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Date : 20070207

Dossier : IMM-1353-06

Référence : 2007 CF 146

Toronto (Ontario), le 7 février 2007

EN PRÉSENCE DE  MONSIEUR LE JUGE HUGHES

 

 

ENTRE :

ADRIANA SANTAMARIA CRAST

demanderesse

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               La demanderesse, Adriana Santamaria Crast, est une adulte qui est actuellement citoyenne du Mexique. Elle demande l’asile au Canada en vertu de l’article 96 et du paragraphe 97(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la LIPR). Dans une décision rendue le 20 février 2006, la Commission de l’immigration et du statut de réfugié a rejeté cette demande parce que la demanderesse pouvait recouvrer sa citoyenneté argentine, car il n’existait pas de preuve de crainte fondée de persécution en Argentine. En outre, elle pouvait retourner en Argentine et ne pas demander asile au Canada.

 

[2]               La demanderesse cherche à faire annuler cette décision et à faire renvoyer l’affaire à un autre commissaire pour qu’il rende une nouvelle décision. Pour les motifs qui suivent, je conclus que la décision doit être annulée et renvoyée à un autre commissaire afin qu’une nouvelle décision soit rendue.

 

[3]               La demanderesse est née en Argentine et y a vécu au cours des trois premières années de sa vie. Ses parents étaient apparemment des citoyens mexicains. La demanderesse et sa famille ont déménagé au Mexique où la demanderesse est devenue citoyenne et a vécu jusqu’à ce qu’elle vienne au Canada pour présenter sa demande. Elle détient un passeport mexicain. Elle n’est jamais retournée en Argentine, n’y a pas de famille et n’y connaît personne. Elle n’a pas tenté de reprendre sa citoyenneté argentine ni de faire l’acquisition d’un passeport argentin.

 

[4]               Jusqu’à il y a quelques années, le père de la demanderesse était un activiste et un rédacteur bien connu au Mexique. Il a quitté le Mexique et est venu au Canada. Il y a présenté avec succès une demande d’asile. Le père de la demanderesse vit maintenant au Canada et mène une carrière universitaire.

 

[5]               Comme elle est la fille de son père, la demanderesse a subi des menaces de violence au Mexique à un point tel qu’elle demande l’asile au Canada pour être avec son père.

 

[6]               La preuve produite en l’espèce relativement au droit argentin indique que toute personne qui est née en Argentine est considérée comme une ressortissante de l’Argentine et une citoyenne de ce pays. La nationalité et la citoyenneté sont deux concepts différents en Argentine, en ce sens que la citoyenneté comprend, en plus, certains droits politiques comme le droit de vote et le droit d’exercer des fonctions officielles. Il est tout à fait impossible de renoncer à sa nationalité. Toutefois, il est possible de perdre sa citoyenneté pour un certain nombre de raisons, dont l’acquisition de la citoyenneté dans un autre pays (sauf dans le cas de certains pays avec lesquels il existe des ententes spéciales, pays dont le Mexique ne fait pas partie), la perpétration d’une infraction grave et l’acceptation d’honneurs à l’étranger sans avoir obtenu au préalable l’approbation du gouvernement argentin. Si un ressortissant argentin a perdu sa citoyenneté, cette personne peut en demander la restitution auprès d’un juge d’une cour fédérale, mais seulement si elle réside en Argentine à ce moment-là. En règle générale, la restitution ne sera pas refusée, sauf si le demandeur a été déclaré coupable d’un crime majeur dans un jugement définitif. Toutefois, les dossiers de restitution sont des cas d’espèce, et il est impossible de formuler un énoncé général quant au résultat d’une demande en particulier.

 

[7]               En appliquant ce droit à la demanderesse dans le présent dossier, on constate que la demanderesse était, de naissance, ressortissante et citoyenne de l’Argentine. En acquérant la citoyenneté mexicaine, elle a perdu la citoyenneté argentine, mais non sa nationalité, qu’elle aura toujours. Pour reprendre sa citoyenneté argentine, la demanderesse devrait d’abord résider en Argentine, puis présenter une demande à un juge d’une cour fédérale. En ce qui concerne la première exigence, il n’existe pas de preuve de ce qu’est la « résidence ». Si l’on présume que la condition de « résidence » est réalisée, comme la demanderesse ne possède aucun dossier de condamnation pour un acte criminel grave, on s’attend à ce que sa demande soit accueillie, mais ce n’est en aucune façon certain.

