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Date : 20070911

Dossier : T-1581-07

Référence : 2007 CF 899

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Toronto (Ontario), le 11 septembre 2007

En présence de monsieur le juge Hughes

 

ENTRE :

SETANA SPORT LIMITED

demanderesse

et

 

2049630 ONTARIO INC. exploitant une entreprise sous le nom de VERDE MINHO TAPAS & LOUNGE, JORGE MONTEZO, JOAQUIM BARBOSA, TOTAL SPORTS BAR INC.,

TOTAL SPORTS BAR LTD. exploitant une entreprise sous le nom de TOTAL SPORTS BAR,

MANUEL ARAUJO, MANUEL TAVARES, CERVEJARIA DOWNTOWN INC., LUCIANO ALVES également appelé LOU ALVES, JOSE MARTINS également appelé

JOE MARTINS, O CAMPINO RESTAURANTE INC. exploitant une entreprise sous le nom de

O CAMPINO RESTAURANTE, NELSON CALDEIRA,

RICARDO OLIVEIRA CALDEIRA, 1174264 ONTARIO INC. exploitant une entreprise sous le nom de NATIONAL SPORTS BAR également appelé NATIONAL SPORTS BAR & RESTAURANT, NORBERT E. SILVA, 1280 SPORTS BAR INC. exploitant une entreprise sous le nom de

IMPERIAL SPORTS BAR, SERGIO MASSA,

PENICHE COMMUNITY CLUB TORONTO, JOEL FILIPE, FERNANDO FILIPE, LEONEL SANTOS, SEVERINO SILVA

défendeurs

                                                                             et                                                             (Ontario)

 

171761 CANADA INC. exploitant une entreprise sous le nom de CLUB DE BILLARD LE SKRATCH, 9030-4353 QUÉBEC INC., 9034-3112 QUÉBEC INC., 9030-4304 QUÉBEC INC. exploitant aussi une entreprise sous le nom de CLUB DE BILLARD LE SKRATCH, GEORGE DIMOPOULOS, ATHANASIOS RETSINAS, STRATOS ROUMANIS,

9179-9809 QUÉBEC INC. exploitant une entreprise sous le nom de CAFÉ BAR HESTIA aussi appelé HESTIA CAFÉ BAR, TAKOUHI MANOUKIAN

défendeurs

(Québec)

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               La demanderesse Setana Sport Limited a présenté une requête en vue d’obtenir une injonction interlocutoire pour empêcher les défendeurs, la plupart étant des bars sportifs ou des établissements semblables, de présenter sur leurs écrans de télévision installés dans leurs locaux certains matchs de soccer européens qui sont transmis au Canada au moyen de signaux satellites cryptés. La demanderesse allègue qu’elle possède des droits d’auteur et ce qu’elle appelle des « droits de diffusion » en Amérique du Nord pour ces matchs de soccer qui ont été ou qui seront télévisés.

 

[2]               Je rejette la requête pour les motifs suivants.

 

[3]               D’abord, il y a un vice de forme dans les éléments de preuve de la demanderesse en matière de droit d’auteur. Faire valoir dans une déclaration que l’on possède un droit d’auteur est tout simplement une conclusion de droit. Aucun fait ne vient étayer cette conclusion, et même s’il y en avait eu, ces faits ne peuvent être présumés vrais à moins d’avoir été acceptés par une défense ou prouvés par une preuve valable pour cette requête. Or, aucune défense n’a été déposée; la plupart des défendeurs semblent avoir été signifiés il y a tout au plus dix (10) jours et aucun n’a comparu devant la Cour saisie de la requête. L’affidavit de Rod Keary qui appuie la requête ne fait que reprendre l’affirmation selon laquelle la demanderesse possède le droit d’auteur. Aucun élément de preuve substantiel n’a été présenté dans cet affidavit ni dans aucun autre.

