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Date : 20070809

Dossier : T-390-07

Référence :  2007 CF 825

Montréal (Québec), le 9 août 2007

En présence de l’Honorable juge Johanne Gauthier

 

ENTRE :

DOMENICO TOZZI

demandeur

et

 

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

MOTIFS DE JUGEMENT ET JUGEMENT

[1]        Monsieur Tozzi demande à la Cour d’annuler la décision de la Section d’appel de la Commission nationale des libérations conditionnelles (CNLC) qui a confirmé la décision de la CNLC rejetant sa demande de suspension temporaire (environ 1 mois) d’une des conditions de sa libération conditionnelle (interdiction de quitter le Canada) afin de lui permettre de visiter ses vieux parents (mère 87 ans, père 93 ans)[1] en Italie.

 

[2]        La Cour n’est pas insensible à la situation difficile de monsieur Tozzi qui n’a pas vu ses parents depuis 12 ans. Toutefois, pour les raisons qui suivent, après un examen très attentif de la documentation pertinente, la Cour ne peut conclure que la décision qui fait l’objet du présent contrôle judiciaire contient une erreur révisable qui justifie son annulation.

 

[3]        Tel qu’indiqué à l’audience, la Cour ne peut simplement substituer sa propre évaluation à celle du décideur. La décision est sévère, mais elle est raisonnable.

 

Contexte

[4]        Les problèmes actuels de monsieur Tozzi découlent de son association avec plus d’une famille de la mafia italienne de Montréal. Au milieu des années ’90, il est arrêté lors d’une importante opération policière organisée autour du Centre international monétaire de Montréal, un faux comptoir d’échange ouvert pas la Gendarmerie Royale du Canada (GRC).

 

[5]        Monsieur Tozzi est condamné pour blanchiment d’argent (implication dans des transactions de nature internationale d’une valeur totale de vingt-sept millions de dollars) et pour complot en vue de trafic et d’importation de stupéfiants (entre autres, 2 500 kilos de cocaïne et 25 tonnes de haschich). Lesdits complots impliquaient le groupe Dimaulo et le groupe Nicolucci. Il purge depuis le 19 mars 1996, une peine de 12 ans.[2]

[6]        Bénéficiant de la procédure d’examen expéditif (articles 125 et ss. de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous conditions, 1992, ch. 20 (ci-après la Loi)), la CNLC lui accorde, dès mars 1998, une semi-liberté. Depuis mars 2000, il bénéficie de la libération conditionnelle totale.

 

[7]        Comme son nom l’indique, cette libération est assortie de diverses conditions, par exemple et entre autres, monsieur Tozzi doit éviter tout contact avec des membres de la mafia et doit fournir des renseignements financiers à tous les mois.

 

[8]        Toutefois, la condition la plus pertinente dans le présent contexte est celle imposée automatiquement par le biais des paragraphes 133(2) de la Loi et 161(b) du Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous conditions DORS/92-620, (ci‑après le Règlement) (voir annexe A où toutes les dispositions pertinentes sont reproduites) : monsieur Tozzi doit demeurer en tout temps au Canada et dans les limites territoriales spécifiées par son surveillant jusqu’à ce qu’il ait terminé de purger sa peine en mars 2008.

 

[9]        En 2005, monsieur Tozzi fait une première demande afin d’obtenir la permission de visiter ses parents en Italie.[3] À cette époque, le Service correctionnel du Canada (SCC), dans

son évaluation globale, conclut qu’il ne peut faire de recommandation à cet égard en l’absence de commentaires de la Division de la sécurité du SCC.

 

[10]    La CNLC dans une décision datée du 19 août 2005 indique :

 

Vous êtes en libération conditionnelle totale ordonnée depuis le 18 mars 2000. Votre cheminement est qualifié de stable. Il est intéressant de noter que tous vos actifs sont au nom de votre épouse.

 

En ce qui concerne votre implication criminelle de haut niveau, vous refusez d’être identifié à une organisation criminelle. Vous ne semblez pas avoir entrepris une réflexion sur vos fréquentations ni sur votre implication dans les délits actuels.

 

Vous n’êtes pas sujet d’intérêt actuellement de la part des forces policières.

 

Votre agent de libération conditionnelle note que les liens familiaux sont effectivement très importants pour vous. Cependant, elle n’est pas en mesure, à l’heure actuelle, d’évaluer votre demande en raison du manque d’informations provenant de la division de sécurité. Elle recommande donc de ne prendre aucune mesure pour autoriser un voyage en Italie.

 

Même si votre profil criminel ne comporte qu’une seule condamnation, la Commission se doit de considérer, dans l’évaluation du risque de récidive, votre implication importante dans plusieurs organisations criminelles connues pour leurs ramifications internationales et le fait que vous n’ayez pas entamé une réflexion fort souhaitable en regard de vos choix criminels.

 

Pour ces motifs, la Commission ne prend aucune mesure pour autoriser un voyage en Italie.

 

[11]    Monsieur Tozzi argue qu’il n’a pas jugé utile d’en appeler de cette décision puisqu’il était évident qu’il manquait de l’information de la Division de la sécurité du SCC, un des facteurs spécifiquement décrits dans le Manuel des politiques de la CNLC (ci-après le Manuel) lorsque le délinquant est associé à des membres du crime organisé.

 

[12]    En 2006, monsieur Tozzi présente une nouvelle demande (sans soumissions écrites discutant des préoccupations exprimées par la CNLC en août 2005). Cette fois, le dossier est complet en ce qu’il contient toute l’information listée dans le Manuel. Toutefois, malgré le fait que les autorités policières concernées et la Division de la sécurité du SCC ne soulèvent aucune objection ou réserve, la nouvelle évaluation globale du SCC conclut:

 

Après avoir analysé l’ensemble des informations figurant au dossier du sujet, nous avons décidé de ne pas recommander le privilège demandé par le sujet. Les antécédents judiciaires du sujet font état d’importantes transactions de nature internationale et ce, en relation avec le milieu du crime organisé. Ce dernier a toujours nié son association avec le milieu du crime organisé, sa criminalité d’envergure internationale, une modalité de sa surveillance stipule spécifiquement qu’il doit résider en tout temps en territoire canadien et advenant son déplacement en Italie, nous ne serions plus en mesure d’assurer une gestion du risque sécuritaire et conséquemment nous ne pourrions plus exercer notre juridiction. 