 

[8]               Pour ce qui est du droit canadien, l’article 96 de la LIPR traite des personnes qui demandent la qualité de réfugié au sens de la Convention :

« 96. A qualité de réfugié au sens de la Convention — le réfugié — la personne qui, craignant avec raison d’être persécutée […] a) soit se trouve hors de tout pays dont elle a la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de chacun de ces pays [] »

 

Les parties conviennent que la « nationalité » dans cette disposition signifie la « citoyenneté » au sens du droit argentin.

 

[9]               Il n’est pas contesté que la demanderesse a prouvé qu’elle craignait avec raison d’être persécutée au Mexique, mais non en Argentine.

 

[10]           La Commission a conclu que, comme la demanderesse était en possession d’un passeport mexicain, il existait une présomption réfutable selon laquelle la demanderesse était une ressortissante mexicaine. Toutefois, comme ce passeport indiquait que le lieu de naissance de la demanderesse était l’Argentine, la Commission a examiné le statut de la demanderesse en rapport avec l’Argentine.

 

[11]           En ce qui concerne les personnes qui doivent être considérées comme ressortissantes, la Commission a affirmé aux pages 2 et 3 de ses motifs :

 

[traduction]

Être considéré ressortissant, de par la loi, signifie que la personne concernée est légalement ou automatiquement considérée un ressortissant aux termes des textes législatifs de l’État ayant trait à la nationalité. Les personnes qui obtiennent automatiquement la citoyenneté de par l’application de ces dispositions juridiques sont définitivement des ressortissants de cet État. Ceux qui doivent présenter une demande de citoyenneté et ceux que la loi décrit comme étant admissibles à présenter une demande, mais dont la demande pourrait être rejetée, ne sont pas des citoyens de cet État de par l’application de la loi de cet État. Lorsque la procédure administrative confère aux responsables le pouvoir discrétionnaire d’accorder la citoyenneté, ces demandeurs ne peuvent être considérés comme des citoyens avant que la demande ait été approuvée et réglée et que la citoyenneté de cet État leur ait été accordée conformément à la loi.

 

[12]           La Commission a alors énoncé la preuve quant au droit argentin qui a déjà été résumé dans les présents motifs et dans les arguments de l’avocat de la demanderesse. Le raisonnement justifiant le rejet par la Commission de la demande présentée par la demanderesse était énoncé aux pages 4 et 5 de ses motifs :

[traduction]

Le tribunal conclut que la demanderesse a perdu involontairement sa citoyenneté argentine lorsqu’elle a acquis la citoyenneté étrangère, mais qu’elle n’est pas régie par la double citoyenneté. Toutefois, le tribunal conclut qu’il n’y a pas assez d’éléments de preuve crédibles ou dignes de foi selon lesquels la demanderesse se ferait refuser la restitution de ses droits à la citoyenneté si elle les demandait. Le tribunal conclut que, bien que le recouvrement de la citoyenneté argentine ne soit pas automatique, il n’y a pas assez d’éléments de preuve crédibles ou dignes de foi selon lesquels la demanderesse se ferait refuser ce droit si elle retournait en Argentine, car les seuls motifs pour lesquels une personne de l’Argentine qui réside en Argentine se ferait refuser la restitution de ses droits à la citoyenneté sont d’ordre pénal. Aucune preuve n’a été présentée selon laquelle la demanderesse a commis un délit grave ou possède un casier judiciaire.

 

Au poste d’entrée, la demanderesse s’est fait demander si elle avait envisagé de déménager en Argentine. Elle a alors répondu par la négative et a expliqué que le gouvernement argentin est dans une piètre situation, et qu’elle ne connaissait personne dans ce pays.

 

Aucune preuve n’a été présentée selon laquelle la demanderesse éprouverait une crainte fondée de persécution, craindrait pour sa vie, craindrait de se faire torturer, ou ferait l’objet de traitements ou peines cruels et inusités si elle retournait en Argentine.

 

[13]           Deux questions en litige sont soulevées en l’espèce :

 

1.                  La Commission a-t-elle appliqué les principes juridiques appropriés?

 

2.                  La Commission a-t-elle bien évalué et appliqué les faits en fonction de ces principes juridiques?

 

 

[14]           Tandis que les principes de droit doivent être appréciés sur la base de la décision correcte et que les conclusions de fait doivent l’être sur la base de la décision manifestement déraisonnable, les questions qui se posent en l’espèce sont essentiellement des questions mixtes de fait et de droit et seront appréciées en fonction du caractère raisonnable.

