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Date : 20061114

Dossier : T-707-06

Référence : 2006 CF 1374

OTTAWA (ONTARIO), le 14 novembre 2006

En présence de monsieur le juge Hughes

 

 

ENTRE :

JANICE DOERR

demanderesse

et

 

BELL CANADA

défenderesse

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision de la Commission canadienne des droits de la personne rendue le 17 mars 2006, dans laquelle la plainte de la demanderesse contre la défenderesse, Bell Canada, a été rejetée. La demanderesse, Janice Doerr, demande que la décision soit annulée et que l’affaire soit renvoyée au Tribunal canadien des droits de la personne pour qu’il instruise la plainte ou, subsidiairement, que l’affaire soit renvoyée à la Commission pour qu’elle fasse une nouvelle enquête. Pour les motifs suivants, la demande sera rejetée et chaque partie assumera ses propres dépens.

 

[2]               La relation entre la demanderesse et la défenderesse a été longue et acrimonieuse. En résumé :

1.                  La demanderesse a commencé à travailler pour Bell Canada en avril 1981, à un poste qui exigeait l’exécution d’un travail répétitif avec un clavier d’ordinateur.

 

2.                  Vers le milieu des années 80, la demanderesse a été impliquée dans un accident de voiture qui lui a causé des blessures des tissus mous, blessures qui semblent avoir contribué aux difficultés que la demanderesse a eues par la suite. Elle souffre apparemment d’une tendinite bilatérale.

 

3.                  En 1994, sur réception d’un avis médical, Bell Canada a retiré des tâches de la demanderesse tout ce qui était lié à l’utilisation de l’ordinateur.

 

4.                  En 1995 et 1996, Bell Canada a réduit ses effectifs et a demandé à la demanderesse de reprendre son travail à l’ordinateur. En 1997, la demanderesse ne travaillait que de façon intermittente.

 

5.                  Bell Canada a mis fin à son emploi en septembre 1997, après quoi la demanderesse a entrepris une procédure de grief. En février 1999, un arbitre a rendu une décision selon laquelle la demanderesse devait être réintégrée dans ses fonctions et être indemnisée pour la période débutant en septembre 1997. Bell Canada devait trouver un autre poste convenable pour la demanderesse et l’affecter à un nouveau gestionnaire. L’arbitre est resté saisi de l’affaire au sujet de ce nouveau poste.

 

6.                  La demanderesse a déposé une plainte (la première plainte) devant la Commission canadienne des droits de la personne le 19 mars 1999, alléguant que Bell Canada ne lui avait pas garanti un emploi dans un environnement exempt de harcèlement et qu’elle avait perdu son emploi en raison de son invalidité. Dans la plainte, elle alléguait qu’il y avait eu conduite irrégulière du mois d’avril 1997 au mois de septembre 1997. La plainte avait été déposée plus d’un an après cette dernière date, cependant la question du délai n’a pas été soulevée lorsque la Commission a tranché l’affaire.

 

7.                  Le 20 août 1999, la Commission a présenté un rapport d’enquêteur et a recommandé que la plainte ne soit pas traitée en attendant le résultat de la procédure d’arbitrage, c’est-à-dire la procédure au cours de laquelle une décision a été rendue en février 1999, sous réserve de certaines questions non réglées.

 

8.                  Les problèmes entre les parties se sont poursuivis. En novembre 1999, la demanderesse et Bell Canada ont signé un procès-verbal de règlement manuscrit dans lequel il était déclaré, entre autres, que :

 

[traduction]

« [...] les parties souhaitent résoudre les différends qui existent entre eux »

 

La demanderesse devait retourner au travail et ses tâches seraient adaptées à son invalidité. Tout litige au sujet de cette adaptation serait présenté à l’arbitre, qui restait saisi de l’affaire à cette fin.

 

9.                  La demanderesse a repris le travail à la fin novembre 1999, mais les choses ne se sont pas réglées. Le 23 mai 2002, Bell Canada a une fois de plus congédié la demanderesse. Celle-ci a présenté un deuxième grief, qui a été remis au même arbitre.

 

10.              Le 23 mai 2003, un an après son deuxième congédiement, la demanderesse a présenté une deuxième plainte à la Commission canadienne des droits de la personne. Elle alléguait que Bell Canada n’avait pas tenu compte de son invalidité, ne lui avait pas garanti un emploi dans un environnement exempt de harcèlement, l’avait congédiée en raison de son invalidité et avait exercé des représailles envers elle.

 

11.              Le 12 août 2003, l’arbitre a rendu une décision au sujet de la question de savoir si Bell Canada avait respecté son obligation de tenir compte de l’invalidité de la demanderesse et, si ce n’était pas le cas, à savoir quel était le recours approprié. L’arbitre a accordé une indemnité à la demanderesse au lieu de sa réintégration. L’arbitre est resté saisi d’une question portant sur les efforts de la demanderesse de limiter le montant des dommages-intérêts réclamés et sur la mise en œuvre de la décision. Bell Canada était d’avis que la décision rendue en août 2003 avait réglé les questions soulevées dans la deuxième plainte.

