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Date : 20061115

Dossier : IMM-4341-06

Référence : 2006 CF 1384

Ottawa (Ontario), le 15 novembre 2006

En présence de Monsieur le juge Blais

 

ENTRE :

NKANGURA TWAGIRAYEZU OLIVIER

demandeur

et

 

LE MINISTRE DE CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une requête de la partie demanderesse visant l’obtention d’une ordonnance de prorogation de délai en vertu de la règle 397 des Règles des Cours fédérales.

 

FAITS PERTINENTS

[2]               La demande visant l’obtention du statut de réfugié a été refusée en date du 17 juillet 2006.

 

[3]               Le demandeur a déposé une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire en date du 8 août 2006. Le demandeur devait signifier et déposer son dossier au plus tard le 7 septembre 2006 conformément aux dispositions des Règles des Cours fédérales (les Règles).

 

[4]               Le 9 septembre 2006, le demandeur a communiqué avec le défendeur qui avait comparu au dossier en date du 18 août 2006 soit Me Richard Cazanova pour lui demander une prorogation de délai pour déposer le dossier du demandeur puisqu’il tentait d’obtenir une transcription de son audience, ainsi que les services d’un avocat via l’aide juridique.

 

[5]               Le 11 septembre 2006, le défendeur répond par lettre qu’il refuse de consentir à une prorogation de délai.

 

[6]               Le 25 septembre 2006, l’honorable juge Michel Beaudry de la Cour fédérale émettait une ordonnance rejetant la demande d’autorisation à cause du défaut du demandeur de déposer son dossier.

 

[7]               Le 20 octobre 2006, le demandeur, par voie de son nouveau procureur, Me Omer Malonga, signifiait au défendeur une requête pour un « réexamen d’une décision en vertu de la règle 397 des Règles, incluant une prorogation pour dépôt d’avis de requête et dossier du demandeur visant à obtenir une autorisation de la Cour afin de déposer le dossier du demandeur ».

 

QUESTION EN LITIGE

[8]               La Cour devrait-elle proroger le délai de dépôt du dossier du demandeur après que le délai prescrit soit expiré et que la Cour ait déjà rendu une ordonnance à l’effet que la demande d’autorisation soit rejetée à cause du défaut du demandeur de déposer son dossier?

 

[9]               D’entrée de jeu, il est important de mentionner que les dispositions de la règle 397 ne s’appliquent pas à une demande de prorogation de délai. La règle 397 précise :

397. (1) Dans les 10 jours après qu’une ordonnance a été rendue ou dans tout autre délai accordé par la Cour, une partie peut signifier et déposer un avis de requête demandant à la Cour qui a rendu l’ordonnance, telle qu’elle était constituée à ce moment, d’en examiner de nouveau les termes, mais seulement pour l’une ou l’autre des raisons suivantes :

a) l’ordonnance ne concorde pas avec les motifs qui, le cas échéant, ont été donnés pour la justifier;

b) une question qui aurait dû être traitée a été oubliée ou omise involontairement.

Erreurs

(2) Les fautes de transcription, les erreurs et les omissions contenues dans les ordonnances peuvent être corrigées à tout moment par la Cour.

 

397. (1) Within 10 days after the making of an order, or within such other time as the Court may allow, a party may serve and file a notice of motion to request that the Court, as constituted at the time the order was made, reconsider its terms on the ground that

(a) the order does not accord with any reasons given for it; or

(b) a matter that should have been dealt with has been overlooked or accidentally omitted.

Mistakes

(2) Clerical mistakes, errors or omissions in an order may at any time be corrected by the Court.

 

 

Par ailleurs, la règle 399 précise :

399. (1) La Cour peut, sur requête, annuler ou modifier l’une des ordonnances suivantes, si la partie contre laquelle elle a été rendue présente une preuve prima facie démontrant pourquoi elle n’aurait pas dû être rendue :

a) toute ordonnance rendue sur requête ex parte;

b) toute ordonnance rendue en l’absence d’une partie qui n’a pas comparu par suite d’un événement fortuit ou d’une erreur ou à cause d’un avis insuffisant de l’instance.

Annulation

(2) La Cour peut, sur requête, annuler ou modifier une ordonnance dans l’un ou l’autre des cas suivants :

a) des faits nouveaux sont survenus ou ont été découverts après que l’ordonnance a été rendue;

b) l’ordonnance a été obtenue par fraude.