 

[15]           Le principal arrêt canadien portant sur les réfugiés qui ont apparemment des liens avec plusieurs États est Canada (Procureur général) c. Ward, [1993] 2 R.C.S. 689. Dans cet arrêt, la Cour suprême a été confortée dans sa position par une Convention de 1951 qui n’a jamais été intégrée aux lois du Canada. Il y est dit au paragraphe 89 :

89. En examinant la revendication d’un réfugié qui bénéficie de la nationalité de plus d’un pays, la Commission doit se demander si le demandeur ne peut ou ne veut se réclamer de la protection de chaque pays dont il a la nationalité. Le paragraphe 2 de l’art. 1(A)(2) de la Convention de 1951 n’a jamais été incorporé dans la Loi sur l’immigration et il n’a donc pas strictement force exécutoire; cependant, il donne un sens approprié à l’expression « réfugié au sens de la Convention » sur ce point. Ce paragraphe de la Convention se lit ainsi :

 

 

ARTICLE PREMIER

 

 

[...]

 

A [...]

 

  (2) [ ...]

     Dans le cas d’une personne qui a plus d’une nationalité, l’expression « du pays dont elle a la nationalité » vise chacun des pays dont cette personne a la nationalité. Ne sera pas considérée comme privée de la protection du pays dont elle a la nationalité, toute personne qui, sans raison valable fondée sur une crainte justifiée, ne s’est pas réclamée de la protection de l’un des pays dont elle a la nationalité.

 

Comme je l’ai déjà dit, la protection internationale des réfugiés est destinée à servir de mesure « auxiliaire » qui n’entre en jeu qu’en l’absence d’appui national. Lorsqu’il est possible de l’obtenir, la protection de l’État d’origine est la seule solution qui s’offre à un demandeur. Le fait que cette disposition de la Convention n’a pas expressément été incorporée dans la Loi ne l’empêche pas d’être pertinente. L’évaluation du statut de réfugié au sens de la Convention la plus compatible avec cette idée exige l’examen de la possibilité pour le demandeur d’obtenir une protection dans tous les pays dont il a la citoyenneté.

 

 

[16]           Dans Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Williams, 2005 CAF 126, la Cour d’appel fédérale devait faire affaire avec un homme qui, étant jeune, avait la double citoyenneté, mais qui a perdu l’une d’elles lorsqu’il a conservé l’autre à l’âge de la majorité. D’après la preuve présentée, la citoyenneté du premier pays pouvait être récupérée selon un usage couramment pratiqué. La cour a indiqué aux paragraphes 21 et 27 :

21        Dans un autre jugement rendu avant que la Cour suprême du Canada ne rende l’arrêt Ward, le juge Rothstein (alors juge à la Section de première instance de la Cour fédérale) a, dans l’affaire Bouianova c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1993), 67 F.T.R. 74, élargi la portée de l’arrêt Akl de notre Cour. Il a déclaré que si, au moment de l’audience, le demandeur a le droit d’acquérir la citoyenneté d’un pays déterminé en raison de son lieu de naissance et que cette acquisition peut se matérialiser par l’accomplissement de simples formalités, ne permettant pas ainsi à l’État en question de refuser de lui accorder la qualité revendiquée, le demandeur est censé se réclamer de la protection de cet État et se verra refuser la qualité de réfugié au Canada sauf s’il démontre qu’il craint avec raison d’être persécuté également dans cet autre pays dont il a la nationalité.

 

[…]

 

27        Cet argument est mal fondé. Le principe qui a été établi par la jurisprudence, c’est que lorsque la citoyenneté d’un autre pays peut être réclamée, le demandeur est censé entreprendre des démarches pour l’obtenir et qu’il se voit refuser la qualité de réfugié s’il est démontré qu’il était en son pouvoir d’acquérir cette autre citoyenneté. Or, en l’espèce, l’intimé a la faculté de renoncer à sa citoyenneté rwandaise pour obtenir la citoyenneté ougandaise. Il lui est loisible d’acquérir cette autre citoyenneté s’il a la volonté de l’obtenir. Dans le jugement Chavarria c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1995] A.C.F. no 17 (1re inst.) (QL), la seule décision invoquée par les parties qui aborde la question de la renonciation à la citoyenneté, le juge Teitelbaum a, sans toutefois entrer dans les détails, refusé d’accorder la qualité de réfugié et ce, même si le recouvrement de la citoyenneté d’un autre pays « signifierait probablement que Eduardo aurait à répudier la nationalité citoyenneté salvadorienne » (au paragraphe 60).

