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Date : 20070924

Dossier : IMM-426-07

Référence : 2007 CF 927

Ottawa (Ontario), le 24 septembre 2007

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE BEAUDRY

 

 

ENTRE :

MUHAMMAD AMIR IBRAHIM QURESHI

demandeur

 

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

défendeur

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire présentée en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la Loi), et visant la décision du 10 novembre 2006 où Mme Marlene Edmond, agente d’immigration désignée (l’agente), a conclu que le demandeur n’avait pas obtenu suffisamment de points pour pouvoir être considéré, en vue d’immigrer au Canada, faire partie de la catégorie des travailleurs qualifiés (programme fédéral).

 

 

LA QUESTION EN LITIGE

[2]               L’agente a-t-elle commis une erreur en n’exposant pas des motifs suffisants?

 

[3]               Je réponds par la négative à cette question, et la présente demande de contrôle judiciaire doit être rejetée.

 

LE CONTEXTE

[4]               Le demandeur est né à Jaïpur, en Inde, en 1946. C’est à Bucarest, en Roumanie, en 1997, qu’il a présenté une demande de résidence permanente au Canada. Son dossier a ensuite été transféré au Caire (Égypte), puis à Buffalo (New York) le 26 octobre 2001, pour être finalement transmis à New York,  le 27 août 2003. C’est à ce dernier endroit que la décision contestée a été rendue.

 

[5]               Dans le cadre du programme fédéral des travailleurs qualifiés, le demandeur a présenté une demande de résidence permanente au regard de deux professions, auxquelles correspondent un code et des critères particuliers selon la Classification nationale des professions (CNP) établie par Ressources humaines Canada, soit directeur financier (code 0111 de la CNP) et commis – secteur financier (code 1434.3 de la CNP).

 

[6]               Le demandeur a passé une première entrevue le 1er décembre 2005, puis une deuxième le 2 novembre 2006. On a évalué le demandeur en fonction tant de l’ancienne Loi sur l’immigration, L.R.C. 1985, ch. I-2, abrogée en 2002, que de la Loi actuelle en vue d’établir si, en tant que travailleur qualifié, il serait en mesure de réussir son établissement sur le plan économique au Canada.

 

[7]               Ni l’une ni l’autre évaluation n’a toutefois permis au demandeur d’obtenir suffisamment de points pour avoir droit à la délivrance d’un visa d’immigrant au Canada. Lors de son évaluation en fonction des critères énoncés dans l’ancien Règlement sur l’immigration, 1978, DORS/78-172 (le Règlement sur l’immigration), le demandeur a obtenu 62 points à l’égard de la première profession et 52 à l’égard de la seconde, alors que le minimum requis était de 70 points pour être admissible selon l’une ou l’autre. Dans le cadre de l’évaluation fondée sur l’actuel Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (le Règlement IPR), le demandeur n’a pas non plus obtenu le nombre minimal requis, actuellement 67 points, pour la délivrance d’un visa de résident permanent. La demande du demandeur a donc été rejetée, une décision dont le demandeur sollicite maintenant l’annulation.

 

LA DÉCISION À L’EXAMEN

[8]               Pour en arriver à sa décision, l’agente a évalué le dossier du demandeur en fonction des deux ensembles de critères suivants :

a)      Les critères prévus dans le Règlement sur l’immigration de 1978 concernant les immigrants autres que les personnes appartenant à la catégorie de la famille, les réfugiés au sens de la Convention cherchant à se réinstaller, les candidats d’une province, et les demandeurs comptant résider dans la province de Québec;

 

b)      Les critères prévus dans le Règlement IRP concernant les travailleurs qualifiés (programme fédéral).

 

 

 

[9]               L’agente a en outre fait renvoi aux dispositions applicables dans l’un et l’autre Règlement et a précisé les critères sur lesquels son évaluation s’est fondée. Parmi les critères prévus à l’alinéa 8(1)a) du Règlement sur l’immigration, il y a les études, les études et la formation, l’expérience, le facteur professionnel, l’emploi réservé ou la profession désignée, le facteur démographique, l’âge, la connaissance du français et de l’anglais, et la personnalité. Le demandeur a obtenu les résultats suivants :

 

Critères prévus au Règlement sur l’immigration

Code 0111 de la CNP

(directeur financier)

Points d’appréciation

Code 1434.3 de la CNP (commis – secteur financier)

Points d’appréciation

Maximum

Études

15

15

 

Études et formation

15

05

 

Expérience

00

00

 

Facteur professionnel

00

00

 

Emploi réservé

00

00

 

Facteur démographique

08

08

 

Âge

10

10

 

Connaissance de l’anglais

06

06

 

Bonification (parent au Canada)

05

05

 

Personnalité

03

03

 

Total

62

52

70

 

[10]           En outre, au regard des paragraphes 11(1) et (2), l’agente a déclaré que le demandeur ne disposait pas d’un emploi réservé au Canada et elle ne lui a accordé aucun point pour le facteur professionnel ni pour l’expérience, car elle n’était pas convaincue que le demandeur avait véritablement acquis l’expérience alléguée pour l’une ou l’autre profession mentionnée dans sa demande.

 

[11]           Pour ce qui est de l’évaluation selon les critères prévus dans le Règlement IPR, le demandeur a cette fois obtenu les résultats suivants :

 

 

 

Code 0111 de la CNP

(directeur financier)

Points d’appréciation

Code 1434.3 de la CNP

(commis – secteur financier)

Points d’appréciation

Maximum

Âge

10

00

 

Études

20

00

 

Expérience

00

00

 

Emploi réservé

00

00

 

Compétence dans les langues officielles

   Anglais

   Français

10

00

 

Capacité d’adaptation

   Études de l’époux ou du conjoint de fait

   Travail ou études antérieurs au Canada

   Emploi réservé

   Parent proche au Canada

05

00

 

Total

45

00

67

 

[12]           Cette fois encore, l’agente a conclu qu’il était improbable que le demandeur puisse réussir son établissement au Canada comme il n’avait pu fournir une preuve d’emploi crédible. Elle ne lui a attribué par conséquent aucun point pour le facteur de l’expérience.