 

 

[13]    Le 16 octobre 2006, la CNLC décide de ne pas accorder la suspension demandée. Dans sa décision, elle révise brièvement les antécédents de monsieur Tozzi et son cheminement tel que décrit dans l’évaluation globale du SCC (l’évaluation de 2006 réfère spécifiquement à celle de 2005). Elle note particulièrement qu’il continue de nier son association avec le milieu du crime organisé même si les informations au dossier démontrent sa participation à d’importantes transactions de nature internationale et ce, en relation étroite avec le crime organisé. Elle indique que « selon les vérifications policières, vous ne seriez pas un sujet d’intérêt pour le moment » et souligne « que pour les autorités italiennes, il n’y aurait pas de contre-indication à ce déplacement ».[4]

 

[14]    La CNLC considère aussi la recommandation négative de l’équipe de gestion de cas du SCC et note en passant les interventions du cousin du demandeur dans le dossier.

 

[15]    Finalement, elle conclut :

La Commission comprend votre désir de visiter vos parents, mais elle doit aussi tenir compte de votre implication dans des organisations criminelles d’envergure internationale, que vos modalités de surveillance exigent que vous résidiez en tout temps sur le territoire canadien et qu’il serait impossible à votre équipe de gestion de cas d’exercer sa juridiction pendant votre séjour en Italie.  Rien ne permettrait de vérifier le risque de récidive que peut représenter un tel séjour et aucune forme de surveillance n’est présente dans un tel voyage. Tenant compte de ces informations, elle ne prend aucune mesure pour autoriser votre voyage en Italie.

 

 

[16]    Monsieur Tozzi en appela de cette décision et dans une décision du 30 janvier 2007, la Section d’appel conclut que « la décision de la CNLC de ne prendre aucune mesure quant à votre demande de séjourner en Italie est raisonnable et qu’elle s’appuie sur de l’information pertinente, crédible et convaincante ».

 

[17]    La Section d’appel décrit les principaux arguments soulevés par le demandeur dans les représentations écrites accompagnant son avis d’appel. Elle indique aussi que « les rapports disponibles » à la CNLC contredisent les prétentions du demandeur quant à son rôle plutôt secondaire dans les opérations de blanchiment d’argent et que son argumentation écrite démontre qu’il ne comprend pas que la permission demandée constitue « un privilège dont l’octroi revêt un caractère exceptionnel ».

 

[18]    La Section d’appel note ensuite que le rôle de la CNLC est avant tout de protéger le public du risque de récidive et que :

D’après notre lecture du dossier, la Commission avait devant elle des renseignements sûrs et convaincants faisant de vous une figure importante du crime organisé et de votre association à la mafia italienne.  Vous aviez la quasi-totale confiance des différentes organisations pour transiger d’importantes sommes d’argent dans des transactions au niveau international. Ce faisant, vos modalités de surveillance font en sorte que vous devez résider en tout temps sur le territoire canadien et il est évident, et vous l’admettez vous-même, qu’il serait impossible pour l’équipe de gestion de cas d’exercer sa juridiction sur le territoire italien. Vous séjourneriez donc en Italie sans aucune forme de surveillance et sans possibilité de vérifier l’évolution possible de votre risque, le rendant dès lors inacceptable dans ce contexte. (Mon souligné)

Questions en litige

[19]    À l’audience, monsieur Tozzi a déposé une copie de son argument oral préparé avec l’aide d’un cousin qui a une formation juridique (sans être un avocat membre d’un barreau).

 

[20]    Ayant révisé les représentations écrites au dossier du demandeur qui référaient originalement à quatorze points en litige (incluant plusieurs dont la pertinence dans le contexte d’un contrôle judiciaire était loin d’être évidente comme par exemple l’existence d’un préjudice irréparable) à la lumière de l’exposé écrit  (partie III des représentations écrites), la Cour est satisfaite que le demandeur a mis l’emphase à l’audience sur les seules véritables questions qui méritent d’être commentées dans les présents motifs. Celles-ci peuvent être résumées comme suit :

 

i)             la Section d’appel de même que la CNLC ont sous-estimé l’importance de l’opinion des autorités policières et de la Division de la sécurité du SCC;

ii)            tant la Section d’appel que la CNLC ont rejeté sa demande sans motif sérieux et elles ont appliqué le mauvais test, soit l’absence de risque plutôt qu’un risque indu ou une augmentation significative du risque ou un risque inacceptable pour la sécurité du public;

iii)          la Section d’appel et la CNLC ont erré dans l’évaluation des renseignements sûrs et convaincants au dossier quant à son rôle dans les délits pour lesquels il a été condamné. Le demandeur s’appuie à cet égard sur la décision de la CNLC datée du 17 mars 1998 qu’il avait d’ailleurs porté à l’attention de la Section d’appel;

iv)          la Section d’appel et la CNLC n’ont pas suffisamment motivé leur décision particulièrement parce qu’elles n’établissent pas un lien clair entre la condition imposée et la probabilité de récidive et n’indiquent pas exactement quelle preuve supportait la conclusion que le risque serait accru lors d’un déplacement à l’étranger.

