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Date : 20070925

Dossier : IMM-3809-07

Référence : 2007 CF 956

 

Toronto (Ontario), le 25 septembre 2007

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE MANDAMIN

 

ENTRE :

KALIFA KIMBERLY TREA

demanderesse

 

et

 

 

LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

défendeur

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE MODIFIÉS ET ORDONNANCE

 

 

Question préliminaire

 

[1]         Mme Kalifa Kimberly Trea a fait l’objet d’une mesure de renvoi. Elle a par la suite demandé un sursis à cette mesure. Le 25 août 2005, la juge Gauthier a rejeté cette demande, et l’exécution de la mesure de renvoi a été fixée au 26 août 2005. Mme Trea ne s’est pas présentée pour son renvoi tel qu’on le lui avait enjoint.

 

[2]         L’avocate du défendeur soutient que la Cour ne devrait pas instruire la présente demande de sursis à la mesure de renvoi puisque Mme Trea ne se présente pas devant elle sans avoir rien à se reprocher, car elle a déjà fait défaut précédemment de se conformer à cette mesure. L’avocate a rappelé à cet égard la directive de la juge Tremblay-Lamer portant qu’il n’était pas dans l’intérêt de la justice d’instruire une seconde demande de sursis lorsqu’un demandeur avait précédemment fait défaut de se présenter pour l’exécution de sa mesure de renvoi.

 

[3]         L’avocate de la défenderesse soutient de son côté que sa cliente peut fournir une explication pour son défaut de se conformer. Au moment où elle a présenté sa première demande de sursis, Mme Trea était enceinte. Il y a eu des complications en cours de grossesse et, le 26 août 2005, la date à laquelle la mesure de renvoi devait être exécutée, Mme Trea a passé du temps en observation dans une clinique médicale. Environ un mois plus tard, Mme Trea a donné naissance à un enfant prématuré (huit mois de grossesse).

 

[4]         Le défaut de la demanderesse de coopérer à l’exécution de la mesure de renvoi ne peut être excusé en droit puisque la Cour n’avait pas accueilli sa demande de sursis. Toutefois, les complications entourant la grossesse, une situation corroborée par la preuve soumise, et le fait que la naissance d’un enfant constitue un événement marquant dans une vie peuvent véritablement servir d’explication raisonnable pour le défaut de se conformer de la demanderesse, de sorte qu’il convient que la Cour exerce son pouvoir discrétionnaire et instruise la présente demande.

 

La demande de sursis au renvoi

 

[5]         L’exécution de la mesure de renvoi visant Mme Trea est prévue pour ce soir, le lundi 24 septembre 2007. Mme Trea demande qu’on sursoie à l’exécution de cette mesure. Pour avoir gain de cause, elle doit satisfaire au critère en trois volets établi dans la décision Toth c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2006] CF 682. Il faut ainsi établir que la demande comporte une question sérieuse, qu’un préjudice irréparable sera subi si le sursis n’est pas accordé, et que la prépondérance des inconvénients joue en faveur de la demanderesse.

 

Une question sérieuse à trancher

[6]         Lorsqu’un demandeur exerce au moyen d’une requête interlocutoire un recours essentiellement semblable à celui en cause dans la présente action, le critère à satisfaire est plus rigoureux que celui énoncé dans l’arrêt RJR – MacDonald Inc. c. Canada. Dans l’affaire Wang c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2001) 3 CF 682, on a statué qu’il fallait également prendre en compte la vraisemblance que la demande sous-jacente soit accueillie. En l’espèce, la demanderesse soutient que des questions sérieuses ont été soulevées du fait que sont en cours de traitement pour son compte une demande auprès de l’Agence et une demande présentée par le conjoint. La première demande a été présentée il y a 22 mois, mais la demanderesse n’exerce aucun contrôle sur son traitement; cette demande devrait être prise en compte en raison de ce délai de 22 mois. En outre, une demande par le conjoint, présentée cinq mois après le mariage de la demanderesse, est aussi en cours de traitement. J’estime à cet égard que, prises en compte ensemble, ces deux demandes peuvent être considérées comme constituant une question sérieuse.