 

12.              Le 15 avril 2004, une enquêteuse a rendu un rapport à la Commission au sujet de la deuxième plainte. Elle recommandait que, en vertu de l’alinéa 44(3)b) de la Loi canadienne sur les droits de la personne, L.R.C., 1985, ch. H-6, art. 44; 1998, ch. 9, art. 24, la Commission n’entreprenne pas d’autre procédure au sujet de la plainte. On a invité les parties à présenter des observations au sujet du rapport. Bell Canada a souscrit à la recommandation. Dans ses observations, la demanderesse soutenait que l’arbitre n’avait pas réglé toutes les questions soulevées dans la plainte.

 

13.              En conséquence, l’enquêteuse a présenté un rapport complémentaire le 22 septembre 2004. Dans ce rapport, elle recommandait qu’en vertu du paragraphe 41(1) de la Loi canadienne sur les droits de la personne, la Commission statue sur certaines parties de la plainte parce qu’elle n’était pas convaincue que l’autre procédure (l’arbitrage) avait entièrement réglé les allégations au sujet du défaut de garantir un environnement de travail exempt de harcèlement et de représailles. Le 3 février 2005, la Commission a avisé les parties qu’elle acceptait la recommandation. Les parties ont été avisées qu’elles pouvaient présenter une demande de contrôle judiciaire à la Cour fédérale, ce qu’elles n’ont pas fait.

 

14.              Le 19 décembre 2005, l’enquêteuse a présenté un rapport à la Commission au sujet de la deuxième plainte. Elle recommandait qu’en vertu du sous-alinéa 44(3)b)(ii) de la Loi canadienne sur les droits de la personne, les questions au sujet du harcèlement et des représailles, telles que définies par la Commission le 3 février 2005, soient rejetées. On a invité les parties à présenter des observations, ce qu’elles ont fait.

 

15.              Le 17 mars 2006, la Commission a rendu sa décision au sujet de la deuxième plainte, dans laquelle elle rejetait la plainte au motif que [traduction] « la preuve n’appuie pas les allégations de la plaignante ». On a avisé les parties qu’elles pouvaient demander le contrôle judiciaire de la décision devant la Cour, ce que la demanderesse a fait. Il s’agit de ce contrôle judiciaire.

 

Les questions en litige

 

[3]               La demanderesse soulève trois questions dans son mémoire des arguments :

[traduction]

a)                   La Commission a-t-elle commis une erreur de droit en refusant d’examiner la preuve présentée dans la première plainte de la demanderesse?

 

b)                   Le point de vue que la Commission a adopté au sujet des allégations et des preuves présentées à l’appui de la deuxième plainte était-il manifestement déraisonnable compte tenu de la situation? (La question de la norme applicable – la décision manifestement déraisonnable ou une autre norme – sera abordée plus loin dans les présents motifs.)

 

c)                   La Commission était-elle tenue, en vertu de l’article 14.1 de la Loi, d’enquêter sur la question des représailles que la demanderesse avait soulevée dans sa plainte?

 

[4]               Pour répondre à ces questions, il faut examiner les points suivants :

1.                  Quelles étaient précisément les preuves et observations dont la Commission avait été saisie avant de rendre sa décision le 17 mars 2006 et dont elle s’est servie pour examiner la plainte et quelles sont les questions en litige à ce sujet?

 

2.                  Quelle est la norme de contrôle applicable à la décision de la Commission?

 

3.                  Compte tenu de la norme de contrôle, quelle décision la Cour rendra-t-elle au sujet de la présente demande?

 

J’examinerai maintenant chacun de ces points.

 

1. Preuves et observations présentées à la Commission

[5]               La première plainte de la demanderesse a été déposée le 19 mars 1999. Elle traitait de la conduite de Bell Canada entre avril 1997 et le 15 septembre 1997, en particulier du fait que Bell Canada n’avait pas garanti un environnement de travail exempt de harcèlement pour la demanderesse et qu’elle avait été congédiée injustement. La Commission avait été informée du fait qu’il y avait en même temps une procédure d’arbitrage. Le 30 août 1999, la Commission a envoyé une lettre aux parties dans laquelle il était écrit que [traduction] « [...] il est recommandé que la Commission ne traite pas la plainte en attendant le résultat du processus d’arbitrage ». On a invité les parties à présenter des commentaires, ce qu’elles ne semblent pas avoir fait. Il semble que la Commission n’ait rien fait de plus au sujet de cette plainte.

 

[6]               Le 23 mai 2003, la demanderesse a déposé une deuxième plainte, à laquelle la Commission a donné un numéro de dossier différent. La demanderesse a déclaré que la mauvaise conduite dont elle se plaignait avait eu lieu le 24 mai 2002, date à laquelle la demanderesse a été congédiée une deuxième fois. Dans cette plainte, la demanderesse fait référence à la première plainte et déclare que le dossier a été fermé [traduction] « [...] étant entendu que [la demanderesse] pourrait [en] demander la réouverture ». Je ne relève rien dans les dossiers présentés à la Cour qui corrobore l’existence d’une telle entente.

