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Date : 20070620

Dossier : IMM-864-06

Référence : 2007 CF 658

Toronto (Ontario), le 20 juin 2007

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE CAMPBELL

 

ENTRE :

WAKEEL AHMED QAZI

 

demandeur

et

 

 

LA MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE

(L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA)

 

défendeur

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision rendue le 16 janvier 2006, par Anne McLellan, ministre de la Sécurité publique (la ministre) qui a rejeté la demande de M. Qazi en vue d’obtenir une « dispense » ministérielle en vertu du paragraphe 34(2) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (la Loi).

 

[2]               M. Qazi est arrivé au Canada le 6 avril 1996, et on a conclu qu’il avait qualité de réfugié au sens de la Convention en 1997 en raison de la persécution qu’il avait subie de la part des autorités de l’État du Pakistan du fait de son appartenance au MQM-A. Par la suite, il a présenté une demande de résidence permanente au Canada le 3 février 1998. Après avoir été interrogé, M. Qazi a été jugé interdit de territoire, en application de l’alinéa 34(1)f) de la Loi, sur le fondement qu’il y avait des motifs raisonnables de croire que le MQM-A était une organisation qui s’était livrée à des activités terroristes au Pakistan entre 1992 et 1996. M. Qazi a donc sollicité une dispense en vertu du paragraphe 34(2) de la Loi :

 

34(2) Ces faits n’emportent pas interdiction de territoire pour le résident permanent ou l’étranger qui convainc le ministre que sa présence au Canada ne serait nullement préjudiciable à l’intérêt national.

 

34. (2) The matters referred to in subsection (1) do not constitute inadmissibility in respect of a permanent resident or a foreign national who satisfies the Minister that their presence in Canada would not be detrimental to the national interest.

 

 

[3]               En ce qui a trait à la demande présentée en vertu du paragraphe 34(2) de la Loi, M. Qazi a été interrogé par Mme Dello, une agente d’immigration, qui a par la suite déposé un rapport contenant une description complète des circonstances entourant l’appartenance de M. Qazi au MQM-A, tant au Pakistan qu’au Canada. Mme Dello a recommandé que la ministre rende une décision favorable au demandeur. Cependant, dans une note d’information à l’intention de la ministre, le superviseur de Mme Dello, M. Jolicoeur, est arrivé à la conclusion qu’une décision favorable ne devrait pas être rendue et a présenté cette recommandation à la ministre. La ministre a accepté cette recommandation en indiquant « Je suis d’accord ». Les parties conviennent que le contenu de la note d’information constitue les motifs de la décision de la ministre.

 

[4]               Le point de départ dans la décision relative à la demande qui fait actuellement l’objet de contrôle est la conclusion de l’existence de motifs raisonnables concernant le MQM-A, fondée sur l’appartenance de M. Qazi à cette organisation au Pakistan. La question qui en découle est de savoir comment le demandeur a manifesté son appartenance à cette organisation au Canada. En ce qui a trait à cette manifestation, les paragraphes qui suivent, tirés de la note d’information, sont d’une importance capitale :

[traduction]

 

Nous vous recommandons de rejeter la demande de dispense présentée par M. Qazi, en vertu du paragraphe 34(2) de la LIPR, visant à faire annuler l’interdiction de territoire dont il fait l’objet conformément à l’alinéa 34(1)f) de la LIPR. Le paragraphe 34(2) énonce : « Ces faits n’emportent pas interdiction de territoire pour le résident permanent ou l’étranger qui convainc le ministre que sa présence au Canada ne serait nullement préjudiciable à l’intérêt national ». Nous sommes d’avis que M. Qazi n’a pas été en mesure d’établir que sa présence au Canada est nullement préjudiciable à l’intérêt national.

 

La justification de cette recommandation est expliquée en détail dans l’exposé des motifs ci-dessus. M. Qazi a exercé des responsabilités accrues au sein de l’organisation lorsqu’il était au Pakistan et il y est demeuré loyal et actif pendant les cinq ans qui ont suivi son arrivée au Canada. Nous sommes d’avis qu’il serait préjudiciable à l’intérêt du Canada d’accorder une dispense à une personne qui a manifestement continué d’appuyer une organisation terroriste pendant qu’il était au Canada. 

 

(dossier certifié du tribunal, page 4)

 

[5]               Il faut se demander si la preuve au dossier dont disposait M. Jolicoeur étaye les conclusions selon lesquelles M. Qazi [traduction] « est demeuré loyal et actif [au sein du MQM‑A] pendant les cinq ans qui ont suivi son arrivée au Canada » et qu’il est une personne [traduction] « qui a manifestement continué d’appuyer une organisation terroriste pendant qu’il était au Canada ». Pour les motifs qui suivent, je suis d’avis que ces conclusions ne sont pas étayées par la preuve.

 

[6]               Les conclusions constituent une inférence selon laquelle M. Qazi serait demeuré actif au sein du MQM-A et loyal à celui-ci pendant qu’il était au Canada, et qu’il aurait appuyé les activités de cette organisation au Pakistan. Il n’y a aucune preuve qui appuie cette inférence.

 

[7]               Il est vrai que M. Qazi est demeuré « membre » du MQM-A pendant qu’il était au Canada, mais la preuve étaye seulement la conclusion selon laquelle son « appartenance » se limitait à des activités sociales et des services communautaires au Canada, et qu’elle n’était aucunement liée aux activités du MQM-A au Pakistan. La preuve étaye la conclusion selon laquelle M. Qazi s’est retiré en tant que « membre » de l’organisation pour une raison personnelle voulant qu’il n’était plus intéressé à entretenir des liens avec les personnes auxquelles il était associé. À mon avis, selon l’examen de l’ensemble de la preuve, il n’y a aucune preuve qui étaye la déclaration selon laquelle M. Qazi [traduction] « a[vait] manifestement continué d’appuyer une organisation terroriste pendant qu’il était au Canada ».

 

[8]               Je conclus donc que la décision de la ministre est manifestement déraisonnable et que, par conséquent, elle est entachée d’une erreur susceptible de contrôle.

 


ORDONNANCE

 

            J’annule donc la décision de la ministre qui fait actuellement l’objet de contrôle.

 

Il n’y a aucune question aux fins de certification.

 

« Douglas R. Campbell »

Juge

 

 

 

 

 

 

 

                Traduction certifiée conforme

 

                Caroline Tardif, LL.B., trad.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                 IMM-864-06

 

INTITULÉ :                                                WAKEEL AHMED QAZI c.

LA MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE (L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA)

                                                                                                                  

LIEU DE L’AUDIENCE :                          TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                        LE 19 JUIN 2007

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                                LE JUGE CAMPBELL

 

DATE DES MOTIFS :                               LE 20 JUIN 2007          

 

 

COMPARUTIONS :

 

Chantal Desloges                                     POUR LE DEMANDEUR

 

Stephen H. Gold                                      POUR LE DÉFENDEUR

                                                                                                           

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Chantal Desloges

Avocate                                                                                  

Toronto (Ontario)                                     POUR LE DEMANDEUR

                                                                                                         

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada                                            

Toronto (Ontario)                                          POUR LE DÉFENDEUR

 

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