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Date : 20060908

Dossier : T-2049-05

Référence : 2006 CF 1075

Ottawa (Ontario), le 8 septembre 2006

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE BLAIS

 

ENTRE :

LES VIANDES DU BRETON INC.

demanderesse

et

 

AGENCE CANADIENNE D’INSPECTION DES ALIMENTS

défenderesse

 

 

 

MOTIFS DE JUGEMENT ET JUGEMENT

 

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire sous l’article 44 de la Loi sur l’accès à l’information, L.R.C., 1985, ch. A-1 (Loi), déposée par Les Viandes du Breton Inc. (demanderesse) à l’encontre d’une décision de l’Agence canadienne d’inspection des aliments (défenderesse) de permettre la divulgation de certains documents concernant la demanderesse, en réponse à une demande d’accès à l’information.

 

FAITS PERTINENTS

 

[2]               Le 25 septembre 2005, une demande d’accès à l’information sous la Loi a été reçue par la défenderesse. Cette demande d’accès à l’information visait initialement l’obtention de rapports d’inspection sur les abattoirs produits entre janvier 2003 et décembre 2004, pour être ensuite amendée lors d’une communication téléphonique et portant maintenant sur les rapports d’inspection des abattoirs du Québec produits entre janvier et mars 2005.

 

[3]               Parmi les documents visés par cette demande se trouvent trois (3) « Rapports d’inspection de l’établissement » [les Rapports] concernant l’abattoir de la demanderesse, en date de janvier 2005, février 2005 et mars 2005.

 

[4]               Le 17 octobre 2005, M. Denis Châtelain de la Section d’accès à l’information de la défenderesse a fait parvenir une lettre à la demanderesse l’informant de cette demande d’accès à l’information, ainsi qu’une copie des trois Rapports mentionnés au paragraphe 3. Dans cette lettre, la demanderesse était invitée à faire part de ses observations à savoir si ces trois Rapports rencontraient les critères d’exception énumérés au paragraphe 20(1) de la Loi permettant de refuser la communication de ces documents.

 

[5]               Le 3 novembre 2005, la demanderesse a fait parvenir à la défenderesse une lettre contenant ses observations à ce sujet, par l’entremise de son procureur.

 

[6]               Le 8 novembre 2005, la défenderesse a communiqué sa décision à la demanderesse dans une autre lettre, l’informant que les observations présentées ne satisfaisaient pas les critères d’exceptions visés par la Loi et qu’elle comptait donc communiquer les Rapports au requérant.

 

[7]               Le 16 novembre 2005, la demanderesse a déposé une demande de contrôle judiciaire en vertu de l’article 44 de la Loi.

 

QUESTIONS EN LITIGE

 

[8]               Les questions en litige sont les suivantes :

 

1)       La demanderesse devait-elle être informée de l’identité du requérant sous la Loi?

 

2)      La défenderesse a-t-elle manqué à son obligation de motivation, et donc à l’équité procédurale, dans sa décision datée du 8 novembre 2005?

 

3)       La demanderesse a-t-elle démontré adéquatement que les Rapports en question  rencontrent les critères d’exception énumérés au paragraphe 20(1) de la Loi?

 

ANALYSE

 

[9]               Tel qu’établi par la Cour d’appel fédérale dans la décision Wyeth-Ayerst Canada Inc. c. Canada (Procureur général), 2003 CAF 257, selon l'approche pragmatique et fonctionnelle, la norme de contrôle applicable à la révision d’une décision de divulguer certains documents sous la Loi est celle de la décision correcte.

 

1) Communication de l’identité du requérant

 

[10]           La demanderesse soumet en premier lieu que la formule de demande d’accès à l’information transmise par la défenderesse ne remplit pas les exigences prévues par la Loi en ce qu’elle ne précise ni l’identité du requérant, ni s’il est citoyen canadien ou résident permanent.

 

[11]           Contrairement à l’affirmation de la demanderesse, rien dans la Loi n’obligeait la défenderesse à communiquer ni l’identité du requérant, ni son statut de citoyen canadien ou résident permanent à la demanderesse. En vertu du paragraphe 27(1) de la Loi, la défenderesse se devait d’aviser par écrit la demanderesse de son intention de communiquer certains documents la concernant. Le paragraphe 27(3) précise les éléments devant être inclus dans cet avis :

a) la mention de l’intention du responsable de l’institution fédérale de donner communication totale ou partielle du document susceptible de contenir les secrets ou les renseignements visés au paragraphe (1);

b) la désignation du contenu total ou partiel du document qui, selon le cas, appartient au tiers, a été fourni par lui ou le concerne;

c) la mention du droit du tiers de présenter au responsable de l’institution fédérale de qui relève le document ses observations quant aux raisons qui justifieraient un refus de communication totale ou partielle, dans les vingt jours suivant la transmission de l’avis.