 

[21]    Monsieur Tozzi a aussi soulevé à l’audience les trois points suivants :

 

i)                    la CNLC a tenu compte d’un facteur non pertinent à savoir que si la permission était accordée, elle pourrait faire l’objet d’une couverture médiatique. Selon monsieur Tozzi, ceci est la véritable raison du refus;

ii)                   la CNLC n’a pas considéré que le terme qui restait à purger au moment de la demande avait été imposé au lieu et place d’une amende;

iii)                 la CNLC a dénaturé la preuve devant elle, soit la position des autorités policières canadiennes et celle de la Division de la sécurité (voir note 4 ci-dessus).

 

[22]    Ces trois derniers arguments n’ont pas été soulevés par le demandeur devant la Section d’appel. Comme l’indique la Cour d’appel fédérale dans Toussaint c. Canada (Conseil Canadien des Relations de Travail) (C.A.F), 1993 A.C.F. no 116 au paragraphe 5, il est clairement établi que dans le cadre d’une demande de contrôle judiciaire, la Cour ne peut trancher une question qui n’a pas été soulevée devant l’autorité dont la décision fait l’objet de la demande de contrôle judiciaire.[5]

 

Norme de contrôle

[23]    Les parties ne s’entendent pas sur la norme de contrôle applicable aux questions soulevées par monsieur Tozzi. Pour le demandeur, puisque toutes les questions soumises sont, selon lui, des questions de droit ou d’équité procédurale, elles sont soumises à la norme de contrôle de la décision correcte.

 

[24]    Pour le défendeur, le rôle de la Section d’appel est essentiellement de vérifier si la décision de CNLC est raisonnable. Selon le défendeur, la principale question devant la CNLC était une question de fait à savoir s’il est opportun de permettre au demandeur de voyager à l’extérieur du Canada compte tenu des risques que cela peut engendrer.

 

[25]    Ayant ainsi qualifié la question de fond de factuelle, le défendeur procède à l’examen des autres facteurs pertinents à l’analyse fonctionnelle et pragmatique préconisée par la Cour suprême du Canada comme suit :

i)                    pas de clause privative, pas d’appel des décisions de la Section d’appel mais celles-ci restent soumises au contrôle de cette Cour;

 

ii)                   la Section d’appel a plus d’expertise que la Cour compte tenu de son rôle spécialisé dans l’appréciation des risques et des conditions de libération conditionnelle (Lathan (2006) A.C.F. no.362 au paragraphe 7);

 

iii)                 l’objet de la Loi et des dispositions particulières en cause impliquent une analyse polycentrique puisque dans l’exercice de sa discrétion en vertu du paragraphe 133(6), la CNLC doit tenir compte des principes énoncés aux articles 100 et 101 de la Loi (Boucher v. Canada (Attorney General) [2006] F.C.J. No. 1749, paragraphe 11).

 

[26]    Sur cette base, le défendeur conclut que c’est la norme qui implique le plus de déférence qui s’applique en l’espèce, soit celle de la décision manifestement déraisonnable.

 

[27]    À ce stade‑ci, il est opportun de rappeler le caractère assez exceptionnel du mécanisme d’appel prévu dans la Loi. Dans Cartier c. Canada (Procureur Général) (C.A), [2003] 2 C.F. 317, la Cour d’appel fédérale décrit le rôle de la Section d’appel comme suit :

7     L'alinéa 147(5)a) [6]est troublant, dans la mesure où il dicte une norme de contrôle qui ne s'applique, à toutes fins utiles, que lorsque la Section d'appel, en application de l'alinéa 147(4)d), infirme la décision de la Commission et permet la libération du délinquant. Quelle norme faut-il appliquer, comme en l'espèce, lorsque la Section d'appel confirme la décision de la Commission en application de l'alinéa 147(4)a)?

8     L'alinéa 147(5)a) semble indiquer une intention du législateur de privilégier la décision de la Commission, bref de refuser la libération d'office dès que cette décision est raisonnablement fondée en droit et en fait. La Commission a droit à l'erreur, si cette erreur est raisonnable. La Section d'appel n'intervient que si l'erreur, de droit ou de fait, est déraisonnable. Je serais porté à croire qu'une erreur de droit de la Commission relativement à son degré de "conviction" quant à [page327] l'évaluation du risque d'une mise en liberté -- une erreur qui est alléguée en l'espèce -- serait une erreur déraisonnable par définition car elle touche la fonction même de la Commission.

9     Si la norme de contrôle applicable est celle de la raisonnabilité lorsque la Section d'appel infirme la décision de la Commission, il me paraît improbable que le législateur ait voulu que la norme soit différente lorsque la Section d'appel confirme. Je crois que le législateur, encore que maladroitement, n'a fait que s'assurer à l'alinéa 147(5)a) que la Section d'appel soit en tout temps guidée par la norme de raisonnabilité.

10     La situation inusitée dans laquelle se trouve la Section d'appel rend nécessaire une certaine prudence dans l'application des règles habituelles du droit administratif. Le juge est théoriquement saisi d'une demande de contrôle judiciaire relative à la décision de la Section d'appel, mais lorsque celle-ci confirme la décision de la Commission, il est en réalité appelé à s'assurer, ultimement, de la légalité de cette dernière.

(Mon souligné)

[28]    La Section d’appel devait donc à la lumière de ce qui précède examiner l’ensemble des questions devant la CNLC à la lumière de la norme de la décision raisonnable.

 

[29]    Dans Barreau du Nouveau Brunswick c. Ryan, [2003] 1 R.C.S. 247 au paragraphe 47, la Cour Suprême du Canada précise que:

47   La norme de la décision raisonnable consiste essentiellement à se demander "si, après un examen assez poussé, les motifs donnés, pris dans leur ensemble, étayent la décision".

 

[30]    Elle ajoute aux paragraphes 55 et 56 :

 

55     La décision n'est déraisonnable que si aucun mode d'analyse, dans les motifs avancés, ne pouvait raisonnablement amener le tribunal, au vu de la preuve, à conclure comme il l'a fait. Si l'un quelconque des motifs pouvant étayer la décision est capable de résister à un examen assez poussé, alors la décision n'est pas déraisonnable et la Cour de révision ne doit pas intervenir (Southam, par. 56). Cela signifie qu'une décision peut satisfaire à la norme du raisonnable si elle est fondée sur une explication défendable, même si elle n'est pas convaincante aux yeux de la cour de révision (voir Southam, par. 79).