 

[17]           La cour a ajouté aux remarques précédentes les paragraphes 29 à 32 où elle donne quatre justifications de sa décision :

29        Premièrement, il ne s’agit pas ici de forcer un individu à renoncer à sa citoyenneté. L’intimé est libre et demeure libre, au Canada, de ne pas renoncer à sa citoyenneté rwandaise et de ne pas chercher à obtenir la citoyenneté ougandaise. S’il choisit de ne pas renoncer à sa citoyenneté rwandaise et de ne pas revendiquer la citoyenneté ougandaise, il devra assumer les conséquences de son choix.

 

30        Deuxièmement, nous n’avons pas affaire ici à quelqu’un qui deviendra apatride s’il renonce à sa citoyenneté.

 

31        Troisièmement, précisément parce que la citoyenneté est un droit fondamental, devant le choix de devenir un réfugié dans un pays ou un citoyen dans un autre, une personne a tout à gagner en optant pour la citoyenneté plutôt que pour le statut de réfugié.

 

32        Quatrièmement, on ne saurait prétendre qu’une personne est privée de son droit de citoyenneté lorsqu’on lui offre la possibilité de renoncer à la citoyenneté d’un pays où elle court le risque d’être persécutée en échange de l’acquisition de plein droit de la citoyenneté d’un pays où elle ne s’expose à aucun risque. On gagne d’un côté ce que l’on perd de l’autre. De plus, il semble qu’un citoyen rwandais ait un droit automatique, naturel et historique à la citoyenneté rwandaise même s’il y a renoncé en vue d’acquérir une citoyenneté étrangère (Rapport sur le Rwanda, octobre 2002, paragraphes 5.3 à 5.5 et note infrapaginale 25g), dossier d’appel, vol. 1, onglet A, pages 119 et 165).

 

[18]           L’arrêt Williams permet de conclure que, lorsque la citoyenneté est disponible dans un autre pays, on s’attend à ce que le demandeur tente de l’acquérir dans la mesure où il était « en son pouvoir » de l’acquérir. La citoyenneté est décrite au paragraphe 31 comme un « droit fondamental » qu’une personne choisirait plutôt que de demander le statut de réfugié.

 

[19]           Une question légèrement différente a été soulevée devant la Cour fédérale dans l’arrêt Katkova c. Canada (MCI), [1997] A.C.F. no 549, dans laquelle le demandeur était un Juif d’Europe de l’Est qui, même s’il n’est jamais allé en Israёl, a le droit d’y aller en vertu du droit israélien. La Cour fédérale a statué qu’il doit exister une véritable connexion et un lien physique avec le pays (Israёl) pour que la nationalité soit prise en compte. Il n’y avait pas d’exigence obligatoire de demander de « retourner » en Israёl, et l’État israélien possédait un vaste pouvoir discrétionnaire pour refuser la citoyenneté. Ainsi, la possibilité de la citoyenneté israélienne plutôt que le droit antérieur à cette citoyenneté signifiait qu’un réfugié éventuel au Canada n’était pas tenu de demander d’abord cette citoyenneté.

 

[20]           Les principes de droit qui ressortent de ces décisions sont les suivants :

1.                  La Commission doit se demander si le demandeur ne veut se réclamer de la protection de chaque pays dont il a la nationalité (Ward).

 

2.                  Toute protection de l’État d’origine est la seule solution qui s’offre à un demandeur lorsqu’il est possible de l’obtenir (Ward).

 

3.                  Lorsque la citoyenneté d’un autre pays peut être réclamée, le demandeur est censé entreprendre des démarches pour l’obtenir  (Williams).

 

4.                  On ne s’attend pas à ce qu’un demandeur tente d’obtenir la citoyenneté dans un État avec lequel il n’existe pas de véritable connexion et de lien physique (Katkova).

 

5.                  On ne s’attend pas à ce qu’un demandeur fasse des tentatives s’il ne veut pas le faire en raison de la crainte même de persécution (Williams).