 

[4]               La demanderesse prend appui sur un certain nombre de certificats d’enregistrement de droit d’auteur. À première vue, ces certificats sont viciés. Premièrement, ils font tous référence à des œuvres pour lesquelles le droit d’auteur subsisterait à titre d’œuvre dramatique dont « Setana Sport Limited » serait l’auteur. Un auteur doit être un être humain ou un groupe d’êtres humains. Le droit d’auteur subsiste pendant la vie de l’auteur et dure encore cinquante (50) ans (voir la Loi sur le droit d’auteur, L.R.C. 1985, ch. C-42, article 6). La subsistance du droit d’auteur est prévue lorsqu’il y a plusieurs auteurs, où il est question de la vie du dernier survivant (article 9). Le concept de « vie » ne s’applique pas à une personne morale telle que Setana. Lorsque la Loi sur le droit d’auteur envisage la possibilité qu’une entité non humaine soit la partie à l’origine du droit d’auteur, elle le fait explicitement; c’est le cas notamment des radiodiffuseurs, des producteurs ou des propriétaires d’une épreuve négative d’une photographie.

 

[5]               Selon l’article 5 de la Loi sur le droit d’auteur, le droit d’auteur subsiste lorsque l’auteur était, à la date de sa création, citoyen, sujet ou résident habituel d’un pays signataire et, s’il s’agit d’une œuvre publiée, lorsque l’œuvre a été publiée la première fois dans ce pays. Je ne vois rien qui s’y rattache dans les actes de procédure, les affidavits ni dans les certificats d’enregistrement.

 

[6]               Deuxièmement, sur la question du droit d’auteur, il est évident que l’enregistrement a été fait à l’égard d’œuvres qui n’existaient pas encore au moment de l’enregistrement. Selon l’article 5 de la Loi, la création d’une œuvre est un préalable à l’existence du droit d’auteur. L’alinéa 39.1(2)b) accorde à la Cour le pouvoir discrétionnaire de prolonger une injonction visant la subsistance du droit d’auteur sur des œuvres qui n’ont pas encore d’existence, mais, encore là, il faut des éléments pour prouver la vraisemblance d’une existence future et de la paternité des œuvres.

 

[7]               Troisièmement, la demanderesse invoque l’alinéa 9(1)c) de la Loi sur la radiocommunication, L.R.C. (1985), ch. R-2, qui interdit une personne de décoder un signal avec encodage à moins d’avoir l’autorisation du « distributeur légitime ». La demanderesse a simplement plaidé et la preuve par affidavit énonce simplement que la demanderesse détient [traduction] « les droits de diffusion pour l’Amérique du Nord ». Ni la nature de ces droits ni l’acquisition de ces droits ne sont expliquées. Nous ne savons pas si la demanderesse est un « distributeur légitime » au sens de la Loi. De qui la demanderesse détient-elle ces « droits »? La source anonyme est-elle le propriétaire véritable de ces « droits »? Jusqu’où ces « droits » s’étendent-ils? Sont-ils exclusifs ou non exclusifs? La Cour ne dispose pas de renseignements suffisants.

 

[8]               Quatrièmement, l’injonction sollicitée est formulée pour avoir la portée la plus vaste, soit « tous les matchs » présentés sur la chaîne Setana Sport. La Cour ignore ce que sont ces droits, si ceux-ci subsistent dans un match ou tous les matchs ni si Setana est le seul distributeur légitime de ces matchs au Canada.

 

[9]               La Cour a déjà signalé à une demanderesse qu’elle n’avait pas réussi à démontrer le bien‑fondé de sa cause dans la décision 1395047 Ontario Inc. c. New Atlantico Café and Restaurante Inc., 2005 CF 1358. Les avocats devraient être sensibles à ces questions.

 

[10]           La requête sera rejetée sous réserve du droit de présenter une autre requête fondée sur une meilleure preuve. Aucuns dépens ne sont accordés.

 

 

 

 

 

 

 


ORDONNANCE

 

Pour les motifs énoncés :

1.         La requête a été rejetée sans préjudice du droit de la requérante de présenter une nouvelle demande fondée sur une meilleure preuve.

            2.         Aucuns dépens ne sont adjugés.

 

« Roger T. Hughes »

Juge


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        T-1581-07

 

INTITULÉ :                                       SETANA SPORT LIMITED et

                                                            2049630 ONTARIO INC. ET AUTRES

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 10 septembre 2007

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                       LE JUGE HUGHES            

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 11 septembre 2007

 

 

COMPARUTIONS :

                                                           

Kevin Fisher                                         POUR LA DEMANDERESSE

POUR LA DEMANDERESSE

M. John Pro

POUR LE DÉFENDEUR

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :     

 

BASMAN SMITH s.r.l.

Toronto (Ontario)                                 POUR LA DEMANDERESSE

 

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