguer de renseignements confidentiels, et l’assujettit à une obligation de loyauté et, plus particulièrement, à l’obligation d’éviter les intérêts conflictuels s’il existe un risque substantiel que la représentation par l’avocat d’un client diminuerait de manière considérable et délétère les obligations de l’avocat à l’égard de son ancien client.

 

[30]           L’obligation fiduciale de loyauté que doit l’avocat à son ancien client survit après la fin de la relation avocat-client, de sorte qu’un avocat ne peut agir de manière préjudiciable à l’ancien client dans les questions liées à l’ancienne représentation. Après avoir représenté une partie dans une demande de brevet, un avocat ne peut par la suite représenter une autre partie dans une action à l’encontre des intérêts de son ancien client découlant de, ou intimement liée à, un brevet qui est en cause. Une telle conduite mettrait directement l’avocat défende des intérêts en conflit avec ceux du premier client dont il était autrefois l’avocat, et envers lequel il aura toujours une obligation de loyauté. D’affirmer le contraire est de méconnaître du principe fondamental que les lois sur le conflit d’intérêts sont destinées à interdire, à savoir toute apparence d’impropriété. L’avocat pourrait aussi être appelé comme témoin par l’une ou l’autre des parties, ce qui amplifie la possibilité de conflit d’intérêts.

 

[31]           Devant les circonstances spécifiques au présent dossier, je conclus que l’obligation de loyauté que doit Everitt à ABIL se prolonge à Robbins, à titre de client d’ABIL et cessionnaire du brevet.

 

Renonciation du conflit et retard de Robbins

 

[32]           Les défendeurs affirment qu’au début des procédures, Robbins avait expressément consenti à la représentation des défendeurs par leur avocat, et de ce fait a renoncé à tout droit dont il aurait pu jouir de contester la représentation des défendeurs par Ridout. Les défendeurs affirment aussi que puisque Robbins a tardé à présenter la présente motion, ils devraient être autorisés à se faire représenter par l’avocat de leur choix. 

 

[33]           Le fait que l’avocat de Robbins n’a soulevé aucune opposition lorsqu’il a été informé que Kvas Miller représentait les défendeurs ne qualifie pas le renoncement au conflit d’intérêts. La question a été soulevée dans un cadre informel entre l’avocat des parties, suivant une demande de prolongation de délais. Il n’est pas clair si les répercussions des renseignements ont été pleinement comprises par l’avocat de Robbins à ce moment. Dans les circonstances, je ne suis pas convaincu que Robbins ait accepté, et encore moins renoncé, au conflit d’intérêts.

 

[34]           Robbins concède avoir tardé à agir après avoir été informé du conflit d’intérêts. Malheureusement, aucune preuve ne démontre que Robbins ait omis de s’opposer au conflit entre la date de dépôt de la demande introductive et sa première demande écrite plus de huit mois plus tard. Par contre, les défendeurs n’ont pas établi de préjudice grave découlant du délai.

 

[35]           Il demeure que le délai d’opposition au conflit d’intérêts ne rectifie pas l’existence du conflit. Les défendeurs ont en fait contribué au délai en omettant de divulguer pleinement et franchement la possibilité d’un conflit d’intérêts qu’ils ont eux-mêmes identifiée. Puisque tout préjudice que les défendeurs auraient pu subir peut être réparé par une ordonnance sur les dépens, je conclus que Robbins ne devrait pas être indument puni pour avoir manqué à s’opposer en temps opportun à ce que Everitt ou Kvas Miller demeurent les avocats au dossier.

 

Conclusion

 

[36]       Dans Succession Macdonald, la Cour suprême du Canada a identifié trois valeurs concurrentes à prendre en considération devant la possibilité d’un conflit d’intérêts :

(a)        préserver les normes exigeantes de la profession d’avocat et l’intégrité de notre             système judiciaire;

(b)        le droit du justiciable de ne pas être privé sans raison valable de son droit de retenir les services de l’avocat de son choix; et,

(c)        la mobilité raisonnable qu’il est souhaitable de permettre au sein de la profession d’avocat.

 

[37]           L’inhabilitation de l’avocat choisi par une partie constitue un recours extraordinaire qui ne doit être accordé qu’avec une grande retenue. Toutefois, l’apparence d’une conduite répréhensible demeure un principe dominant dans les instances de conflit d’intérêts.

 

[38]           Une partie de la défense des défendeurs dans cette procédure consiste à contester la validité du brevet ‘975, pour lequel la demande a été préparée et déposée par le même avocat dont le cabinet cherche maintenant à faire invalider le brevet. Une personne raisonnablement informée ne pourrait pas, dans de telles circonstances, se convaincre qu’il n’y aurait eu aucun emploi inopportun de renseignements confidentiels communiqués dans le cadre de la relation avocat-client. Les présentes circonstances affichent tous les signes d’une conduite répréhensible.

 

[39]           Aucune règle automatique ne permet de prévenir tous les conflits d’intérêts, et les règles qui existent ne s’appliquent pas dans l’absolu. Puisque Everitt a reçu des renseignements confidentiels et pourrait éventuellement les employer à l’encontre de Robbins au bénéfice des défendeurs, il est automatiquement inhabilité de représentation dans la présente procédure. Les défendeurs n’ont présenté aucune preuve que de véritables protections ont été mises en place pour empêcher Everitt de divulguer des renseignements confidentiels se rapportant à l’invention ou à la demande de brevet ‘975 à Kvas ou à d’autres membres de Ridout. Il s’ensuit que Ridout est impliqué dans le même conflit d’intérêts. Dans l’intérêt de l’intégrité de la justice et de la relation avocat-client, Ridout doit par conséquent se retirer comme avocats des défendeurs dans la présente procédure.

 

[40]           Pour ce qui est des dépens de la présente motion, aucun ne sera accordé. Les parties conviennent que le montant des dépens évalués pour la motion aurait été d’environ 5 000 $, d’après un mémoire des frais provisoire préparé par l’avocat de Robbins. Ces dépens auraient été déclarés payables par les défendeurs à Robbins devant l’accueil substantiel de la motion. Toutefois, ils sont complètement neutralisés par un montant équivalent dilapidé par les défendeurs dans la préparation des communications préalables en raison du délai pris par Robbins pour déposer la présente motion.

 

 

 


ORDONNANCE

 

            LA COUR STATUE que :

1.                  Le cabinet de Ridout & Maybee, LLP est par les présentes inhabilité à représenter les défendeurs, Torque Control Systems Ltd. et Andrew Wright, dans la présente procédure.

2.                  Aucun dépens n’est attribué pour la présente motion.

3.                  Le cabinet de Ridout & Maybee, LLP n’est pas inhabilité à représenter les défendeurs, Torque Control Systems Ltd. et Andrew Wright, aux fins limitées à tout appel de la présente ordonnance.

                                                                                                            “Roger R. Lafrenière”

Protonotaire

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        T-830-05

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :            Robbins & Myers Canada, Ltd. c. Torque Control Systems Ltd. et Andrew Wright

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Vancouver (Colombie-Britannique)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 24 janvier 2007

 

MOTIFS DE DÉCISION :               Le protonotaire LAFRENIÈRE.

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 24 septembre 2007

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Me D. Manson

Me Karen F. MacDonald

 

POUR LE DEMANDEUR

Me Christopher J. Kvas

 

POUR LES DÉFENDEURS

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Smart & Biggar

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

POUR LE DEMANDEUR

Ridout & Maybee LLP

Mississauga (Ontario)

 

POUR LES DÉFENDEURS

 

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