Effet de l’ordonnance

(3) Sauf ordonnance contraire de la Cour, l’annulation ou la modification d’une ordonnance en vertu des paragraphes (1) ou (2) ne porte pas atteinte à la validité ou à la nature des actes ou omissions antérieurs à cette annulation ou modification.

 

399. (1) On motion, the Court may set aside or vary an order that was made

(a) ex parte; or

(b) in the absence of a party who failed to appear by accident or mistake or by reason of insufficient notice of the proceeding,

if the party against whom the order is made discloses a prima facie case why the order should not have been made.

Setting aside or variance

(2) On motion, the Court may set aside or vary an order

(a) by reason of a matter that arose or was discovered subsequent to the making of the order; or

(b) where the order was obtained by fraud.

Effect of order

(3) Unless the Court orders otherwise, the setting aside or variance of an order under subsection (1) or (2) does not affect the validity or character of anything done or not done before the order was set aside or varied.

 

 

[10]           Il apparaît important d’abord d’examiner la décision rendue le 25 septembre 2006. La décision du juge Beaudry est une décision finale et sans appel. Les dispositions des articles 72(1) et (2) ainsi que 74 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (la Loi) s’appliquent dans les circonstances :

72. (1) Le contrôle judiciaire par la Cour fédérale de toute mesure — décision, ordonnance, question ou affaire — prise dans le cadre de la présente loi est subordonné au dépôt d’une demande d’autorisation.

 

(2) Les dispositions suivantes s’appliquent à la demande d’autorisation :

a) elle ne peut être présentée tant que les voies d’appel ne sont pas épuisées;

b) elle doit être signifiée à l’autre partie puis déposée au greffe de la Cour fédérale — la Cour — dans les quinze ou soixante jours, selon que la mesure attaquée a été rendue au Canada ou non, suivant, sous réserve de l’alinéa 169f), la date où le demandeur en est avisé ou en a eu connaissance;

c) le délai peut toutefois être prorogé, pour motifs valables, par un juge de la Cour;

d) il est statué sur la demande à bref délai et selon la procédure sommaire et, sauf autorisation d’un juge de la Cour, sans comparution en personne;

e) le jugement sur la demande et toute décision interlocutoire ne sont pas susceptibles d’appel

 

74. Les règles suivantes s’appliquent à la demande de contrôle judiciaire :

a) le juge qui accueille la demande d’autorisation fixe les date et lieu d’audition de la demande;

b) l’audition ne peut être tenue à moins de trente jours — sauf consentement des parties — ni à plus de quatre-vingt-dix jours de la date à laquelle la demande d’autorisation est accueillie;

c) le juge statue à bref délai et selon la procédure sommaire;

d) le jugement consécutif au contrôle judiciaire n’est susceptible d’appel en Cour d’appel fédérale que si le juge certifie que l’affaire soulève une question grave de portée générale et énonce celle-ci.

 

 

72. (1) Judicial review by the Federal Court with respect to any matter — a decision, determination or order made, a measure taken or a question raised — under this Act is commenced by making an application for leave to the Court.

 

(2) The following provisions govern an application under subsection (1):

( a) the application may not be made until any right of appeal that may be provided by this Act is exhausted;

( b) subject to paragraph 169( f), notice of the application shall be served on the other party and the application shall be filed in the Registry of the Federal Court (“the Court”) within 15 days, in the case of a matter arising in Canada, or within 60 days, in the case of a matter arising outside Canada, after the day on which the applicant is notified of or otherwise becomes aware of the matter;

( c) a judge of the Court may, for special reasons, allow an extended time for filing and serving the application or notice;

( d) a judge of the Court shall dispose of the application without delay and in a summary way and, unless a judge of the Court directs otherwise, without personal appearance; and

( e) no appeal lies from the decision of the Court with respect to the application or with respect to an interlocutory judgment.

 

74. Judicial review is subject to the following provisions:

(a) the judge who grants leave shall fix the day and place for the hearing of the application;

(b) the hearing shall be no sooner than 30 days and no later than 90 days after leave was granted, unless the parties agree to an earlier day;

(c) the judge shall dispose of the application without delay and in a summary way; and

(d) an appeal to the Federal Court of Appeal may be made only if, in rendering judgment, the judge certifies that a serious question of general importance is involved and states the question

 

 

[11]           Il ressort clairement des dispositions de la Loi qu’en l’absence d’une question certifiée, les décisions ne sont pas susceptibles d’appel.

