Date : 20250923
Dossier : IMM-8217-24
Référence : 2025 CF 1558
Ottawa (Ontario), le 23 septembre 2025
En présence de monsieur le juge Sébastien Grammond
ENTRE : |
BALJIT SINGH ET HARPREET KAUR |
demandeurs |
et |
LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION |
défendeurs |
JUGEMENT ET MOTIFS
[1] La demande d’asile de M. Singh et de Mme Kaur a été rejetée en raison de contradictions majeures entre les versions des faits qu’ils ont données à différentes étapes du processus de demande d’asile. Je rejette leur demande de contrôle judiciaire de la décision de la Section d’appel des réfugiés [SAR]. Celle-ci a effectué une analyse raisonnable de la preuve. Contrairement à ce que soutiennent les demandeurs, les contradictions relevées par la SAR étaient bien réelles et portaient sur des éléments cruciaux de leur demande.
I. Contexte
[2] Les demandeurs, M. Singh et Mme Kaur, sont des citoyens de l’Inde. Après avoir obtenu un visa, ils sont entrés au Canada en novembre 2019 et ont demandé l’asile. En substance, ils allèguent qu’ils craignent la police indienne, qui croit que le cousin de M. Singh est un militant séparatiste. Ils affirment avoir été détenus et agressés par la police et harcelés par deux partis politiques. Ils ont donné diverses versions des faits qui sous-tendent leur demande, lors des occasions suivantes :
- Une entrevue avec un agent de l’Agence des services frontaliers du Canada [ASFC] au moment de leur arrivée, le 15 novembre 2019;
- Leur formulaire de fondement du droit d’asile [FDA], rempli le 9 décembre 2019 avec l’aide d’un avocat;
- Une seconde entrevue avec un agent de l’ASFC le 19 mai 2021;
- Des ajouts au formulaire FDA présentés le 1er février 2023 et le 23 février 2023;
- L’audience de la Section de la protection des réfugiés [SPR] tenue le 23 février 2023 et le 11 avril 2023.
A. La décision de la SPR
[3] La Section de la protection des réfugiés [SPR] a rejeté la demande d’asile de M. Singh et de Mme Kaur, estimant que leur témoignage n’était pas crédible. Plus précisément, elle a constaté que les demandeurs avaient invoqué des sources de risque fondamentalement différentes lors des occasions mentionnées plus haut. Par exemple, M. Singh a déclaré au premier agent de l’ASFC qu’il craignait le parti du Congrès, sans pouvoir mentionner d’incident précis. Par contre, dans le formulaire FDA, les demandeurs ont affirmé avoir été détenus et agressés par la police en raison des activités présumées du cousin de M. Singh, mais n’ont pas dit craindre le parti du Congrès. Lors de la deuxième entrevue avec l’ASFC, M. Singh a affirmé avoir été détenu par le parti du Congrès, sans mentionner les allégations concernant la police. Enfin, dans le formulaire FDA modifié, M. Singh alléguait avoir été attaqué par des fiers-à-bras au service du parti BJP en 2019.
[4] Par ailleurs, la SAR a reconnu que Mme Kaur pouvait avoir des raisons valables de ne pas divulguer l’agression sexuelle dont elle aurait été victime à l’agent de l’ASFC le jour de son arrivée au Canada. Cependant, puisque cette agression serait liée à la persécution alléguée par son mari et que ces allégations ne sont pas crédibles, la SPR n’a pas ajouté foi au témoignage de Mme Kaur.
[5] La SPR s’est également fondée sur l’évolution du témoignage de M. Singh au sujet de sa fuite à New Delhi en septembre 2019. Dans son formulaire FDA, il a affirmé que les membres de sa famille à New Delhi avaient refusé de l’héberger, mais lors de son témoignage devant la SPR, il a affirmé qu’il a habité chez son oncle pendant 10 à 15 jours. De plus, la SPR a noté que M. Singh avait été incapable d’expliquer cette contradiction de manière satisfaisante et n’avait même pas été en mesure de dire quelle version des faits était véridique.
[6] La SPR a relevé d’autres contradictions qui lui ont permis de conclure à l’absence de crédibilité des demandeurs. Premièrement, les demandeurs ont présenté l’affidavit d’une personne qui aurait persuadé la police de les libérer, tout en affirmant à l’audience que cette personne les avait maltraités. Deuxièmement, il y avait de nombreuses divergences entre les renseignements figurant dans la demande de visa et ceux qui ont été fournis dans le cadre de la demande d’asile. Troisièmement, la SPR a accordé peu de poids aux preuves documentaires des demandeurs, notamment en raison des circonstances nébuleuses de la préparation de l’affidavit de la mère de M. Singh. Dans les trois cas, la SPR a noté que M. Singh n’avait pas donné d’explications crédibles quant aux contradictions relevées.