56     Cela ne signifie pas que chaque élément du raisonnement présenté doive passer individuellement le test du caractère raisonnable. La question est plutôt de savoir si les motifs, considérés dans leur ensemble, sont soutenables comme assise de la décision. Une cour qui applique la norme de la décision raisonnable doit toujours évaluer si la décision motivée a une base adéquate, sans oublier que la question examinée n'exige pas un résultat unique précis. De plus, la cour ne devrait pas s'arrêter à une ou plusieurs erreurs ou composantes de la décision qui n'affectent pas la décision dans son ensemble.

 

[31]    La question de savoir si la Section d’appel a erré dans son appréciation globale du caractère raisonnable de la décision de la CNLC est, selon moi, une question mixte de fait et de droit puisque, comme l’indique mon collègue le juge Sean Harrington dans Fournier c. Canada (Procureur Général), [2004] C.F. 1124 au paragraphe 22, il s’agit de vérifier si la CNLC a raisonnablement appliqué la Loi à une situation particulière.

 

[32]    Dans le cadre de l’analyse pragmatique et fonctionnelle pour déterminer la norme applicable à la décision de la Section d’appel, l’absence d’un droit d’appel et de clause privative est un facteur neutre. L’expertise particulière de la Section d’appel dans l’appréciation de telles demandes milite en faveur d’une déférence surtout lorsque l’on considère, tel qu’indiqué par le défendeur, que l’objet de la Loi et des dispositions pertinentes à être appliquées requiert une analyse polycentrique. Toutefois, compte tenu de ma conclusion que l’appréciation de la raisonnabilité de la décision de la CNLC n’est pas une question purement factuelle ou une pure question de droit, la Cour conclut que la norme applicable à la décision de la Section d’appel est aussi celle de la décision raisonnable.

 

[33]    La Cour est consciente que dans certaines décisions citées par le défendeur, la norme de la décision manifestement déraisonnable a été appliquée à une question semblable. Toutefois, comme l’indique le juge Allen M. Linden de la Cour d’appel fédérale dans Condo v. Canada (AG), 2005 FCA 391, [2005] F.C.J. No. 1951, l’adoption d’une norme impliquant moins de déférence n’a pas d’impact ici car la Cour conclut que la décision est raisonnable.

 

[34]    Ceci étant dit, si comme le soumet le demandeur, la Section d’appel avait elle-même manqué à son obligation de motiver sa décision, la Cour devrait normalement intervenir puisque cela constituerait un manquement à l’équité procédurale (Sketchley c. Canada (Procureur Général) [2005] A.C.F. no 2056.

 

[35]    Si la Section d’appel avait elle-même commis une erreur de droit indépendante de celles reprochées à la CNLC (par exemple, si la Section d’appel avait appliqué la mauvaise norme dans son évaluation de la décision de la CNLC en appliquant la norme de la décision manifestement déraisonnable) la Cour devrait réviser cette question selon la norme de la décision correcte. Toutefois ici, les erreurs de droit reprochées à la Section d’appel sont les mêmes que celles que le demandeur reprochait à la CNLC. Il conteste donc l’appréciation de la raisonnabilité de la décision de la CNLC plutôt qu’une erreur distincte commise par la Section d’appel.

 

Analyse

[36]    Monsieur Tozzi argue, comme je l’ai dit, que l’absence d’objection ou de réserve de la part des forces policières ou de la Division de la sécurité et son comportement exemplaire depuis sa condamnation sont assurément des facteurs plus déterminants que « les scénarios, soupçons et autres suppositions » de la CNLC et de la Section d’appel qui de toute façon ne reposent selon lui sur aucun fait, renseignement ou information fiable. C’est aussi là, selon lui, que l’erreur de la CNLC et de la Section d’appel dans l’évaluation des renseignements ou de la preuve dont elles disposent concernant son rôle dans les délits pour lesquels il fut condamné et dans la mafia italienne prend toute son importance. Et ce sont ces « erreurs » qui expliquent sa conclusion à l’effet que la CNLC et la Section d’appel ont rejeté sa demande sans motif sérieux.

 

[37]    Disons d’abord que l’argument de monsieur Tozzi à l’effet que certains éléments sont plus déterminants que d’autres indique que dans les faits, il demande à la Cour de réévaluer les éléments au dossier et de substituer cette évaluation à celle de la Section d’appel ou de la CNLC. Compte tenu de la norme de contrôle applicable en l’espèce, il est très clair que ceci n’est pas le rôle de la Cour.

 

[38]    Lorsque monsieur Tozzi a obtenu sa libération conditionnelle totale en 2000, les conditions imposées par la CNLC - y inclus celles imposées par la Loi - représentaient les conditions les moins restrictives possibles compte tenu de la protection de la société qui demeure le critère déterminant dans tous les cas (article 101 de la Loi).

 

[39]    L’importance des conditions imposées par le paragraphe 133(2) de la Loi et par le Règlement ne peut être sous-estimée puisque le législateur en adoptant l’alinéa 161(b) du Règlement a exprimé clairement sa volonté que règle générale, les délinquants en liberté conditionnelle même totale demeure en tout temps au Canada et dans les limites territoriales spécifiées par leur surveillant. Il s’agit là d’un élément important du système de libération conditionnelle fondée sur la gestion du risque.  Le délinquant demeure toujours sous la juridiction et la surveillance du SCC par le biais de l’équipe de gestion de cas.

 

[40]    C’est donc dire que, comme l’a clairement indiqué la Section d’appel, la suspension même temporaire de cette condition est un privilège ou une exception à la règle générale.