 

[7]         L’avocate de la demanderesse soutient également que l’agent de renvoi n’a pas pris en compte les répercussions au plan psychologique que la séparation d’avec un membre de sa famille aurait sur l’enfant de la demanderesse. Il semble après examen des notes de l’agent que celui-ci a bien pris en compte la question des soins à dispenser à l’enfant et de son soutien financier ainsi que des répercussions sur la demanderesse de sa séparation d’avec son enfant. L’agent, toutefois, n’a pas pris en considération les répercussions au plan psychologique sur l’enfant de la séparation d’avec un membre de sa famille. Je suis convaincu que cela constitue également une question sérieuse à trancher.

 

Le préjudice irréparable

[8]         Le préjudice irréparable subi, advenant l’exécution de la mesure de renvoi, a trait à la séparation de l’enfant de la demanderesse d’avec un membre de sa famille. L’enfant pourrait rester avec sa mère, avec son beau-père ou encore avec d’autres parents-substituts. Certains éléments de preuve montrent que l’enfant est devenue attachée à son beau-père. L’enfant sera donc affectée si elle est séparée soit de la demanderesse, soit de son beau-père. Je suis convaincu par conséquent qu’on a également satisfait au critère du préjudice irréparable pour l’enfant.

 

La prépondérance des inconvénients

[9]         La demanderesse ne s’est pas avérée un fardeau pour la société canadienne. Elle n’a pas été bénéficiaire d’aide sociale ni n’a fait l’objet d’accusations au pénal. Elle a établi des liens familiaux avec son nouvel époux, qui a présenté une demande en vue de la parrainer. La demanderesse et son époux prennent soin de l’enfant, âgée de deux ans. Deux demandes visant la demanderesse sont en cours de traitement, soit une demande CH qui l’est depuis 22 mois, et une demande, plus récente, de parrainage par le conjoint.

 

[10]       Compte tenu de toutes les circonstances, la Cour conclut que la prépondérance des inconvénients penche en faveur de la défenderesse.

 

Conclusion

[11]       Pour les motifs qui précèdent, une ordonnance sera délivrée sursoyant à la mesure de renvoi hors du Canada de la demanderesse jusqu’à ce qu’une décision définitive ait été rendue à l’égard de la demande CH et de la demande de parrainage par le conjoint.

 


 

ORDONNANCE

 

VU les requêtes présentées par Kalifa Kimberly Trea pour que soit délivrée une ordonnance sursoyant à une mesure de renvoi vers Trinidad dont l’exécution est actuellement fixée à minuit le 24 septembre 2007, et

 

VU l’examen des documents déposés par la partie ainsi que les observations orales présentées le 24 septembre 2007, 

 

LA COUR ORDONNE que le sursis soit accordé jusqu’à ce qu’il soit statué sur la demande CH et sur la demande parrainée par le conjoint.

 

 

« Leonard S. Mandamin »

Juge

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Michèle Ledecq, B. trad.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

 

DOSSIER :                                                   IMM-3809-07

 

INTITULÉ :                                                  KALIFA KIMBERLY TREA

                                                                       c.

                                                            LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                            TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                          LE 24 SEPTEMBRE 2007

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

MODIFIÉS ET ORDONNANCE :             LE JUGE MANDAMIN

 

DATE DES MOTIFS ET

DE L’ORDONNANCE :                              LE 25 SEPTEMBRE 2007

 

 

COMPARUTIONS :

 

Hilary Cameron

Avocate

POUR LA DEMANDERESSE

 

 

Kareena Wilding

Avocate

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Hilary Cameron

Toronto (Ontario)

POUR LA DEMANDERESSE

 

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

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