B. La décision de la SAR
[7] La SAR a rejeté l’appel des demandeurs. Elle a tout d’abord noté que dans leur mémoire, les demandeurs n’avaient pas présenté d’observations très élaborées à l’encontre de la décision de la SPR. Comme l’exige son rôle, elle a néanmoins procédé à une évaluation indépendante du dossier.
[8] La SAR a tout d’abord répondu aux arguments des demandeurs concernant l’insuffisance des motifs de la SPR concernant les contradictions entre la demande de visa et la demande d’asile. Elle a préparé un tableau dans lequel elle expose les nombreuses contradictions entre la demande de visa, le formulaire FDA, le témoignage et les notes d’entrevue de l’ASFC.
[9] La SAR a ensuite résumé les contradictions entre les différentes versions des faits données par les demandeurs relativement à la source de leur crainte. Elle a conclu que les demandeurs n’avaient pas fourni d’explications satisfaisantes et que les contradictions étaient majeures.
[10] La SAR a également rejeté la prétention des demandeurs selon laquelle la SPR aurait fait défaut d’appliquer les Directives no 4 concernant les questions liées au genre, étant donné les nombreux problèmes de crédibilité qui affectent la preuve des demandeurs.
[11] Quant au reste, la SAR a conclu que la SPR avait analysé la preuve de manière adéquate et qu’il lui était loisible de rejeter la preuve documentaire en raison des problèmes préexistants de crédibilité.
[12] Les demandeurs sollicitent maintenant le contrôle judiciaire de la décision de la SAR.
II. Analyse
[13] Je rejette la demande de M. Singh et de Mme Kaur, puisqu’ils n’ont pas réussi à démontrer le caractère déraisonnable de la décision de la SAR. Leurs prétentions ont trait aux conclusions que celle-ci a tirées concernant leur crédibilité. Il s’agit de questions de fait, et le pouvoir d’intervention de la Cour à l’égard de telles questions est fort limité.
[14] Avant d’aborder les arguments que font valoir M. Singh et Mme Kaur, il convient de rappeler certains principes qui régissent l’évaluation de la crédibilité et l’examen des conclusions de fait à l’étape du contrôle judiciaire.
[15] L’évaluation de la crédibilité est la première étape de l’analyse de la preuve. Bon nombre de facteurs peuvent être pris en considération à cette fin : Magonza c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2019 CF 14 aux paragraphes 16 à 20. Un facteur particulièrement pertinent est la cohérence entre les versions des faits données par les demandeurs à différentes étapes du processus de demande d’asile. À ce propos, j’ai écrit ce qui suit dans l’affaire Olajide c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2021 CF 197 aux paragraphes 11 à 13 :
On peut supposer que les demandeurs qui ont vécu des événements difficiles, voire traumatisants, donnant lieu à une crainte fondée de persécution, se souviennent de ces faits avec exactitude et sont en mesure d’en fournir un compte rendu exhaustif et cohérent aux différentes étapes du processus de demande. Par conséquent, la crédibilité des demandeurs est mise à mal lorsqu’ils se contredisent ou livrent un témoignage à propos d’un événement qu’ils n’ont pas relaté dans leurs déclarations antérieures.
Il reste que les témoins sont des êtres humains. On ne peut s’attendre à un témoignage parfait. Un témoin peut être cru même s’il se contredit dans son témoignage […]. En particulier, dans les Directives numéro 8 du président : Procédures concernant les personnes vulnérables qui comparaissent devant la CISR, on reconnaît que « la vulnérabilité d’une personne peut affecter sa mémoire et son comportement, de même que sa capacité de relater des événements pertinents » et que ses symptômes peuvent avoir « des répercussions sur la cohérence de son témoignage ».
C’est pourquoi notre Cour a souvent rappelé aux décideurs de ne pas faire preuve d’un excès de zèle pour ce qui est de trouver des contradictions et des omissions […]. Nous avons infirmé des décisions où seule une contradiction mineure avait mené à une conclusion défavorable en matière de crédibilité […]. Cependant, il n’y a pas de règle rigide à cet égard. Une contradiction mineure peut injustement entacher la crédibilité d’un témoin honnête, mais aussi démasquer un mensonge bien ficelé.