 

[41]    Et c’est à la CNLC que le législateur a conféré la discrétion d’accorder un tel privilège (paragraphe 133(6) de la Loi). Donc, même si la CNLC doit tenir compte des recommandations du SCC, des vues et commentaires des forces policières et de la Division de la sécurité, elle ne doit pas se contenter de simplement entériner l’opinion de ces tierce-parties.

 

[42]    De la même façon qu’elle n’est pas liée par une recommandation négative du SCC, elle n’a pas à donner un poids déterminant aux vues de la Division de la sécurité ou à celles des forces policières.

 

[43]    La Loi et le Règlement ne prévoit aucun test particulier à appliquer lors d’un examen en vertu du paragraphe 133(6) de la Loi. Il s’agit d’une décision discrétionnaire. Naturellement, la CNLC doit être guidée en tout temps dans l’exécution de son mandat par les principes prévus aux articles 100 et 101 de la Loi. À cet égard, la Cour note que dans son Manuel, la CNLC indique qu’elle doit tenir compte « de tout facteur pertinent pour déterminer si le déplacement à l’extérieur du pays pourrait présenter un risque accru ».

 

[44]    Le Manuel énumère ensuite au paragraphe 7.1, certains facteurs dont la CNLC doit notamment tenir compte :

 

·        Une lettre des autorités du pays de destination confirmant qu’elles n’ont pas d’objection à ce que le délinquant visite le pays ;

·        Les renseignements du SCC sur le but, les détails et la nécessité du déplacement, incluant le nombre de jours que le délinquant sera à l’extérieur du Canada et l’accessibilité de contacts collatéraux dans le pays de destination.

·        La cohérence avec le plan correctionnel du délinquant et toute recommandation du surveillant de liberté conditionnelle ;

·        La nature des antécédents criminels du délinquant, l’opinion des services de police et, pour les délinquants associés à des membres du crime organisé, tout commentaire soumis par la Division de la sécurité, à l’AC du SCC ;

·        Les progrès faits par le délinquant au cours de sa mise en liberté actuelle et lors de ses libérations antérieures, y compris la durée à ce jour de sa présente libération et la proximité de la date d’expiration du mandat.

 

[45]    Naturellement, l’usage de l’expression « notamment » après tout facteur pertinent indique que cette liste n’est pas exhaustive.

 

[46]    Le demandeur ne conteste pas que les facteurs listés dans le Manuel sont tous pertinents et légitimes. De plus, il ne fait aucun doute qu’en l’espèce, la Section d’appel et la CNLC avaient à leur disposition toutes ces informations. Ces décideurs sont présumés avoir pris connaissance et tenu compte de tous les éléments devant eux.

 

[47]    Monsieur Tozzi a aussi indiqué qu’on lui a déjà donné la permission de voyager en Colombie-Britannique pour rendre visite à son fils et qu’il n’a aucunement abusé de ce privilège.[7] Selon lui, ceci établit qu’il peut respecter les conditions de sa libération sans surveillance immédiate.

 

[48]    Il est évident qu’un voyage à l’intérieur de la juridiction canadienne n’est pas vraiment comparable à un voyage hors juridiction particulièrement en Italie, berceau de la mafia italienne et où ses allées et venues à l’intérieur même du pays et ses possibles contacts avec des personnes liées au crime organisé ne peuvent aucunement être surveillés ou contrôlés.

 

[49]    Le demandeur soumet que la CNLC dans les faits lui a imposé un fardeau exagéré, soit de prouver avec certitude qu’il n’y a aucun risque accru de récidive lors de ce déplacement.

 

[50]    La Cour ne peut accepter cette position.  Rien dans la décision rendue n’indique que les décideurs ont imposé un tel fardeau. En fait, dans son Manuel, la CNLC décrit bien en quoi consiste l’exercice lors d’examen d’une telle demande. Elle souligne spécifiquement qu’« il faut déterminer les risques que ce délinquant présente pour la sécurité du public avant d’approuver des déplacements à l’étranger ».

 

[51]    À ce stade, il est utile de rappeler que dans sa décision du 17 mars 1998[8], la CNLC mentionne clairement que même s’il n’existe pas de motif raisonnable de croire que le demandeur commettra une infraction accompagnée de violence avant la fin de sa peine[9], elle croit « que le risque de récidive dans les délits de même nature demeure présent ». À cet égard, elle note, entre autres, que le demandeur minimise l’importance de son implication et de ses relations avec les têtes dirigeantes du réseau et qu’il a tendance à se victimiser.

 

[52]    Dans cette décision, la CNLC souligne aussi que « l’appât du gain facile apparaît comme l’explication la plus plausible de la participation de monsieur Tozzi aux délits pour lesquels il fut condamné » et qu’elle est préoccupée du peu de changement apporté aux valeurs du demandeur depuis son arrestation.

 

[53]    Le demandeur fait grand cas de sa conduite exemplaire depuis sa libération et même avant, et de son respect des conditions de sa libération jusqu’à ce jour. Personne n’a mis cela en doute, il appert toutefois de son dossier, que la situation n’a pas changé quant à sa réflexion sur ses valeurs et qu’il continue à nier ou minimiser son association passée avec le crime organisé. Ce problème est noté partout, même dans le dernier suivi de son plan correctionnel daté du 24 mai 2006.

 

[54]    En fait, monsieur Tozzi argue encore que l’approche ou « l’aveuglement » de la CNLC et de la Section d’appel quant à la nature de son association avec la mafia italienne a totalement « obscurci » leur jugement.

 

[55]    La position de la CNLC a pourtant été constante et elle n’a jamais été contestée formellement par le demandeur. La description utilisée par la Section d’appel dans sa décision est très semblable à celle utilisée par la CNLC en 1998 (voir page 3, paragraphe 3 de cette décision).

 

[56]    Ce sont les gestes posés par le demandeur et pour lesquels il fut condamné qui indiquent clairement son association à la mafia italienne.