(a) a statement that the head of the government institution giving the notice intends to release a record or a part thereof that might contain material or information described in subsection (1);

(b) a description of the contents of the record or part thereof that, as the case may be, belong to, were supplied by or relate to the third party to whom the notice is given; and

(c) a statement that the third party may, within twenty days after the notice is given, make representations to the head of the government institution that has control of the record as to why the record or part thereof should not be disclosed.

 

 

[12]           De plus, la diffusion de renseignements personnels sur le requérant par la défenderesse aurait été une violation de l’article 19 de la Loi et de l’article 3 de la Loi sur la protection des renseignements personnels, L.R. C., 1985, ch. P-21 (LPRD) qui stipulent :

 

Loi sur l’accès à l’information

19. (1) Sous réserve du paragraphe (2), le responsable d’une institution fédérale est tenu de refuser la communication de documents contenant les renseignements personnels visés à l’article 3 de la Loi sur la protection des renseignements personnels.

19. (1) Subject to subsection (2), the head of a government institution shall refuse to disclose any record requested under this Act that contains personal information as defined in section 3 of the Privacy Act.

 

 

Loi sur la protection des renseignements personnels

3. Les définitions qui suivent s’appliquent à la présente loi :

[…]

« renseignements personnels »

Les renseignements, quels que soient leur forme et leur support, concernant un individu identifiable, notamment :

[…]

f) toute correspondance de nature, implicitement ou explicitement, privée ou confidentielle envoyée par lui à une institution fédérale, ainsi que les réponses de l’institution dans la mesure où elles révèlent le contenu de la correspondance de l’expéditeur;

[…]

i) son nom lorsque celui-ci est mentionné avec d’autres renseignements personnels le concernant ou lorsque la seule divulgation du nom révélerait des renseignements à son sujet;

3. In this Act,

“personal information” means information about an identifiable individual that is recorded in any form including, without restricting the generality of the foregoing,

[…]

 (f) correspondence sent to a government institution by the individual that is implicitly or explicitly of a private or confidential nature, and replies to such correspondence that would reveal the contents of the original correspondence,

[…]

 (i) the name of the individual where it appears with other personal information relating to the individual or where the disclosure of the name itself would reveal information about the individual,

 

 

[13]           Finalement, l’identité du requérant n’est pas pertinente à la décision ultime de divulguer ou non les documents demandés. Tel qu’affirmait le juge Charles Doherty Gonthier dans l’arrêt Canada (Commissaire à l’information) c. Canada (Commissaire de la Gendarmerie royale du Canada), [2003] 1 R.C.S. 66, la Loi « ne confère pas aux responsables des institutions fédérales le pouvoir de prendre en compte l’identité de l’auteur de la demande ni le but qu’il vise ». Tout argument présenté par la demanderesse et basé sur l’identité du requérant n’aurait donc pu être considéré par la défenderesse dans le cadre de son analyse.

 

[14]           La demanderesse a insisté largement, à l’audience, sur le fait que le représentant de la défenderesse n’avait pas pris les mesures nécessaires minimales pour s’assurer que le requérant répondait aux exigences de la Loi.

 

[15]           Dans les circonstances, les exigences sont minimales, puisque le décret adopté en vertu de l’article 4(2) de la Loi, a étendu le droit d’accès aux documents à toute personne morale ou physique qui est présente au Canada.

 

[16]           Les réponses de M. Châtelain, représentant de la défenderesse, lors de son interrogatoire par écrit, sont éloquentes et démontrent qu’il était vraisemblablement convaincu que le demandeur d’accès (requérant) était admissible aux termes de la Loi.

 

[17]           J’en conclu que la défenderesse s’est acquittée de son obligation minimale, et qu’il n’y a rien qui puisse justifier l’intervention de la Cour.

 

[18]           Pour ce qui est de la description de la demande d’accès à l’information (« les rapports d’inspection produit [sic] sur les abattoirs au Québec de janvier à mars 2005 »), celle-ci a été communiquée clairement dans la lettre de M. Châtelain datée du 17 octobre 2005. La Cour est satisfaite que les trois Rapports d’inspection de l’établissement concernant les abattoirs de la demanderesse étaient clairement visés par cette demande d’accès.

 

[19]           En l’espèce, la défenderesse n’avait pas l’obligation de divulguer l’identité du requérant et l’absence de divulgation n’affecte donc en rien la validité de la demande d’accès.