 

[7]               À l’audience, l’avocat de la demanderesse a mentionné précisément certaines allégations qui avaient été avancées dans la deuxième plainte, à savoir :

[traduction]

Paragraphe 7 : Bell Canada était d’avis que la possibilité de reprendre le travail comme associée dans un poste semblable était mince et que d’autres types d’adaptation ne seraient pas « réalisables ».

 

Paragraphe 9 : Bell Canada a déclaré qu’elle mettrait fin à l’emploi de la plaignante si elle [traduction] « ne se trouvait pas un autre emploi au sein de Bell Canada dans une période de [trois mois] ».

 

Paragraphe 12 : Bell Canada a demandé à ce que je participe à une réunion mensuelle avec les membres de la direction.

 

[8]               La plainte se conclut par le paragraphe 19, qui, selon l’avocat, n’est qu’un résumé et non un exposé complet de la preuve de la demanderesse. Ce paragraphe se lit comme suit :

[traduction]

19. En conclusion, je crois que le comportement dont j’ai été victime viole mes droits en tant que personne souffrant d’une invalidité physique. Bell Canada n’a pas réussi ou a négligé de trouver ou de créer un nouveau poste adapté à mon invalidité physique. Tout au long du processus, j’ai été soumise à du harcèlement injustifiable et à des représailles parce que je revendiquais mon droit à un environnement de travail adapté à mon invalidité physique et j’ai finalement été congédiée une deuxième fois. La décision de Bell Canada de contester le grief que j’ai présenté le 23 mai 2002 est une preuve de plus de la poursuite du harcèlement et des représailles.

 

[9]               Il semble qu’on ait fourni à l’enquêteuse de la Commission la décision de l’arbitre rendue le 12 août 2003, puisque son rapport du 15 avril 2004 recommandait que la Commission ne prenne aucune autre mesure. L’analyse et la recommandation du rapport se lisent comme suit :

[traduction]

Analyse

 

9. La décision arbitrale portait sur les mêmes questions que celles soulevées dans la plainte concernant les droits de la personne et, par conséquent, elles ont déjà été tranchées. Le seul aspect qui n’a pas été résolu est celui de l’indemnité, que les parties tentent présentement de régler à l’amiable. L’arbitre reste saisi de l’affaire au cas où des difficultés surgiraient à ce sujet.

 

Recommandation

 

10. Il est recommandé, en vertu de l’alinéa 44(3)b) de la Loi canadienne sur les droits de la personne, que la Commission ne prenne aucune autre mesure au sujet de la plainte puisque la situation a été résolue.

 

[10]           Bell Canada a appuyé la recommandation, ce qui ne semble pas être le cas de la demanderesse. Bien qu’il n’y ait aucune mention dans le dossier d’observations de la demanderesse au sujet du rapport, il est évident que des observations ont été présentées puisque la Commission a demandé à l’enquêteuse de réexaminer l’affaire et de préparer un rapport complémentaire.

 

[11]           En conséquence, l’enquêteuse a présenté un rapport complémentaire le 22 septembre 2004. L’objet du rapport était énoncé au paragraphe 1 :

[traduction]

1. L’objet du rapport complémentaire est de répondre à la question à savoir s’il y a eu réparation, dans les décisions arbitrales du 12 août 2003 et du 26 janvier 2004, en ce qui concerne les allégations de discrimination.

 

[12]           Le rapport complémentaire examinait la décision de l’arbitre :

[traduction]

7. Les griefs de la plaignante portaient sur les points suivants : congédiement injustifié, refus d’adapter le poste et défaut de la défenderesse de payer à la plaignante son traitement complet alors qu’elle cherchait un autre emploi.

 

8. La première décision arbitrale, rendue le 12 août 2003, portait sur la question de savoir si la défenderesse avait rempli son obligation d’adapter l’environnement de travail pour la plaignante et, si ce n’était pas le cas, quel était le recours approprié. L’arbitre a conclu que [traduction] « Bell Canada n’a pas poursuivi la question d’adaptation au point d’exmpter à la plaignante des difficultés excessives [...] ». L’arbitre a aussi déclaré que [traduction] « La plaignante a aussi « sa part de responsabilité dans la situation ». À mon avis, elle n’a pas respecté ses obligations non plus ». L’arbitre a conclu que Bell n’avait pas rempli son obligation d’adapter l’environnement de travail.

 

9. L’arbitre a tenu compte de l’article 53 de la Loi canadienne sur les droits de la personne lorsqu’il a examiné quel serait le recours approprié et il a accordé une indemnité au lieu de la réintégration parce que [traduction] « il est peu probable que la relation entre l’employeur et l’employée soit viable ».

 

[13]           Par conséquent, l’enquêteuse a fait la recommandation suivante :

[traduction]

 

12. Il est recommandé, en vertu du paragraphe 41(1) de la Loi canadienne sur les droits de la personne, que la Commission examine la plainte parce que :

 

Il n’est pas certain que l’autre procédure ait entièrement répondu à l’allégation du défaut de garantir à la plaignante un environnement de travail exempt de harcèlement et de représailles.