[renvois omis]
[16] De plus, lorsque le témoignage d’un demandeur d’asile comporte un grand nombre de contradictions, le décideur peut tirer une conclusion générale d’absence de crédibilité. Selon l’arrêt Sheikh c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1990] 3 CF 238 à la page 244 (CA), cela signifie que la conclusion d’absence de crédibilité « peut fort bien s’étendre à tous les éléments de preuve pertinents de son témoignage »
.
[17] Les conclusions relatives à la crédibilité sont des conclusions de fait. Lors du contrôle judiciaire, la Cour doit faire preuve d’une grande retenue à l’égard de ce type de conclusion : Aguebor c Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1993] ACF no 732 (CAF). Ce n’est pas son rôle de soupeser la preuve à nouveau. Elle ne doit intervenir que « si le décideur s’est fondamentalement mépris sur la preuve qui lui a été soumise ou n’en a pas tenu compte »
: Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c Vavilov, 2019 CSC 65 au paragraphe 126, [2019] 4 RCS 653.
[18] La SPR et la SAR doivent motiver leurs conclusions relatives à la crédibilité. Cela peut présenter un défi lorsque les contradictions sont si nombreuses qu’il devient difficile d’en donner une présentation systématique. À cet égard, on ne saurait exiger la perfection : R c Gagnon, 2006 CSC 17 au paragraphe 20, [2006] 1 RCS 621. Lors du contrôle judiciaire, il faut adopter une vue d’ensemble et chercher à comprendre le raisonnement général du décideur, plutôt que de s’engager dans une « chasse au trésor »
à la recherche d’une erreur, si mince soit-elle.
[19] Il est vrai que le contrôle judiciaire porte sur la décision de la SAR et non celle de la SPR. Néanmoins, il peut être utile de consulter la décision de la SPR afin de comprendre celle de la SAR. Après tout, même si elle effectue une analyse de novo, la SAR statue en appel de la décision de la SPR. Dans cet exercice, il faut aussi prendre en considération les moyens d’appel soulevés par les demandeurs. Lorsque la SAR répond à ces moyens, on ne doit pas lui reprocher de ne pas avoir abordé d’autres questions. Il arrive aussi qu’un demandeur d’asile ne conteste pas devant la SAR certaines conclusions de la SPR. Dans ce cas, il faut nécessairement tenir compte des conclusions non contestées dans l’analyse du caractère raisonnable de la décision de la SAR. Enfin, lorsque la SPR et la SAR tirent une conclusion générale négative quant à la crédibilité, il peut devenir important de bien suivre l’ordre logique dans lequel elles traitent des différents aspects de cette question.
[20] En l’espèce, la demande d’asile de M. Singh et de Mme Kaur a été rejetée parce que ceux‑ci ont donné plusieurs versions fort différentes des faits sur lesquels se fonde leur crainte. La SPR a fourni des motifs élaborés pour justifier sa conclusion négative de crédibilité. Devant la SAR, les appelants ont présenté des moyens d’appel lacunaires et peu élaborés. La SAR a fait de son mieux pour y répondre et n’a pas jugé utile de fournir des motifs détaillés quant aux questions qui ne faisaient pas directement l’objet de l’appel. C’est dans cet esprit que j’aborde l’examen des arguments soulevés par les demandeurs au soutien de leur demande de contrôle judiciaire.
A. La demande de visa
[21] Les demandeurs s’en prennent tout d’abord au fait que la SAR se fonde sur des contradictions entre les renseignements fournis dans la demande de visa et les autres éléments de preuve. Selon eux, la demande de visa a été préparée par un agent qui ne leur a pas donné l’occasion de vérifier les renseignements qu’elle contenait et qui a contrefait la signature de M. Singh.
[22] Ces explications ont été fournies à la SPR, qui les a rejetées en se fondant principalement sur le fait que la crédibilité des demandeurs était déjà entachée par les contradictions concernant la source de leur crainte. La SAR, de son côté, a conclu que les contradictions en question étaient nombreuses et n’avaient pas été expliquées de manière satisfaisante. Il faut souligner que cette conclusion de la SAR porte non seulement sur la demande de visa, mais aussi sur les contradictions concernant la fuite à New Delhi.