 

[13]           L’agente a conclu sa décision par un paragraphe de routine dans lequel elle déclarait ne pas être convaincue, par suite de l’examen dont le demandeur avait fait l’objet, que ce dernier satisfaisait aux exigences prévues dans la Loi et le Règlement pour les motifs énoncés dans les tableaux figurant plus haut. L’agente a toutefois également produit un affidavit détaillé, daté du 29 mars 2007, auquel étaient jointes les notes au dossier consignées par le Système de traitement informatisé des dossiers d’immigration (STIDI). L’agente a également déposé un affidavit supplémentaire daté du 5 juillet 2007.

 

[14]           Les notes du STIDI fournissent des détails sur la décision de l’agente. On y signale entre autres l’existence de contradictions importantes dans les renseignements fournis par le demandeur à l’agente lorsqu’elle lui a fait passer sa première entrevue, le 1er décembre 2005. En outre, lors de la seconde entrevue passée le 2 novembre 2006, l’agente a conclu que le demandeur se montrait  évasif et qu’il modifiait ses réponses selon les besoins lorsqu’on lui faisait remarquer l’existence de contradictions dans les renseignements fournis.

 

ANALYSE

La norme de contrôle

[15]           Notre Cour a statué que les décisions des agents avaient un caractère discrétionnaire et que la norme de contrôle qui leur était applicable était donc celle de la décision manifestement déraisonnable. Cela est d’autant plus vrai lorsque, comme en l’espèce, l’agente met en question la crédibilité du demandeur d’asile (se reporter à Arvinderjit Singh c. Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, 2006 CF 1479, [2006] A.C.F. n° 1869 (QL), paragraphe 13; Zheng c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2001] A.C.F. n° 110 (1re inst.) (QL), paragraphe 9).

 

L’agente a-t-elle commis une erreur en n’exposant pas des motifs suffisants?

[16]           La seule question que soulève le demandeur dans son mémoire est de savoir si l’agente a commis une erreur en ne justifiant pas davantage sa décision défavorable. Faisant valoir l’arrêt Hilo c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1991] A.C.F. n° 228 (C.A.F.) (QL) de la Cour d’appel fédérale, l’avocat du demandeur soutient que, faute pour ce dernier d’avoir eu connaissance de la teneur des notes du STIDI, l’agente aurait dû indiquer les motifs pour lesquels elle en arrivait à ses conclusions. Dans Hilo, précité, le juge Heald a déclaré ce qui suit à cet égard :

[...] Selon moi, la Commission se trouvait dans l’obligation de justifier, en termes clairs et explicites, pourquoi elle doutait de la crédibilité de l’appelant. L’évaluation (précitée) que la Commission a faite au sujet de la crédibilité de l’appelant est lacunaire parce qu’elle est exposée en termes vagues et généraux.  [...]

 

[17]           Le défendeur concède le droit pour le demandeur de répliquer aux éléments formulés dans les notes du STIDI, en fonction des exigences prévues en matière de justification. Il est manifeste selon moi, après avoir examiné la décision ainsi que les notes du STIDI, de même que l’affidavit détaillé signé par l’agente, que la décision de cette dernière n’était pas manifestement déraisonnable compte tenu des faits dont elle était saisie. Premièrement, il n’était pas manifestement déraisonnable pour l’agente de douter de la crédibilité du demandeur quant à ses antécédents professionnels. Deuxièmement, le demandeur a fourni trois lettres de référence différentes, dont la teneur était toutefois essentiellement identique. Troisièmement, l’une des lettres était prétendument signée par M. Donald Franson; ce dernier, toutefois, a catégoriquement nié avoir signé cette lettre. L’agente n’a pas jugé satisfaisante les explications données par le demandeur, et cette conclusion n’a rien de déraisonnable.

 

[18]           Faute pour le demandeur d’avoir établi par d’autres éléments de preuve que l’agente aurait dû davantage justifier sa décision, j’estime que notre Cour n’a pas à intervenir en l’espèce. Selon moi, d’ailleurs, les motifs de l’agente étaient exposés en termes clairs et explicites. C’est là la raison pour laquelle je n’examinerai pas l’argument présenté verbalement par le demandeur le jour de  l’audience, selon lequel les lettres de refus devraient toujours être accompagnées des notes du STIDI.

 

[19]           Aucune question n’a été proposée en vue de sa certification, et aucune question n’a à être certifiée.

 


 

JUGEMENT

 

LA COUR STATUE :

  1. La demande est rejetée.
  2. Aucune question n’est certifiée.

 

 

« Michel Beaudry »

Juge

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Michèle Ledecq, B. trad.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                   IMM-426-07

 

INTITULÉ :                                                  MUHAMMAD AMIR IBRAHIM QURESHI

                                                                       c.

                                                                       LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                            MONTRÉAL (QUÉBEC)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                          LE 29 AOÛT 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                         LE JUGE BEAUDRY

 

DATE DES MOTIFS

ET DU JUGEMENT :                                  LE 24 SEPTEMBRE 2007

 

 

COMPARUTIONS :

 

Jean-François Bertrand                                    POUR LE DEMANDEUR

 

Gretchen Timmins                                            POUR LE DÉFENDEUR

 

                                                                      

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Bertrand, Deslauriers                                       POUR LE DEMANDEUR

Montréal (Québec)

 

John Sims, c.r.                                                 POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

 

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