 

[57]    Que le demandeur ait été un simple transporteur (au niveau des transactions financières) ou plus que cela, c’est son implication (plutôt que son rôle précis) dans des transactions de haut niveau soit de plusieurs millions de dollars qu’amène la CNLC à conclure qu’il jouissait d’une confiance quasi-totale des têtes dirigeantes de cette opération de lessivage d’argent.

 

[58]    Comme l’indique la CNLC dans sa décision de 1998 (voir page 5, 2e paragraphe), « la gravité du délit pour lequel [il] a été incarcéré ne laisse aucun doute quant au niveau de confiance dont [le demandeur] a fait l’objet pendant [son] implication criminelle ». Même en donnant plus de poids au témoignage de l’agent Fontaine de la GRC qui le décrivait comme un simple transporteur[10], la CNLC a conclu qu’il était évident que le demandeur a été un « proche, peut-être même un confident, de certains chefs du groupe criminalisé que l’on appelle la mafia italienne ».[11]

 

[59]    C’est pour cela que les fréquentations du demandeur ont été qualifiées d’« élément central au niveau de sa dynamique délinquante »et que la CNLC a décrit comme une « mesure indispensable » à sa libération conditionnelle qu’une condition spécifique soit imposée afin qu’il s’abstienne de toute communication avec des pairs criminalisés ou des personnes liées de près ou de loin à la mafia italienne.

 

[60]    La Cour n’est pas satisfaite que la décision de la Section d’appel contient une erreur révisable relativement à la nature de l’association du demandeur avec la mafia italienne.

 

[61]    Dans un tel contexte (nature du crime, association passée avec la mafia italienne et conditions particulières de sa libération conditionnelle), était-il raisonnable pour la Section d’appel (et la CNLC) de conclure que le risque de récidive qui existe, particulièrement lors d’un déplacement en Italie où les fréquentations et les allées et venues du demandeur ne peuvent être surveillées, devient inacceptable?

 

[62]    Après un examen assez poussé, la Cour est convaincue que dans ce cas d’espèce, où la surveillance du délinquant particulièrement quant au respect de la condition relative à ses fréquentations est un élément crucial de la gestion du risque de récidive, la conclusion de la Section d’appel est raisonnable.

 

[63]    Finalement, comme l’indique le paragraphe 101(f) de la Loi, la CNLC et la Section d’appel ont l’obligation de rendre des décisions motivées.

 

[64]    La question de savoir si les motifs sont suffisants dépend des circonstances de chaque espèce. Règle générale, les motifs sont suffisants lorsqu’ils remplissent les fonctions pour lesquelles l’obligation de motiver a été imposée (Via Rail c. Lemonde, [2000] A.C.F. no 1685, paragraphe 21).

 

[65]    Ici, le législateur visait à assurer l’équité et la clarté du processus et à donner au délinquant la possibilité de faire réviser la décision.

 

[66]    La Cour est satisfaite que le demandeur savait pourquoi on lui avait refusé cette permission et qu’il a pu exercer pleinement son droit d’appel devant la Section d’appel et son droit de faire réviser cette dernière décision par la Cour. Le raisonnement suivi et les éléments ayant motivé le refus étaient succinctement mais clairement énoncés. La Cour a aussi pu exercer son contrôle de la légalité de ces décisions.

 

[67]    Dans le présent contexte et compte tenu de l’information au dossier du décideur et du fait que le demandeur était familier avec toute la documentation antérieure dans son dossier (particulièrement les autres décisions de la CNLC), la Cour est satisfaite que les deux décisions étaient suffisamment motivées.

 

[68]    En conclusion, le demandeur n’a pas établi que la décision de la Section d’appel est entachée d’une erreur révisable qui justifierait son annulation.

 

[69]    Dans quelques mois, le demandeur aura purgé l’entièreté de sa peine et il pourra à nouveau voyager.

 

 

 

 

 


JUGEMENT

LA COUR ADJUGE que :

                        La demande est rejetée.

 

 

Johanne Gauthier

juge


ANNEXE « A »

 

Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition ( 1992, ch. 20 )

 

Objet

 

100. La mise en liberté sous condition vise à contribuer au maintien d’une société juste, paisible et sûre en favorisant, par la prise de décisions appropriées quant au moment et aux conditions de leur mise en liberté, la réadaptation et la réinsertion sociale des délinquants en tant que citoyens respectueux des lois.

 

Principes

 

101. La Commission et les commissions provinciales sont guidées dans l’exécution de leur mandat par les principes qui suivent :

 

a) la protection de la société est le critère déterminant dans tous les cas;

 

b) elles doivent tenir compte de toute l’information pertinente disponible, notamment les motifs et les recommandations du juge qui a infligé la peine, les renseignements disponibles lors du procès ou de la détermination de la peine, ceux qui ont été obtenus des victimes et des délinquants, ainsi que les renseignements et évaluations fournis par les autorités correctionnelles;

 

c) elles accroissent leur efficacité et leur transparence par l’échange de renseignements utiles au moment opportun avec les autres éléments du système de justice pénale d’une part, et par la communication de leurs directives d’orientation générale et programmes tant aux délinquants et aux victimes qu’au public, d’autre part;

 

d) le règlement des cas doit, compte tenu de la protection de la société, être le moins restrictif possible;

 

e) elles s’inspirent des directives d’orientation générale qui leur sont remises et leurs membres doivent recevoir la formation nécessaire à la mise en oeuvre de ces directives;

 

f) de manière à assurer l’équité et la clarté du processus, les autorités doivent donner aux délinquants les motifs des décisions, ainsi que tous autres renseignements pertinents, et la possibilité de les faire réviser.

 

Conditions automatiques

 

133. (2) Sous réserve du paragraphe (6), les conditions prévues par règlement sont réputées avoir été imposées dans tous les cas de libération conditionnelle ou d’office ou de permission de sortir sans escorte.