 

2) Manquement à l’obligation de motivation (équité procédurale)

 

[20]           Dans sa lettre datée du 8 novembre 2005, M. Châtelain s’exprime ainsi : « Nous avons examiné vos observations et avons jugé qu’elles ne satisfont pas les critères des exceptions visées aux articles 20(1) de la Loi. » (Dossier confidentiel de la demanderesse, page 26). La demanderesse soutient qu’il y a eu un manquement à l’obligation de motivation de la part de la défenderesse, et donc à l’équité procédurale, puisque cette lettre rejette les arguments déposés par la demanderesse sans expliquer en quoi les observations fournies ne satisfont pas aux critères d’exceptions.

 

[21]           Le paragraphe 28(3) de la Loi exige que le tiers concerné (en l’occurrence la demanderesse) soit informé de la décision de divulguer les documents demandés dans un avis contenant :

a) la mention du droit du tiers d’exercer un recours en révision en vertu de l’article 44, dans les vingt jours suivant la transmission de l’avis;

b) la mention qu’à défaut de l’exercice du recours en révision dans ce délai, la personne qui a fait la demande recevra communication totale ou partielle du document.

(a) a statement that the third party to whom the notice is given is entitled to request a review of the decision under section 44 within twenty days after the notice is given; and

(b) a statement that the person who requested access to the record will be given access thereto or to the part thereof unless, within twenty days after the notice is given, a review of the decision is requested under section 44.

 

Rien dans la Loi n’obligeait donc la défenderesse à motiver de façon détaillée la raison de son rejet des arguments présentés par la demanderesse.

 

[22]           En se penchant maintenant sur la question d’équité procédurale, la Cour doit conclure que le peu de détails contenus dans la lettre de M. Châtelain datée du 8 novembre 2005, n’affecte en rien la capacité de la demanderesse de faire valoir pleinement ses arguments à travers le processus de contrôle judiciaire, puisque le processus devant la Cour est un processus de novo. Tel qu’exprimait clairement le juge Yvon Pinard dans l’arrêt Merck Frosst Canada & Co. c. Canada (Ministre de la Santé), 2003 CF 1422, au paragraphe 3:

Dans le cadre du recours en révision sous-jacent qui est fondé sur l'article 44 de la LAI, la Cour n'examine pas la légalité de la décision du défendeur, mais décidera à nouveau, en se fondant en partie sur de nouveaux éléments de preuve dont le défendeur n'était pas saisi, si les renseignements contenus dans les documents sont de nature confidentielle ou préjudiciable au point où ils devraient être exemptés de la divulgation en vertu de l'article 20 de la LAI.

 

[23]           La situation présente étant pratiquement identique à la situation ayant donné lieu à l’arrêt Viandes du Breton Inc. c. Canada (Agence canadienne d’inspection des aliments), 2006 CF 335, nous pouvons d’ailleurs citer la juge Johanne Gauthier qui conclut aux paragraphes 40-41 :

Quant à l’obligation de motiver, la Cour est satisfaite que celle-ci a été respectée en l’espèce. Compte tenu des échanges entre les parties, de la nature des documents à être divulgués et de la demande d’accès, il n’y avait pas lieu pour la défenderesse de donner plus de détails qu’elle ne l’a fait dans sa lettre […]

 

La Cour est parfaitement capable de comprendre le fondement de la décision et, compte tenu de la nature du recours, la Cour est satisfaite que la capacité de la demanderesse de soulever tous les arguments qu’elle désirait faire valoir n’a pas été brimée.

 

[24]           Pour les raisons mentionnées ci-haut, l’obligation de motiver a été rencontrée et il n’y a donc pas eu de manquement à l’équité procédurale par la défenderesse.

 

3) Analyse des critères d’exemption

 

[25]           Tout d’abord, il est important de noter que, tel que mentionné au paragraphe 2(1) de la Loi, l’objectif de cette loi est « d’élargir l’accès aux documents de l’administration fédérale en consacrant le principe du droit du public à leur communication » et que les exceptions à ce droit sont «  précises et limitées ». Ces exceptions, en ce qui concerne la divulgation des renseignements sur des tiers partis tels la demanderesse, se trouvent au paragraphe 20(1) de la Loi:

20. (1) Le responsable d’une institution fédérale est tenu, sous réserve des autres dispositions du présent article, de refuser la communication de documents contenant :

a) des secrets industriels de tiers;

b) des renseignements financiers, commerciaux, scientifiques ou techniques fournis à une institution fédérale par un tiers, qui sont de nature confidentielle et qui sont traités comme tels de façon constante par ce tiers;

c) des renseignements dont la divulgation risquerait vraisemblablement de causer des pertes ou profits financiers appréciables à un tiers ou de nuire à sa compétitivité;

d) des renseignements dont la divulgation risquerait vraisemblablement d’entraver des négociations menées par un tiers en vue de contrats ou à d’autres fins.