 

6.                  Le demandeur se verra refuser la qualité de réfugié s’il est démontré qu’il était en son pouvoir d’acquérir cette autre citoyenneté (Williams).

 

 

[21]           Il faut se demander ce qu’il en est d’une situation comme la situation actuelle : la demanderesse n’a pas fait de demande pour recouvrer sa citoyenneté; il n’existe pas de preuve de crainte de persécution; il y a un lien fragile avec l’Argentine qui repose uniquement sur le lieu de naissance; et la preuve révèle que, compte tenu de l’obligation de résidence en Argentine, il est probable, mais aucunement certain, que la citoyenneté puisse être recouvrée.

 

[22]           D’abord, l’examen des motifs de la Commission et le dossier du tribunal révèlent que la Commission ne s’est pas penchée sur ce qu’est la preuve de l’exigence de résidence aux termes du droit argentin avant qu’une demande de réintégration en tant que citoyen puisse être présentée. S’agissait-il d’une obligation de la demanderesse de produire une preuve sur ce point? Conviendrait-il que la Commission présume qu’en l’absence de la preuve elle pourrait régler la question à l’encontre des intérêts de la demanderesse?

 

[23]           Il est clair qu’il appartient à la personne qui demande le statut de réfugié d’établir qu’elle a droit à ce statut. Il existe une présomption de protection de l’État (p. ex.. Nunez c. Canada (MCI), 2005 CF 1661). En vertu du droit argentin, il faut avoir établi sa résidence avant de pouvoir demander d’être réintégré. Dans ses motifs, la Commission n’a absolument pas traité de cette question. Il s’agit là d’une erreur de droit. Aucune conclusion de fait n’a été tirée sur ce point. Il y a donc eu une erreur factuelle manifestement déraisonnable.

 

[24]           Ensuite, la Commission ne traite pas de la question du degré de contrôle qu’un demandeur cherchant à recouvrer sa citoyenneté doit avoir sur la réussite du résultat final. La Cour d’appel fédérale, dans l’arrêt Williams, indique que, si le recouvrement de la citoyenneté est une simple question de formalités, le contrôle est certain. En l’espèce, on exige davantage que de simples formalités, car la résidence et une demande à la cour fédérale sont exigées. La preuve indique que le résultat ne peut être prévu avec certitude. Dans ses motifs, la Commission n’a pas évalué le degré de certitude. Rien n’indique que l’on a tenu dûment compte de la preuve. Les conclusions de la Commission ne sont pas raisonnables.

 

[25]           Dans ces circonstances, le résultat approprié consisterait à annuler la décision et à renvoyer l’affaire à la Commission afin qu’un nouveau commissaire statue sur la résidence et sur le degré de certitude auquel on s’attend relativement à toute demande de recouvrement de la citoyenneté que pourrait présenter la demanderesse.

 

[26]           Les parties ont demandé une période de 10 jours pour présenter des observations sur toute question appropriée en vue de la certification, et j’accorderai cette période. Aucuns dépens ne sont adjugés.

 


JUGEMENT

 

POUR LES MOTIFS PRONONCÉS EN L’ESPÈCE :

 

LA COUR STATUE QUE :

 

1.                  la demande est accueillie;

 

2.                  cette question est renvoyée à la Commission de l’immigration et du statut de réfugié pour qu’un commissaire différent prenne une nouvelle décision en conformité avec ces motifs;

 

3.                  les parties ont 10 jours à compter de la date de l’ordonnance pour présenter des observations quant à la certification de toute question;

 

4.                  aucuns dépens ne sont adjugés.

 

 

« Roger T. Hughes »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Michèle Ledecq, B. trad.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS ET PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

 

DOSSIER :                                                   IMM-1353-06

 

INTITULÉ :                                                  ADRIANA SANTAMARIA CRAST

c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                            TORONTO (ONTARIO)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :                          LE 6 FÉVRIER 2007

 

 

MOTIFS DE JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                         LE JUGE HUGHES

 

 

DATE DES MOTIFS :                                 LE 7 FÉVRIER 2007

 

 

COMPARUTIONS :

 

Micheal Crane

POUR LA DEMANDERESSE

 

 

Negar Hashemi

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Micheal Crane

Avocat et procureur

Toronto (Ontario)

 

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

 

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

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