 

Dispense ou modification des conditions

 

(6) L’autorité compétente peut, conformément aux règlements, soustraire le délinquant, avant ou après sa mise en liberté, à l’application de l’une ou l’autre des conditions du présent article, modifier ou annuler l’une de celles-ci.

 

Droit d’appel

 

147. (1) Le délinquant visé par une décision de la Commission peut interjeter appel auprès de la Section d’appel pour l’un ou plusieurs des motifs suivants :

 

a) la Commission a violé un principe de justice fondamentale;

 

b) elle a commis une erreur de droit en rendant sa décision;

 

c) elle a contrevenu aux directives établies aux termes du paragraphe 151(2) ou ne les a pas appliquées;

 

d) elle a fondé sa décision sur des renseignements erronés ou incomplets;

 

e) elle a agi sans compétence, outrepassé celle-ci ou omis de l’exercer.

 

Décision

 

(4) Au terme de la révision, la Section d’appel peut rendre l’une des décisions suivantes :

a) confirmer la décision visée par l’appel;

 

b) confirmer la décision visée par l’appel, mais ordonner un réexamen du cas avant la date normalement prévue pour le prochain examen;

 

c) ordonner un réexamen du cas et ordonner que la décision reste en vigueur malgré la tenue du nouvel examen;

 

d) infirmer ou modifier la décision visée par l’appel.

 

Mise en liberté immédiate

 

(5) Si sa décision entraîne la libération immédiate du délinquant, la Section d’appel doit être convaincue, à la fois, que :

 

a) la décision visée par l’appel ne pouvait raisonnablement être fondée en droit, en vertu d’une politique de la Commission ou sur les renseignements dont celle-ci disposait au moment de l’examen du cas;

 

b) le retard apporté à la libération du délinquant serait inéquitable.

Purpose of conditional release

 

100. The purpose of conditional release is to contribute to the maintenance of a just, peaceful and safe society by means of decisions on the timing and conditions of release that will best facilitate the rehabilitation of offenders and their reintegration into the community as law-abiding citizens.

 

Principles guiding parole boards

 

101. The principles that shall guide the Board and the provincial parole boards in achieving the purpose of conditional release are

 

(a) that the protection of society be the paramount consideration in the determination of any case;

 

(b) that parole boards take into consideration all available information that is relevant to a case, including the stated reasons and recommendations of the sentencing judge, any other information from the trial or the sentencing hearing, information and assessments provided by correctional authorities, and information obtained from victims and the offender;

 

(c) that parole boards enhance their effectiveness and openness through the timely exchange of relevant information with other components of the criminal justice system and through communication of their policies and programs to offenders, victims and the general public;

 

(d) that parole boards make the least restrictive determination consistent with the protection of society;

 

(e) that parole boards adopt and be guided by appropriate policies and that their members be provided with the training necessary to implement those policies; and

 

(f) that offenders be provided with relevant information, reasons for decisions and access to the review of decisions in order to ensure a fair and understandable conditional release process.

 

Conditions of release

 

133. (2) Subject to subsection (6), every offender released on parole, statutory release or unescorted temporary absence is subject to the conditions prescribed by the regulations.

 

Relief from conditions

 

(6) The releasing authority may, in accordance with the regulations, before or after the release of an offender,

(a) in respect of conditions referred to in subsection (2), relieve the offender from compliance with any such condition or vary the application to the offender of any such condition; or

 

(b) in respect of conditions imposed under subsection (3), (4) or (4.1), remove or vary any such condition.

 

Right of appeal

 

147. (1) An offender may appeal a decision of the Board to the Appeal Division on the ground that the Board, in making its decision,

 

(a) failed to observe a principle of fundamental justice;

 

(b) made an error of law;

 

(c) breached or failed to apply a policy adopted pursuant to subsection 151(2);

 

(d) based its decision on erroneous or incomplete information; or

 

(e) acted without jurisdiction or beyond its jurisdiction, or failed to exercise its jurisdiction.

 

Decision on appeal

 

(4) The Appeal Division, on the completion of a review of a decision appealed from, may

 

(a) affirm the decision;

 

(b) affirm the decision but order a further review of the case by the Board on a date earlier than the date otherwise provided for the next review;

 

(c) order a new review of the case by the Board and order the continuation of the decision pending the review; or

 

(d) reverse, cancel or vary the decision.

 

Conditions of immediate release

 

(5) The Appeal Division shall not render a decision under subsection (4) that results in the immediate release of an offender from imprisonment unless it is satisfied that

 

(a) the decision appealed from cannot reasonably be supported in law, under the applicable policies of the Board, or on the basis of the information available to the Board in its review of the case; and

 

(b) a delay in releasing the offender from imprisonment would be unfair.

 

 

 

 


Règlement sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition (DORS/92-620)

 

161. (1) Pour l'application du paragraphe 133(2) de la Loi, les conditions de mise en liberté qui sont réputées avoir été imposées au délinquant dans tous les cas de libération conditionnelle ou d'office sont les suivantes :

a) dès sa mise en liberté, le délinquant doit se rendre directement à sa résidence, dont l'adresse est indiquée sur son certificat de mise en liberté, se présenter immédiatement à son surveillant de liberté conditionnelle et se présenter ensuite à lui selon les directives de celui-ci;

b) il doit rester à tout moment au Canada, dans les limites territoriales spécifiées par son surveillant;

c) il doit respecter la loi et ne pas troubler l'ordre public;

d) il doit informer immédiatement son surveillant en cas d'arrestation ou d'interrogatoire par la police;

e) il doit porter sur lui à tout moment le certificat de mise en liberté et la carte d'identité que lui a remis l'autorité compétente et les présenter à tout agent de la paix ou surveillant de liberté conditionnelle qui lui en fait la demande à des fins d'identification;

f) le cas échéant, il doit se présenter à la police, à la demande de son surveillant et selon ses directives;

g) dès sa mise en liberté, il doit communiquer à son surveillant l'adresse de sa résidence, de même que l'informer sans délai de :