 

[12]           Qu’en est-il maintenant de l’application des dispositions des règles 397 et 399?

 

[13]           En fait, il y a également un délai pour pouvoir déposer une demande en vertu de la règle 397 et le délai est de dix jours. Ce délai a expiré le 6 octobre 2006 et la demande a été déposée plus de deux semaines plus tard.

 

[14]           Tel que soulevé avec justesse par le procureur du défendeur pour qu’il puisse être possible de réexaminer une décision rendue, des conditions strictes doivent s’appliquer, soit que l’ordonnance ne concorde pas avec les motifs qui, le cas échéant, ont été donnés pour la justifier ou encore qu’une question qui aurait due être traitée, ait été oubliée ou omise involontairement. Il ne s’agit pas non plus d’une erreur résultant d’une faute de transcription qui se serait glissée au moment de la rédaction du jugement. Il n’y a rien dans la requête qui fasse état que la Cour ait oublié de traiter d’une question ou involontairement omis de tenir compte d’un document ou d’un élément de preuve.

 

[15]           Il a été décidé, à de nombreuses reprises, tant par la Cour fédérale que la Cour d’appel fédérale, que la règle 397 ne pouvait être utilisée comme moyen indirect d’en appeler d’une décision qui n’est pas elle-même susceptible d’appel.

 

[16]           Quant à invoquer la règle 399, il ne s’agit pas non plus d’une ordonnance rendue sur requête ex parte ou encore rendue en l’absence d’une partie qui n’aurait pas comparue par suite d’un événement fortuit ou d’une erreur ou à cause d’un avis insuffisant de l’instance.

 

[17]           Il ne s’agit pas non plus d’une ordonnance qui a été obtenue par fraude. Le demandeur semble suggérer que la règle 399(2)(a) pourrait s’appliquer puisque des faits nouveaux sont survenus ou ont été découverts après que l’ordonnance ait été rendue. Le demandeur invoque comme argument le fait qu’il peut y avoir des imprévus pouvant empêcher d’atteindre des objectifs du demandeur soit de nature naturelle, sociale, politique ou administrative. Il suggère que le manque de diligence de l’ancien avocat au dossier qui n’a pu aviser son client qu’il pouvait lui-même déposer son dossier sans l’aide d’un avocat et la lenteur de la réponse de l’aide juridique suffisent pour justifier une pareille requête.

 

[18]           Bien évidemment, ces motifs invoqués ne tiennent pas la route.

 

[19]           Ces motifs ont été rejetés, à de nombreuses reprises, par les tribunaux : (voir Rodriguez c. Canada (M.C.I.), [2002] A.C.F. no 435, Pistan c. Canada (M.C.I.), [2001] A.C.F. no 1132 ainsi que Melendez c. Canada (M.C.I.), [2005] A.C.F. no 2031; voir également Boubarak c. Canada (M.C.I.), [2003] A.C.F. no 1553, Chin c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1993] A.C.F. no 1033.

 

 

 

CONCLUSION

[20]           Le demandeur n’a pas réussi à convaincre la Cour que les règles 397 et 399 pouvaient s’appliquer en pareilles circonstances et la Cour maintient que la décision du 25 septembre 2006, à l’effet de rejeter la demande d’autorisation et la demande de contrôle judiciaire constitue une décision finale et sans appel et que la demande de prorogation de délai n’est pas recevable dans les circonstances.

 

[21]           Pour toutes ces raisons, la demande devrait être rejetée.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

JUGEMENT

 

            La requête de réexamen en vertu de la règle 397 des Règles des Cours fédérales incluant une prorogation de délai pour dépôt d’avis de requête et dossier du demandeur visant à obtenir une autorisation de la Cour afin de déposer le dossier du demandeur est rejetée.

 

 

 

 

« Pierre Blais »

Juge


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-4341-06

 

INTITULÉ :                                       NKANGUJRA TWAGIRAYEZU OLIVIER c. MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Requête écrite

 

DATE DE L’AUDIENCE :               N/A

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT:                    LE JUGE BLAIS

 

DATE DES MOTIFS :                      15 novembre 2006

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

N/A

 

POUR LE DEMANDEUR

N/A

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Me Omer Malonga

Ottawa (Ontario)

POUR LE DEMANDEUR

 

John H. Sims, c.r.

Sous procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

 

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

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