20. (1) Subject to this section, the head of a government institution shall refuse to disclose any record requested under this Act that contains

(a) trade secrets of a third party;

(b) financial, commercial, scientific or technical information that is confidential information supplied to a government institution by a third party and is treated consistently in a confidential manner by the third party;

(c) information the disclosure of which could reasonably be expected to result in material financial loss or gain to, or could reasonably be expected to prejudice the competitive position of, a third party; or

(d) information the disclosure of which could reasonably be expected to interfere with contractual or other negotiations of a third party.

 

 

[26]           L’accès étant la règle, le fardeau de démontrer qu'un document ne devrait pas être divulgué repose sur celui qui cherche à obtenir une exemption. Le juge en chef adjoint James A. Jerome, dans l'arrêt Cyanamid Canada Inc. c. Canada (Minister of Health and Welfare) (1992), 41 C.P.R. (3d) 512 (C.F. 1re inst.), confirmé par (1992), 45 C.P.R. (3d) 390 (C.A.F.), a résumé ce principe comme suit à la page 527 :

In a third party application under s. 44 of the Act, the party opposing disclosure bears the burden of showing that clear grounds exist to justify exempting the documents in issue from disclosure to the requester: Merck Frost Canada Inc. v. Canada (Minister of Health and Welfare) (1988), 30 C.P.R. (3d) 473 at p. 476 […]. The Access to Information Act codifies the public right of access and the basic premise that access to records gathered for a public purpose and at public expense ought to be available. In this light, the court will not frustrate public access to government information except under the clearest grounds and any doubt ought to be resolved in favour of disclosure: Maislin Industries Ltd. v. Canada (Minister of Industry, Trade and Commerce) (1984), 80 C.P.R. (2d) 253 at p. 256 […]

 

 

[27]           La demanderesse soumet que les trois Rapports en question contiennent des renseignements financiers et commerciaux dont la divulgation pourrait entraver le bon fonctionnement de l’entreprise et rendre l’entreprise vulnérable, mais n’apporte aucune preuve à l’appui. Tel qu’expliqué par le juge Marc Nadon au paragraphe 9 de l’arrêt Viandes du Breton Inc. c. Canada (Ministère de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire), [2000] A.C.F. no 2088, pour obtenir une exemption sous les alinéas 20(1)c) et 20(1)d),

[…] la demanderesse ne doit pas seulement affirmer, dans un affidavit, que la divulgation des documents lui causerait probablement un préjudice, mais elle doit présenter des éléments de preuve démontrant la probabilité de ce préjudice.

 

 

[28]           La demanderesse insiste aussi sur la nature confidentielle de l’information qui se trouve dans ces Rapports, affirmant d’ailleurs que si la divulgation de l’information contenue dans ses Rapports avait été anticipée, elle n’aurait jamais permis l’accès à ses abattoirs. Cet argument fait abstraction du fait que ces renseignements n’ont pas été volontairement ‘fournis’ à la défenderesse par la demanderesse. Au contraire, l’accès à ces lieux doit être permis aux inspecteurs de l’Agence canadienne d’inspection des aliments aux termes de la Loi sur l’inspection sur les viandes, L.R.C., 1985, ch. 25 (1er suppl.).

 

[29]           À ce sujet, cette Cour souscrit d’ailleurs à l’analyse de l’applicabilité de l’alinéa 20(1)b) présentée par la juge Gauthier aux paragraphes 44 à 52 de l’arrêt Viandes du Breton Inc. c. Canada (Agence canadienne d’inspection des aliments), 2006 CF 335 :

Comme l'indiquait la Cour d'appel fédérale en 1989 dans Canada Packers Inc. c. Canada (Ministre de l'Agriculture), [1989] 1 C.F. 47 (C.A.F.), au paragraphe 13, quant à des rapports d'une équipe de vérification de l'inspection des viandes concernant des abattoirs dans la région de Kitchener, aucun des renseignements contenus dans ce type de rapports n'a été fourni par l'appelante. "Ces rapports sont plutôt des jugements que des inspecteurs gouvernementaux ont portés sur ce qu'ils ont eux-mêmes observé. À mon avis, aucune autre interprétation raisonnable, soit de cet alinéa ni des faits, n'est possible, et l'alinéa 20(1)b) n'est donc pas pertinent dans les présentes affaires."