(i) tout changement de résidence,

(ii) tout changement d'occupation habituelle, notamment un changement d'emploi rémunéré ou bénévole ou un changement de cours de formation,

(iii) tout changement dans sa situation domestique ou financière et, sur demande de son surveillant, tout changement dont il est au courant concernant sa famille,

(iv) tout changement qui, selon ce qui peut être raisonnablement prévu, pourrait affecter sa capacité de respecter les conditions de sa libération conditionnelle ou d'office;

h) il ne doit pas être en possession d'arme, au sens de l'article 2 du Code criminel, ni en avoir le contrôle ou la propriété, sauf avec l'autorisation de son surveillant;

i) s'il est en semi-liberté, il doit, dès la fin de sa période de semi-liberté, réintégrer le pénitencier d'où il a été mis en liberté à l'heure et à la date inscrites à son certificat de mise en liberté.

 

161. (1) For the purposes of subsection 133(2) of the Act, every offender who is released on parole or statutory release is subject to the following conditions, namely, that the offender

(a) on release, travel directly to the offender's place of residence, as set out in the release certificate respecting the offender, and report to the offender's parole supervisor immediately and thereafter as instructed by the parole supervisor;

(b) remain at all times in Canada within the territorial boundaries fixed by the parole supervisor;

(c) obey the law and keep the peace;

(d) inform the parole supervisor immediately on arrest or on being questioned by the police;

(e) at all times carry the release certificate and the identity card provided by the releasing authority and produce them on request for identification to any peace officer or parole supervisor;

(f) report to the police if and as instructed by the parole supervisor;

(g) advise the parole supervisor of the offender's address of residence on release and thereafter report immediately

(i) any change in the offender's address of residence,

(ii) any change in the offender's normal occupation, including employment, vocational or educational training and volunteer work,

(iii) any change in the domestic or financial situation of the offender and, on request of the parole supervisor, any change that the offender has knowledge of in the family situation of the offender, and

(iv) any change that may reasonably be expected to affect the offender's ability to comply with the conditions of parole or statutory release;

(h) not own, possess or have the control of any weapon, as defined in section 2 of the Criminal Code, except as authorized by the parole supervisor; and

(i) in respect of an offender released on day parole, on completion of the day parole, return to the penitentiary from which the offender was released on the date and at the time provided for in the release certificate.

 


COUR FÉDÉRALE

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        T-390-07

 

INTITULÉ :                                       DOMENICO TOZZI

                                                            demandeur

 

                                                            et

 

                                                            LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                            défendeur

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               10 juillet 2007

 

MOTIFS DE JUGEMENT

ET JUGEMENT:                               juge Johanne Gauthier

 

DATE DES MOTIFS :                      9 août 2007

 

 

COMPARUTIONS :

 

Monsieur Domenico Tozzi                                POUR LE DEMANDEUR

 

Me Michèle Lavergne                                       POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

M. Domenico Tozzi (pour lui-même)                 POUR LE DEMANDEUR

7669, rue Hébert

St-Léonard, Québec H1S 2Y1

 

John H. Sims, c.r.                                             POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)



[1] Lettre du monsieur Tozzi à la Section d’appel de la CNLC datée du 20 décembre 2006.

[2] Monsieur Tozzi avait l’option de payer une amende de 150 000 $ ou de voir sa sentence prolongée d’une période additionnelle de 2 ans. Il a choisi la deuxième option, ce qui porta sa sentence à 12 ans.

[3] Selon un certificat médical soumis en Italien seulement et daté du mois d’août 2000, son père souffre entre autres, de diabète, d’hypertension et de dépression.  Même s’il indique dans ses représentations écrites que la situation s’est détériorée, monsieur Tozzi n’a produit aucune preuve à cet effet.  Son affidavit ne traite pas de la situation actuelle, et n’indique pas non plus que ses deux parents étaient eux-mêmes incapables de voyager depuis août 2000.

[4] Il est opportun de souligner ici que monsieur Tozzi argue que ce passage établit que la CNLC a mal compris la preuve puisque ce n'est pas seulement la police italienne mais aussi la police canadienne et la Division de la sécurité qui n'avaient pas de réserve.

[5] De toute façon, la Cour n’est pas convaincue que la CNLC a commis une erreur révisable quant à ces questions. Même si le rapport du SCC réfère à la possibilité d’une couverture médiatique, la CNLC ne reprend pas ce point dans sa décision et l’argument du demandeur est purement spéculatif. Quant à la peine qui restait à purger, la CNLC est présumée avoir pris connaissance de toute la documentation devant elle. L’évaluation globale du SCC référait spécifiquement à celle faite en 2005 qui note ce fait de même que l’attachement du demandeur à sa famille. Finalement pour ce qui est du point iii), l’argument est fondé entièrement sur la formulation utilisée et requiert une interprétation stricte et restrictive de la décision. La Cour, comme le défendeur, n’interprète pas la décision de cette façon et elle n’est pas satisfaite que la CNLC a mal compris la position des autorités policières et de la Division de la sécurité qui était clairement décrite dans la documentation devant elle.

[6] Voir à l’annexe A.

[7] Ceci indique que des limitations territoriales à l’intérieur même du Canada lui avaient été imposées par son surveillant.

[8] Il est aussi opportun de rappeler que la CNLC dans sa dernière décision réfère spécifiquement à sa décision de 1998 qu’elle a évidemment considérée avant de décider de la demande de monsieur Tozzi.

[9] critère applicable pour déterminer si une libération conditionnelle totale doit être accordée, paragraphe 126(2) de la Loi

[10] Un autre agent de la GRC avait émis une opinion contraire dans le dossier mais n’avait pas témoigné.

[11] C’est clairement dans ce sens que la Section d’appel a utilisé l’expression « figure importante » et non pas pour décrire le demandeur comme une tête dirigeante du réseau.

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