 

[14]           Il est clair que le rapport complémentaire a établi une distinction entre la question de l’adaptation, que le rapport considérait comme ayant été tranchée par l’arbitre, et les questions de harcèlement et de représailles qui, d’après l’enquêteuse, n’avaient pas été résolues.

 

[15]           La Commission a envoyé le rapport complémentaire aux parties accompagné d’une lettre explicative en date du 24 septembre 2004 et les a invitées à présenter leurs commentaires. Bell Canada a envoyé une lettre le 22 octobre 2004 dans laquelle elle ne demandait qu’une prorogation de délai et ne faisait aucun commentaire de fond. La demanderesse n’a présenté aucun commentaire. Par conséquent, la Commission a pris une décision et en a avisé les parties par lettre datée du 3 février 2005, dans laquelle elle déclarait :

[traduction]

 Il n’est pas certain que l’autre procédure ait entièrement répondu à l’allégation du défaut de garantir à la plaignante un environnement de travail exempt de harcèlement et de représailles. 

 

[16]           Les parties ont été avisées qu’elles pouvaient demander un contrôle judiciaire en vertu de l’article 18 de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, ch. F-7, art.1; 2002, ch. 8, art. 14. Aucune partie n’a demandé un tel contrôle.

 

[17]           Par conséquent, la Commission a rendu une décision définitive et exécutoire selon laquelle l’arbitre avait réglé la question de l’adaptation, mais que la Commission traiterait des questions du harcèlement et des représailles.

 

[18]           Le 16 août 2005, l’enquêteuse a écrit à l’avocat de la demanderesse, l’avisant que Bell Canada allait établir une défense et que des commentaires de réfutation de la part de la demanderesse seraient alors requis. En la faisant accompagner d’une lettre datée du 20 octobre 2005, l’enquêteuse a fait parvenir la défense de Bell Canada à l’avocat de la demanderesse. Dans cette lettre, l’enquêteuse demandait des commentaires et des renseignements détaillés. Elle écrivait, entre autres :

[traduction]

L’examen de la plainte de Mme Doerr révèle que la seule mention de harcèlement et/ou de représailles se trouve au paragraphe 19, sous la déclaration que [traduction] « Tout au long du processus, j’ai été soumise à du harcèlement injustifiable et à des représailles parce que je revendiquais mon droit à un environnement de travail adapté à mon invalidité physique [...] » Pour que je puisse enquêter sur ces allégations, j’aurai besoin de renseignements supplémentaires sur le harcèlement dont votre cliente se plaint – en particulier, le nom de la personne ou des personnes qui l’auraient harcelée, ainsi qu’une description (avec la date) des incidents précis et/ou des paroles échangées. Si possible, veuillez fournir maintenant le nom (et le numéro de téléphone où cette personne peut être jointe dans la journée) de tout témoin qui peut corroborer les allégations de Mme Doerr.

 

En ce qui a trait aux représailles, veuillez noter que l’article 14.1 de la Loi canadienne sur les droits de la personne prévoit que les représailles, quelles qu’elles soient, doivent être le résultat de la présentation par la demanderesse (ou par son agent) d’une plainte précédente de discrimination devant la Commission. Par conséquent, je vous demande de fournir des renseignements détaillés sur les incidents particuliers au cours desquels Mme Doerr croit que la défenderesse a exercé des représailles contre elle en réaction à sa plainte originale, présentée en mars 1999.

 

Comme je l’ai déjà mentionné, vous pouvez présenter vos commentaires au sujet du point de vue de la défenderesse, qu’elle a énoncé dans la lettre ci-jointe. Vous pouvez présenter tout commentaire que vous croyez pertinent et approprié; cependant, je vous demanderais de répondre en particulier aux poins suivants :

 

(certains points précis étaient énumérés)

 

[19]           L’avocat de la demanderesse a répondu par lettre le 14 décembre 2005. Il était d’avis que tous les points soulevés dans la première et la deuxième plainte devaient être résolus dans le cadre de la deuxième plainte. Il a ajouté que d’autres exemples de harcèlement, plus récents, étaient soulevés dans la deuxième plainte. En ce qui a trait aux représailles, la lettre expliquait que Bell Canada avait contesté les griefs de la demanderesse, [traduction] « dont le bien-fondé était évident », et que le seul motif de cette contestation était d’exercer des représailles.

 

[20]           Cinq jours plus tard, le 19 décembre 2005, l’enquêteuse (Mme Craig) a rendu un rapport qui a été envoyé aux parties pour qu’elles présentent des commentaires. Comme la recommandation faite dans ce rapport a finalement été acceptée par la Commission, le rapport est devenu, en fait, les motifs de la Commission. Le rapport mentionne, aux paragraphes 7 à 10, la décision de l’arbitre rendue en août 2003 et la décision de la Commission de poursuivre seulement au sujet du harcèlement et des représailles.