 

Quant au caractère confidentiel des informations colligées dans les rapports d'inspection, le juge Pinard a indiqué dans Coopérative fédérée du Québec (f.a.s. Aliments Flamingo) c. Canada (Agriculture et Agroalimentaire), [2000] A.C.F. no 26 (C.F.) (QL), au paragraphe 16 :

 

Enfin, bien que les demanderesses n'invoquent pas spécifiquement l'exemption contenue à l'alinéa 20(1)b) de la Loi, elles attribuent toutefois un caractère confidentiel aux rapports d'inspection. Qu'il suffise de rappeler à cet égard que ces documents sont colligés par une agence gouvernementale et qu'en droit, ils constituent des documents de l'administration fédérale assujettis à la Loi (voir la décision récente de la Cour d'appel fédérale dans The Information Commissioner of Canada and The President of the Atlantic Canada Opportunities Agency, [1999] A.C.F. no 1723, (17 novembre 1999), A-292-96).

La Cour a examiné attentivement tous et chacun des rapports qui font l'objet de la demande de révision et elle est satisfaite qu'aucune distinction ne s'impose ici.

 

La Cour ne peut accepter l'interprétation de la demanderesse à l'effet que, comme elle a "ouvert sa porte" aux inspecteurs, elle a d'une certaine façon fourni les informations contenues dans les rapports. La demanderesse est légalement tenue de permettre aux inspecteurs de faire leur travail.

 

De plus, comme je l'ai indiqué lors de l'audience, compte tenu de leur expérience passée, il est évident que Les Viandes du Breton Inc. ne pouvait raisonnablement penser que ces rapports d'inspection étaient ou seraient tenus confidentiels par la défenderesse.

 

[...]

 

Considérant ce qui précède, la demanderesse savait ou aurait dû savoir que, règle générale, ces rapports sont divulgués à ceux qui les demandent en vertu de la Loi.

 

Le fait que les rapports et l'information qu'ils contiennent soient traités de façon confidentielle à l'interne par l'entreprise ne change rien à la façon dont ceux-ci sont traités par l'Agence, ni aux principes établis dans la Loi.

 

 

[30]           La demanderesse soumet en dernier lieu que l’information contenue dans ces Rapports est protégée par le secret professionnel qui régit la relation entre le client et le médecin vétérinaire qui a préparé et signé ces Rapports d’inspection, selon les articles 23 à 25 du Code de déontologie des médecins vétérinaires.

 

[31]           À la base, le secret professionnel ne peut exister dans une telle situation que si la demanderesse est considérée comme étant la cliente du rédacteur du rapport agissant en tant que médecin vétérinaire. Or, dans le contexte d’inspection d’établissements en vertu de la Loi sur l’inspection des viandes, le rédacteur des Rapports d’inspection, s’il se trouve à être un médecin vétérinaire de profession (ce qui n’est pas nécessairement le cas), agit non pas à titre de vétérinaire pour le compte du propriétaire des animaux se trouvant dans l’établissement, mais plutôt à titre d’inspecteur désigné par le président de l’Agence canadienne d’inspection des aliments aux termes du paragraphe 13(3) de la Loi sur l’Agence canadienne d’inspection des aliments, L.C., 1997, ch. 6.

 

[32]           Pour ces raisons, la Cour conclut que : 1) la demanderesse n’a pas démontré la probabilité d’un préjudice pouvant justifier une exemption sous les alinéas 20(1)c) ou 20(1)d) de la Loi, et 2) l’information dans les Rapports d’inspection n’est pas protégée par le secret professionnel et n’est pas confidentielle au sens de l’alinéa 20(1)b) de la Loi.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

JUGEMENT

 

1.      La demande de contrôle judiciaire est rejetée;

2.      Le tout avec dépens.

 

 

 

 

« Pierre Blais »

Juge

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        T-2049-05

 

INTITULÉ :                                       LES VIANDES DU BRETON INC. c. AGENCE CANADIENNE D’INSPECTION DES ALIMENTS

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Québec (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               16 août 2006

 

MOTIFS DE JUGEMENT ET JUGEMENT :                   LE JUGE BLAIS

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 8 septembre 2006

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Me Louis Masson

 

POUR LA DEMANDERESSE

Me Sébastien Gagnon

 

POUR LA DÉFENDERESSE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Joli-Cœur Lacasse

 

POUR LA DEMANDERESSE

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur general du Canada

Québec

 

POUR LA DÉFENDERESSE

 

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