[23] Même s’il s’agit du premier argument des demandeurs, il faut garder à l’esprit qu’il porte sur une question secondaire, que la SPR avait abordée après avoir tiré une conclusion générale d’absence de crédibilité en se fondant sur d’autres motifs. C’est en raison de cette absence de crédibilité générale que la SPR n’a pas accepté l’explication des demandeurs selon laquelle ils ignoraient le contenu de la demande de visa. Il faut aussi rappeler que les demandeurs, dans leur avis d’appel à la SAR, se sont bornés à alléguer que la SPR « n’explique pas non plus l’existence de contradictions entre la demande de visa de l’appelant et sa demande d’asile. »
On comprend donc que la SAR a préféré se concentrer à faire la démonstration prétendument omise par la SPR, tout en adhérant au raisonnement de celle-ci quant au caractère inadéquat des explications fournies par les demandeurs. Le fait que la SAR se soit penchée sur cette question au début de ses motifs n’altère pas l’ordre logique du raisonnement qui a conduit la SPR à tirer une conclusion générale d’absence de crédibilité, à laquelle la SAR a adhéré.
[24] En agissant ainsi, la SAR a rendu une décision raisonnable. Elle a répondu aux arguments soulevés par les demandeurs en s’appuyant sur la preuve. La conclusion selon laquelle l’explication des demandeurs n’était ni raisonnable ni crédible n’était pas directement attaquée dans le mémoire d’appel. Quoi qu’il en soit, il était raisonnable de rejeter cette explication en raison des problèmes de crédibilité que la SPR avait identifiés et auxquels la SAR a elle-même souscrit après son analyse.
[25] Par ailleurs, on ne saurait sérieusement contester qu’il existe des contradictions majeures entre les renseignements fournis dans la demande de visa et dans la demande d’asile, notamment quant à la composition de la famille des demandeurs. Ces contradictions ne portent pas uniquement sur la source de la crainte des demandeurs, qui ne serait normalement pas divulguée dans une demande de visa.
B. Les notes au point d’entrée
[26] Les demandeurs soutiennent que la SAR a accordé un poids injustifié aux notes de l’entrevue au point d’entrée avec l’agent de l’ASFC. Ils s’appuient sur la jurisprudence de notre Cour qui met les décideurs en garde en ce qui a trait à la fiabilité de ces notes, étant donné que ces entrevues ne se déroulent pas toujours dans des conditions idéales. Voir, à titre d’exemples, Wu c Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2010 CF 1102, au paragraphe 16; Cetinkaya c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2012 CF 8 aux paragraphes 49 à 51; Guven c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2018 CF 38 aux paragraphes 39 à 42; Singh c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2024 CF 1526 au paragraphe 12.
[27] Au paragraphe 18 de la décision, la SPR a pris acte de la jurisprudence de notre Cour concernant la fiabilité des notes prises au point d’entrée, mais a jugé que cela n’expliquait pas les divergences entre les versions des faits fournies sur une période de quatre ans. Aux paragraphes 19 à 23, la SPR a analysé en détail les explications fournies par M. Singh à l’audience quant à ces contradictions, mais ne les a pas jugées convaincantes. De manière sans doute plus concise, la SAR a elle aussi pris acte de la prudence qui est de mise en ce qui a trait aux notes prises au point d’entrée, mais a souligné qu’il y avait eu deux entrevues à 18 mois d’intervalle et que les explications fournies par les demandeurs n’étaient pas raisonnables.
[28] Les demandeurs soutiennent que la SAR a commis une erreur en affirmant que M. Singh « n’a pas soulevé de problèmes »
concernant l’entrevue au point d’entrée, alors que la SPR note que M. Singh a déclaré qu’il était nerveux. Ces deux affirmations ne sont pas nécessairement contradictoires. Il semble que la SAR avait à l’esprit l’absence de problèmes soulevés lors de l’entrevue au point d’entrée, alors que la SPR renvoyait plutôt au témoignage de M. Singh à l’audience devant elle.
[29] Quoi qu’il en soit, s’il y a erreur, elle ne porte pas à conséquence. Il faut garder à l’esprit que lors de la seconde entrevue avec l’agent de l’ASFC, M. Singh a livré une version des faits qui s’apparente à celle qu’il avait donnée à son arrivée au Canada un an et demi plus tôt et qui faisait état de motifs de crainte fort différents de ceux qui étaient invoqués dans son formulaire FDA rempli peu de temps après la première entrevue. Tant la SPR que la SAR ont conclu que la nervosité ne saurait expliquer des divergences de cet ordre. Cette conclusion est raisonnable. Comme dans l’affaire Gong c Canada (Citoyenneté et Immigration), 2022 CF 24, les omissions au point d’entrée portaient sur le motif principal de crainte allégué plus tard.