 

[21]           Le rapport donne des précisions sur la demande de renseignements supplémentaires et détaillés et le défaut de la demanderesse de présenter une réponse sur le fond. Il note aux paragraphes 11 à 14 :

[traduction]

11. La plaignante ne donne aucun exemple précis dans sa plainte qui permette de valider ses allégations selon lesquelles la défenderesse ne lui a pas garanti un environnement de travail exempt de harcèlement ou qu’elle a exercé des représailles contre elle. En fait, la seule affirmation de la demanderesse au sujet du harcèlement ou des représailles se trouve au paragraphe 19 de la plainte : [traduction] [...], j’ai été soumise à du harcèlement injustifiable et à des représailles parce que je revendiquais mon droit à un environnement de travail adapté à mon invalidité physique [...] La décision de Bell Canada de contester le grief que j’ai présenté le 23 mai 2002 est une preuve de plus de la poursuite du harcèlement et des représailles. »

 

12. Puisque la déclaration au sujet du harcèlement et des représailles était trop générale, comme le mentionne le paragraphe 11 ci-dessus, on a demandé à la demanderesse de fournir des détails supplémentaires, y compris des renseignements précis sur la nature du harcèlement et/ou des représailles et le moment où de tels incidents seraient survenus, ainsi que les noms des personnes en cause, que ce soit la personne qui avait commis les actes de discrimination ou un témoin. La plaignante, par son avocat, a déclaré qu’elle [traduction] « avait déjà présenté à la Commission et à la défenderesse suffisamment de preuves détaillées à l’appui de l’allégation de harcèlement » et a cité les deux plaintes qu’elle avait présentées à la Commission le 19 mars 1999 et le 23 mai 2003.

 

13. Comme le paragraphe 5 le mentionne, la plaignante a confirmé qu’elle avait présenté une deuxième plainte plutôt qu’une demande de réactivation de la première plainte, après que l’arbitre eut rendu sa décision. Son avocat note que :

 

[traduction]

« comme elle était insatisfaite du processus d’arbitrage, [elle] a présenté une deuxième plainte, qui est le cœur de [la] présente enquête. La deuxième plainte est le prolongement de la première. Nous sommes d’avis que toutes les questions soulevées dans ces deux plaintes doivent être réglées dans le cadre de l’enquête sur la deuxième plainte. »

 

14. Il est à noter que la première plainte de la plaignante a été laissée en suspens à la mi-octobre 1999 en attendant l’issue d’une autre procédure – en l’espèce, l’arbitrage. La plaignante n’en a jamais demandé la réactivation et, par conséquent, le dossier est resté fermé et toute allégation qui en faisait partie ne peut faire l’objet d’une reprise d’enquête. Il est aussi à noter que les allégations de harcèlement et duedéfaut d’adapter l’environnement de travail qui étaient avancées dans la première plainte portent sur le congédiement de septembre 1997 et, par conséquent, étaient déjà plusieurs années hors délai lorsqu’elle a présenté sa deuxième plainte en mai 2003.

 

[22]           Le rapport se termine avec une analyse et une recommandation :

[traduction]

Analyse

 

35. Comme le mentionne le paragraphe 26 ci-dessus, la Loi canadienne sur les droits de la personne précise que les plaintes au sujet de représailles doivent, en vertu de l’article 14.1, être associées au dépôt d’une autre plainte. La plaignante n’a pas prouvé un tel lien entre ses allégations de représailles dans la deuxième plainte et la plainte qu’elle avait déposée en mars 1999.

 

36. Outre le fait que l’allégation de représailles n’était pas liée à la plainte précédente, la preuve n’appuie pas la prétention de la plaignante selon laquelle la défenderesse contestait le grief – [traduction] « dont le bien-fondé était évident » – dans le but d’exercer des représailles. Les principes de justice naturelle comprennent la notion d’équité procédurale et, par conséquent, la procédure devrait être juste envers toutes les parties. Comme la plaignante avait le droit de déposer un grief si elle était d’avis que la défenderesse avait contrevenu à la convention collective, la défenderesse avait, elle aussi, le droit de se défendre contre les allégations de la demanderesse. Il est évident qu’il ne s’agit pas de représailles.

 

37. Comme aucun exemple précis de harcèlement n’a été présenté, la preuve n’appuie pas l’allégation de la plaignante selon laquelle la défenderesse ne lui a pas garanti un environnement de travail exempt de harcèlement.

 

Recommandation

 

38. Il est en outre recommandé que, en vertu du sous-alinéa 44(3)b)(ii) de la Loi canadienne sur les droits de la personne, la Commission rejette la plainte parce que la preuve n’appuie pas les allégations de la plaignante.

