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Date : 20070622

Dossier : IMM-4571-06

Référence : 2007 CF 669

Ottawa (Ontario), le 22 juin 2007

EN PRÉSENCE DE MADAME LA JUGE MACTAVISH

 

 

ENTRE :

MENTOR TOLA

demandeur

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Mentor Tola est un jeune citoyen albanais qui soutient craindre les membres d’une famille voisine qui auraient déclaré une vendetta contre sa famille. Selon M. Tola, cette vendetta tire son origine d’une terre en litige. La Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié a rejeté la demande de M. Tola au motif que son récit n’était pas crédible.

 

[2]               M. Tola sollicite maintenant le contrôle judiciaire de la décision de la Commission en alléguant qu’elle a tiré plusieurs conclusions de fait qui étaient manifestement déraisonnables. Il soutient également que la Commission a commis une erreur en n’accordant guère d’importance à la preuve documentaire qu’il avait déposée.

 

[3]               Pour les motifs qui suivent, je ne suis pas convaincue que la décision de la Commission était manifestement déraisonnable. La demande de contrôle judiciaire sera donc rejetée.

 

Le droit de propriété antérieur de la famille Tola sur la terre en litige

[4]               La Commission a fourni de très brefs motifs en rendant sa décision. Un examen de ces motifs montre que la raison principale pour laquelle la Commission n’a pas cru le récit de M. Tola est une incohérence dans la preuve en ce qui concerne le droit de propriété antérieur de la famille sur la terre en litige.

 

[5]               M. Tola a inscrit dans son Formulaire de renseignements personnels (le FRP) que la terre avait été [traduction] « retournée » à sa famille au début des années 90 alors que pendant son témoignage, il a affirmé que sa famille n’avait jamais été propriétaire de cette terre avant que le gouvernement ne la leur donne en 1992.

 

[6]               M. Tola soutient qu’il était clair dans son FRP qu’il ne connaissait pas tous les détails de l’historique du litige entre les deux familles et qu’il allait recueillir plus de renseignements à ce sujet avant l’audition de sa demande d’asile. En conséquence, il affirme qu’il était manifestement déraisonnable que la Commission s’arrête à ce qui était somme toute une incohérence mineure dans son témoignage pour conclure que son récit n’était pas crédible.

[7]               Je ne partage pas l’avis du demandeur selon lequel cette incohérence était mineure. Le conflit qui aurait découlé du litige relatif à la terre et la vendetta qui s’en serait suivie constituaient le fondement de sa demande et, par conséquent, son témoignage sur cette question était manifestement d’une importance capitale.

 

[8]               De plus, M. Tola a expressément écrit dans son FPR que la terre avait été [traduction] « retournée » à sa famille. C’est après avoir fait cette déclaration que M. Tola a par la suite affirmé qu’il ne connaissait pas tous les détails du litige, au-delà de ce qu’il avait déjà déclaré, ce qui donne à penser qu’il savait bien que la propriété avait été retournée.

 

[9]               Enfin, et surtout, lorsque la Commission a interrogé M. Tola à l’audience au sujet de l’incohérence, il n’a pas offert l’explication qu’il avance maintenant et affirmé qu’il avait obtenu plus de renseignements concernant le litige après avoir rempli son FRP. Dans son témoignage, il a plutôt affirmé qu’il n’avait pas remarqué l’erreur lorsqu’il a relu son FRP avant de le signer. La Commission a examiné cette explication et l’a rejetée.

 

[10]           Dans les circonstances, je ne suis pas convaincue que cette conclusion était manifestement déraisonnable.

 


L’omission de mentionner la terre en litige et la vendetta à l’agent d’immigration

[11]           Le deuxième motif en raison duquel la Commission n’a pas cru le récit de M. Tola est qu’à l’époque où il faisait sa demande d’asile de l’intérieur du Canada, il n’a fait aucune mention soit de la terre en litige, soit de la vendetta.

 

[12]           Un examen des notes de l’agent d’immigration révèle que, lorsqu’il a demandé à M. Tola pourquoi il cherchait à obtenir l’asile au Canada, M. Tola a fourni une description passablement longue et détaillée de l’attaque qu’il aurait eu subie, des répercussions qu’elle avait entraînées et du conflit qui en avait découlé entre sa famille est ses voisins. Aucune mention de la terre en litige ne figure au compte‑rendu. En effet, lorsque l’agent d’immigration a demandé à M. Tola pourquoi il avait été attaqué, il a répondu qu’il ne le savait pas.

 

[13]           Le récit de M. Tola au sujet de la terre en litige n’apparaît que trois semaines plus tard lorsqu’il a rempli son FRP. Dans ces circonstances, rien ne me semble déraisonnable dans la conclusion de la Commission selon laquelle cette omission remet en question la crédibilité de M. Tola.

 

[14]           Il est vrai que la Commission a commis une erreur en concluant que M. Tola n’avait fait aucune mention de la vendetta à l’agent d’immigration, puisque ces notes renferment une mention claire selon laquelle il y aurait une vendetta impliquant les deux familles. Cependant, étant donné les autres problèmes relevés dans le récit de M. Tola, je ne suis pas convaincue que cette erreur, en elle‑même, justifie l’annulation de la décision rendue par la Commission.

Le vol qualifié comme mobile de l’attaque

[15]           La Commission a aussi commis une erreur en affirmant que M. Tola avait dit à l’agent d’immigration que ses attaquants voulaient le voler. En fait, M. Tola a affirmé que la police avait laissé entendre que le vol qualifié était un des mobiles possibles de l’attaque. Toutefois, peu importe de savoir si c’était M. Tola ou la police qui avait soulevé la possibilité que le mobile de l’attaque ait été le vol qualifié, ce n’est pas une erreur importante, car l’élément essentiel est que M. Tola n’a jamais mentionné au cours de son entrevue avec l’agent d’immigration que la terre en litige pouvait être le mobile de l’attaque.

 

L’évaluation de la preuve documentaire effectuée par la Commission

[16]           Étant donné que la Commission n’a pas cru au récit de M. Tola relativement à la vendetta, il n’était pas déraisonnable pour la Commission de décider de ne pas accorder beaucoup d’importance à la preuve documentaire.

 

Conclusion

[17]           Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire sera rejetée.

 

La certification

[18]           Les parties n’ont proposé aucune question aux fins de certification, et aucune n’est soulevée en l’espèce.

 

 


JUGEMENT

 

LA COUR STATUE :

 

1.                  que la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée;

 

            2.         qu’aucune question grave de portée générale n’est certifiée.

 

 

« Anne Mactavish »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

 

Jacques Deschênes, LL.B.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                    IMM-4571-06

 

INTITULÉ :                                                   MENTOR TOLA

                                                                        c.

                                                                        LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                                        ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           LE 21 JUIN 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                          LA JUGE MACTAVISH

 

DATE DES MOTIFS :                                  LE 22 JUIN 2007

 

 

COMPARUTION :

 

Micheal Crane

 

POUR LE DEMANDEUR

Kristina Dragaitis

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Micheal Crane

Avocat

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

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