C. L’agression sexuelle
[30] Dans le formulaire FDA, Mme Kaur allègue qu’elle a été agressée sexuellement par les policiers indiens. Elle a omis de mentionner cette agression lors de l’entrevue au point d’entrée. Les demandeurs reprochent à la SAR d’avoir rejeté l’explication que Mme Kaur a donnée pour justifier cette omission.
[31] Encore une fois, il convient de lire les motifs de la SAR à la lumière de la décision de la SPR. La SPR a débuté son analyse de cette question en soulignant qu’à la lumière des Directives no 4, elle pourrait être disposée à accepter le type d’explication donnée par Mme Kaur, selon laquelle elle était très nerveuse et incapable de parler de cet incident. Cependant, la SPR a donné trois motifs pour juger cette explication non crédible : (1) les contradictions importantes entre les diverses versions des faits données par les demandeurs; (2) l’absence d’explication raisonnable de ces contradictions; (3) le fait que l’agression alléguée découlait de la persécution alléguée par M. Singh.
[32] Dans leur avis d’appel à la SAR, les demandeurs se sont bornés à affirmer ce qui suit :
La SPR a commis une erreur de droit en ne tenant pas compte dans sa décision des directives numéro 4 du Président.
En effet, les discriminations subies par l’appelante associée en raison de son appartenance à un groupe social.
Il s’agit d’une erreur de la commissaire.
[Sic]
[33] Quant à elle, la SAR a affirmé que la SPR avait bien appliqué les Directives. Elle a rappelé que Mme Kaur avait non seulement omis de mentionner l’agression, mais aussi menti à l’agent de l’ASFC en affirmant être venue au Canada pour des vacances. La SAR conclut qu’en raison des nombreux autres problèmes de crédibilité, la SPR pouvait tirer une conclusion négative quant à la crédibilité des demandeurs en se fondant sur cette omission.
[34] Lorsque l’on fait l’effort de suivre ce raisonnement pas à pas, il paraît entièrement raisonnable. Je souligne que les nombreux autres problèmes de crédibilité relevés par la SAR incluent notamment le fait que les demandeurs n’ont pas mentionné l’agression alléguée lors de la deuxième entrevue avec l’agent de l’ASFC.
[35] Quoi qu’il en soit, il est évident qu’au moment d’aborder cette question, tant la SPR que la SAR avaient déjà tiré une conclusion générale d’absence de crédibilité à l’égard des demandeurs. Il leur était alors loisible de tenir compte de cette conclusion pour rejeter l’explication donnée par Mme Kaur.
D. Autres questions
[36] Les demandeurs soutiennent également que la SAR aurait erré dans son analyse de la preuve en accordant trop de poids à la modification apportée au formulaire FDA le jour de l’audience de la SPR et en discréditant l’affidavit de la mère de M. Singh. Or, ils ne démontrent aucunement que ces aspects de la décision de la SAR sont déraisonnables. Ils ne font qu’inviter la Cour à donner aux faits une interprétation différente de celle que la SAR a retenue, par exemple en qualifiant les modifications au formulaire FDA de mineures plutôt que de significatives. Après que la Cour a constaté que les conclusions de la SAR peuvent s’appuyer sur la preuve, il ne lui appartient pas de réévaluer elle-même la preuve. Les demandeurs n’ont fait valoir aucun motif d’intervention de la Cour.
III. Conclusion
[37] Puisque la décision de la SAR est raisonnable, la demande de contrôle judiciaire sera rejetée.
JUGEMENT dans le dossier IMM-8217-24
LA COUR STATUE que :
- La demande de contrôle judiciaire est rejetée.
- Aucune question n’est certifiée.
« Sébastien Grammond »
Juge
COUR FÉDÉRALE
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER
|
Dossier : |
IMM-8217-24 |
INTITULÉ : |
BALJIT SINGH ET HARPREET KAUR c LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION |
|
LIEU DE L’AUDIENCE : |
Montréal (Québec) |
|
DATE DE L’AUDIENCE : |
LE 8 septembre 2025 |
|
JUGEMENT ET MOTIFS : |
LE JUGE GRAMMOND |
|
DATE DES MOTIFS : |
LE 23 septembre 2025 |
|
COMPARUTIONS :
Rim Nehme |
Pour les demandeurs |
Sarah Sbeiti |
POUR LE DÉFENDEUR |
AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :
Rim Nehme Avocate Montréal (Québec) |
Pour les demandeurs |
Procureur général du Canada Montréal (Québec) |
POUR LE DÉFENDEUR |