 

[23]           On a une fois de plus invité les parties à présenter leurs commentaires. Il s’agissait de la dernière chance de présenter des commentaires sur le bien-fondé de la plainte. Dans une lettre datée du 9 janvier 2006, l’avocat a présenté une liste de dix pages, dont la formulation était sibylline, de dates d’incidents et de précisions sur certains incidents qui avaient eu lieu entre le 1er avril 1981 et le 24 novembre 2005. Les pages 1 et 2 de cette lettre résumaient le contexte ainsi :

[traduction]

En ce qui a trait aux paragraphes 5 et 6 du rapport, nous sommes d’avis que le résumé de Mme Craig des contextes entourant la première et la deuxième plaintes (c’est-à-dire vos dossiers T49079 et T49080) n’est pas conforme aux faits. Nous souhaitons mentionner que la deuxième plainte a été déposée parce que Bell Canada avait commis de nouveaux actes de discrimination, de harcèlement et de représailles depuis le moment où notre cliente avait présenté sa première plainte. Nous n’avions aucun autre recours que de présenter une nouvelle plainte. Nous sommes d’avis que la première plainte était toujours en cours d’examen, malgré le fait qu’environ quatre (4) ans s’étaient écoulés depuis qu’elle avait été déposée. Le fait est que les parties ont continué, pendant ce temps, de tenter d’exécuter la première décision de l’arbitre W. Raynor. Nous sommes d’avis que, si nous avions tenté de rouvrir la première plainte, la Commisison aurait rejeté notre demande pour ce motif. Lorsque les efforts des parties pour trouver une solution ont échoué et que la défenderesse a congédié la demanderesse une deuxième fois, nous avons déposé une deuxième plainte. Dans la deuxième plainte, au paragraphe 1, notre cliente a expressément ou implicitement exprimé clairement son désir de rouvrir la première plainte en parallèle avec la question qui a donné lieu à la deuxième plainte.

 

À mon humble avis, Mme Craig se trompe lorsqu’elle soutient que les allégations dans la deuxième plainte de notre cliente étaient les mêmes que dans la première plainte. Bien que la nature des allégations de violations de la Loi canadienne sur les droits de la personne soit la même, les preuves et les faits substantiels à l’appui de la deuxième plainte sont entièrement nouveaux. Cependant, il reste que l’objet de la deuxième plainte est étroitement lié à celui de la première plainte et qu’ils réflètent les actes ou omissions illicites de la défenderesse envers notre cliente.

 

[24]           Bell Canada a répondu aux commentaires de l’avocat de la demanderesse dans une lettre datée du 27 janvier 2006 et a mentionné la décision de la Commission de restreindre la plainte aux questions de harcèlement et de représailles.

 

[25]           L’avocat de la demanderesse a envoyé à la Commission une autre lettre, non sollicitiée, le 1er février 2006, dans laquelle il présentait un « argument supplémentaire » :

[traduction]

Notre argument supplémentaire est le suivant :

 

Bien qu’il ne soit pas expressément allégué que la défenderesse a exercé des représailles contre notre cliente parce qu’elle avait déposé une plainte en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne (la Loi), la Commission peut tirer une conclusion de fait à ce sujet. Le fait est que la première plainte de notre cliente n’a jamais été tranchée par la Commission. Elle n’était toujours pas réglée lorsque notre cliente a été congédiée par la défenderesse une deuxième fois. Compte tenu des circonstances, cet acte de la part de la défenderesse peut être vu comme des représailles contre la demanderesse parce qu’elle avait déposé une plainte en vertu de la Loi.  Comme nous l’avons déjà mentionné, notre cliente a été congédiée parce qu’elle continuait de demander que son environnement de travail soit adapté à son invalidité et qu’il soit exempt de discrimination. Dans cette optique, nous sommes d’avis que le bien-fondé de l’allégation de représailles est amplement démontré.

 

[26]           Le 2 février 2006, l’avocat de la demanderesse a envoyé une fois de plus une lettre non sollicitée à laquelle étaient jointes des copies de deux décisions, une de la Cour divisionnaire de l’Ontario dans l’affaire Jones c. Amway of Canada Inc. 2002 CarswellOnt 1191 et une de la Cour fédérale dans l’affaire Dubois c. Canada (Procureur général), 2005 CF 1017, et dans laquelle il faisait des commentaires au sujet de ces décisions.

 

[27]           Bell Canada n’a présenté aucun commentaire au sujet de ces deux dernières lettres.

 

[28]           Le 17 mars 2006, la Commission a décidé de rejeter la plainte parce que [traduction] « la preuve n’appuie pas les allégations de la plaignante ». La Commission n’a pas mentionné les lettres de commentaires des parties à propos du rapport, ni les lettres de l’avocat de la demanderesse qui ont suivi.

 

Les objections de la demanderesse quant à la décision et au processus de prise de décision

[29]           L’avocat de la demanderesse, en plaidoirie, a soulevé les objections suivantes au sujet de la décision de la Commission et quant à la façon dont cette décision a été prise :

1.                  La Commission n’a pas tenu compte de la première plainte et des questions de harcèlement soulevées dans cette plainte;

 

2.                  la Commission n’a pas tenu compte des questions de harcèlement et de représailles soulevées dans la deuxième plainte;

 

3.                  la Commission n’a pas tenu compte des conclusions de l’arbitre dans la décision arbitrale de 2003 au sujet du harcèlement et des représailles;

 

4.                  l’enquêteuse n’a effectué aucune enquête et a simplement rendu une décision [traduction] « sur dossier ».

 

[30]           L’avocat de la défenderesse a répondu à ces objections :

1.                  La première plainte est réglée. Elle a été présentée en retard de toute façon et il n’y a eu aucune demande de réouverture. Des références à la première plainte, présentées plusieurs années après le dépôt de cette plainte, ne sont pas suffisantes pour rouvrir la plainte;

 

2.                  la Commission a décidé que seules les questions du harcèlement et des représailles seraient examinées dans le cadre de la deuxième plainte. Les questions d’adaptation ont été réglées dans la décision de l’arbitre en 2003. Ni l’une ni l’autre partie n’a demandé le contrôle judiciaire de cette décision;

 

3.                  les incidents particuliers soulevés dans la deuxième plainte aux paragraphes 7, 9 et 12 portent tous sur l’adaptation et la Commission n’en a pas tenu compte, avec raison. Seul le paragraphe 19 porte sur le harcèlement et les représailles. Les allégations du paragraphe 19 sont trop vagues et, malgré les demandes que la Commission a faites pour obtenir une justification, la demanderesse a seulement expliqué que la défense de Bell Canada contre ses griefs constituait un harcèlement et des représailles. Bell Canada a tout à fait le droit de se défendre contre un grief;

 

4.                  la Commission était en possession de documents portant sur la première plainte, la deuxième plainte et la décision arbitrale de 2003. Le rapport de l’enquêteuse de décembre 2005 mentionne chacun de ces documents et en tient compte suffisamment;

 

5.                  La Commission n’avait pas d’obligation de tenir compte des preuves, si tant est qu’il y en eût dans la lettre du 9 janvier 2006 de l’avocat de la demanderesse au lieu des commentaires qui avaient été demandés. Quoi qu’il en soit, ces prétendues preuves sont inadéquates.

 

 

[31]           Afin d’examiner ces questions, la Cour doit d’abord déterminer la norme de contrôle applicable.

 

La norme de contrôle

[32]           Dans l’arrêt Sketchley c. Canada (Procureur général), 2005 CAF 404, au paragraphe 45, la Cour d’appel fédérale a déclaré que les cours doivent appliquer une analyse pragmatique et fonctionnelle aux décisions de la Commission rendues en vertu de l’article 44 de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Au paragraphe 50, elle a souligné qu’une telle analyse doit être effectuée de nouveau pour chaque décision.

 

[33]           En l’espèce, la Commission devait examiner les questions suivantes :

1.                  Un plaignant peut-il, dans une deuxième plainte, exiger que la Commission mentionne des faits particuliers au sujet du harcèlement et des représailles invoquées dans la première plainte lorsque cette plainte a été ajournée en attendant la décision arbitrale et qu’aucune demande de réouverture n’a été présentée?

 

2.                  La Commission peut-elle examiner des allégations faites dans la deuxième plainte en vue de déterminer si elles ont déjà été réglées par l’arbitrage?

 

3.                  Dans quelle mesure un enquêteur doit-il effectuer une enquête indépendante s’il peut être conclu que, après une demande d’énonciation des faits et des preuves, une décision peut être rendue au sujet de l’affaire sur le vu des preuves qui ont déjà été présentées à la Commission?

 

4.                  Quelle importance doit être accordée, s’il y a lieu, aux précisions et à la preuve présentées dans des commentaires à la suite de la remise d’un rapport?

 

5.                  Dans quelle mesure un enquêteur et, si nécessaire, la Commission, doivent exposer, dans le rapport et la décision, leur raisonnement pour chacune des questions ci-dessus énoncées?

 

[34]           Cette formulation faite ressortir que certaines des questions portent sur l’équité procédurale et sur la justice naturelle. Comme la Cour suprême du Canada l’a mentionné dans l’arrêt Syndicat canadien de la fonction publique c. Ontario (Ministre du Travail), [2003] 1 R.C.S. 539, la question de la norme de contrôle ne s’applique pas à l’équité procédurale et à la justice naturelle. Si la procédure était injuste et ne respectait pas la justice naturelle, la décision doit être annulée.

 

[35]           D’autres questions, comme celle de savoir si une allégation porte sur l’adaptation, le harcèlement ou les représailles, relèvent entièrement de l’expertise de la Commission. Ces décisions ont droit à une très grande retenue.

 

[36]           La juge Mactavish, de la Cour fédérale, a récemment effectué une analyse approfondie quant à la norme de contrôle applicable à des circonstances semblables à celles de l’espèce, dans la décision Loyer c. Air Canada, 2006 CF 1172. Tout en étant bien conscient de la mise en garde de la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Sketchley, précité, selon laquelle chaque affaire doit être jugée d’après ses faits, je constate que l’analyse dans la décision Loyer porte sur des circonstances très semblables à celles de l’espèce. Je souscris entièrement à cette analyse, que je fais mienne dans la présente affaire. La décision raisonnable est la norme de contrôle applicable à une conclusion tirée à partir de la preuve et dans le cadre de l’exercice du pouvoir discrétionnaire. Si une erreur de droit a été commise, la décision correcte sera la norme applicable.

 

Y a-t-il eu une erreur susceptible de révision?

[37]           En ce qui a trait à la question de l’équité et de la justice naturelle, il est clair que la Commission a amplement donné à la demanderesse et à son avocat l’occasion de décrire les incidents de harcèlement et de représailles et de présenter des preuves à l’appui. La demanderesse a amplement eu l’occasion de démontrer le bien-fondé de sa plainte. Il n’y a eu aucun manquement à l’équité procédurale ou à la justice naturelle.

 

[38]           En ce qui a trait à la décision de la Commission au sujet de la deuxième plainte, les paragraphes 4 et 5 du rapport de décembre 2005 expliquent clairement que la demanderesse était au courant de la possibilité de rouvrir la première plainte, mais que, quatre ans plus tard, elle n’avait toujours pas présenté de demande de rouverture. Dans la lettre du 9 janvier 2006, présentée par l’avocat de la demanderesse, la partie qui porte sur le contexte (précitée) est équivoque à ce sujet, mais reconnaît qu’une demande de réouverture aurait été rejetée. Il y est soutenu que la deuxième plainte a été déposée parce que de nouveaux actes de discrimination, de harcèlement et de représailles avaient été commis. La Commission n’a commis aucune erreur susceptible de révision lorsqu’elle a conclu que la première plainte ne pouvait pas se transformer en base des allégations qui lui avaient été présentées dans la deuxième plainte.

 

[39]           En ce qui a trait aux allégations de la deuxième plainte, la Commission a conclu, dans une décision qui n’a pas été contestée par les parties, que les questions portant sur l’adaptation avaient été réglées dans le processus d’arbitrage. Il s’agit de questions qui relèvent clairement de la compétence de la Commission. Elle n’a commis aucune erreur susceptible de révision lorsqu’elle a déterminé quels incidents étaient liés à l’adaptation et lesquels étaient liés au harcèlement ou à des représailles.

 

[40]           Les lettres de l’avocat de la demanderesse qui ont été envoyées à la Commission après que le rapport eut été émis s’efforçaient de présenter des preuves et des faits particuliers au sujet du harcèlement et des représailles de même que des arguments supplémentaires à la Commission. La décision de la Commission n’en fait aucunement mention. Ces observations constituent en fait une nouvelle plainte ou une certaine modification de la plainte. L’alinéa 41(1)e) de la Loi canadienne sur les droits de la personne prévoit que la Commission n’a pas à traiter les plaintes présentées après l’expiration d’un délai d’un an à partir du dernier des faits sur lesquels elle est fondée, à moins que la Commission, dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire, décide de le faire. Le temps pour présenter des observations doit, à un certain moment, prendre fin. La demanderesse a amplement eu l’occasion de présenter ces points plus tôt, avant que le rapport soit préparé. Des commentaires au sujet du rapport comme tel ne devraient pas être considérés comme une occasion de présenter de nouvelles observations, de modifier les observations déjà présentées ou de consolider des points faibles. La Commission n’a commis aucune erreur susceptible de révision en ne mentionnant pas expressément ces observations dans sa décision.

 

[41]           De plus, la Commission a conclu que le fait que Bell Canada s’est défendue contre le  deuxième grief de la demanderesse ne constitue pas des représailles. Cette conclusion peut être considérée comme une question mixte de fait et de droit. Certainement, en droit, aucune cour ne contesterait le droit d’une partie de se défendre dans une telle procédure. La question de savoir si la façon dont la défense a été montée constitue des représailles est une question de fait et la Commission a l’expertise nécessaire pour rendre une décision à ce sujet. Il n’y a eu aucune erreur susceptible de révision sur ce point.

 

[42]           Par conséquent, en résumé, la Commission n’a commis aucune erreur susceptible de révision et sa décision du 17 mars 2006 était raisonnable.

 

Les dépens

[43]           Les parties se sont entendues : peu importe l’issue de l’affaire, elles assumeront chacune leurs propres dépens.

 

 


JUGEMENT

 

POUR LES MOTIFS QUI PRÉCÈDENT :

 

1.                  La demande est rejetée;

2.                  Chaque partie assumera ses propres dépens.

 

« Roger T. Hughes »

Juge

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Evelyne Swenne, traductrice


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

 

DOSSIER :                                        T-707-06

 

INTITULÉ :                                       Janice Doerr

                                                            c. Bell Canada

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 8 novembre 2006

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE HUGHES

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 14 novembre 2006

 

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

John McNair

POUR LA DEMANDERESSE

 

 

Mireille Bergeron

POUR LA DÉFENDERESSE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

McKenzie Lake Lawyers, LLP

London (Ontario)

POUR LA DEMANDERESSE

 

 

Bell Canada (juriste d’entreprise)

Montréal (Québec)

POUR LA DÉFENDERESSE

 

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